COUR D'APPEL DE PARIS 5è chambre, section C ARRET DU 22 DECEMBRE 2000 (N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 1999/22093 Pas de jonction Décision dont appel : Arrêt rendu le 06/10/1999 par la COUR D'APPEL de PARIS 1è Ch.D sur contredit - RG n : 1999/03400 Date ordonnance de clôture : 12 Octobre 2000 Nature de la décision :
CONTRADICTOIRE Décision : RENVOI MISE EN ETAT APPELANT : S.A. KOMET prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 35-37, rue de la Bidauderie - BP 427 18100 VIERZON représentée par la SCP HARDOUIN avoué assistée de Maître PECH, Toque P372, Avocat au Barreau de PARIS INTIME : Société TRACTEL LTD prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 20 Queen Street West suite 3 300 TORONTO M5H 3R3 - CANADA représentée par la SCP TEYTAUD, avoué assistée de Maître GALLET, Toque P 458, Avocat au Barreau de PARIS, SCP LYONNET BIGOT ET ASSOCIES COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré, Président : Madame DESGRANGE X... : Monsieur BOUCHE X... : Monsieur SAVATIER Y... : A l'audience publique du 16 novembre 2000 GREFFIER : Lors des débats et lors du prononcé de l'arrêt Greffier : Madame Z..., ARRET :
Prononcé publiquement par Monsieur BOUCHE, X... le plus ancien, en remplacement de Madame DESGRANGE, Président empêchée, lequel a signé la minute avec Madame Z..., Greffier.
La société TRACTEL LTD a assigné, devant le tribunal de commerce de PARIS, la société KOMET, dont le siège est à VIERZON, pour voir constater la résiliation, aux torts exclusifs de cette dernière, de la convention du 15 avril 1991 par laquelle elle lui a consenti l'exclusivité en Amérique du Nord de la distribution des produits qu'elle fabrique, ainsi qu'en réparation du préjudice que lui a causé son refus de lui livrer ses matériels.
Par jugement du 6 janvier 1999, auquel il est renvoyé pour un plus ample exposé des faits, le tribunal de commerce de PARIS a rejeté l'exception d'incompétence territoriale soulevée par la société KOMET.
Par arrêt du 6 octobre 1999, la Cour a déclaré irrecevable le contredit formé par la société KOMET au motif que le tribunal s'étant prononcé sur la compétence et sur le fond, son jugement ne pouvait être attaqué que par la voie de l'appel.
La société KOMET a procédé comme il est prévu à l'article 91 du nouveau Code de procédure civile.
Dans ses dernières écritures déposées le 5 octobre 2000, auxquelles il est renvoyé, la société KOMET conclut à l'incompétence du tribunal de commerce de PARIS et à la compétence de celui de BOURGES en soutenant que la clause attributive de compétence contenue au contrat ne peut recevoir application aux motifs que la convention est caduque, que le contrat est nul, et qu'enfin, la clause ne peut être qualifiée de clause attributive de compétence et n'a pas été spécifiée de manière claire et suffisamment apparente. Elle sollicite la somme de 30 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Dans ses dernières écritures déposées le 4 septembre 2000, auxquelles
il est renvoyé, la société TRACTEL conclut à la confirmation du jugement en ce que le tribunal s'est déclaré compétent. Elle demande à la Cour d'examiner le fond après avoir mis en demeure les parties de conclure. Elle sollicite la somme de 30 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. SUR CE, LA COUR :
Considérant que le moyen tiré de la caducité du contrat n'est pas fondé; qu'en effet, la société TRACTEL démontre qu'elle a distribué des produits fabriqués par la société KOMET jusqu'à ce que celle-ci cesse d'honorer les commandes qu'elle lui passait en mai 1996, ce qui l'a privée de stock comme elle l'en a avertie ; qu'il ressort aussi des correspondances échangées en janvier 1994 que les deux parties faisaient référence dans leurs relations au contrat du 15 avril 1991, la société KOMET demandant alors à son partenaire d'étendre la gamme de ses produits, qu'elle proposait sur le marché américain, afin, écrivait-elle, de "nous mettre en conformité avec le contrat qui nous lie" ;
