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27/06/2001 | FRANCE | N°2001/05141

France | France, Cour d'appel de Paris, 27 juin 2001, 2001/05141


COUR D'APPEL DE PARIS 1è chambre, section A X... DU 27 JUIN 2001

(N , 7 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 2001/05141 Pas de jonction Décision dont appel : Décision du Bâtonnier rendue le 2/2/2001 par Madame de LA CHAISE, membre du conseil de l'Ordre agissant en qualité de déléguée de M. le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats à la Cour de Paris. Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : CONFIRMATION DEMANDERESSE AU RECOURS : Madame LEMOINE Y... ... par Maître Jean-Charles GUILLARD, Toque P19, Avocat au Barreau de PARIS plaidant pour la société d

'avocats au barreau de Paris LE FOYER DE COSTIL etamp; GUILLARD COMPOSIT...

COUR D'APPEL DE PARIS 1è chambre, section A X... DU 27 JUIN 2001

(N , 7 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 2001/05141 Pas de jonction Décision dont appel : Décision du Bâtonnier rendue le 2/2/2001 par Madame de LA CHAISE, membre du conseil de l'Ordre agissant en qualité de déléguée de M. le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats à la Cour de Paris. Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : CONFIRMATION DEMANDERESSE AU RECOURS : Madame LEMOINE Y... ... par Maître Jean-Charles GUILLARD, Toque P19, Avocat au Barreau de PARIS plaidant pour la société d'avocats au barreau de Paris LE FOYER DE COSTIL etamp; GUILLARD COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré, Président :

Monsieur Christian CHARRUAULT Z... :

Madame Geneviève BREGEON Z... :

Monsieur Xavier SAVATIER A... : A l'audience tenue en chambre du conseil du 23 mai 2001 MINISTÈRE PUBLIC représenté lors des débats par Madame Brigitte B..., substitut du Procureur Général, qui a développé ses observations orales. GREFFIER : Lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Madame C... X... : contradictoire Prononcé en chambre du conseil par Monsieur CHARRUAULT, Président, lequel a signé la minute avec Madame C..., Greffier - * * *

Le 13 mai 1997, la société FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE (la société FIDAL), société d'avocats au barreau des Hauts-de-Seine, a adressé à Mme LEMOINE, avocat au barreau de Paris, une lettre contenant notamment les énonciations suivantes :

"Nous faisons suite aux différents rendez-vous que vous avez eus avec nous et nous avons le plaisir de vous confirmer que nous sommes prêts

à vous engager dans notre Cabinet en tant qu'avocat salarié (...) pour une durée indéterminée (...).

Un contrat d'avocat salarié sera établi lors de votre arrivée, mais nous avons arrêté dès maintenant les dispositions suivantes :

Les trois premiers mois de travail constitueront votre période d'essai (...).

Votre rémunération se composera d'un montant fixe mensuel de 37 500 FF et éventuellement d'un bonus discrétionnaire (...).

Il vous appartiendra de vous inscrire en tant qu'avocat au barreau de Nanterre (...).

Comme je vous l'ai indiqué lors de notre dernier entretien, nous souhaitons (...) que vous puissiez intégrer notre équipe le mardi 1er juillet (...)".

Par lettre adressée le 20 mai 1997 à la société FIDAL, Mme LEMOINE a informé celle-ci qu'elle acceptait la proposition telle qu'ainsi définie aux termes de la lettre précitée.

Mme LEMOINE, entrée en fonctions au sein de la société FIDAL le 1er juillet 1997, a, le 21 septembre 1998, adressé à cette dernière une lettre contenant notamment les énonciation suivantes :

"Comme convenu, et afin de finaliser mon dossier d'inscription sur Nanterre, je vous prie de bien vouloir trouver ci-après mon contrat de collaboration signé pour lequel j'ai pris la liberté d'actualiser la date de signature.

Par ailleurs, je souhaite vous faire part de ma demande de travail à (temps) partiel (...) afin de disposer de temps pour me consacrer à régler les différents dossiers personnels et tracas (dont je vous ai fait part, pour ce qui est de certains d'entre eux au moins) (...)". A cette même date, Mme LEMOINE a apposé sa signature au pied d'un acte sous seing privé, déjà signé le 1er juillet 1998 par la société

FIDAL.

Cet acte, dénommé "contrat d'avocat salarié", contient notamment les clauses suivantes :

"Le présent contrat est conclu pour une durée indéterminée (...).

A compter du 1er juillet 1997, Mme Y... LEMOINE exercera la profession d'avocat en qualité de salarié de FIDAL (...).

Le présent contrat est conclu sous la condition suspensive de l'inscription de Mme Y... LEMOINE au tableau de l'Ordre des avocats au barreau de Nanterre en sa qualité d'avocat de FIDAL.

