La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/05/2002 | FRANCE | N°2001/19489

France | France, Cour d'appel de Paris, 23 mai 2002, 2001/19489


COUR D'APPEL DE PARIS 8è chambre, section B ARRET DU 23 MAI 2002

(N , 12 pages) Numéro d'inscription au répertoire général :

2001/19488 2001/19489, 2001/20929 Décisions dont appels : - Jugement rendu le 12/11/2001 par le JUGE DE L'EXECUTION DU TGI de PARIS. RG n : 2001/85108 (Juge : Muriel DURAND) - Jugement rendu le 12/11/2001 par le JUGE DE L'EXECUTION DU TGI de PARIS. RG n° : 2001/85107 (Juge : Muriel DURAND) - Jugement rendu le 06/12/2001 par le JUGE DE L'EXECUTION du TGI de PARIS. RG n° : 2001/85666 (Juge : Muriel DURAND) Date ordonnance de clôture : 3 Avril 2002

Nature de la décision : contradictoire. Décision : CONFIRMATION des...

COUR D'APPEL DE PARIS 8è chambre, section B ARRET DU 23 MAI 2002

(N , 12 pages) Numéro d'inscription au répertoire général :

2001/19488 2001/19489, 2001/20929 Décisions dont appels : - Jugement rendu le 12/11/2001 par le JUGE DE L'EXECUTION DU TGI de PARIS. RG n : 2001/85108 (Juge : Muriel DURAND) - Jugement rendu le 12/11/2001 par le JUGE DE L'EXECUTION DU TGI de PARIS. RG n° : 2001/85107 (Juge : Muriel DURAND) - Jugement rendu le 06/12/2001 par le JUGE DE L'EXECUTION du TGI de PARIS. RG n° : 2001/85666 (Juge : Muriel DURAND) Date ordonnance de clôture : 3 Avril 2002 Nature de la décision : contradictoire. Décision : CONFIRMATION des jugements du 12 novembre 2001 INFIRMATION du jugement du 6 décembre 2001. APPELANTE et INTIMEE : SOCIETE CONNECTICUT BANK OF COMMERCE prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 612 Bedford Street, Standord CONNECTICUT CT 06.201 -USA représentée par Maître MELUN, avoué assistée de Maître MANSEAU, avocat, A 056, et de Maître MACEDO, B 946, avocat plaidant pour le Cabinet MANSEAU, APPELANTE et INTIMEE : S.A. WALKER INTERNATIONAL HOLDINGS LIMITED prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège Craigmur Chambers, PO BOX 71, Road Town, TORTOLA, Iles Vierges Britaniques, représentée par Maître MELUN, avoué assistée de Maître MANSEAU, avocat, A 056, et de Maître MACEDO, B 946, avocat plaidant pour le Cabinet MANSEAU, APPELANTE ET INTIMEE : S.A. SOCOTRAM - SOCIETE CONGOLAISE DE TRANSPORTS MARITIMES prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège Immeuble les Manguiers BP 4922 - 00 POINTE NOIRE - REPUBLIQUE DU CONGO représentée par la SCP LECHARNY-CALARN, avoué assistée de Maître BOURGOING DUMONTEIL, avocat plaidant pour la SCP BOURGOING DUMONTEIL et associés, P 16, INTIMEE :

S.C.P. ERIC CRUSSARD prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 16 rue du Pont Neuf 75001 PARIS représentée par Maître MELUN, avouéassistée de Maître MANSEAU, avocat, A 056 et de

Maître MACEDO, B 946, avocat plaidant pour le Cabinet MANSEAU, INTIMEE : S.A. BANQUE BELGOLAISE prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 6 avenue Vélasquez 75008 PARIS représentée par Maître BAUFUME, avoué assistée de Maître RIVIERE, avocat plaidant pour la SCP LANGER NETTER ADLER, R 223. COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré : Président : Monsieur ANQUETIL, Conseillers : Madame X... et Madame BOREL Y.... DEBATS : à l'audience publique du 4 AVRIL 2002 GREFFIER : Lors des débats et du prononcé de l'arrêt, Madame Z.... ARRET :

