COUR D'APPEL DE PARIS 14ème chambre, section B ARRÊT DU 2 MARS 2001
(N , 4 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 2000/20588 Pas de jonction Décision dont appel : Ordonnance de référé rendue le 06/10/2000 par le TRIBUNAL DE COMMERCE de PARIS - RG n : 2000/59982 (M. De X...) Date ordonnance de clôture : 25 Janvier 2001 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision :
INFIRMATION APPELANTE: S.A. TEMTRADE, prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 8 impasse Colombelle 12/18 Grand Saconnex (Suisse) représentée par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, Avoué assistée de Maître JOUANNEAU, Toque A.96, Avocat au Barreau de PARIS INTIMÉE : S.N.C. L'ORÉAL PARFUMS etamp; BEAUTÉ, prise en la personne de ses représentants légaux, ayant son siège 106 rue Danton 92300 LEVALLOIS PERRET représentée par Maître BAUFUMÉ, Avoué assistée de Maître GILLET-VINET, Toque P.80, Avocat au Barreau de PARIS COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : Président :
M. CUINAT Y... : MM. Z... et VALETTE DÉBATS : à l'audience publique du 2 février 2001. GREFFIER : aux débats et au prononcé de l'arrêt, Mme POUVREAU. ARRÊT : CONTRADICTOIRE Prononcé publiquement par M. CUINAT, Président, lequel a signé la minute de l'arrêt avec Mme POUVREAU, greffier.
* Statuant sur l'appel formé par la société de droit helvétique TEMTRADE d'une ordonnance de référé rendue le 6 octobre 2000 par le Président du Tribunal de Commerce de PARIS, lequel, saisi par la SNC L'OREAL PARFUMS etamp; BEAUTÉ, a : - ordonné à la SA TEMTRADE de verser entre les mains de la SCP Brigitte BEGO et Stéphane VAN KEMMEL, huissiers audienciers, désignée en qualité de séquestre, la somme de 3.617.351,19 F dès le prononcé de la décision, laquelle conservera cette somme jusqu'à ce qu'il en soit, par décision de justice devenue définitive au fond, autrement ordonné, ou d'accord entre les parties décidé ; - rejeté toutes demandes des parties plus
amples ou contraires à l'ordonnance ; - laissé les dépens à la charge de la SNC L'OREAL PARFUMS etamp; BEAUTÉ. Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 20 décembre 2000, la société TEMTRADE expose au soutien de son appel : - qu'il résulte des stipulations d'un accord conclu entre les parties que tous litiges entre elles seraient de la compétence du Tribunal de Commerce de PARIS et que la loi applicable serait la loi suisse ; - que le premier juge, tout en admettant l'applicabilité de la loi suisse, a statué ultra petita en ordonnant une mesure conservatoire que la demanderesse n'avait pas sollicitée et qui n'a pas été débattue à l'audience ; - qu'elle est créancière de la société L'OREAL PARFUMS etamp; BEAUTÉ en raison de la violation par celle-ci de son engagement d'exclusivité et qu'elle a introduit une instance actuellement pendante devant le Tribunal de Commerce de PARIS, afin d'obtenir la condamnation de cette société à lui payer la somme de 227.682.480 $ US ou sa contre-valeur en francs français ; - que l'article 120 OE 2 du Code des obligations suisse prévoit que "le débiteur peut opposer la compensation même si sa créance est contestée" ; - que dans ces conditions, la créance alléguée à son encontre par la société L'OREAL PARFUMS etamp; BEAUTÉ étant sérieusement contestable, il n'y a pas lieu à référé. Pour ces raisons, elle demande à la Cour : - d'infirmer l'ordonnance entreprise ; - d'ordonner la restitution par la SCP BEGO etamp; VAN KEMMEL de la somme de 2.595.387,35 F qui lui a été remise en exécution de cette décision. Subsidiairement, dans le cas où la Cour estimerait possible et nécessaire de prendre une mesure conservatoire, de substituer la fourniture d'une caution à la constitution d'un séquestre et dans l'un ou l'autre cas, dans la limite de la somme de 2.595.387,35 F ; - de condamner la société L'OREAL PARFUMS etamp; BEAUTÉ à lui payer la somme de 30.000 F au titre de l'article 700 du NCPC, ainsi qu'aux dépens. Par dernières
