COUR D'APPEL DE PARIS 8è chambre, section B ARRET DU 25 JANVIER 2001 (N , 7 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 2000/10856 Pas de jonction Décision dont appel : Jugement rendu le 08/03/2000 par le JUGE DE L'EXECUTION DU TGI de PARIS. RG n : 2000/80458 (Juge :
Catherine AYACHE) Date ordonnance de clôture : 7 décembre 2000 Nature de la décision : contradictoire. Décision : INFIRMATION. APPELANT :
Monsieur X... Y... né le 8 septembre 1931 à SAINT RAPHAEL (Var), de nationalité française, demeurant 7 rue Jean Goujon 75008 PARIS représenté par Maître HUYGHE, avoué assisté de Maître Bernard JOUANNEAU, avocat, A 96, INTIMEE : S.C.P. ORNANO RENUCCI PEPRATX prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 19 rue Neuve Sainte Catherine BP 63 (13007) MARSEILLE représentée par Maître BLIN, avoué assistée de Maître Stéphanie ROCHE, avocat du barreau de MARSEILLE, substituant à l'audience Maître LAGARDE, avocat du barreau de PARIS, INTIMEE : CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 56 rue de Lille 75007 PARIS représentée par Maître BETTINGER, avouéassistée de Maître Agnès PROTAT, avocat, C 84. COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré : Président :
Monsieur ANQUETIL, Conseiller désigné pour présider cette Chambre par ordonnance du Premier Président en l'absence et par empêchement du Président de cette Chambre, Conseillers : Madame Z... et Madame A.... DEBATS : à l'audience publique du 7 décembre 2000 GREFFIER : Lors des débats et du prononcé de l'arrêt, Madame B.... ARRET :
contradictoire. Prononcé publiquement par Monsieur ANQUETIL, Président, qui a signé la minute avec Madame B..., Greffier. RAPPEL DE LA PROCEDURE ANTERIEURE: Par jugement contradictoire rendu le 8 mars 2000, le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de PARIS a déclaré Monsieur Y... X... irrecevable en ses
demandes formées contre la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX et contre la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS, tendant à obtenir le prononcé de la nullité et de la mainlevée de la saisie-attribution effectuée à l'encontre de celui-ci le 21 décembre 1999 par la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX entre ses propres mains; il a rejeté la demande de dommages-intérêts de la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX et condamné Y... X... à payer 10 000F au titre des frais irrépétibles; LA PROCEDURE DEVANT LA COUR: C'est de ce jugement que Y... X... est appelant; il reproche à la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX d'avoir procédé à la saisie litigieuse pour ne pas avoir à reverser les fonds à la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS en application de l'arrêt de la Cour d'appel d'AIX EN PROVENCE du 9 décembre 1999; il soutient avoir un intérêt à agir puisqu'il est partie à cet arrêt et peut donc veiller à sa bonne exécution; il soutient que la saisie litigieuse est nulle puisqu'il ne peut y avoir de compensation en présence d'une demande de restitution d'une chose dont le propriétaire a été injustement dépouillé; il ajoute que la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX n'est pas le débiteur du concluant mais celui de la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS qui, elle, est le débiteur du concluant; il conteste que la SCP puisse procéder à une saisie-attribution entre ses propres mains; il ajoute que la créance n'est pas liquide, au moins en ce qui concerne les intérêts dont il conteste le décompte opéré par le créancier saisissant; il rappelle qu'il n'appartient pas au juge de l'exécution de se faire juge de l'arrêt de la Cour d'appel d'AIX EN PROVENCE; il ajoute que les fonds dont s'agit étaient sa propriété avant la saisie jugée irrégulière, pratiquée par la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX; il soutient qu'il a intérêt à ce que les fonds retournent à la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS et à demander les intérêts qu'ils auraient pu lui procurer; il demande la nullité de la saisie du 21 décembre 1999, subsidiairement sa
mainlevée et sollicite 50 000F pour ses frais irrépétibles; La SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX intimée, rappelle le contentieux d'honoraires l'opposant à l'appelant, l'ordonnance de taxe obtenue et la saisie-attribution faite en exécution, le 13 février 1996, entre les mains de la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS; que la saisie n'ayant pas été contestée dans les délais légaux, est intervenu le paiement des sommes saisies; mais que l'appelant, jugeant ce paiement contestable, a engagé une action en restitution des sommes saisies-attribuées; qu'il a obtenu la condamnation de la concluante à restituer les sommes au tiers saisi, par arrêt du 9 décembre 1999 de la Cour d'Appel d'AIX EN PROVENCE; La SCP conclut au défaut d'intérêt à agir de l'appelant, l'arrêt