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24/03/2000 | FRANCE | N°1997/16176

France | France, Cour d'appel de Paris, 24 mars 2000, 1997/16176


COUR D'APPEL DE PARIS 5è chambre, section C ARRET DU 24 MARS 2000

(N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 1997/16176 Pas de jonction Décision dont appel : Jugement rendu le 09/05/1997 par le TRIBUNAL DE COMMERCE de PARIS 5/è Ch. RG n : 1996/89867 Date ordonnance de clôture : 7 Janvier 2000 Nature de la décision :

CONTRADICTOIRE Décision : INFIRMATION APPELANT : S.A. SENIM EQUIPEMENT DE NIMES SUD prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège Hotel de Ville Place de la Mairie 30000 NIMES représentée par la SCP VALDELIEVRE-GARNIER,

avoué assistée de Maître SALESJEAN-EDMOND, Avocat au Barreau de MONTPELLI...

COUR D'APPEL DE PARIS 5è chambre, section C ARRET DU 24 MARS 2000

(N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 1997/16176 Pas de jonction Décision dont appel : Jugement rendu le 09/05/1997 par le TRIBUNAL DE COMMERCE de PARIS 5/è Ch. RG n : 1996/89867 Date ordonnance de clôture : 7 Janvier 2000 Nature de la décision :

CONTRADICTOIRE Décision : INFIRMATION APPELANT : S.A. SENIM EQUIPEMENT DE NIMES SUD prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège Hotel de Ville Place de la Mairie 30000 NIMES représentée par la SCP VALDELIEVRE-GARNIER, avoué assistée de Maître SALESJEAN-EDMOND, Avocat au Barreau de MONTPELLIER, JE SALES SELARL INTIMES : MAITRE X... en qualités de liquidateur judiciaire de la SARL LE CHEVAL BLANC 211 Boulevard Vincent Auriol 75011 PARIS MAITRE Y... en qualités de liquidateur judiciaire de la SARL LE CHEVAL BLANC 11 bis rue Roussy 30000 NIMES représentés par la SCP VARIN-PETIT, avoué assistés de Maître GARCIA, Toque B283, Avocat au Barreau de PARIS, CABINET PETRESCHI COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré, Président : Madame DESGRANGE Conseiller : Monsieur BOUCHE Conseiller : Monsieur SAVATIER DEBATS : A l'audience publique du 11 février 2000 GREFFIER : Lors des débats et lors du prononcé de l'arrêt Greffier : Madame BAUDUIN, ARRET :

Prononcé publiquement par Madame le Président DESGRANGE, qui a signé la minute avec Madame BAUDUIN, Greffier.

Le 30 janvier 1990 la société SOCIETE D'EQUIPEMENT DE NIMES SUD (la SENIM) a acquis un fonds de commerce de hôtel, restaurant, salon de thé, connu sous le nom de "Hôtel du Cheval Blanc et des Arènes". Le même jour, le propriétaire des murs lui a consenti un bail commercial. Elle a entrepris des travaux importants afin de créer un ensemble hôtelier de grand luxe. Leur coût a dépassé 54 millions de francs.

Le 25 juin 1991, la SENIM a conclu avec une société COMPAGNIE FINANCIERE DU TRIANGLE une convention par laquelle elle promettait de lui céder, ou à toute personne morale qu'elle se substituerait, le fonds de commerce "anciennement connu sous le nom "Hôtel du Cheval Blanc et des Arènes", cette société s'engageant à se porter acquéreur au plus tard le 31 juillet 1991. La SENIM s'engageait à consentir une sous-location commerciale des locaux à l'acquéreur du fonds.

Il était convenu que les promesses de vente et d'achat étaient sous la condition suspensive qu'un homme de l'art assure les parties de ce que cette sous location ne serait pas considérée par l'administration fiscale comme une cession pure et simple du droit au bail et que le prix fixé pour la cession du fonds ne présenterait pas de risque de redressement par l'administration.

Cette condition n'a pu être remplie, de sorte que cette convention est demeurée sans effet.

Pourtant, la société LE CHEVAL BLANC, qui avait été constituée le 30 juillet 1991 pour exploiter l'établissement dans le cadre de la faculté de substitution appartenant à la COMPAGNIE FINANCIERE DU TRIANGLE, est entrée dans les lieux. Elle y a exercé son activité jusqu'à ce que le tribunal de commerce de PARIS ouvre une procédure simplifiée de redressement judiciaire à son encontre et prononce sa liquidation par un même jugement du 10 février 1994.

Les liquidateurs judiciaires, Maîtres X... et Y..., invoquant une convention orale de location gérance, ont assigné la SENIM sur le fondement de l'article 8 de la loi du 20 mars 1956 pour la voir condamner à supporter le passif de la société LE CHEVAL BLANC.

Par jugement du 9 mai 1997, le tribunal de commerce de PARIS a fait droit à cette demande et à condamné la SENIM à payer aux liquidateurs, es qualités, la somme de 17 568 877,25 F, montant du passif déclaré, outre celle de 20 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

A l'appui de son appel, la SENIM fait valoir dans ses dernières écritures, en date du 26 novembre 1999, auxquelles il est renvoyé, qu'il n'y a pas eu d'accord entre les parties pour conclure une location gérance. Elle conteste avoir engagé sa responsabilité sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, contrairement à ce que le tribunal a retenu, faute d'un lien de causalité entre l'absence de contrat et les résultats de l'exploitation.

