COUR D'APPEL DE PARIS 24è chambre, section D ARRÊT DU 4 MAI 2000
(N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 1999/18755 Pas de jonction Décision dont appel : Ordonnance rendue le 28/06/1999 par le JUGE AFF. FAMILIALES TGI de FONTAINEBLEAU RG n : 99/00388 Date ordonnance de clôture : 9 Mars 2000 Nature de la décision :
X... Décision : ANNULATION APPELANT : Monsieur Y... Z... ... par la SCP TAZE-BERNARD-BELFAYOL-BROQUET, avoué assisté de Maître ASSOULINE Armand, Avocat au Barreau de FONTAINEBLEAU, INTIMÉE : Madame A... Laurence Janine B... épouse Y... ... par Maître BETTINGER, avoué assistée de Maître BERNEY Anne, Avocat au Barreau de FONTAINEBLEAU, AIDE JURIDICTIONNELLE : PARTIELLE 15 % du 04/10/1999 n 9930195 COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré : Madame BRONGNIART, Conseiller faisant fonction de Président (ordonnance du 21 avril 1997) Madame BERNARD, Conseiller Madame DAVID, Conseiller DÉBATS : A l'audience non publique du 16 Mars 2000 GREFFIER : Lors des débats et du prononcé de l'arrêt Madame C... ARRÊT X... : Prononcé publiquement par Madame BRONGNIART, Conseiller faisant fonction de Président, laquelle a signé la minute avec Madame C..., Greffier. Z... Y... et Laurence A... se sont mariés le 20 mars 1982 sans contrat préalable ; trois enfants sont issus de cette union :
Ludivine née le 1er septembre 1982, Sébastien né le 16 août 1985 et Océane née le 22 novembre 1989. Monsieur Z... Y... a interjeté appel de l'ordonnance de non-conciliation du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Fontainebleau rendue le 28 juin 1999 qui, sur la requête en divorce de Madame Laurence A... fondée sur les articles 233 à 236 du code civil, a notamment : - constaté le double aveu par les époux de faits qui
rendent intolérables le maintien de la vie commune, - autorisé les époux à résider séparément, - fait défense à chacun des époux de troubler son conjoint dans sa résidence, sinon les autorise à faire cesser le trouble, à s'opposer à l'introduction du conjoint, et le cas échéant, à le faire expulser même avec l'assistance de la force publique, - attribué à titre gratuit à l'épouse la jouissance du logement familial, à charge pour elle d'en assumer les crédits soit 4.200 francs par mois, - constaté le désaccord des époux sur la répartition du mobilier, - attribué à chacun des époux un véhicule, - dit que l'autorité parentale sera exercée en commun, avec résidence habituelle chez la mère, - organisé dans son dispositif son droit de visite et d'hébergement en précisant que ce droit ne s'exercera pas contre la volonté des enfants, - fixé à 800 francs par mois et par enfant sa part contributive à leur entretien et à leur éducation. Cette ordonnance a été signifiée à la personne de Monsieur Z... Y... le 5 août 1999. L'appel interjeté le 13 août 1999 a été enrôlé sur demande du 13 septembre 1999. Monsieur Z... Y... a conclu au visa de l'article 915 du nouveau code de procédure civile le 29 octobre 1999. Par bulletin du 21 janvier 2000, l'affaire a été fixée pour clôture au 17 février 2000 et plaidoiries au 16 mars 2000. Madame Laurence A... qui a constitué avoué le 8 septembre 1999, a répliqué pour le première fois le 16 février 2000. PRÉTENTIONS DES PARTIES Monsieur Z... Y... demande, dans des dernières conclusions du 1er mars 2000, à la cour de : - dire que les agissements de Madame Laurence A... ont vicié le consentement de son mari à un divorce amiable et accepté, - constater le rétractation de son aveu judiciaire, - déclarer nulle et de nul effet l'ordonnance de non-conciliation du 28 juin 1999, - condamner Madame Laurence A... à lui verser une indemnité de 20.000 francs à titre de dommages et intérêts sur le
