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07/05/2002 | FRANCE | N°JURITEXT000006940999

France | France, Cour d'appel de Paris, 07 mai 2002, JURITEXT000006940999


COUR D'APPEL DE PARIS 1ère chambre, section H ARRET DU 7 MAI 2002

(N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 2001/18583 Pas de jonction Décision dont recours : Decision n° 01-D-58 du Conseil de la concurrence en date du 24/09/2001 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : REJET DEMANDEUR AU RECOURS : M. LE MINISTRE DE X... -D.G.C.C.R.F - domicilié BAT.5, 59, Boulevard Vincent AURIOL 75703 PARIS CEDEX 13 Représenté par Madame Y..., munie d'un mandat régulier. DEFENDERESSES AU RECOURS : - S.A.R.L BENETTON FRANCE TRADING prise en la personne de ses reprÃ

©sentants légaux ayant son siège social 29/31, rue Saint Augustin 7...

COUR D'APPEL DE PARIS 1ère chambre, section H ARRET DU 7 MAI 2002

(N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 2001/18583 Pas de jonction Décision dont recours : Decision n° 01-D-58 du Conseil de la concurrence en date du 24/09/2001 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : REJET DEMANDEUR AU RECOURS : M. LE MINISTRE DE X... -D.G.C.C.R.F - domicilié BAT.5, 59, Boulevard Vincent AURIOL 75703 PARIS CEDEX 13 Représenté par Madame Y..., munie d'un mandat régulier. DEFENDERESSES AU RECOURS : - S.A.R.L BENETTON FRANCE TRADING prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 29/31, rue Saint Augustin 75002 PARIS - Société BENETTON GROUP, société de droit italien prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social Via Villa Minelli 31050 PONZANO VENETO (TV) ITALIE Représentées par la SCP ANNIE BASKAL, avoué, 3, rue du 29 Juillet 75001 PARIS Assistées de Me M. KARSENTY-RICARD, avocat, 70, Boulevard de Courcelles 75017 PARIS et de Me F.BRUNET, avocat, 41, avenue de Friedland 75008 PARIS - Société PER BENE prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 11, Rue Portefoin 75003 PARIS Assistée de Me J.D.ZERDOUN , avocat, 51, avenue Raymond Poincaré 75116 PARIS Toque P 299 - S.A. BENELYON prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 24, rue Childebert 69002 LYON - S.A.R.L NOVA prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 21, avenue de la Liberté 33110 LE BOUSCAT - S.A.R.L REPSUD prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 38/40, rue Grignan 13001 MARSEILLE Représentées par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, avoué, 23, rue du Louvre 75001 PARIS Assistées de Me C. ROBIN, avocat, 14, rue Pergolèse 75116 PARIS COMPOSITION DE LA COUR : Z... des débats et du délibéré Monsieur LACABARATS, Président Monsieur SAVATIER, Conseiller Monsieur MAUNAND, Conseiller GREFFIER :

Z... des débats : Madame JAGODZINSKI Z... du

prononcé de l'arrêt : Madame A... B... : A l'audience publique du 2 avril 2002 MINISTERE PUBLIC : Monsieur C..., Substitut Général ARRET : Prononcé publiquement le SEPT MAI DEUX MILLE DEUX, par Monsieur LACABARATS, Président, qui a signé la minute avec Madame A..., Greffier. Après avoir, à l'audience publique du 2 Avril 2002, entendu Madame le représentant du Ministre chargé de l'économie, les conseils des parties et le Ministère public en leurs observations, le requérant ayant eu la parole en dernier ; Vu les mémoires, pièces et documents déposés au greffe à l'appui du recours;

En 1997, une enquête a été ouverte par le Conseil de la concurrence sur des pratiques anticoncurrentielles imputées aux sociétés du groupe BENETTON.

A l'issue de cette enquête, deux griefs ont été notifiés au groupe BENETTON et soumis à l'appréciation du Conseil de la concurrence :

- la mise en oeuvre d'une pratique de prix de revente publics imposés,

- la mise en oeuvre d'une pratique consistant à imposer aux revendeurs de produits BENETTON le choix des entreprises d'aménagement de magasins.

