Monsieur X... Y.../ Madame Z...
Audience du 30/11/01 La Cour statue sur l'appel de Monsieur X... du jugement rendu le 19 juin 2000 par le Juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance d'Evry qui l'a débouté de sa demande de réduction de prestation compensatoire et condamné aux dépens. Référence faite aux énonciations de cette décision pour l'exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales des parties et à leurs dernières conclusions signifiées le 21 novembre 2001 par l'appelant et le même jour par l'intimée en ce qui concerne leurs prétentions actuelles et les moyens invoqués, il sera rappelé que la convention homologuée par jugement définitif du 3 décembre 1996 qui a prononcé le divorce de Monsieur X... et Madame Z... sur leur requête conjointe prévoyait au paragraphe "prestation compensatoire" :
reprendre pièce 1 de A...à...B) L'appelant, faisant valoir que la loi du 30 juin 2000 s'applique et invoquant un changement important dans sa situation dû pour l'essentiel que si sa mise à la retraite était prévue, l'absence de bénéfice pour lui d'un emploi au sol était imprévu et à sa nouvelle situation : le couple qu'il forme avec son épouse a à sa charge depuis 1999 les trois de celle-ci à l'entretien desquels le père ne peut pas contribuer et la mère de celle-ci placée dans une maison de retraite, demande à la Cour, infirmant la décision déférée, de - réduire la rente due au titre de la prestation compensatoire à 3.000 francs par mois à compter du 1er décembre 1999, - condamner Madame Z... aux entiers dépens et au paiement de 15.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; Madame Z..., intimée, s'oppose à ces demandes et
demande la condamnation de Monsieur X... à lui payer la somme de 10.000 francs à titre de procédure abusive et celle de 25.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Elle fait valoir pour l'essentiel que ce n'est pas la loi du 30 juin 2000 qui s'applique mais les dispositions de l'article 279 al 3 du Code civil auquel les parties avaient clairement recours dans leur convention définitive homologuée, que lors de la signature de cette convention Monsieur X... était parfaitement informé de son licenciement et des implications économiques de celui-ci, qu'elle n'a pas à assumer la carence financière du père des enfants de la femme de son ex-mari et la prise en charge par Monsieur X... de sa belle-mère qui incombe à ses deux enfants. Cela étant exposé,
LA COUR SUR LA LOI APPLICABLE Considérant que la loi du 30 juin 2000 relative à la prestation compensatoire en matière de divorce prévoit en son article 20 que la révision des rentes viagères attribuées avant l'entrée en vigueur de la présente loi peut être demandée dans les conditions fixées à l'article 276-3 du Code civil, à savoir en cas de changement important dans les ressources et les besoins des parties ; que la loi, qui ne fait pas de distinction suivant le mode de fixation de la rente, est applicable à toutes les rentes qu'elles soient fixées judiciairement dans le cadre d'une procédure de divorce pour faute ou, conventionnellement, comme c'est le cas en l'espèce, dans le cas d'une procédure de divorce sur demande conjointe ; que les conditions de la révision prévues à l'article 276-3 nouveau se substituent alors à celles prévues à l'ancien article 279 al. 3 lorsque les époux, divorçant par consentement mutuel, les ont, comme cet article les y autorisait, insérées dans leur convention, et ce sous réserve de conditions particulières qu'ils ont pu par ailleurs
