COUR D'APPEL DE PARIS 1ère chambre, section H ARRET DU 28 NOVEMBRE 2000
(N , 10 pages) Numéro d'inscription au répertoire général :
2000/10294 Pas de jonction Décision dont recours : Décision n° 00-D-15 du Conseil de la concurrence en date du 03/05/2000 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : IRRECEVABILITE PARTIELLE ET REJET DEMANDERESSE AU RECOURS : Société CENTRALE DU PROTHESISTE DENTAIRE (CAP) prise en la personne de ses représentants légaux Ayant son siège 10, rue Ampère - 95500 GONESSE Assistée de Maître Marc LEVY et de Maître Olivier AUDRAS, Toque P 119, avocats au Barreau de PARIS, SCP LEVY etamp; ASSOCIES, 6, rue de Madrid - 75008 PARIS DEFENDERESSE AU RECOURS : Société IVOCLAR DIVISION FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux Ayant son siège Route de la Chapelle du Puits - 74410 SAINT-JORIOZ Assistée de Maître Y. MARTINET, Toque R 075, 64-66, avenue d'Iéna - 75016 PARIS EN PRESENCE : du Ministre de l'Economie, des Finances et du Budget, Représenté aux débats par Monsieur X..., muni d'un mandat régulier. COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré, Monsieur CAVARROC, Président Madame RIFFAULT, Conseiller Monsieur SAVATIER, Conseiller GREFFIER : Lors des débats et du prononcé de l'arrêt, Madame Y... MINISTERE Z... : Monsieur A..., Substitut Général Entendu en ses observations, DEBATS : A l'audience publique du 10 octobre 2000, ARRET : Prononcé publiquement le VINGT HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE, par Monsieur CAVARROC, Président, qui a signé la minute avec Madame Y..., greffier.
* * * Après avoir, à l'audience publique du 10 Octobre 2000, entendu les conseils des parties, les observations du Ministre chargé de l'Economie et celles du Ministère public ; Vu les mémoires, pièces et documents déposés au greffe à l'appui du recours; La Cour statue sur le recours en réformation formé par la société C.A.P.- La Centrale du
Prothésiste Dentaire, ci-après dénommée "la société CAP", à l'encontre de la décision n° 00-D-15 du 3 mai 2000 du Conseil de la Concurrence ; Les circonstances de fait et la procédure sont les suivantes : Etabli au Liechtenstein, le groupe Ivoclar-Vivadent est composé des sociétés Ivoclar A.G. et Vivadent Ets. Il fabrique des produits et fournitures pour dentistes et prothésistes qu'il commercialise par l'intermédiaire de 13 filiales établies dans plusieurs pays. La société IVOCLAR FRANCE est l'une de celles-ci. Elle commercialise en France les deux types de produits que fabrique le groupe sous les marques "Ivoclar" et "Vivadent". La première comprend les produits et fournitures destinés aux laboratoires de prothèses dentaires (dents artificielles, matériaux pour prises d'empreintes, matériaux en résine ou céramique pour couronnes, bridges, inlays et autres travaux de réparation, appareils de mise en oeuvre et fours céramiques), la seconde comprend des produits similaires destinés aux dentistes (amalgames, ciments, accessoires...). Le réseau de distribution de la société IVOCLAR FRANCE est composé de sociétés, dénommées "dépôts dentaires" (24 en 1995), avec lesquelles elle conclut un contrat type de distribution. A l'origine, il s'agissait d'un contrat par lequel, en contrepartie d'un approvisionnement exclusif, le dépôt avait le droit de distribuer les produits de la marque Ivoclar en France et dans les pays du Marché Commun mais s'interdisait "de pratiquer de quelque façon que ce soit la vente des produits ("Ivoclar") par correspondance". De par la présence de cette dernière clause, la validité de ce contrat-type était subordonnée à la mise en oeuvre des dispositions de l'article 85 OE3 du Traité de Rome en applications desquelles, par décision du 27 novembre 1985, la Commission européenne accordait à la société IVOCLAR FRANCE une exemption individuelle pour une durée de dix ans à compter du 1er février 1983.