L'avocat fera son affaire personnelle des démarches nécessaires à cet effet (...)".

Le 29 avril 1999, la société FIDAL a remis, en mains propres, à Mme LEMOINE une lettre ainsi rédigée :

"Comme nous en sommes expliqués à de nombreuses reprises depuis votre lettre du 21 septembre 1998, votre intégration dans notre département pose des difficultés relationnelles et opérationnelles non négligeables. Ceci nous a d'ailleurs amenés à avoir un entretien sur les raisons qui ont conduit à limiter votre bonus à un niveau minimum.

Par ailleurs, comme nous vous l'avons indiqué, l'organisation de notre groupe ne permet pas d'envisager l'absence dont vous avez demandé à bénéficier par lettre du 21 septembre 1998.

De plus, le non transfert de votre dossier du barreau de Paris au barreau de Nanterre pour des raisons que nous respectons, mais qui relèvent de considérations purement personnelles, ne nous permet pas de maintenir le lien contractuel qui vous unit à notre cabinet.

Pour la bonne forme, ce document a été établi en deux exemplaires dont un original vous a été remis".

Ce même jour la société FIDAL a adressé à Mme LEMOINE une lettre, reçue par celle-ci le 11 mai suivant, ainsi rédigée :

"Suite à votre lettre de licenciement du 29 avril 1999 qui faisait suite à l'entretien préalable que nous avons eu le 23 mars 1999, nous vous confirmons que le Cabinet vous dispense de votre préavis à compter du 11 mai 1999 au soir.

Nous vous précisons, bien entendu, que celui-ci vous sera intégralement payé.

Votre solde de tous comptes vous sera présenté le 29 juillet 1999".

Un litige ayant ensuite opposé les parties relativement à la rupture du contrat qui les liait, Mme LEMOINE a, le 3 août 2000, saisi de ce litige le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Paris auquel elle a demandé de condamner la société FIDAL à lui payer les sommes suivantes, augmentées des intérêts par elles produits au taux légal à compter de cette date :

- 225.000 francs au titre de l'indemnité prévue par l'article L. 122-14-4 du Code du travail "pour n'avoir pu bénéficier de l'assistance d'un conseiller au cours de l'entretien préalable et non respect de la procédure de licenciement : absence de convocation à l'entretien préalable, absence de notification de la lettre recommandée A.R. de licenciement",

- 440.000 francs pour "licenciement sans cause réelle et sérieuse et abusif",

- 112.5000 francs à titre de dommages-intérêts pour "licenciement brutal et vexatoire".

Par décision du 2 février 2001, le bâtonnier, dont la compétence avait été déniée par la société FIDAL, a :

- rejeté cette exception d'incompétence,

- jugé que le licenciement litigieux "est fondé sur une cause réelle et sérieuse" et "ne revêt aucun caractère brutal et vexatoire",

- jugé que la société FIDAL "n'a pas respecté les dispositions légales en matière de procédure de licenciement",

- condamné ladite société à payer à Mme LEMOINE la somme de 37.500 francs à titre de dommages-intérêts ainsi que celle de 3.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

LA COUR,

Vu l'appel formé contre cette décision par Mme LEMOINE,

Vu les conclusions des 17 avril et 22 mai 2001 en vertu desquelles Mme LEMOINE demande à la cour de confirmer la décision en ce qu'elle a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par son adversaire et dit irrégulière la procédure de licenciement, de réformer les autres dispositions de la décision, d'accueillir ses prétentions originaires et de condamner la société FIDAL à lui payer la somme de 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Vu les conclusions du 22 mai 2001 selon lesquelles la société FIDAL demande à la cour :

- de confirmer la décision en ce qu'elle a jugé que le licenciement litigieux est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- de réformer la disposition de la décision allouant des dommages-intérêts à Mme LEMOINE pour non respect des dispositions légales en matière de procédure de licenciement,

- de juger qu'elle n'a pas violé lesdites dispositions, à défaut, de dire que seules les dispositions de l'article L.122-14-5 du Code du travail s'appliquent et de juger que Mme LEMOINE, d'une part, a pu préparer et présenter sa défense, d'autre part, n'a subi aucun préjudice, partant de rejeter la demande formée de ce chef par celle-ci,

- de condamner Mme LEMOINE à lui payer la somme de 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

SUR CE,

Considérant, en droit, qu'il résulte de l'article L. 122-14-5 du Code du travail que les salariés ayant moins de 2 ans d'ancienneté dans l'entreprise peuvent prétendre, tant en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse qu'en cas d'inobservation de la procédure de licenciement, à une indemnité calculée en fonction du préjudice subi ;