susvisé ayant dénié à celui-ci tout droit sur les sommes saisies; elle conclut au bien fondé de la saisie litigieuse, prise dans l'ignorance de la motivation de l'arrêt du 9 décembre 1999, connue que le 24, et dans la crainte que la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS ait dû restituer les sommes saisies à l'appelant, totalement insolvable; faisant appel incident, elle demande 200 000F de dommages-intérêts pour atteinte à sa considération par la formulation d'accusations injustes et vexatoires, le prononcé d'une amende et 100 000F pour ses frais irrépétibles; La CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS intimée, précise qu'elle est tiers au litige et s'en remet à justice; elle demande 6 000F pour ses frais irrépétibles; SUR CE, LA COUR, Considérant qu'un débiteur saisi a un intérêt à contester la saisie attribution faite à son préjudice si cette saisie lui paraît nulle; qu'en l'espèce, le créancier saisissant lui-même reconnaît dans ses écritures, à propos du bien fondé de cette saisie, "qu'il peut paraître étrange de pratiquer une saisie-attribution entre ses propres mains pour éluder par avance les conséquences excessives de la mise à exécution d'une décision de justice définitive nonobstant le pourvoir engagé contre
elle"; que la question de la validité de la saisie peut donc être légitimement posée; que Y... X... est recevable en son action; que le jugement sera infirmé; Considérant que par ordonnance du 17 janvier 1996 du délégataire du Premier Président de la Cour d'Appel d'AIX EN PROVENCE, les honoraires et frais de la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX dûs par Y... X... ont été fixés à la somme de 933 020F HT et que ce dernier a été condamné à payer cette somme, avec intérêts au taux légal à compter de la décision; qu'en exécution, une saisie attribution a été opérée le 13 février 1996 par la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX entre les mains de la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS à l'encontre du débiteur pour la somme de 1 136 091,71F; que le tiers saisi a répondu d'une part détenir la somme de 1250 000F représentant une caution de contrôle judiciaire ordonnée le 12 août 1985 par un juge d'instruction de GRASSE; qu'il a d'autre part mentionné l'existence d'une précédente saisie-arrêt pour 305,00F; qu'il n'est pas discuté que cette saisie-attribution, dénoncée le 16 février 1996, n'a pas été contestée dans le délai de l'article 66 du Décret n°92-755 du 31 juillet 1992; qu'un certificat de non contestation a été délivré le 8 octobre 1996; Considérant par ailleurs que le 19 avril 1996, sur requête de Y... X..., le Procureur de la République de GRASSE avait autorisé la restitution du cautionnement de 1 250 000F versé à la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS, sous réserve de toute procédure conservatoire ou d'exécution; que par courrier du 22 avril 1996, Roland D'SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX, avocat de la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX, se prévalant de cette autorisation de déconsignation des sommes, qui avaient été remises le 16 août 1985 par débit du compte CARSAM, a sollicité de la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS le virement à son compte CARSAM du montant total des sommes consignées augmentées des intérêts courus, indiquant qu'il donnerait mainlevée
de la saisie du 13 février 1996 dès paiement; qu'une somme de 1 450 208,34F a ainsi été virée sur le compte de la CARSAM de la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX le 13 mai 1996; Considérant que, sur la demande en restitution des fonds de Y... X..., la Cour d'Appel d'AIX EN PROVENCE, par arrêt du 9 décembre 1999: - constatant que Me D'ORNANO, qui n'avait pas obtenu la déconsignation des fonds sur mandat de son client et qui n'avait pas la qualité de bailleur de fonds, ne pouvait légitimement récupérer les fonds en ces qualités, - constatant par ailleurs que le certificat de non contestation de la saisie du 13 février 1996 datait du 8 octobre 1996, alors que le paiement des sommes saisies avait été demandé dès le 22 avril 1996 et obtenu le 13 mai suivant, donc antérieurement à la délivrance dudit certificat, - après avoir fait les comptes et constaté qu'il restait un disponible de 94 776,12F revenant à Y... X..., a condamné la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX à restituer en deniers ou quittances à ce dernier ladite somme de 94 776, 12F avec intérêts de droit à compter du 4 septembre 1996, et à reverser la somme de 1 175 432,22F à la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS; Considérant qu'il résulte de cet arrêt que Y... X... n'a nullement contesté sa dette à l'encontre de la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX résultant de l'ordonnance de taxe du 17 janvier 1996, que la légitimité de la saisie attribution du 13 février 1996 n'a nullement été remise en cause; que la somme de 1 175 432,22F a donc été définitivement attribuée à la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX qui a droit à son paiement, et ne saurait revenir à Y... X..., ainsi du reste qu'il a été expressément relevé; mais que la Cour, constatant que les fonds saisis avaient été payés irrégulièrement à la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX, a seulement voulu sanctionner celle-ci pour son action illégitime et inadmissible de la part d'une société d'avocats qui ne pouvait ignorer les formes légales à respecter; que pour ce