En juillet 1992, la société IVOCLAR a engagé la procédure de renouvellement de cette exemption auprès de la Commission. Celle-ci ne s'est pas, à ce jour, prononcée mais a fait savoir, dans une communication du 15 septembre 1993, qu'elle "envisage(ait) de prendre une décision positive à l'égard de la demande d'Ivoclar de proroger l'exemption" et a invité les tiers concernés à lui adresser leurs observations. Y déférant par lettre du 10 décembre 1993, la société C.A.P. a indiqué à la Commission qu'elle estimait que les conditions qui avaient justifié l'exemption initiale n'étaient plus réunies, de sorte qu'elle s'opposait à la demande de renouvellement formée par la société IVOCLAR relativement à son contrat-type. Cette réponse de la société C.A.P. a été suivie, le 7 juillet 1995, d'une lettre à la Commission aux termes de laquelle elle déposait plainte devant cette instance en raison, d'une part du refus de la société IVOCLAR de lui vendre ses produits en tant que société de vente par correspondance et, d'autre part, d'un abus de la position dominante qu'elle détiendrait sur les marchés français et italien des dents artificielles, en ce qu'elle obligerait ses "dépôts" à respecter des prix recommandés. Entre temps, soit le 16 février 1995, la société C.A.P., conjointement avec la société DENTAL CENTER, aujourd'hui dissoute, avait saisi le Conseil de la Concurrence de pratiques, jugées par elles anticoncurentielles, de la société IVOCLAR FRANCE dans le secteur de la distribution de produits pour prothésistes dentaires, qui consistaient à exclure les sociétés de vente par correspondance de son réseau de distribution et à imposer à ses distributeurs les prix de revente au détail. Le 29 novembre 1995, la société IVOCLAR FRANCE a notifié à la Commission une modification de son contrat-type de distribution dans lequel sont supprimées, notamment, l'interdiction formelle de vente de ses produits par correspondance qui liait, jusqu'alors, les membres de son réseau
commercial et l'exclusivité territotiale dont ils bénéficiaient. Répondant à la société C.A.P. par lettre du 23 février 1999, la Commission l'a informée du rejet de sa demande. Au soutien de son refus, cette instance : - relève qu'IVOCLAR n'occupe pas une position dominante sur aucun des quatre marchés, -dents artificielles, matériaux pour prothèses, matériaux de revêtement, appareils ; - précise que, même en admettant l'existence d'une telle position, " il ne saurait être question d'un abus (...) du moment qu'IVOCLAR pratique sans discrimination un système de distribution qui est techniquement justifié" et qu'il n'est pas établi que cette société contraigne ses "dépôts" à "respecter les prix" ; - estime , notamment au vu de son nouveau contrat-type, qu'elle satisfait aux conditions exigées par la Cour de Justice en matière de système de distribution sélective et invite la société C.A.P. à s'adapter, à l'instar d'un autre groupe de vente, aux exigences imposées par IVOCLAR ; Telles sont les circonstances de fait et la procédure ayant précédé la notification, effectuée le 17 septembre 1999 à la société IVOCLAR FRANCE par le rapporteur désigné par le Conseil de la Concurrence, des griefs suivants : - sur le fondement de l'article 7 de l'ordonnance du ler décembre 1986 pour s'être entendue avec ses distributeurs pour interdire la vente par correspondance de ses produits et avoir ainsi exclu une forme de distribution et, donc, restreint la concurrence intramarque entre différentes formes de distribution, et sur le fondement de l'article 8 pour avoir ainsi abusé de la position dominante qu'elle occupe sur le marché des dents artificielles ; - sur le fondement de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 pour avoir diffusé un catalogue de prix utilisateurs, favorisant ainsi une uniformisation artificielle des marges de ses distributeurs, et sur le fondement de l'article 8 pour avoir abusé de la position dominante qu'elle occupe sur le marché des
dents artificielles ; Le Conseil de la Concurrence a, aux termes de la décision déférée : -sursis à statuer sur la licé'té de la clause du contrat de distribution Ivoclar en vigueur jusqu'au débaut de l'année 1999 qui interdit aux "dépôts dentaires" membres du réseau de vendre, de quelque façon que ce soit, les produits Ivoclar par correspondance, jusqu'à ce que la Commission européenne ait rendu sa décision sur la demande d'exemption individuelle présentée par la société IVOCLAR FRANCE, le 31 juillet 1992 ; -dit qu'il n'est pas établi que cette société a enfreint l'aricle 7 ou l'article 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 en diffusant des tarifs utilisateurs.