contradictoire. Prononcé publiquement par Monsieur ANQUETIL, Président, qui a signé la minute avec Madame Z..., Greffier. RAPPEL DE LA PROCEDURE ANTERIEURE: Par jugement contradictoire rendu le 12 novembre 2001 (RG N°01/85107), le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de PARIS a, sur la demande de la société SOCOTRAM, prononcé la nullité, en ce qu'elles visent la société SOCOTRAM, des saisies-attribution diligentées le 24 octobre 2001 par la SCP Eric CRUSSARD à la requête de la société WALKER INTERNATIONAL HOLDINGS LTD entre les mains de la Banque BELGOLAISE, le CREDIT LYONNAIS, la SOCIETE GENERALE et la BNP PARIBAS, en exécution d'une sentence arbitrale rendue le 20 juillet 2000 exéquaturée le 4 décembre 2000 et signifiée le 19 décembre suivant; il a condamné la société WALKER INTERNATIONAL HOLDINGS LTD à payer à la société SOCOTRAM la somme de 150 000F de dommages-intérêts et celle de 15 000F à titre d'indemnité pour frais irrépétibles; Par jugement contradictoire rendu le 12 novembre 2001 (RG N°01/85108), le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de PARIS a, sur la demande de la société SOCOTRAM, prononcé la nullité, en ce qu'elles visent la société SOCOTRAM, des saisies-attribution diligentées le 24 octobre 2001 par la SCP Eric CRUSSARD à la requête de la société CONNECTICUT BANK OF COMMERCE entre les mains de la Banque BELGOLAISE, le CREDIT LYONNAIS, la SOCIETE GENERALE et la BNP PARIBAS, en

exécution d'un jugement rendu le 12 mai 1999 par la High Court of Londres exéquaturée le 12 octobre 2001 et signifiée le 16 octobre suivant; il a condamné la société CONNECTICUT BANK OF COMMERCE à payer à la société SOCOTRAM la somme de 150 000F de dommages-intérêts et celle de 15 000F à titre d'indemnité pour frais irrépétibles; Par jugement contradictoire rendu le 6 décembre 2001 (RG N°01/85666), le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de PARIS saisi par la société SOCOTRAM d'une contestation de nouvelles saisies-attribution opérées à son encontre le 27 novembre 2001 par la SCP Eric CRUSSARD à la requête tant de la société CONNECTICUT BANK OF COMMERCE que de la société WALKER INTERNATIONAL HOLDINGS LTD entre les mains de la BANQUE BELGOLAISE, sur les mêmes fondements ( et visant les fonds libérés par la mainlevée des saisies antérieures prononcée par les jugement susvisés), a rejeté la contestation au vu de nouvelles pièces produites par les parties et débouté la société SOCOTRAM de toutes ses demandes; LA PROCEDURE DEVANT LA COUR: La société WALKER INTERNATIONAL HOLDINGS LTD a formé appel du jugement 01/85107 du 12 novembre 2001 à l'encontre de la société SOCOTRAM, appel enregistré sous le N° RG 2001/19489; La société CONNECTICUT BANK OF COMMERCE a formé appel du jugement 01/85108 du 12 novembre 2001 à l'encontre de la société SOCOTRAM, appel enregistré sous le N° RG 2001/19488; La société SOCOTRAM a formé appel du jugement 01/85666 du 6 décembre 2001, à l'encontre de la société WALKER INTERNATIONAL HOLDINGS LTD, la société CONNECTICUT BANK OF COMMERCE, la SCP Eric CRUSSARD huissier instrumentaire, et la Banque BELGOLAISE, tiers saisie, appel enregistré sous le N° RG 2001/20929; En raison de la connexité de ces trois appels, le litige portant notamment sur la question de savoir si la société SOCOTRAM est ou non une émanation de la REPUBLIQUE DU CONGO, seule visée par les titres exécutoires servant de fondement aux poursuites, les instances ont été jointes le

31 janvier 2002 sous le N°RG 2001/19488; L'ordonnance de clôture a été prononcée le 3 avril 2002; Dans leurs dernières écritures avant clôture, en date du 28 mars 2002, les sociétés WALKER INTERNATIONAL HOLDINGS LTD et CONNECTICUT BANK OF COMMERCE, créanciers saisissants, et la SCP Eric CRUSSARD, huissier instrumentaire, contestent in limine litis la jonction ordonnée, et demandent que les litiges soient traités dans deux instances distinctes de la manière suivante:

WALKER appelante du jugement du 12 novembre 2001 et intimée du jugement du 6 décembre 2001 / CONNECTICUT, appelante du jugement du 12 novembre 2001 et intimée du jugement du 6 décembre 2001, de sorte que deux arrêts soient rendus l'un pour la société WALKER et l'autre pour la société CONNECTICUT; elles demandent une disjonction; Par ailleurs les concluantes soulèvent l'irrecevabilité des exceptions de procédure invoquées par la société SOCOTRAM, qui ne l'ont pas été simultanément et avant toute défense au fond; En ce qui concerne l'instance WALKER, après un rappel des faits et de la procédure spécifiques à cette société, les concluantes soutiennent que la SOCOTRAM n'est qu'une émanation pure et simple de la République du Congo et qu'en conséquence les saisies pratiquées sont valides; qu'est en effet une émanation d'un état la personne morale - qui ne dispose pas d'un patrimoine propre et distinct de l'état dont elle dépend, - qui accomplit des actes normalement considérés comme relevant de la compétence dudit état, - qui subit l'ingérence de cet état soit dans les prises de décisions, soit par la disposition du patrimoine, traduisant ainsi une intervention étatique dans la gestion quotidienne de ladite émanation; Pour soutenir que la SOCOTRAM est une émanation de la REPUBLIQUE du CONGO, il est invoqué:

- le décret du 29 janvier 1998 du Président de la République du Congo et deux arrêtés du même jour pris en application, du Ministre des Transports, de l'Aviation civile et de la Marine dont il résulte que

la SOCOTRAM perçoit 40% des droits de trafic maritime généré par le commerce extérieur de la République, et qu'il y a ainsi ingérence de celle-ci dans la gestion quotidienne de la société SOCOTRAM qui s'apparente à un collecteur d'impôts; que si la société SOCOTRAM est officiellement privée, ce n'est que dans le prolongement de l'Etat du Congo qu'elle peut percevoir une taxe portuaire; qu'elle ne forme ainsi avec cet Etat qu'une unique entité; que la société SOCOTRAM se finance ainsi par des recettes publiques destinées à l'Etat Congolais, qui enrichissent à la fois l'Etat et la société; elles soutiennent encore que s'agissant du contrôle et de la direction de la SOCOTRAM, celle-ci est officiellement contrôlée directement à hauteur de 45% par l'Etat Congolais, qui dispose d'une minorité de blocage, les 55% restant appartenant à la société SHIPPING et TRADING immatriculée au Liechtenstein, paradis fiscal; que le véritable dirigeant de la SOCOTRAM est Willy Nguesso, membre influent de la famille du Président Sassou Nguesso et du gouvernement Congolais par le biais du groupement familial du Pouvoir; les concluantes citent divers articles journalistiques à cette fin; ils dénoncent un habillage juridique qui masque l'émanation de la République; Elles critiquent les moyens et pièces adverses, notamment la pièce 46, et soutiennent que la SOCOTRAM est en fait un instrument de la République du Congo qui par délégation exerce certaines prérogatives de l'Etat avec le patrimoine duquel son propre patrimoine se confond, en raison de l'ingérence de celui-ci dans son fonctionnement; sur les demandes à titre subsidiaire de la SOCOTRAM, elles concluent à la non nécessité d'une signification préalable des titres exécutoires à cette société avant toute exécution, la signification à l'Etat suffisant; elles soutiennent que la signification de la sentence arbitrale aux règles de l'article 688 du Nouveau Code de Procédure Civile; elles contestent les demandes de dommages-intérêts, rappelant