conclusions du 8 décembre 2000, la SNC L'OREAL PARFUMS etamp; BEAUTÉ, anciennement dénommée PARFUMS etamp; BEAUTÉ, intimée et appelante incidente, répond : - que la société TEMTRADE ne peut se prévaloir des dispositions du droit suisse, la loi du for étant seule applicable tant en ce qui concerne la procédure que le mode de preuve ; - que les éléments d'une compensation entre créances réciproques ne sont pas réunis au regard du droit français ; - qu'en tout état de cause la compensation opposée par la société TEMTRADE n'est pas davantage justifiée au regard des dispositions du droit suisse ; - que la créance indemnitaire alléguée par la société TEMTRADE se heurte à l'existence d'une contestation sérieuse dont le bien-fondé a été reconnu par le jugement rendu le 22 novembre 2000 par le Tribunal de Commerce de PARIS ; - que ce même jugement a condamné la société TEMTRADE à lui payer la somme de 2.595.387,35 F avec intérêts au taux légal à compter du 24 juillet 2000 ; - de dire et juger la société TEMTRADE mal fondée en son appel et de la débouter de l'ensemble de ses demandes ; - réformer l'ordonnance entreprise ;
- d'ordonner à la SCP BEGO etamp; VAN KEMMEL de lui verser la somme de 2.595.321,81 F consignée entre ses mains par la société TEMTRADE. - Très subsidiairement, de confirmer la mesure de séquestre ordonnée par la décision entreprise sauf à ramener le montant de la somme versée par la société TEMTRADE à celle de 2.595.387,35 F correspondant à la fixation de sa créance par le Tribunal de Commerce de PARIS dans son jugement du 22 novembre 2000. - de condamner la société TEMTRADE à lui verser la somme de 30.000 F au titre de l'article 700 du NCPC, ainsi qu'aux dépens.
SUR CE, Considérant qu'il résulte des pièces versées aux débats qu'aux termes d'un avenant du 30 janvier 1998 aux contrats de
distribution sélective dont est titulaire la société TEMTRADE, il a été convenu entre les parties que tous les litiges seront de la compétence du Tribunal de Commerce de PARIS et que la loi applicable sera la loi suisse ; Considérant qu'eu égard à cette clause, contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, la compensation qu'oppose la société TEMTRADE à la créance alléguée à son encontre par la société L'OREAL PARFUMS etamp; BEAUTÉ, doit être appréciée au regard de la loi suisse et non de la loi du for ainsi que celle-ci le prétend à tort, laquelle ne peut s'appliquer qu'aux seules règles de la procédure et de l'administration de la preuve ; Considérant qu'aux termes de l'article 1202 du Code des Obligations suisse, le débiteur peut opposer la compensation même si sa créance est contestée ; Considérant qu'il s'ensuit, en application de ce texte, que la créance indemnitaire d'un montant de 227.682.480 $ US qu'oppose la société TEMTRADE , dont il n'a pas été jugé définitivement qu'elle n'était pas fondée, rend sérieusement contestable la demande de provision formée par la SNC L'OREAL PARFUMS etamp; BEAUTÉ, au titre de sa propre créance s'élevant à 2.595.387,35 F, qui ne peut dans ces conditions être accueillie ; Considérant qu'il n'y a pas lieu non plus de maintenir la mesure de séquestre ordonnée par le premier juge qui n'apparaît pas justifiée ; Considérant qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de la société TEMTRADE les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés ; Considérant que la SNC L'OREAL PARFUMS etamp; BEAUTÉ qui succombe sur l'appel de la société TEMTRADE doit être condamnée aux entiers dépens et ne peut, de ce fait, prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 700 du NCPC ;
PAR CES MOTIFS, LA COUR, Déclare la société TEMTRADE bien fondée en son appel ; en conséquence ; Infirme en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise ; Statuant à nouveau : Rejette la demande de
provision formée par la SNC L'OREAL PARFUMS etamp; BEAUTÉ à l'encontre de la société TEMTRADE ; Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article de l'article 700 du NCPC ; Condamne la SNC L'OREAL PARFUMS etamp; BEAUTÉ aux entiers dépens de première instance et d'appel ; Admet la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, Avoué, au bénéfice des dispositions de l'article 699 du NCPC.
LE GREFFIER
LE PRÉSIDENT