COUR D'APPEL DE PARIS 8è chambre, section B ARRET DU 25 JANVIER 2001 (N , 7 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 2000/10938 Pas de jonction Décision dont appel : Jugement rendu le 06/03/2000 par le JUGE DE L'EXECUTION DU TGI de PARIS. RG n : 2000/80382 (Juge :
Muriel DURAND) Date ordonnance de clôture : 7 décembre 2000 Nature de la décision : contradictoire. Décision : INFIRMATION. APPELANTE :
S.A. AXA GLOBAL RISKS devenue AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 4 rue Jules Lefebvre 75426 PARIS CEDEX 09 représentée par la SCP BOMMART-FORSTER, avoué assistée de Maître Barthélémy LACAN, avocat, E 435, INTIME : ETABLISSEMENT PUBLIC AEROPORTS DE PARIS exerçant sous l'enseigne ADP pris en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 291 boulevard Raspail 75675 PARIS CEDEX 14 représenté par la SCP DUBOSCQ-PELLERIN, avoué assisté de Maître SANTANA, avocat plaidant pour la SCP NEVEU SUDAKA, P 43. COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré : Président : Monsieur ANQUETIL, Conseiller désigné pour présider cette Chambre par ordonnance du Premier Président en l'absence et par empêchement du Président de cette Chambre, Conseillers : Madame X... et Madame Y.... DEBATS : à l'audience publique du 7 décembre 2000 GREFFIER : Lors des débats et du prononcé de l'arrêt, Madame Z.... ARRET :
contradictoire. Prononcé publiquement par Monsieur ANQUETIL, Président, qui a signé la minute avec Madame Z..., Greffier. RAPPEL DE LA PROCEDURE ANTERIEURE: Par jugement réputé contradictoire rendu le 6 mars 2000, le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de PARIS a condamné la société AXA GLOBAL RISKS, en qualité de tiers saisi, à payer à l'ETABLISSEMENT PUBLIC AEROPORTS DE PARIS une somme de 6 803 197,10F représentant les causes de la saisie-attribution pratiquée le 22 décembre 1998 entre les mains dudit assureur à l'encontre de la
société BELAIR, outre les intérêts au taux légal sur cette somme à compter du 3 février 1999, à titre de dommages-intérêts; il a condamné la société AXA GLOBAL RISKS à payer 5 000F au titre des frais irrépétibles; LA PROCEDURE DEVANT LA COUR: C'est de ce jugement que la société AXA GLOBAL RISKS, tiers saisi condamné, est appelante; elle a pris la dénomination d'AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE en cours de procédure d'appel;
Elle rappelle qu'elle était l'assureur de la société BELAIR au titre de plusieurs appareils que cette dernière exploitait; qu'un premier sinistre survenu le 5 août 1998 sur un appareil MD 83-F-GKZL a été enregistré, puis un second survenu le 15 septembre 1998 qui a affecté l'appareil B 727 F-GCGU; que la saisie attribution litigieuse est intervenue le 22 décembre 1998; qu'elle a répondu à l'huissier instrumentaire le 24 décembre suivant; que le certificat de non-contestation lui a été notifié le 11 février 1999 avec demande de paiement des fonds saisis; qu'elle n'a pu payer, la créance n'étant pas encore liquidée, s'en expliquant par lettre du 18 février; qu'elle a été assignée par le créancier saisissant qui considère qu'elle n'a pas répondu à ses obligations d'information; Elle soutient au contraire qu'elle les a remplies suffisamment; que sa déclaration n'est pas tardive, compte tenu des circonstances de l'interpellation et des difficultés de la réponse à fournir; qu'elle a maintenu l'huissier instrumentaire informé de l'évolution des dossiers en répondant à ses interrogations successives; elle précise en ce qui concerne le sinistre du 5 août 1998 qu'elle a prévenu l'huissier qu'en raison du montant de l'indemnité liquidée, le bénéficiaire n'était pas le débiteur saisi; elle précise qu'elle n'a pas subordonné le paiement de l'indemnité à l'accomplissement des réparations sur l'appareil sinistré; elle ajoute que l'inaction de la société BELAIR a ralenti la liquidation de l'indemnité et que la