faire, elle a voulu replacer les parties dans leur état antérieur à cette appréhension illégale des fonds et a donc condamné la SCP à les restituer au tiers saisi; que pour autant cette restitution n'interdit nullement un reversement ultérieur desdits fonds au créancier saisissant, cette fois dans les formes légales; qu'elle la rend au contraire possible; Considérant que les rapports entre les parties doivent donc s'analyser comme suit: - la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX est créancière de Y... X... au titre de sa créance d'honoraires pour laquelle elle a titre exécutoire; - elle n'est pas débitrice de la somme de 1 175 432,22F à l'encontre de Y... X... (puisque c'est à l'égard de la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS qu'elle l'est) et ne pouvait donc être tiers saisi; qu'elle ne pouvait donc pas saisir le 21 décembre 1999 entre ses propres mains une créance du débiteur saisi à son encontre, à hauteur de 1 125222,12F (en principal), qui n'existait pas; Considérant qu'il n'est pas prétendu par ailleurs par la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX aurait été encore, à la date de la saisie, débitrice de la somme de 94 776,12F qu'elle avait été condamnée également à payer à Y... X... en deniers ou quittances, somme que la saisie litigieuse aurait eu pour but de saisir; qu'ainsi la saisie du 21 décembre 1999 revient en fait pour le créancier saisissant à saisir la créance qu'il détient sur la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS en vertu de la saisie attribution du 13 février 1996 (c'est-à-dire les sommes saisies) et non une créance de son débiteur sur lui-même; que la saisie pratiquée est donc nulle; que les demandes de la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX seront par suite rejetées; Considérant que la saisie du 21 décembre 1999, quoique nulle, n'a pour autant causé aucun préjudice financier (hormis ses frais irrépétibles) à Y... X... qui n'a pas de droits sur les sommes en cause, ni en principal ni en intérêts; qu'il sera débouté de sa demande de dommages-intérêts;
qu'il a mis en cause inutilement la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS, totalement tiers à la saisie litigieuse; qu'il sera condamné à lui rembourser la somme de 6 000F pour ses frais irrépétibles, et les dépens afférents; qu'il n'est pas inéquitable par contre qu'il soit lui-même remboursé de ses frais irrépétibles par la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX à hauteur de la somme de 10 000F; PAR CES MOTIFS, Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions; Dit Y... X... recevable et bien fondé en sa contestation de la saisie attribution du 21 décembre 1999 opérée à son préjudice par la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX en ses propres mains; Dit nulle ladite saisie; Constate que pour autant Y... X... n'a aucun droit sur les fonds saisis, qui doivent être restitués à la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS en sa qualité de tiers saisi dans le cadre de la saisie antérieure du 13 février 1996, et ce en vertu d'un arrêt de la Cour d'appel d'AIX EN PROVENCE du 9 décembre 1999; Dit en conséquence qu'il n'y a lieu ni à restitution à Y... X... des sommes saisies le 21 décembre 1999 ni à dommages-intérêts; Met hors de cause la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS et condamne Y... X... à lui payer la somme de 6 000F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile; Condamne la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX à payer à Y... X... la somme de 10 000F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile; Rejette toutes autres demandes des parties; Condamne Y... X... aux dépens d'instance et d'appel engagés par la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS et dit que le montant de ces derniers pourra être recouvré directement par Me BETTINGER , avoué, dans les conditions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile; Condamne la SCP D'ORNANO, RENUCCI, PEPRATX aux autres dépens d'instance et d'appel et dit que le montant de ces derniers pourra être recouvré directement par Me HUYGHE, avoué, dans
les conditions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. LE GREFFIER LE PRESIDENT