fondement des articles 1382 et suivants du code civil en réparation du préjudice moral, subsidiairement, - dire qu'il exercera un droit de visite et d'hébergement usuel sans aucune restriction, - condamner Madame Laurence A... à lui verser une indemnité de 8.500 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - la débouter de toutes ses demandes, - de la condamner aux entiers dépens d'appel avec distraction au profit de l'avoué concerné dans les conditions de l'article 699 du même code, en faisant principalement valoir qu'il avait déposé son mémoire d'acceptation en soulignant son accord sur les mesures provisoires sollicitées par son époux sauf à en préciser certaines, qu'à l'audience du 21 juin 1999, Madame Laurence A... s'est opposé à un droit de visite et d'hébergement normal à son profit alors que seul le montant de la contribution pour les enfants devait être discuté, qu'elle a déposé au mépris du principe du contradictoire une note en délibéré à laquelle il a répondu sans que le juge y fasse droit, que les manoeuvres dolosives de l'intimée tendent à détruire les liens affectifs et sacrés qui unissent un père de famille à ses enfants légitimes. Madame Laurence A... dans des dernières écritures du 16 février 2000 demande à la cour : - de déclarer Monsieur Z... Y... mal fondé en son appel sur le fondement des articles 233 et suivants du code civil, - de dire qu'il n'a subi aucun vice du consentement, - confirmer l'ordonnance de non-conciliation en toutes ses dispositions, subsidiairement - dire que cette rétractation revêt un caractère fautif, - condamner Monsieur Z... Y... à lui verser une indemnité de 20.000 francs à titre de dommages et intérêts sur le fondement des articles 1382 et suivants du code civil, - condamner Monsieur Z... Y... à lui verser une indemnité de 15.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - le condamner aux entiers dépens d'appel qui
seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle, en soutenant principalement que Monsieur Z... Y... exerce dans des conditions parfaitement régulières un droit de visite et d'hébergement auquel la mère ne s'est jamais opposé, que Monsieur Z... Y... confond manifestement le principe du divorce et les conséquences accessoires au divorce lui-mêmes, que le vice du consentement étant inexistant la rétractation est fautive. La cour se réfère pour un plus ample exposé des faits, des moyens et prétentions des parties notamment quant aux mesures provisoires à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel. CECI EXPOSE, LA COUR
Considérant que la recevabilité de l'appel n'est pas discutée ; que l'ordonnance de non-conciliation a été signifié le 5 août 1999, l'appel ayant été interjeté le 13 août 1999 ; que les pièces du dossier ne font apparaître aucune fin de non recevoir susceptible d'être relevée d'office ; que l'appel sera déclaré recevable ;
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 783 du nouveau code de procédure civile, aucune conclusion ne peut être déposée ni produite aux débats après l'ordonnance de clôture à peine d'irrecevabilité prononcée d'office ; que seront écartées des débats les conclusions de Madame Laurence A... signifiées le 14 mars 2000 soit postérieurement à l'ordonnance de clôture rendue le 9 mars 2000 ;
Considérant que le fondement de la requête en divorce présentée par Madame Laurence A..., sur les articles 233 à 236 du code civil, n'est pas contesté ;
Que le divorce sur demande acceptée est une forme du divorce par consentement mutuel ; qu'il constitue en effet le deuxième paragraphe de la première section "du divorce par consentement mutuel" du chapitre consacré aux cas de divorce ;
Que, tout comme la demande en divorce par consentement mutuel peut ne pas être renouvelée, l'aveu des époux peut être librement rétracté par la voie de l'appel tant que l'ordonnance du juge qui le constate n'est pas devenue définitive de sorte qu'il n'y a pas lieu de suivre les parties dans leur argumentaire respectif relatif à l'existence ou à l'inexistence d'un vice du consentement ;
Qu'en conséquence, Monsieur Z... Y... peut librement rétracté, par la voie de l'appel, l'aveu contenu dans sa déclaration d'acceptation en date du 28 avril 1999 notifiée le 29 avril 1999 et l'ordonnance de non-conciliation du 28 juin 1999 doit être déclarée non avenue ; que la demande de dommages et intérêts formée par Madame Laurence A... n'est donc pas fondée ;