situation de blocage actuelle n'est pas son fait; elle demande l'infirmation de la décision entreprise et le débouté d'AEROPORTS DE PARIS de ses demandes; elle sollicite pour elle-même 15 000F pour ses frais irrépétibles; L'ETABLISSEMENT PUBLIC AEROPORTS DE PARIS, créancier saisissant intimé, rappelle sa créance à l'encontre de la société BELAIR, débiteur saisi; il précise en ce qui concerne le sinistre du 5 août 1998 sur l'appareil MD, que la police d'assurance ne lui a pas été communiquée malgré sommation; qu'il s'agit d'un sinistre sur un moteur de l'appareil, évalué à 1 150 000 FS; sur le sinistre du 15 septembre 1998 sur l'appareil B727, que la police n'a pas été davantage communiquée; qu'il existe un devis estimatif de remise en état du moteur à hauteur de 385 000USD; qu'un premier devis l'avait estimé à 800 00 USD; qu'une provision de 1,4MF a été versée par l'assureur à la société BELAIR le 15 décembre 1998 par compensation avec une somme équivalente due au titre des primes d'assurance; il reproche au tiers saisi de n'avoir pas effectué ses déclarations correctement; - notamment que sa lettre du 24 décembre 1998 ne faisait référence qu'au sinistre du 15 septembre 1998, alors que l'autre était encore en instruction; qu'il y a eu dissimulation; il conteste les explications de l'assureur selon lesquelles l'indemnité d'assurance serait due non pas à la société BELAIR mais à une société FINOVA (ayant financé l'appareil sinistré); - il reproche encore que la réponse faite sur l'autre sinistre est imprécise; qu'aucune indication n'a été donnée sur le montant de l'indemnité, alors même que le coût de la remise en état du moteur était connu, et que l'indemnité due devait s'élever à au moins 385 000USD; qu'il ne suffisait pas d'indiquer que la créance n'était pas liquide et exigible pour satisfaire aux obligations de l'article 44 de la Loi n°91-650 du 9 juillet 1991; que l'assureur aurait dû indiquer la franchise applicable, l'estimation minimale connue de l'indemnité
due; que depuis la date de la saisie, la liquidation aurait dû intervenir, la mise en liquidation judiciaire de la société BELAIR ne pouvant justifier le retard; il reproche également, suite à la demande de paiement après obtention du certificat de non contestation, qu'aucun paiement n'ait été fait, l'assureur invoquant des motifs inexacts; à titre principal il demande la condamnation de l'assureur aux causes de la saisie sur le fondement de l'article 60 alinéa 1 du Décret n°92-755 du 31 juillet 1992; à titre subsidiaire, il demande la condamnation de l'assureur à des dommages-intérêts et aux causes de la saisie, sur le fondement de l'article 60 alinéa 2 dudit décret; il sollicite de plus 30 000F pour résistance abusive et 50 000F pour ses frais irrépétibles; SUR CE, LA COUR, Considérant qu'aux termes de l'article 44 de la loi n 91-650 du 9 juillet 1991, le tiers saisi est tenu de déclarer au créancier l'étendue de ses obligations à l'égard du débiteur saisi ainsi que les modalités qui pourraient les affecter, et s'il y a lieu les cessions de créances, délégations ou saisies antérieures; que l'article 59 du décret n 92-755 du 31 juillet 1992 précise qu'il est tenu de fournir sur-le-champ à l'huissier de justice ces renseignements et de lui communiquer les pièces justificatives; que par application de l'article 60 alinéa 1 dudit décret, le tiers saisi qui sans motif légitime ne fournit pas les renseignements prévus est condamné au paiement des causes de la saisie, mais qu'une déclaration incomplète, inexacte ou mensongère ne peut que donner lieu à sa condamnation à dommages-intérêts sur le fondement de l'article 60 alinéa 2; Sur la tardiveté de la réponse: Considérant qu'il n'est pas contesté que le tiers saisi n'a répondu à l'huissier ayant instrumenté le 22 décembre 1998 que par lettre du 24 décembre suivant; que toutefois, AEROPORTS DE PARIS indique explicitement dans ses dernières écritures qu'il ne reproche pas à l'assureur d'avoir répondu dans ce délai de 48 heures;