les termes du jugement du 6 décembre 2001, et soutenant que le recouvrement entrepris n'est pas fautif; En ce qui concerne CONNECTICUT, après un rappel des faits et de la procédure spécifiques à cette société, les mêmes moyens sont recopiés; En conséquence, il est demandé l'infirmation des jugements du 12 novembre 2001 et la confirmation du jugement du 6 décembre 2001, et de dire valides les saisies-attribution pratiquées; Les sociétés WALKER et CONNECTICUT demandent pour chacune 5000 euros pour leurs frais irrépétibles à l'encontre de la société SOCOTRAM; Elles demandent le débouté des demandes de la BANQUE BELGOLAISE ; Aucune demande n'est formée par les concluantes en faveur de la SCP Eric CRUSSARD jointe à elles; Dans ses dernières conclusions du 22 mars 2002, la société SOCOTRAM soulève la nullité des saisies pratiquées à son encontre pour défaut de titres, ceux invoqués au fondement desdites saisies visant la REPUBLIQUE DU CONGO et la CAISSE CONGOLAISE D'AMORTISSEMENT, et non la société SOCOTRAM; sur la notion d'émanation, elle rappelle que la charge de la preuve incombe au créancier poursuivant; elle rappelle en tant que besoin qu'elle est une société anonyme, commerciale, jouissant de plein droit de la personnalité morale du seul fait de son immatriculation au Registre du Commerce; que sa personnalité morale ne se confond avec aucune autre; que l'Etat du CONGO ne détient que 45% du capital, le reste appartenant à une société de droit privé TRADING AND SHIPPING cessionnaire des actions souscrites à la constitution par la société française d'armement maritime SAGA et par la société de droit congolais ELF CONGO dans laquelle les intérêts privés français sont majoritaires; elle précise encore que l'administration de la société est assurée par un Conseil dans lequel les intérêts privés sont statutairement majoritaires, et qui nomme le directeur général; il n'est pas démontré que l'Etat du Congo exercerait un pouvoir de fait dans la conduite des affaires sociales;

elle invoque le protocole d'accord conclu le 18 janvier 1990 entre l 'Etat et la société, qui reconnaît le caractère propre du patrimoine de ladite société; Elle soutient que la circonstance que SOCOTRAM serait chargée de collecter un impôt pour le compte de l'Etat n'est pas à elle seule opérante, dès lors qu'il ne s'agit pas de l'objet exclusif de la société; qu'en réalité les activités de la société s'inscrivent dans le cadre approuvé par la CNUCED, qui prévoit la règle des 40/40/20 dont le décret du 29 janvier 1998 fait application; elle rappelle qu'actuellement la SOCOTRAM exerce son activité par voie d'affrètement, dans l'attente de l'acquisition de ses propres navires, seule ou en partenariat avec d'autres armements; elle précise que les droits perçus ne sont pas reversés à l'Etat mais constituent des subventions, éléments de son chiffre d'affaires; que seul partie des bénéfices revient à l'Etat au prorata de sa part; Elle précise qu'en dépit de la qualité d'armement national, elle n'a pas de prérogative de puissance publique, notamment dans l'organisation du transport maritime du Congo qui relève de la Direction Générale de la Marine Marchande; elle précise encore qu'elle n'a aucun monopole; subsidiairement, elle soutient que le titre invoqué par CONNECTICUT n'était pas encore exécutoire, le délai pour recours n'étant pas expiré, et que la signification du titre par WALKER ne lui a pas été faite; Elle conclut donc à l'illégalité des saisies pratiquées; elle demande réparation de ce détournement de procédure opéré, destiné à faire pression sur la concluante en paralysant ses activités pour prendre en charge les créances litigieuses; outre le blocage des fonds, les saisies pratiquées auprès des principales banques de la place de Paris ont terni la réputation de la société; elle demande confirmation des jugements du 12 novembre 2001 en demandant que les dommages-intérêts soient portés à 150 000 euros pour chacun des saisissants tenus un solidum; compte

tenu du comportement des créanciers, elle demande qu'il leur soit fait, ainsi qu'à l'huissier instrumentaire, et ce sous astreinte, défense de pratiquer de nouvelles saisies en application des titres invoqués à l'appui des précédentes saisies; elle sollicite 25 000 euros pour ses frais irrépétibles compte tenu de son éloignement; La BANQUE BELGOLAISE, intimée dans le cadre de l'appel formé à l'encontre du jugement du 6 décembre 2001, constate que la SOCOTRAM ne forme aucune demande à son encontre et soutient qu'elle n'est pas partie au litige; elle demande sa mise hors de cause et de condamner solidairement les autres parties à lui payer 5 000 euros pour ses frais irrépétibles; Postérieurement à la clôture du 3 avril 2002, de nouvelles conclusions au nom des sociétés WALKER INTERNATIONAL HOLDINGS LTD et CONNECTICUT BANK OF COMMERCE, créanciers saisissants, et de la SCP Eric CRUSSARD ont été déposées; La société SOCOTRAM en demande le rejet; SUR CE, LA COUR, Sur les questions de procédure:

Considérant qu'aux termes de l'article 784 du Nouveau Code de Procédure Civile, l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue; qu'aucun fait de cette nature n'est allégué; qu'il n'y a donc pas lieu à révocation de l'ordonnance de clôture, aucune des parties ne le demandant du reste; Considérant qu'aux termes de l'article 783 du Nouveau Code de Procédure Civile, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite après le prononcé de l'ordonnance de clôture, à peine d'irrecevabilité; que les conclusions signifiées le 2 avril mais non déposées au greffe avant la clôture par les sociétés WALKER INTERNATIONAL HOLDINGS LTD et CONNECTICUT BANK OF COMMERCE, créanciers saisissants, et la SCP Eric CRUSSARD (ainsi qu'il résulte de l'absence de tampon du greffe et de leur non enregistrement au bordereau informatique) sont irrecevables; Considérant que la jonction a été prononcée dans l'intérêt d'une bonne administration de

la justice, notamment pour éviter une contrariété de décision, la question principale posée par la contestation de la société SOCOTRAM à l'encontre des saisies pratiquées par la société WALKER et par la société CONNECTICUT étant de savoir si la société SOCOTRAM est ou non une émanation de la REPUBLIQUE DU CONGO; que de ce chef, la défense des deux créanciers est exactement la même; que du reste dans l'instance ayant donné lieu au jugement du 6 décembre 2001, la SOCOTRAM avait assigné les deux créanciers ensemble; qu'il n'y a lieu à disjonction; Sur la validité des saisies litigieuses: Considérant sur le fond, qu'il n'est pas contesté que les titres exécutoires dont se prévalent les sociétés WALKER INTERNATIONAL HOLDINGS LTD et CONNECTICUT BANK OF COMMERCE, créanciers saisissants, ne visent pas la société SOCOTRAM qui n'était pas partie ni dans l'instance ayant donné lieu à la sentence arbitrale du 20 juillet 2000 ni dans l'instance ayant donné lieu au jugement de Hight Court of Justice de Londres du 12 mai 1999; qu'en application de l'article 2 de la loi N 91-650 du 9 juillet 1991, le créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible ne peut en poursuivre l'exécution forcée que sur les biens de son débiteur; que les saisies litigieuses ne pourraient donc être régulières à l'encontre de la société SOCOTRAM qu'autant que celle-ci serait considérée comme une émanation de la REPUBLIQUE DU CONGO, contre qui les titres susvisés peuvent être utilement invoqués par les créanciers saisissants; que la charge de la preuve en incombe à ceux-ci; Considérant au vu des pièces suivantes produites par la société SOCOTRAM et notamment: - déclaration au registre du commerce de la société SOCOTRAM en date du 21 août 2000, - dispositions de l'Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales, applicables, selon l'article 1, même aux sociétés commerciales dans lesquelles l'Etat ou une personne morale de droit public est associé, et notamment l'article 98 selon lequel

toute société jouit de la personnalité juridique à compter de son immatriculation au registre du commerce, - statuts de la société SOCOTRAM, selon lesquels celle-ci est : 1°une société anonyme ayant pour objet d'assurer une desserte maritime régulière entre les ports maritimes congolais et les ports étrangers ainsi que le cabotage entre ports maritimes, d'exploiter directement ou indirectement toutes activités liées au commerce et au transport maritime, généralement de réaliser toutes opérations commerciales, industrielles, financières, mobilières ou immobilières, se rattachant directement ou indirectement à l'objet social ou lui étant utiles ou étant susceptibles d'en faciliter la réalisation, 2° dotée d'un capital de 100 000 000 F CFA, divisé en 1000 actions et réparti à raison de 450 actions (A) détenues par la République du Congo et 550 actions(B) détenues par la société TRADING and SHIPPING de droit privé, 3° gérée par un Conseil de 9 membres, dont 4 désignés au titre des actionsA appartenant à la République du Congo et 5 désignés par les titulaires des actions B, qui nomme intuitu personae un président parmi ses administrateurs personnes physiques et, à la demande du président, un directeur général, administrateur ou personne extérieure, conseil qui a les pouvoirs les plus étendus pour gérer la société et accomplir toutes les opérations relatives à son objet, 4° dotée d'une assemblée générale qui décide notamment de la distribution des bénéfices et contrôlée par des commissaires aux comptes, - bilans 1999 et 2000 de la société SOCOTRAM ( comptabilité commerciale) que la société SOCOTRAM est une société commerciale de droit privé, au patrimoine propre, dont l'état du Congo n'est qu'un actionnaire minoritaire qui ne dispose d'aucun pouvoir propre pour imposer ses décisions; que cette participation de l'Etat ne porte pas atteinte à l'indépendance juridique de la société SOCOTRAM et sa capacité d'être titulaire de droits et d'obligations propres; qu'il y