prévoir ; Qu'il s'ensuit que Monsieur X... est recevable à demander la révision de la rente viagère fixée à la convention définitive homologuée par jugement du 3 décembre 1996 s'il établit un changement important dans les ressources et les besoins de lui-même ou de son ex-épouse, étant au demeurant observé que ce changement ne peut résulter de la mise à la retraite de l'intéressé, comme les époux l'ont, par une clause particulière, expressément spécifié dans ladite convention ; SUR L'EXISTENCE D'UN CHANGEMENT IMPORTANT Considérant que Monsieur X..., au soutien de sa demande de révision de la prestation compensatoire, invoque des changements importants dans sa seule situation personnelle ; que Madame Z..., qui n'est pas remariée, perçoit une rémunération nette mensuelle de 9.300 francs (elle percevait 7.000 francs au moment du divorce) ; qu'en exécution de la convention définitive homologuée, elle est propriétaire du pavillon de Ris Orangis d'une valeur d'environ 800.000 francs ; Considérant que c'est à juste titre que le premier juge a retenu que le licenciement économique intervenu le 26 décembre 1996 de Monsieur X..., qui a été convoqué à l'entretien préalable au licenciement le 27 novembre 1996 soit antérieurement au jugement de divorce et qui, au surplus, en sa qualité de représentant du Syndicat des Pilotes Navigants était parfaitement au courant de ce projet, n'était pas imprévu ; que ce licenciement, qui a été mise en oeuvre à la suite du refus opposé par Monsieur X... à l'offre de reclassement sur Airbus 320, a nécessairement été prise en compte dans l'établissement de la convention prévoyant la prestation compensatoire ; qu'il ne peut dès lors invoquer, comme un changement dans sa situation, les conséquences, elles-mêmes prévisibles, de ce licenciement ; que les conséquences de ce licenciement invoquées par Monsieur X... sont la perte d'un demi-salaire pendant six mois et l'impossibilité pour lui, après sa mise à la retraite effectivement prise en juillet 1997, de
bénéficier d'un emploi au sol avec un salaire de 18.000 à 20.000 francs ; qu'il sera en tout état de cause observé d'une part qu'il a perçu à l'occasion de ce licenciement des sommes importantes, dont il ne justifie pas de l'inexactitude des chiffres donnés par l'intimée (352.995 francs à titre d'indemnité légale de licenciement et de 804.889 francs au titre des "indemnités inhérentes à la rupture") et d'autre part qu'il ne rapporte pas la preuve de l'usage invoqué par lui selon lequel les commandements de bord-instructeurs, sur leur simple demande, étaient admis à remplir des fonctions d'instructeur au sol après leur mise à la retraite ; Considérant que Monsieur X... invoque en second lieu l'alourdissement de ses charges du fait que les deux enfants de son épouse qui vivaient chez leur père, vivent désormais avec eux depuis mai 1997 sans recevoir d'aide matérielle du père, ce qui a entraîné en outre des frais d'aménagement du logement familial, et que depuis le mois de juin 1999 il participe avec son épouse à l'entretien de sa belle-mère qui a dû entrer en maison de retraite ; Qu'il sera rappelé que Monsieur X... s'est marié le 26 avril 1997 avec Madame A... mère de trois enfants issus d'une précédente union ; que le couple, dont on ignore le régime matrimonial, et les trois enfants occupent un pavillon appartenant à Madame A... ; que les revenus moyens mensuels sont en 2000 de 38.687 francs pour Monsieur X... et de 17.374 francs pour son épouse ; Considérant, sur le premier point, que les enfants de Madame A..., qui ne sont pas issus de son mariage avec Monsieur X..., sont à la charge de leurs parents, et, en cas d'impécuniosité du père (qui ne saurait être démontrée par les seules attestation de celui-ci et de son comptable pour 1999 et en l'absence de tout document fiscaux ou judiciaires), de la mère qui a des revenus ; que, si la contribution financière aux charges du mariage de Madame Z... (elle y contribue également par la mise à la disposition de la