Considérant, en l'espèce, que le licenciement de Mme LEMOINE entre dans les prévisions de ces dispositions dès lors, d'une part, qu'à la date à laquelle l'intéressée a été informée de son licenciement, l'ancienneté de cette dernière au sein de la société FIDAL était inférieure à deux ans, d'autre part, qu'il n'est pas contesté qu'existent, au sein de cette société, des institutions représentatives du personnel, en sorte que Mme LEMOINE n'est pas fondée à revendiquer l'application des sanctions édictées en cas d'inobservation de la règle posée par l'article L. 122-14, alinéa 2, du Code du travail, relative à l'assistance du salarié par un conseiller de son choix ;

Considérant, d'abord, selon l'article L. 122-14, alinéa 1, du Code du travail, que l'employeur, ou son représentant, qui envisage de licencier un salarié, doit, avant toute décision, convoquer l'intéressé par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge en lui indiquant l'objet de la convocation ;

que la société FIDAL ne produit aucun élément de preuve propre à établir que, relativement au licenciement de Mme LEMOINE, elle ait satisfait aux exigences du texte précité, non plus qu'à celles de l'article L. 122-14-1, alinéa 1, du même Code, aux termes duquel l'employeur qui décide de licencier un salarié doit notifier le licenciement par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ;

que si Mme LEMOINE ne prouve pas que la méconnaissance de ce dernier

texte lui ait fait grief dès lors que la lettre l'informant des motifs de son licenciement lui a été remise en mains propres, en revanche l'inobservation des dispositions relatives à la convocation de l'intéressée à l'entretien préalable à son licenciement a privé celle-ci des garanties attachées à une telle convocation ;

que la réparation du préjudice né de ce manquement appelle l'allocation de la somme de 37.500 francs à titre de dommages-intérêts, de sorte qu'il convient de confirmer la décision du bâtonnier en sa disposition allouant cette somme à Mme LEMOINE, partant de rejeter, pour le surplus, la demande formée par celle-ci aux fins d'allocation de la somme de 225.000 francs ;

que, conformément aux dispositions de l'article 1153-1, alinéa 2, du Code civil, ladite indemnité de 37.500 francs porte de plein droit intérêt au taux légal à compter de la décision du bâtonnier ;

Considérant, ensuite, que les parties, qui, en vertu des lettres précitées originairement échangées, les 13 et 20 mai 1997, avaient noué des relations contractuelles, à compter du 1er juillet 1997, ont, selon les termes clairs et précis de la clause liminairement citée du contrat par elles conclu, en date des 1er juillet et 21 septembre 1998, manifesté leur commune intention de subordonner la poursuite desdites relations à la réalisation de la condition, improprement qualifiée de suspensive, de l'inscription de Mme LEMOINE au tableau du barreau de Nanterre, que celle-ci s'est obligée à solliciter sans délai ;

que Mme LEMOINE n'a pas satisfait à cette obligation ;

qu'en une motivation pertinente, le bâtonnier a exactement estimé qu'une telle défaillance, que ne suffisent pas à justifier les prétendues difficultés financières alléguées par Mme LEMOINE, constitue une cause réelle et sérieuse du licenciement de celle-ci ;

que la demande formée par cette dernière aux fins d'allocation de la somme de 440.000 francs est donc dépourvue de fondement ;

Considérant, encore, que Mme LEMOINE ne produit aucun élément propre à faire regarder comme "brutal et vexatoire" le licenciement litigieux, étant observé, à cet égard, que la dispense d'exécution du préavis, qu'explique ladite défaillance, ne saurait conférer à ce licenciement un tel caractère qu'excluent, au demeurant, les pourparlers, finalement infructueux, engagés par les parties à l'effet de s'accorder sur les modalités de la rupture de leurs relations contractuelles ;

que Mme LEMOINE n'est donc pas fondée à solliciter de ce chef l'allocation de la somme de 112.500 francs à titre de dommages-intérêts ;

Considérant, enfin, qu'il n'y a lieu d'accueillir aucune des demandes articulées sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Par ces motifs,

Confirme la décision rendue entre les parties le 2 février 2001 par le bâtonnier de l'Ordre des avocats au barreau de Paris ;

Rejette toute autre prétention ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens d'appel par elle exposés. Le Greffier

Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 2001/05141
Date de la décision : 27/06/2001

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Applications diverses

La non-inscription d'un salarié au tableau du Barreau de Nanterre, érigée, aux termes de son contrat de travail, en condition subordonnant la poursuite des relations contractuelles avec son employeur constitue une cause réelle et sérieuse du licenciement de celui-ci


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2001-06-27;2001.05141 ?
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