LA COUR,
Vu les conclusions de la société C.A.P. en date du 20 septembre 2000, aux
termes desquelles, poursuivant la réformation de la décision du Conseil, elle
prétend que:
- la décision de sursis à statuer n'est pas justifiée en l'espèce;
- la société IVOCLAR FRANCE détient une position dominante sur le marché
pertinent;
- cette société a enfreint les dispositions des articles 7 et 8 de
l'ordonnance du
1er décembre 1986, en excluant délibérément la vente par correspondance de
son réseau et en imposant, en fait, des prix de revente ;
et sollicite l'application des dispositions de l'article 700 du NCPC à son profit
à hauteur de la somme de 50.000F;
Vu les observations de la société IVOCLAR FRANCE du 7 août 2000 par
lesquelles elle conclut à la confirmation de la décision du Conseil dans
l'intégralité de ses dispositions et demande la condamnation de la société
C.A.P. à lui payer la somme de 40.000F en application de l'article 700 du
Nouveau Code de Procédure Civile;
Vu les observations du ministre chargé de l'économie en date du 1er
septembre 2000 tendant à l'irrecevabilité du recours formé par la société
C.A.P. en ce qu'il concerne la décision de surseoir à statuer et, sur le fond,
à la réformation de ladite décision;
Vu les écritures complémentaires de la société IVOCLAR FRANCE en
date du 18 septembre 2000 par lesquelles elle soulève notamment, dans les
mêmes termes que le ministre, l'irrecevabilité du recours en ce qui concerne
le sursis à statuer;
Vu les observations du Conseil de la Concurrence du 1er septembre 2000;
Ou' le Ministère Z... en ses observations orales et les requérants ayant eu
la possibilité de s'expliquer en dernier;
SUR CE :
Sur le sursis à statuer sur la licé'té de la clause du contrat de distribution
Ivoclar en vigueur jusqu'au début de l'année 1999 qui interdit aux
"dépôts
dentaires membres du réseau" de vendre, de quelque façon que ce soit, les
produits Ivoclar par correspondance:
Considérant que la société IVOCLAR FRANCE et le ministre estiment que le sursis à statuer prononcé par le Conseil constitue une mesure d'ordre
interne insusceptible de donner lieu à recours ;
Considérant que les dispositions des articles L 464-7 et L 464-8 du nouveau
Code de commerce reprenant celles des articles 12 et 15 de l'ordonnance du
1er décembre 1986 prévoient que les décisions du Conseil de la Concurrence
qui se prononcent sur des demandes de mesures conservatoires ou sur le fond,
-irrecevabilité, non-lieu ou injonctions, sanctions et mesures de publication, -
peuvent faire l'objet d'un recours en annulation ou en réformation devant
la Cour;
Que ne peut donner lieu à recours, dès lors qu'elle n'entre pas dans ces
catégories, une décision de sursis à statuer, mesure d'ordre interne qui
concerne l'instruction d'une affaire dont le Conseil ne se dessaisit pas; qu'en
l'espèce, la Cour déclarera donc irrecevable le recours formé par la société
C.A.P. du chef de la mesure de sursis à statuer sur la licé'té de la clause
relative à la vente par correspondance;
AU FOND:
Sur la violation des dispositions de l'article L 420-2 du nouveau Code de
commerce reprenant celles de l'article 8 de l'ordonnance du 1er
décembre
1986:
Considérant que la mise en oeuvre de ce texte, qui réprime l'abus de position
dominante, est subordonnée à la détermination préalable du marché sur lequel
la société IVOCLAR FRANCE exercerait un pouvoir de domination; que le Conseil a estimé, en l'espèce, que la confrontation de l'offre des fabricants et
de la demande des distributeurs des produits Ivoclar (dents artificielles,
produits pour prothèses, produits de revêtement, appareils à confectionner les
prothèses) n'était pas limitée au seul territoire national et que, dès lors, le
territoire géographique concerné "(devait) être considéré comme s'étendant
au moins à celui de l'Union européenne";
Considérant que la société C.A.P., ainsi que le ministre, contestent cette
analyse et soutiennent qu'il existe, sur le marché de la dent artificielle, une
demande spécifiquement nationale, et ce pour trois raisons essentielles tenant
à ce que:
- la demande, pour ces produits relevant du secteur médical, dépend largement
des politiques nationales en matière de santé,
- l'offre est de dimension presque exclusivement nationale et même régionale,
-"les particularités morphologiques et colorimétriques des dents naturelles des
populations latines font obstacle à une globalisation du marché des dents