Par décision du 24 septembre 2001, le Conseil de la concurrence a dit qu'il n'y avait pas lieu de poursuivre la procédure à l'encontre de BENETTON.

Le 23 octobre 2001, le Ministre chargé de l'économie a déposé au greffe de la cour une déclaration de recours contre la décision du Conseil de la concurrence. Ce recours ne porte que sur le premier des deux griefs notifiés à BENETTON.

Par des écritures du 26 novembre 2001, le Ministre chargé de l'économie demande à la cour :

- de qualifier au regard de l'article L 420-1 du code de commerce la pratique de prix de revente imposés mise en oeuvre par les sociétés

BENETTON GROUP SPA et BENETTON FRANCE TRADING au cours de la période 1993-1996,

- de sanctionner au regard de l'article L 464-2 du code de commerce cette pratique,

- de juger nécéssaire de faire procéder à un complément d'investigations afin de rechercher s'il existe des indices graves, précis et concordants pour qualifier le comportement des sociétés BENETTON GROUP SPA et BENETTON FRANCE TRADING, en ce qui concerne la période postérieure à 1996.

Par un mémoire du 25 janvier 2002 les sociétés BENETTON GROUP SPA et BENETTON FRANCE TRADING demandent à la cour de rejeter le recours et de condamner le requérant aux dépens.

Par un mémoire de la même date, les sociétés BENELYON, NOVA et REPSUD demandent à la cour de prendre acte que le recours ne les concerne pas. La société PER-BENE a sollicité par des écritures du même jour, la confirmation de la décision et sa mise hors de cause.

Le Conseil de la concurrence a déposé des observations le 13 février 2002.

Des observations ont également été déposées le 20 février 2002 par le Ministre chargé de l'économie et le 13 mars 2002 par les sociétés BENETTON. A l'audience du 2 avril 2002, la cour a entendu le représentant du Ministre chargé de l'économie en ses explications, les conseils des sociétés BENETTON, PER BENE, BENLYON, NOVA et REPSUD en leurs plaidoiries, M.l'avocat général en ses conclusions orales tendant au rejet du recours. Le requérant a eu la parole en dernier. A l'issue des débats, l'affaire a été mise en délibéré pour être jugée le 7 mai 2002.

Considérant que le système de distribution du groupe BENETTON sur le territoire français repose sur une filiale, la société BENETTON

FRANCE TRADING, des agents commmerciaux mandataires de cette société se partageant les cinq zones déterminées par BENETTON pour le territoire national et un réseau de détaillants revendeurs ; que l'enquête du Conseil de la concurrence a été ouverte à la suite de plaintes d'anciens détaillants soutenant avoir été soumis par BENETTON à des pratiques de prix imposés ; que le ministre chargé de l'économie fait grief au Conseil de la concurrence, d'une part d'avoir fait une interprétation erronée des faits en retenant que la pratique de prix imposés n'était pas suffisamment caractérisée, d'autre part de ne pas avoir donné de base légale à sa décision en refusant des investigations complémentaires par l'absence de franchissement d'une seuil de sensibilité ;

Sur la pratique des prix imposés

Considérant qu'en vertu de l'article L 420-1,2° du code de commerce, sont prohibées, lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées, conventions, ententes ou coalitions tendant à faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse ;

Considérant que pour justifier sa demande au regard de ce texte le Ministre chargé de l'économie soutient que, pour la période 1993 à 1996, BENETTON a livré aux revendeurs des produits préétiquetés ne permettant pas aux commerçants de modifier les prix indiqués sans altérer la marque BENETTON et contrevenir ainsi à l'article 10 des conditions générales de vente imposées par le fournisseur interdisant toute modification de cette marque ;

Considérant cependant que tout fournisseur peut en principe déterminer librement les conditions de distribution de ses produits et diffuser auprès des revendeurs des prix conseillés ou indicatifs,

même au moyen d'un système de préétiquetage ; que c'est seulement lorsque les engagements contractuels ou le comportement des intéressés démontrent qu'en réalité les prix proposés s'imposent aux revendeurs que la pratique en cause peut constituer une atteinte illicite à la liberté de la concurrence ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient le Ministre chargé de l'économie, la preuve d'une telle atteinte n'est pas en l'espèce rapportée ;