que c'est la teneur de la réponse qui est discutée; qu'au demeurant, en l'espèce, et sauf à l'huissier à avoir interpellé l'employé de l'assureur spécialement chargé de la liquidation du sinistre concernant le débiteur saisi, il n'était guère possible de donner immédiatement une réponse par nature technique et nécessitant des recherches; que celle fournie par le tiers saisi dans les 48 heures l'a été dans un délai légitime; Sur l'inexactitude ou la fausseté de la réponse donnée: Considérant que par lettre du 24 décembre 1999 adressée à l'huissier instrumentaire, le tiers saisi a répondu, selon les références indiquées sur sa lettre, relativement au sinistre n°2 001 914 résultant de l'accident du 15-9-98 (soit celui concernant un Boeing 727); qu'il était précisé: "les sommes que nous pourrions être amenés à régler à la société BELAIR... ne sauraient être considérées comme des créances actuelles et certaines, dans la mesure où le montant définitif du sinistre n'est pas chiffré, puisque nous sommes à ce jour dans l'attente du rapport de notre expert...." Qu'il résulte de cette réponse, malgré la maladresse de certains termes, que l'assureur ne contestait pas le principe de l'indemnisation du sinistre mais précisait que la liquidation restait à faire après le dépôt du rapport d'expertise; qu'il n'est pas contesté qu'une expertise était effectivement en cours, ni prétendu que le rapport de l'expert ait été à cette date déposé; que la réponse n'est donc pas inexacte ou mensongère, la compagnie ne pouvant proposer une offre d'indemnisation qu'au vu de ce rapport; Considérant encore que par lettre du 18 février 1999, en réponse à la demande de paiement de l'huissier instrumentaire en date du 11 février, après signification du certificat de non contestation, le tiers saisi a répondu que la créance n'était pas liquide, ajoutant " les opérations en vue de la liquider sont en cours, l'expert d'assurance n'ayant pas à ce jour remis son rapport permettant de finaliser le montant exact du
sinistre. La créance saisie n'étant pas liquide, elle n'est pas exigible. Lorsqu'elle aura été liquidée, nous ne manquerons pas de la verser entre vos mains, dans la limite de la créance qui a fondé la saisie."; qu'il n'est pas davantage démontré que cette réponse est inexacte ou mensongère, n'étant pas établi que le rapport d'expertise ait été alors déposé; Considérant qu'à une nouvelle demande de l'huissier du 30 août 1999 (non produite) le tiers saisi répondait le 21 septembre suivant: "le dossier n'a subi aucune évolution depuis notre lettre du 18 février 1999. A notre connaissance, le moteur endommagé n'a pas été réparé et aucune facture n'a été émise par le réparateur. Nous vous tiendrons informé de toute nouvelle information qui pourrait nous être communiquée"; qu'il n'est pas davantage démontré que la réponse est inexacte, n'étant pas prétendu ou en tout cas prouvé que la réparation était faite ou la facture communiquée par le réparateur à l'assureur; Considérant que les réponses de l'assureur, exactes, n'étaient pas non plus insuffisantes, relativement au sinistre pris en considération; qu'en effet, le créancier saisissant, s'il a droit à une information sur la créance de son débiteur dans les termes de l'article 44 de la Loi n°91-650 du 9 juillet 1991, c'est-à-dire sur l'étendue des obligations du tiers saisi à l'égard du débiteur et les modalités qui peuvent les affecter, ne peut pour autant s'immiscer dans les rapports juridiques de ce dernier avec le tiers saisi; qu'en l'espèce, l'assureur n'avait pas à donner une estimation approximative de l'indemnité au vu de devis provisoires chiffrés à 385 000USD ou à 800 000 USD, ce qui en établit la relativité totale et montre l'utilité de l'expertise; qu'il ne saurait en tout cas être sanctionné pour ne pas l'avoir fait; que le retard dans le dépôt du rapport d'expertise, manifestement lié à la liquidation judiciaire du débiteur saisi, ne peut davantage motiver une condamnation à dommages-intérêts, en