Considérant qu'aucun élément ne permet de retenir que les parties ont entendues que cessent leurs relations l'intuitu personae, qui aurait présidé à la conclusion de la convention, ayant disparu ; qu'au contraire, la lecture de la lettre adressée le 13 janvier 1994 par la société KOMET à la société TRACTEL démontre que l'intention de la première était de "renforcer sa collaboration" avec la seconde ; que, d'ailleurs, cette lettre expose les avantages de vendre à des "confrères", c'est à dire, dans la pensée de l'auteur, à des concurrents ; qu'enfin, il appartenait à la société KOMET de tirer les conséquences de la perte de confiance qu'elle allègue à la suite des prises de contrôle intervenues, soit en contraignant son cocontractant à exécuter, soit en mettant fin au contrat comme celui-ci le prévoyait ;
Que le moyen tiré de ce que le contrat n'a pas été transmis à la société TRACTEL LTD ne peut donc être accueilli ;
Considérant que la société KOMET entend faire juger que la clause de compétence ne saurait recevoir application à raison de la nullité du contrat qui contreviendrait aux dispositions de l'article 1er de la loi du 14 octobre 1943, la convention comportant une clause d'exclusivité à durée indéterminée, et à celles de l'article 1129 du Code civil, l'engagement d'exclusivité étant indéterminé puisqu'il porte sur "la gamme complète des produits" sans identification de ceux-ci au jour de la signature du contrat ;
Considérant, cependant, qu'il appartient au juge désigné par les parties dans leur convention de statuer sur la validité du contrat au regard des causes de nullité invoquées en l'espèce, aucun vice de leur consentement ou défaut de capacité n'étant allégué ;
Considérant, dés lors, que le moyen est sans portée sur le sort de l'exception d'incompétence dont est saisie la Cour ;
Considérant que la convention du 15 avril 1991, rédigée en anglais, stipule que : "in the event of disagreement between the parties in the execution of this agreement, the Tribunal de Commerce of PARIS will be the sole arbitrator." ; que les parties ne contestent pas la traduction en français proposée qui est la suivante : "en cas de désaccord entre les parties sur l'exécution du présent contrat, le Tribunal de Commerce de PARIS sera seul arbitre." ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient la société KOMET, le texte de cette clause est sans équivoque et manifeste clairement la volonté des parties de soumettre leurs différends sur l'exécution du contrat au tribunal de commerce de PARIS ; que l'emploi du terme arbitrator, qui fait référence à la notion d'amiable compositeur, ne suffit pas à mettre en doute la volonté des parties de saisir ce tribunal des litiges nés de l'execution du contrat selon la procédure
contentieuse ordinaire ; qu'en effet, la clause apparaît destinée à déterminer la juridiction étatique territorialement compétente pour connaître des litiges nés de ce contrat international et non la procédure à suivre devant celle-ci, malgré la maladresse de rédaction ;
Considérant que la société KOMET ne peut soutenir que le présent litige ne relèverait pas de l'exécution du contrat ; qu'en effet, la demande est fondée sur l'inexécution fautive de la convention ; que dès lors, la clause a vocation à s'appliquer à l'instance introduite pas la société TRACTEL ;
Considérant que c'est donc à bon droit que le tribunal de commerce de PARIS a retenu sa compétence ; que sa décision sera confirmée de ce chef ;
Considérant que, compte tenu de sa décision du 6 octobre 1999, et par application des articles 561 et suivants du nouveau Code de procédure civile, la Cour est saisie de l'entier litige, de sorte qu'il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le conseiller de la mise en état afin de permettre aux parties de conclure au fond ;
Considérant que l'équité commande de condamner la société KOMET à payer à la société TRACTEL la somme de 20 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Considérant qu'elle sera également condamnée aux dépens exposés pour qu'il soit statué sur l'exception d'incompétence ; PAR CES MOTIFS :
Confirme le jugement attaqué en ce qu'il a retenu la compétence du tribunal de commerce de PARIS,
Renvoie les parties devant le conseiller de la mise en état pour qu'elles concluent au fond,
Condamne la société KOMET à payer la somme de 20 000 F à la société TRACTEL LTD au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
La condamne aux dépens exposés pour qu'il soit statué sur l'exception d'incompétence, et dit que l'avoué concerné pourra les recouvrer comme il est dit à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. LE GREFFIER
LE PRESIDENT