Considérant en effet que, si certains revendeurs ont indiqué lors de l'enquête que le procédé du pré-étiquetage, combiné à l'article 10 susvisé des conditions générales de vente, leur interdisait de modifier les prix indiqués(M.TROYANO, commerçant à Montpellier, Mme D..., commerçante à Paris, les époux E... anciens dirigeants de la société MARINE, Mme F..., revendeur à Lunel ), d'autres ont en revanche affirmé que leur liberté de fixer les prix de revente des marchandises livrées par BENETTON demeurait entière (Mme G..., commerçante à Paris, M. H..., revendeur à Rouen, M.VITTON-MEA, revendeur à Chambéry, M.MAURIS, revendeur à Annecy, M.SANCHEZ, revendeur à Orléans, M. I..., revendeur à Angers, M.WOLFF, revendeur à Paris); que cette liberté a été rappelée à plusieurs reprises, notamment en 1990,1993 et 1999, par BENETTON au moyen de lettres-circulaires diffusées auprès des agents commerciaux à l'attention des revendeurs ; qu'en outre l'examen des types d'étiquettes utilisées par BENETTON montre que les revendeurs ont la possibilité de modifier le prix des marchandises sans toucher à la partie de l'étiquette reproduisant le" code-barre" du vêtement et la marque appartenant au fournisseur ;

Considérant que la preuve d'une entrave à la concurrence ne saurait résulter que d'un faisceau d'indices constituant des présomptions graves, précises et concordantes ; qu'aucune circonstance ne

permettant d'accorder à certaines déclarations de revendeurs une valeur probante supérieure à celle des autres, c'est à juste titre que le Conseil de la concurrence a retenu que les contradictions constatées entre les différentes déclarations et l'absence de mesures de surveillance, de contrainte ou de rétorsion appliquées par BENETTON à l'égard de ses distributeurs ne permettaient pas de soutenir utilement la thèse d'une pratique de prix de revente publics imposée ; que la décision attaquée doit être dès lors, sur ce point confirmée ;

Sur la demande de complément d'enquête

Considérant que le Ministre chargé de l'économie fait grief au Conseil de la concurrence d'avoir, pour rejeter sa demande de complément d'enquête concernant la période postérieure à 1996, fait référence à l'existence d'une seuil de sensibilité et à l'absence de toute incidence significative des pratiques dénoncées sur le marché ; Mais considérant qu'un complément d'enquête ne se justifie qu'en présence d'indices sérieux de pratiques anticoncurrentielles qui auraient été négligées dans l'instruction de l'affaire ; qu'à défaut de toute précision fournie par le requérant sur ce point et en l'état d'investigations minutieuses n'ayant pas permis, au terme d'une instruction de plus de trois ans, d'établir la réalité des faits dénoncés, le Conseil de la concurrence a légalement justifié sa décision ; que le recours doit en conséquence être rejeté ; PAR CES MOTIFS :

Rejette le recours ;

Condamne le requérant aux dépens ; LE GREFFIER.

LE PRESIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006940999
Date de la décision : 07/05/2002

Analyses

CONCURRENCE - Pratique anticoncurrentielle - Entente - Conditions - Entrave à la concurrence - Appréciation - Pratique illicite

En vertu de l'article L.420-1, 2° du Code de commerce, sont prohibées, lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées, conventions ou coalitions tendant à faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse. Tout fournisseur peut en principe déterminer librement les conditions de distribution de ses produits et diffuser auprès des revendeurs des prix conseillés ou indicatifs. C'est seulement lorsque les engagements contractuels ou le comportement des intéressés démontrent qu'en réalité les prix proposés s'imposent aux revendeurs que la pratique en cause peut constituer une atteinte illicite à la liberté de la concurrence. En l'espèce, la preuve d'une entrave à la concurrence ne saurait résulter que d'un faisceau d'indices constituant des présomptions graves, précises et concordantes. Or, cette preuve n'est pas rapportée. En effet, les contradictions constatées entre les différentes déclarations et l'absence de mesures de surveillance, de contrainte ou de rétorsion appliquées par le fournisseur à l'égard de ses distributeurs ne permettent pas de soutenir la thèse d'une pratique de prix de revente publics imposée


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2002-05-07;juritext000006940999 ?
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