famille du logement dont elle est seule propriétaire), qui n'existait pas au moment où la convention a été signée, est de ce fait moins importante puisqu'elle est fixée à proportion des facultés respectives des époux, Monsieur X..., lequel au demeurant bénéficie fiscalement de la présence de des enfants de son épouse, n'a aucune obligation directe à leur égard ; Considérant que des travaux d'entretien et d'amélioration du logement familial, propriété de Madame A..., ont été réalisés en 1998 et 1999 pour un montant d'environ 220.000 francs ainsi qu'il résulte des deux factures produites ; qu'aucune justification sur le mode de financement de ces travaux n'est produite ; qu'en tout état de cause la participation de Monsieur X..., dont on rappellera qu'il ne règle pas de loyer, au financement de ces travaux ponctuels ne constitue pas un changement important dans ses ressources et ses besoins ; Considérant qu'aux termes des articles 205 et 206 du Code civil, l'obligation alimentaire à l'égard des père et mère incombe aux enfants et à leurs conjoints ; que la personne tenue à cette obligation dispose d'un recours contre les coobligés pour les sommes qu'elle a payées excédant sa part contributive compte tenu des facultés contributives des débiteurs ; que l'obligation alimentaire l'égard de la mère de Madame A... pèse donc sur Monsieur X..., son gendre, et sur ses deux enfants ; Considérant que Monsieur X... indique que depuis juin 1999, il participe avec sa femme à l'entretien de sa belle-mère qui a dû rentrer dans une maison de retraite à la suite de graves problèmes de santé et que le montant de leur participation au coût de la maison de retraite est de 11.000 francs par mois ; Que sont produites des factures de la maison de retraite faisant ressortir des frais mensuels de l'ordre de 15.000 francs, factures acquittées par Madame B... ; que cependant aucun élément d'information récent n'est donné sur la situation financière de Madame A... mère dont
Madame Z... indique qu'elle touchait en 1998 une retraite déclarée de 76.697 francs, soit un revenu mensuel de 6.400 francs, montant intégrant ses revenus mobiliers et immobiliers ; que ses revenus personnels viennent en déduction des dettes de ses obligés alimentaires ; qu'il sera en outre observé que le frère de Madame A..., médecin de son état, fait partie de ses obligés et que les arrangements pris entre le frère et la soeur ne sauraient faire supporter définitivement à Monsieur X..., au delà de sa part contributive, compte tenu des facultés du Docteur A... contre lequel il dispose d'un recours, la charge alimentaire de sa belle-mère ; qu'il sera en outre observé que l'obligation alimentaire de Monsieur X... à l'égard de sa belle-mère s'apprécie compte tenu de ses ressources et de ses charges dont fait bien sûr partie la rente due à son ex-épouse à titre de prestation compensatoire ; Qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'obligation alimentaire de Monsieur X... à l'égard de sa belle-mère doit être relativisée, compte tenu notamment des ressources de la créancière d'aliments et de la présence de coobligés alimentaires ; qu'il ne justifie pas dans ces conditions que la charge alimentaire à laquelle il est juridiquement tenue à l'égard de sa belle mère du fait de son placement en maison de retraite entraîne pour lui un changement important dans ses ressources et ses besoins ; Considérant en définitive que Monsieur X... ne rapporte pas la preuve qu'il remplit les conditions de l'article 276-3 du Code civil lui permettant de demander la révision de la rente viagère due à son ex-épouse au titre de la prestation compensatoire ; qu'il sera en conséquence débouté de sa demande et le jugement confirmé de ce chef ; SUR LES AUTRES DEMANDES Considérant que Monsieur X... a exercé cette voie de recours sans que cet usage ait dégénéré en abus ; que la demande de Madame Z... en dommages et intérêts pour procédure abusive sera
rejetée ; Que Monsieur X..., qui succombe en son appel, en supportera les dépens et ne peut prétendre à une indemnité au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Que l'équité justifie l'allocation à Madame Z... d'une indemnité de 1.200 euros au titre de ce même article ; PCM Vu la loi n° 2000-596 du 30 juin 20000, Confirme le jugement du Juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance d'Evry du 19 juin 2000, Condamne Monsieur X... à verser à Madame Z... la somme de 1.200 euros (7.920 francs) au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Rejette toute autre demande, Dit que Monsieur X... supportera les dépens d'appel et qu'ils seront recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.