artificielles";
Mais considérant que si
Mais considérant que si la politique médicale d'un Etat membre peut influencer
l'évolution des ventes de tel ou tel produit à l'intérieur d'un Etat, elle
n'entraîne pas pour autant, "ipso facto", dans un autre Etat soumis à une
politique de santé différente, une modification de la nature de la demande
portant sur ce même produit; qu'à cet égard, les affirmations de la société
requérante selon lesquelles "les variations quantitatives de la demande obligent
les distributeurs à adapter leurs politiques commerciale et tarifaire, avec pour
conséquence un bouleversement de leur politique de distribution et notamment
quant aux critères qualitatifs de l'offre" ne sont en aucune façon démontrées;
Considérant, par ailleurs, qu'il résulte des constatations du Conseil de la
Concurrence et de la Commission que les fabricants des produits concernés
sont principalement situés hors de France; que le rapporteur du Conseil a
constaté, en page 14 de la notification des griefs, que "les importations
parallèles ont également pris de l'importance" et que "certains distributeurs
ne se fournissent plus auprès des filiales de fabricants ou des importateurs
exclusifs mais importent directement des produits";
Que le même rapporteur a également relevé, en page 21 de la notification des
griefs, que les distributeurs par correspondance tel que la société C.A.P.
s'approvisionnent directement à l'étranger; que l'ensemble de ces
constatations, qui revêtent un caractère incontestable, dément les affirmations
de la requérante et du ministre selon lesquelles l'offre serait de dimension
presque exclusivement nationale et même régionale;
Considérant, dés lors, que la société C.A.P. et le ministre ne démontrent pas
l'existence d'une quelconque spécificité du marché français des produits
concernés qui pourrait être susceptible de remettre en cause la définition du
marché de référence sur lequel sont confrontées l'offre et la demande des
produits concernés, telle que donnée, par de justes motifs que la Cour adopte,
par le Conseil de la Concurrence dans la décision déférée;
Considérant qu'il résulte, par ailleurs, des constatations effectuées par le
Conseil et non contestées par la société C.A.P. que la part détenue par
IVOCLAR FRANCE sur le marché de référence n'est pas de nature à lui
conférer un pouvoir de domination sur ce marché;
Que, dans ces conditions, la demande tendant à faire juger que la société
IVOCLAR FRANCE détiendrait et aurait abusé d'une position dominante sur
le marché français devient sans objet ; que la Cour rejettera le recours formé
de ce chef;
Sur la violation des dispositions de l'article L 420-1 du nouveau Code de
commerce reprenant celles de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre
1986:
Considérant que la société IVOCLAR FRANCE diffuse à ses distributeurs un
"tarif de gros HTVA", dans lequel figurent tous les produits de la gamme
Ivoclar, avec un prix de gros HTVA et un prix de détail TTC; qu'elle diffuse
aussi un catalogue, intitulé "prix de vente utilisateurs", qui ne reprend que les
prix de détail, ainsi qu'un tarif utilisateur où ne figurent que les dents, intitulé
"Dents: prix de vente utilisateurs", qui indique des prix à l'unité et des prix
dégressifs en fonction des quantités achetées;
Que la requérante prétend que la diffusion de ces tarifs constituent, - bien
qu'ils soient assortis d'une mention précisant que les prix indiqués ne le sont
qu"à titre indicatif ",- une pression sur les distributeurs; qu'elle allègue, à cet
égard, des interventions directes de la société IVOCLAR FRANCE tant auprès
des distributeurs que des utilisateurs finaux, pour imposer des prix, concourant
ainsi à faire obstacle à leur fixation par le libre jeu d'un marché
normalement
concurrentiel et à réaliser leur uniformisation dans le réseau de distribution de
la marque;
Considérant que la société C.A.P. reproche à la décision déférée de n'avoir
retenu, parmi les déclarations des responsables des dépôts recueillies lors de
l'enquête effectuée par les agents de la Direction Générale de la Concurrence,
de la Consommation et de la Répression des Fraudes (D.G.C.C.R.F.), que
celles qui attestent d'une libre détermination des prix de détail; qu'elle fait
également valoir que de telles déclarations doivent s'apprécier en fonction "du
fait que ces distributeurs agréés ont quelques craintes à faire état des