a toujours lieu de distinguer la propriété du capital d'une personne morale, partiellement ou totalement publique, et la propriété juridique des biens dont elle dispose en son nom propre; Considérant que les créanciers saisissants, pour soutenir que la société SOCOTRAM est une émanation de la REPUBLIQUE DU CONGO, invoquent principalement le décret 98-39 du 19 janvier 1998 et les arrêtés 98-11 et 12 du 29 janvier 1998 dont il résulte que la société SOCOTRAM relève de l'armement national et à ce titre perçoit à son profit des taxes relevant de la puissance publique; qu'elle serait un collecteur d'impôts pour le compte de l'Etat congolais et qu'il y aurait confusion de patrimoine; Mais considérant que le commissaire aux comptes de la société atteste que les redevances de transport que la société facture et encaisse constituent son chiffre d'affaires et ne sont pas collectées pour le compte de l'Etat congolais en vue d'un reversement au Trésor, et que l'Etat congolais, associé minoritaire, ne peut percevoir des sommes de cette société qu'au titre des dividendes distribués par elle sur décision de l'assemblée générale des associés; que d'autres sociétés, notamment la société CONGO LIMA et la société SMC, bénéficient des mêmes avantages que tout autre armement national congolais (notamment la SOCOTRAM) dans l'exercice de leurs activités, ainsi qu'il résulte d'arrêtés du Ministre des Transports; qu'ainsi, la société SOCOTRAM est une société de droit privé qui, parmi d'autres, s'est vu concéder une part du service public maritime généré par le commerce extérieur congolais, et qui est rémunérée pour le service rendu par le droit conféré de percevoir une taxe appropriée, selon du reste un usage reconnu internationalement; que ce faisant, elle ne devient nullement un organe de l'Etat congolais chargé de collecter l'impôt mais garde son indépendance juridique; Considérant enfin que les remarques tirées de la personnalité du dirigeant actuel de la société SOCOTRAM et de ses

liens personnels ou familiaux avec les gouvernants congolais actuels, sont inopérants quant à la détermination de l'indépendance juridique de ladite société; Considérant que la société SOCOTRAM n'est donc pas une émanation de la REPUBLIQUE DU CONGO et n'est pas le débiteur des sociétés WALKER INTERNATIONAL HOLDINGS LTD et CONNECTICUT BANK OF COMMERCE; que les saisies litigieuses, opérées sur le fondement de titres qui ne visaient pas la société SOCOTRAM, ne l'ont pas été sur des biens appartenant au débiteur des créanciers saisissants et sont donc nulles; que les jugements du 12 novembre 2001 seront confirmés et celui du 6 décembre 2001 infirmé; Sur la réparation et les autres demandes: Considérant que les créanciers saisissants, qui ne disposaient pas d'un titre visant la société SOCOTRAM, n'ont pas procédé, avant de faire saisir les comptes de cette société, à toutes les diligences que la prudence leur imposait pour s'assurer des rapports juridiques exacts pouvant exister entre cette société et l'Etat congolais; que les saisies opérées le 24 octobre 2000 sont dans ces conditions abusives; que les premiers juges dans leurs décisions du 12 novembre 2001 ont fait une exacte évaluation du préjudice subi par la société SOCOTRAM; qu'il n'y a lieu à prononcer une solidarité entre les deux créanciers qui ont agi de manière indépendante; que les jugements du 12 novembre 2001 seront confirmés; Considérant que même si les saisies du 27 novembre 2001 opérées le jour où le délégataire du Premier Président devait rendre ses ordonnances statuant sur les demandes de sursis à l'exécution provisoire des jugements du 12 novembre 2001, (et qui devait rejeter ces demandes), traduisent un comportement déloyal à l'égard de la SOCOTRAM, il n'y a pas lieu en l'état de penser que les créanciers déboutés ne respecteront pas à l'avenir l'arrêt de la Cour et auraient l'audace de procéder, pour les mêmes causes, à de nouvelles voies d'exécution, ce qui engagerait gravement leur responsabilité;