l'absence d'une faute clairement établie et imputable au tiers saisi; qu'ainsi l'assureur, en indiquant que la créance, dont il ne déniait pas le principe, n'était pas liquide et ne serait liquidée qu'après le dépôt du rapport d'expertise, ce qui était matériellement exact, a fait une réponse satisfactoire; Considérant par ailleurs qu'il n'est pas produit de lettre émanant de l'huissier instrumentaire demandant la communication des polices d'assurance; qu'aucun reproche de non justification ne peut donc être fait au tiers saisi, les justifications à apporter en application de l'article 44 précité étant à distinguer de celles dans le cadre de la procédure contentieuse; Considérant de plus qu'il n'est pas sans intérêt de constater que par lettre du 26 mai 1999, le tiers saisi a refusé le paiement d'un règlement que lui demandait la société BELAIR, renvoyant celle-ci à obtenir l'autorisation du créancier saisissant; qu'il est ainsi établi que le tiers saisi entendait bien assumer ses obligations résultant de la saisie pratiquée; Sur la prétendue dissimulation d'un sinistre, valant absence de réponse: Considérant encore que le créancier saisissant reproche au tiers saisi d'avoir dissimulé le sinistre du 5 août 1998 relatif à l'appareil Mac Douglas; Considérant qu'en réalité, par lettre du 14 juin 1999, l'assureur tiers saisi a répondu à l'huissier instrumentaire en ces termes: "notre expert vient de nous remettre son rapport définitif chiffrant le montant des réparations de l'avion MD 83 F-GKZL à la somme de 392 079,66USD. Nous attirons votre attention sur les conditions d'application de notre contrat d'assurance qui prévoit qu'au delà de 100 000 USD, l'indemnité d'assurance revient de droit à la société FINOVA CAPITAL CORPORATION qui a financé cet appareil. Cette société a d'ailleurs récemment fait valoir ses droits à indemnité sur l'avion. Nous tenons à vous informer que conformément à nos obligations, nous allons donc procéder au paiement de l'indemnité
d'assurance entre les mains de la société FINAVA CAPITAL CORPORATION"; que l'huissier instrumentaire n'a pas réagi à cette réponse; Considérant, par suite, qu'il n'y a pas eu dissimulation par le tiers saisi d'une obligation qu'il aurait eue à l'égard du débiteur saisi, puisque c'est à l'égard d'une autre personne que ce tiers saisi se considérait contractuellement obligé et qu'il n'avait pas dès lors à déclarer en sa qualité de tiers saisi ce lien d'obligation étranger à la saisie litigieuse; que si AEROPORT DE PARIS considère que le véritable créancier de l'indemnité d'assurance est non pas la société FINOVA mais son propre débiteur, il lui appartient d'abord d'exercer devant le juge compétent les actions prévues aux articles 1166 et 1167 du code civil, sans pouvoir faire juger ce litige par le juge de l'exécution ou la Cour statuant sur l'appel de sa décision, qui selon les dispositions de l'article L311-12-1 du Code de l'Organisation Judiciaire, ont compétence pour statuer sur les seules difficultés de fond relatives aux titres exécutoires et non sur celles soulevées dans le cadre d'une action contre le tiers saisi; Considérant qu'il convient donc de débouter l'ETABLISSEMENT PUBLIC AEROPORTS DE PARIS de sa demande de condamnation non seulement aux causes de la saisie, puisqu'une réponse a été donnée par le tiers saisi, mais encore à des dommages-intérêts, la réponse faite étant satisfactoire; Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge du tiers saisi ses frais irrépétibles d'appel, à hauteur de 15 000 F; PAR CES MOTIFS, Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions; Déboute l'ETABLISSEMENT PUBLIC AEROPORTS DE PARIS de ses demandes; Le condamne à payer à la société AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE la somme de 15 000F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile; Rejette toutes autres demandes des parties; Condamne l'ETABLISSEMENT PUBLIC AEROPORTS DE PARIS aux dépens
d'instance et d'appel, et dit que le montant de ces derniers pourra être recouvré directement par la SCP BOMMART-FORSTER, avoué, dans les conditions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. LE GREFFIER LE PRESIDENT