Considérant que la demande de dommages et intérêts de Monsieur Z... Y... se fonde sur le comportement fautif de Madame Laurence A... ;
Considérant que Monsieur Z... Y... est mal fondé à invoquer les dispositions de l'article 1130 du nouveau code de procédure civile pour soutenir que Madame Laurence A... ne pouvait pas remettre en cause les mesures provisoires contenues dans sa requête initiale dès lors qu'il les avait acceptées par son mémoire et qu'elle doit en supporter la responsabilité ;
Qu'en effet, par application des articles 233 et 234 du code civil, le mémoire et son acceptation ne portent que sur "un ensemble de faits, procédant de l'un et de l'autre, qui rendent intolérable le maintien de la vie commune" ; que la déclaration d'acceptation n'a pas d'autre objet que la reconnaissance des faits exposés dans le mémoire de l'époux demandeur sauf à en proposer une version personnelle ; qu'elle ne porte pas sur les mesures provisoires ; qu'aucune conséquence juridique n'est attachée à la mention dans cette déclaration de l'acceptation des mesures provisoires
sollicitées par l'époux demandeur ;
Que d'ailleurs après avoir procédé à la tentative de conciliation dans les conditions de l'article 1134, le juge aux affaires familiales prescrit, s'il y a lieu, tout ou partie des mesures provisoires prévues aux articles 255 et 256 du code civil (article 1135 du nouveau code de procédure civile) ; qu'ainsi il se prononce sur les modalités du droit de visite et d'hébergement du parent chez lequel les enfants ne résident pas habituellement ; que si, pour ce faire, il peut prendre en considération les arrangements que les époux ont déjà conclus, il exerce un contrôle sur leur conformité à l'intérêt des enfants ;
Que l'époux demandeur n'est pas juridiquement lié par les mesures provisoires telles que demandées dans la requête initiale en divorce ; qu'il importe peu que cette discussion sur les mesures provisoires résulte d'une note en délibéré dès lors que le magistrat l'accepte et que l'autre partie a pu y répondre ce que Monsieur Z... Y... reconnaît en l'espèce ;
Considérant que Monsieur Z... Y... semble encore fonder sa demande de dommages et intérêts sur la cruauté mentale de son épouse qui lui aurait refusé son numéro de téléphone, qui a changé les serrures de la maison sans l'en aviser préalablement et qui tente par des manoeuvres dolosives de détruire les liens affectifs qui l'unissent aux enfants ;
Que le domicile conjugal ayant été attribué à Madame Laurence A... par l'ordonnance de non-conciliation avec défense à Monsieur Z... Y... de la troubler en sa résidence, Madame Laurence A... pouvait prendre toute mesure de nature à assurer la protection de sa vie privée ; que s'agissant des relations du père avec les enfants, force est de constater que le juge aux affaires familiales a "dit que ce droit ne s'exercera pas contre la volonté
des enfants" et qu'en conséquence, Monsieur Z... Y... ne peut faire aucune reproche à Madame Laurence A... quant au refus opposé par les enfants tel que relaté dans les attestations qu'il produit ;
Que Monsieur Z... Y... sera débouté de sa demande de dommages et intérêts ;
Considérant que compte tenu de la nature familial du litige, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Considérant que l'appel ne tendant pas à la réformation de l'ordonnance de non-conciliation mais à la libre rétractation par Monsieur Z... Y... de son aveu, les dépens d'appel seront mis à sa charge ; PAR CES MOTIFS, DÉCLARE l'appel recevable, ECARTE des débats les conclusions signifiées par Madame Laurence A... le 14 mars 2000, CONSTATE la rétractation de l'aveu de Monsieur Z... Y..., DÉCLARE non avenue l'ordonnance entreprise et inexistante la procédure de divorce, DÉBOUTE les parties de toutes leurs autres demandes plus amples ou contraires, CONDAMNE Monsieur Z... Y... aux dépens et dit qu'ils seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle. LE GREFFIER,
LE PRÉSIDENT,