éventuelles pressions qu'ils auraient pu subir, de peur de perdre un
agrément
si difficile à obtenir";
Mais considérant que la preuve de l'entrave à la concurrence ainsi alléguée ne
saurait résulter que d'un faisceau d'indices constituant des présomptions
graves, précises et concordantes;
Considérant que le Conseil a cité quatre déclarations, recueillies lors de
l'enquête, faisant état de pressions ou tout au moins d'une présence appuyée
des agents commerciaux d'IVOCLAR auprès de certains distributeurs qui se
seraient démarqués trop nettement des prix conseillés; qu'il a, à juste titre,
écarté celles de Mmes B... et ROLLAND comme étant trop imprécises, de même que celle de M.ARBOUIN, ancien représentant de la société
Omnium Dentaire à Bordeaux, qui ne se réfère à aucun élément concret; Qu'après avoir relevé que d'autres distributeurs se sont plaints que des
membres du réseau, avec lesquels ils pouvaient être en concurrence,
pratiquaient des prix jugés trop bas et ont sollicité l'intervention du fabricant,
il a également indiqué qu'aucun élément du dossier n'établissait que la société
IVOCLAR FRANCE aurait accédé à leur demande et effectivement fait
pression sur un distributeur pour qu'il remonte ses prix;
Qu'à cet égard, la Cour constate que, les déclarations de MM. C..., LEGLISE et HOUALET, figurant au rapport d'enquête de la D.G.C.C.R.F.,
sont particulièrement précises en ce qu'elles excluent catégoriquement toute
intervention sur les prix des produits Ivoclar et caractérisent l'existence d'une
"concurrence féroce entre les concessionnaires " et d'une "guerre des prix";
Que, de même, les déclarations recueillies font apparaître que les revendeurs
demeurent libres de pratiquer ou non les remises conseillées par IVOCLAR
sans jamais consulter cette dernière;
Considérant également que, s'appuyant sur les résultats d' une enquête
impliquant nécessairement le recours à une méthode fondée sur l'examen
d'échantillons, - méthode dont la requérante se borne à contester la valeur-,
le Conseil a justement observé que, pour les cinq dépôts suivants:
Henry
Schein, Perrigot, FDO, FDL et OCDF, les pourcentages de commandes des
mutuelles s'écartant du prix conseillé étaient, respectivement de
98%,58%,21% 80% et 64%;
Que le Conseil a aussi examiné le comportement de la société IVOCLAR FRANCE dans ses rapports avec les acheteurs dits "finaux", qu'ils soient
prothésistes dentaires ou chirurgiens-dentistes; qu'il fait état, dans sa décision,
des résultats de l'enquête effectuée à partir des factures adressées à ces
acheteurs; que la Cour constate que, bien que ces résultats s'écartent des
précédents, ils n'attestent pas, pour autant, et de manière certaine, de
l'existence de pressions imputées à la société IVOCLAR FRANCE en vue de
réaliser une harmonisation des prix de revente dans son réseau;
Considérant enfin qu'il n'est pas démontré que la décision prise par IVOCLAR
FRANCE de cesser l'octroi de remises automatiques sur objectifs à partir de
1996 ait eu pour objet, ou pour effet, d'uniformiser les prix de revente
pratiqués par les distributeurs; que la critique formée de ce chef par le ministre
ne saurait prospérer;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'est pas établi que la
diffusion des
tarifs utilisateurs incriminée soit constitutive d'une entente; que
le recours formé de ce chef sera rejeté;
Sur la demande formée au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure
Civile
Considérant que l'équité ne commande pas de faire application des dispositions
de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile; que la demande formée
à ce titre ne sera pas accueillie;
PAR CES MOTIFS:
- Déclare irrecevable le recours formé contre la décision du Conseil de la
Concurrence
n°00-D-15 du 3 mai 2000 en ce qu'elle a sursis à statuer sur la
licé'té de la clause du contrat de distribution Ivoclar en vigueur jusqu'au début
de l'année 1999 qui interdit
aux dépôts dentaires membres du réseau de
vendre, de quelque façon que ce soit, les produits Ivoclar par correspondance,
jusqu'à ce que la Commission européenne ait rendu sa décision sur la demande
d'exemption individuelle présentée par la société Ivoclar le 31
juillet 1992;
- Le rejette pour le surplus;
- Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Nouveau
Code de Procédure Civile
- Condamne la requérante aux dépens.
LE GREFFIER
LE PRESIDENT