que la demande d'astreinte demandée par la société SOCOTRAM pour s'en prémunir, sera rejetée; Considérant que la banque BELGOLAISE s'est constituée spontanément suite à l'appel de la société SOCOTRAM qui l'avait appelée à l'instance à juste titre pour que les décisions lui soient opposables; qu'aucune demande cependant n'étant faite à son encontre en appel, elle sera mise hors de cause; qu'il convient de lui accorder 1 000 euros d'indemnité pour ses frais irrépétibles d'appel; Qu'aucune demande ne prospère à l'encontre de la SCP Eric CRUSSARD qui sera mis hors de cause; qu'ayant fait cause commune avec les créanciers saisissants déboutés, ses frais irrépétibles ne lui seront cependant pas indemnisés; Que les frais irrépétibles d'appel de la société SOCOTRAM seront indemnisés à hauteur de 20 000 euros; que l'ensemble des indemnités au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile seront supportées in solidum par les sociétés WALKER INTERNATIONAL HOLDINGS LTD et CONNECTICUT BANK OF COMMERCE dont les saisies sont annulées; PAR CES MOTIFS, et ceux non contraires du premier juge, Déclare irrecevables les conclusions des sociétés WALKER INTERNATIONAL HOLDINGS LTD et CONNECTICUT BANK OF COMMERCE, créanciers saisissants, et de la SCP Eric CRUSSARD, déposées après clôture; Rejette la demande de disjonction; Dit que la sociétéssants, et de la SCP Eric CRUSSARD, déposées après clôture; Rejette la demande de disjonction; Dit que la société SOCOTRAM n'est pas une émanation de la REPUBLIQUE DU CONGO; Déclare nulles les saisies pratiquées à l'encontre de la société SOCOTRAM les 24 octobre et 27 novembre 2001 par la SCP Eric CRUSSARD à la requête de la société WALKER INTERNATIONAL HOLDINGS LTD sur le fondement d'une sentence arbitrale rendue le 20 juillet 2000 exéquaturée le 4 décembre 2000 et signifiée le 19 décembre suivant, d'une part, et à la requête de la société CONNECTICUT BANK OF COMMERCE d'un jugement rendu le 12 mai 1999 par la High Court of Londres exéquaturée le 12

octobre 2001 et signifiée le 16 octobre suivant d'autre part; En conséquence, Confirme les jugements déférés en date du 12 novembre 2001 en toutes leurs dispositions; Infirme le jugement déféré en date du 6 décembre 2001 en toutes ses dispositions; Condamne en outre in solidum les sociétés WALKER INTERNATIONAL HOLDINGS LTD et CONNECTICUT BANK OF COMMERCE, créanciers saisissants, à payer à la société SOCOTRAM, débiteur indûment saisi, la somme de 20 000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile; Met hors de cause la SCP Eric CRUSSARD et la BANQUE BELGOLAISE; Condamne en outre in solidum les sociétés WALKER INTERNATIONAL HOLDINGS LTD et CONNECTICUT BANK OF COMMERCE à payer sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile la somme de 1 000 euros à la Banque BELGOLAISE; Rejette toutes autres demandes des parties; Condamne in solidum les sociétés WALKER INTERNATIONAL HOLDINGS LTD et CONNECTICUT BANK OF COMMERCE, créanciers saisissants, aux dépens de première instance générés par la décision infirmée, et aux dépens d'appel dont le montant pourra être recouvré directement par les avoués de la cause dans les conditions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 2001/19489
Date de la décision : 23/05/2002
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2002-05-23;2001.19489 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award