COUR D'APPEL DE PARIS 24è chambre, section C ARRÊT DU 8 MARS 2001
(N , 5 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 1999/05827 Décision dont appel : Ordonnance rendue le 01/02/1999 par le JUGE AUX AFFAIRES FAMILIALES du Tribunal de Grande Instance de CRETEIL 8ème Ch - Cab. H - RG n : 1998/32663 Date ordonnance de clôture : 21 Décembre 2000 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : IRRECEVABILITÉ DE LA DEMANDE APPELANTE : Madame X... Maria ... représentée par Maître THEVENIER, avoué assistée de Maître FERREIRA-PITON Claudina, Avocat - Toque A 590 AIDE JURIDICTIONNELLE : TOTALE du 13/12/1999 n 199938498 INTIME : Monsieur Y... Lucinio ... représenté par la SCP DAUTHY-NABOUDET, avoué assisté de Maître KERROS Jean-Yves, Avocat au Barreau de CRETEIL
COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré : Président : Mondane COLCOMBET Conseiller : Odile MONDINEU-HEDERER Conseiller : Danielle BELLOT GREFFIER : Philippe BLAISE ayant assisté aux débats et au prononcé de l'arrêt DÉBATS : A l'audience non publique du 31 janvier 2001 ARRÊT Prononcé publiquement par Mondane COLCOMBET, Président, laquelle a signé la minute avec Philippe BLAISE, Greffier
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE La Cour statue sur l'appel interjeté par Madame X... d'une ordonnance rendue le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de CRETEIL qui :
- s'est déclaré incompétent pour connaître de la demande de Madame X... concernant le montant des crédits souscrits durant le mariage, - s'est déclaré compétent pour connaître de la demande de révision de
la prestation compensatoire sollicitée par Madame X... et l'a déboutée de cette demande et condamnée aux dépens. Monsieur Y... a constitué avoué le 22 mars 1999 et une première ordonnance de clôture est intervenue le 25 mai 2000 ; l'affaire a été plaidée le 7 juin 2000 et mise en délibéré ; par décision du 30 août 2000 les débats ont été rouverts afin de permettre aux parties de conclure au regard des dispositions de la loi du 30 juin 2000 et notamment de l'article 276-3 du Code civil dans sa nouvelle rédaction. L'instruction de l'affaire a été à nouveau clôturée le 21 décembre 2000. L'appel est recevable. Les faits de la procédure et de la cause ont été très exactement exposés par le premier juge, il convient seulement de s'y référer et de rappeler que le divorce des parties est intervenu sur leur demande conjointe par jugement Juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de Créteil en date du 28 janvier 1997 qui a homologué la convention définitive prévoyant le versement par Monsieur Y... d'une prestation compensatoire à son épouse "d'un montant mensuel de 1.000 francs sa vie durant" avec indexation. PRÉTENTIONS DES PARTIES Madame X... limite dans ses écritures son appel au rejet de sa demande de révision de prestation compensatoire. Elle soutient que le premier juge n'a pas tenu compte de l'aggravation de sa situation, qu'elle est atteinte de cécité et que ses ressources ne lui permettent pas de faire face aux frais de la vie courante, qu'elle ne perçoit que 2.000 francs par mois outre une allocation compensatrice de tierce personne de 4.500 francs alors que ses dépenses mensuelles s'élèvent à 7.000 francs au minimum, qu'elle a introduit l'action en révision de la prestation compensatoire avant l'application de la loi du 30 juin 2000 et qu'en conséquence sa demande doit être régie par les dispositions de l'article 273 non modifié du code civil ; que cette article lui donne la possibilité de demander la révision dans la mesure ou l'absence de
révision aurait des conséquences d'une extrême gravité ce qui est son cas. Elle demande à la cour :
- de constater que l'action a été engagée avant l'entrée en vigueur de la loi du 30 juin 2000,
- dire en conséquence que la loi du 30 juin 2000 ne s'applique pas en l'espèce, vu l'article 273 du code civil,
- infirmer le jugement déféré,
- débouter Monsieur Y... de ses demandes,
- modifier le montant de la prestation compensatoire et la fixer à 2.500 francs,
- condamner Monsieur Y... aux dépens et au paiement de la somme de 4.000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Monsieur Y... expose que la loi du 30 juin 2000 rend la demande de Madame X... irrecevable en application du nouvel article 276-3 du Code civil ; que cette loi s'applique aux instance en cours qui n'ont pas donné lieu à une décision passée en force de chose jugée selon l'article 23 de cette loi ; subsidiairement il expose que l'exceptionnelle gravité exigée par l'ancien article 273 du code civil n'est ni prouvée ni démontrée, que le prononcé du divorce est définitif Madame X... n'ayant jamais manifesté son désaccord éventuel à chaque étape de la procédure, qu'en fait Madame X... perçoit des ressources de l'ordre de 9.100 francs par mois dont 1.000 francs de prestation compensatoire, qu'elle est prise en charge à 100% et bénéficie d'avantages et de réductions importantes, que sa situation s'est améliorée depuis la séparation du couple, qu'en ce qui le concerne ses revenus étaient de 120.000 francs en 1996 et ne sont plus que de 112.000 francs en 1998, que ses charges ont augmenté compte tenu du fait qu'il est remarié, qu'il a subi un préjudice important du fait de la procédure initiée par Madame X.... Il demande à la cour :
- de déclarer Madame X... irrecevable en ses demandes,
- subsidiairement, de débouter Madame X... de sa demande et déclarer l'appel infondé,
- de confirmer la décision déférée,
- de condamner Madame X... à lui verser une somme de 20.000 francs à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,
- de condamner Madame X... aux dépens et au paiement de la somme de 10.000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Cela étant exposé
LA COUR
Considérant qu'en application de son article 23, les dispositions de la loi n° 2000-596 du 30 juin 2000 relative à la prestation compensatoire en matière de divorce, publiée au Journal Officiel du 1er juillet 2000, sont applicables aux instances en cours qui n'ont pas donné lieu à une décision passée en force de chose jugée ; Que tel est bien le cas en l'espèce puisque, lors de l'entrée en vigueur de la loi précitée, l'affaire était en délibéré, un arrêt devant être rendu le 7 septembre 2000 ; qu'ainsi la loi du 30 juin 2000 est bien applicable à la présente instance, et ce peu important que l'action en révision de Madame X... ait été introduite antérieurement ; Considérant qu'il sera tout d'abord relevé que les ex-époux n'ont pas prévu, dans leur convention homologuée par le jugement de divorce prévoyant une rente viagère au profit de Madame X..., de clause de révision ; Considérant que les dispositions de l'article 273 du Code civil relatives à la révision de la prestation compensatoire fixée par le juge ont été supprimées ; qu'elles ont été remplacées, dans le cas de la prestation compensatoire sous forme de rente viagère que le juge peut prononcer à titre exceptionnel sous certaines conditions, par les dispositions de l'article 276-3 nouveau du Code civil ; Que cet article dispose : " la prestation compensatoire fixée sous forme de rente viagère peut être révisée, suspendue ou supprimée en cas de
changement important dans les ressources et les besoins des parties. La révision ne peut avoir pour effet de porter la rente à un montant supérieur à celui fixé initialement par le juge. L'action en révision est ouverte au débiteur et à ses héritiers; Considérant qu'à supposer que cet article puisse s'appliquer à la prestation compensatoire conventionnelle sous forme de rente viagère, force est de constater que l'action en révision est réservée au seul débiteur ou à ses héritiers ; qu'il s'ensuit que Madame X..., créancière de la prestation compensatoire, n'a plus qualité pour agir ; qu'elle sera en conséquence déclarée irrecevable en sa demande ; SUR LES AUTRES DEMANDES Considérant que le recours à la voie de l'appel, qui est un droit, n'a pas dégénéré en abus dans la présente procédure ; qu'en conséquence la demande de dommages-intérêts présentée par Monsieur Y... sera rejetée ; Considérant que Madame X..., supportera les dépens exposés devant la Cour, les dépens exposés en première instance restant répartis conformément à la décision déférée ; qu'elle ne peut prétendre au bénéfice de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Que l'équité ne justifie pas qu'il soit fait application des dispositions de cet article au bénéfice de Monsieur Y... ; PAR CES MOTIFS,
Déclare l'appel recevable, Vu la loi n° 2000-596 du 30 juin 2000, Vu l'article 276-3 du code civil, Déclare la demande de révision de la prestation compensatoire engagée par Madame X... irrecevable, Rejette toutes demandes contraires ou plus amples des parties, Condamne Madame X... aux dépens et accorde à l'avoué de son adversaire le droit de recouvrer directement ceux des dépens dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision. Le Greffier
Le Président