La SENIM conclut à l'infirmation du jugement et au rejet de toutes les demandes des liquidateurs et demande que ceux-ci, es qualités soient condamnés à lui verser la somme de 200 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Maîtres X... et Y..., agissant es qualités de liquidateur de la société LE CHEVAL BLANC, concluent, dans leurs dernières écritures en date du 21 septembre 1999, auxquelles il est renvoyé, à la confirmation du jugement et à la condamnation de la SENIM à leur verser la somme de 50 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Ils soutiennent que les relations entre les parties, bien que non régularisées par écrit, s'analysent en terme de location gérance d'un fonds de commerce qui existait et invoquent l'opposabilité d'un arrêt de la Cour de cassation du 23 mars 1999 qui a statué dans l'instance

opposant l'URSSAF, créancier de la société LE CHEVAL BLANC, et la SENIM sur le même fondement. SUR CE, LA COUR :

Considérant que la Cour n'est pas liée par la décision invoquée par les intimés qui n'est pas intervenue dans la même instance et entre les mêmes parties ;

Considérant qu'il est constant, et reconnu dans leurs écritures par les intimés, qu'aucun acte n'ayant été régularisé entre les parties, la société LE CHEVAL BLANC a exploité le fonds en l'absence de tout titre ; qu'il apparaît, en effet, que la prise de possession de celle-ci s'est faite au regard d'une promesse de vente qui est devenue caduque, faute que la condition prévue soit remplie ; qu'ainsi, la société LE CHEVAL BLANC s'est trouvée exploitante sans que la SENIM l'ait voulu puisqu'elle l'avait autorisée à prendre possession uniquement parce qu'elle avait promis de l'acquérir ;

Considérant qu'il appartient aux liquidateurs de la société LE CHEVAL BLANC d'établir que, comme ils le soutiennent pour s'en prévaloir, un accord est intervenu par lequel la SENIM a concédé la location du fonds à la société LE CHEVAL BLANC qui l'exploitait à ses risques et périls ;

Considérant qu'au delà de la situation de fait né de ce que la société était entrée dans les lieux et avait commencé son exploitation, ils ne produisent aucune pièce de nature à conforter leurs affirmations, qu'en particulier, ils ne produisent pas le projet d'acte de location gérance qui, selon eux, avait été établi ; Considérant, au contraire, qu'il apparaît qu'un tel contrat ne pouvait être valablement passé, puisqu'il ressort de l'acte d'acquisition du fonds par la SENIM le 30 janvier 1990 que celle-ci ne remplissait pas les délais prévus à l'article 4 de la loi du 20 mars 1956, puisqu'elle avait été constituée seulement le 3 juillet

1986, et qu'elle n'avait pu exploiter ce fonds pendant deux années au moins ; qu'en effet il n'est pas contesté que l'entrée dans les lieux et le début de l'exploitation par la société LE CHEVAL BLANC est antérieure au 30 janvier 1992 ; que cette obstacle juridique ne pouvait échapper à la SENIM, d'autant que, selon le rapport de M. Z..., expert commis par les liquidateurs, le projet d'acte de location gérance avait été établi par un notaire et faisait référence à ces conditions de délai, de sorte qu'elle était nécessairement éclairée sur le risque de nullité d'un tel contrat ;

Considérant, en outre, qu'il ne ressort d'aucune pièce émanant de la SENIM, que celle-ci a reconnu avoir consenti une telle location ; qu'en particulier, dans sa requête en revendication du fonds, adressée au juge commissaire de la procédure de liquidation, si elle indique, après avoir rappelé que la société LE CHEVAL BLANC avait été choisie pour acheter le fonds, ce qu'elle n'a pu faire, "qu'il a par la suite été prévu par SENIM de lui louer à titre de location gérance ledit fonds", elle ajoute aussitôt "qu'aucune de ces conventions n'a pu être formalisée" ;

Considérant que les références faites par la SENIM à la redevance due par la société LE CHEVAL BLANC ne suffit pas à établir son accord pour lui concéder le fonds ; qu'en effet, jouissant sans titre de celui-ci, cette société était tenue d'en indemniser le propriétaire et les parties pouvaient s'entendre pour fixer la somme due en référence aux projets de contrats, et notamment à la convention du 25 juin 1991, à laquelle les parties se référaient lors de l'entrée dans les lieux de la société LE CHEVAL BLANC, qui stipulait que le contrat de sous location commerciale serait conclu moyennant un loyer annuel fixe d'un montant de 480 000 F ; qu'un tel accord sur la contrepartie de cette occupation n'établit pas un accord de la SENIM pour concéder la location du fonds à l'occupant sans titre ;

Considérant qu'il s'ensuit que la preuve n'est pas rapportée de ce que la SENIM a concédé la location du fonds ; qu'elle a au contraire cherché à en reprendre possession en demandant l'expulsion de la société LE CHEVAL BLANC par assignation du 18 janvier 1994 ;

Considérant qu'il en ressort que les relations des parties ne relèvent pas des dispositions de la loi du 20 mars 1956, et donc que la demande des liquidateurs de la société LE CHEVAL BLANC fondée sur l'article 8 de celle-ci n'est pas fondée ;

Considérant que le tribunal a également retenu la responsabilité de la SENIM sur le fondement de l'article 1382 du Code civil ; que cependant il n'a pas caractérisé la faute qu'il retient à la charge de la SENIM ; que si celle-ci a tardé à assigner la société LE CHEVAL BLANC, il apparaît qu'elle recherchait avec cette société une solution juridique pour sortir de la situation de fait qui s'était créée, sans que cela puisse lui être reproché ; qu'il ne peut pas plus lui être tenu rigueur, comme l'a fait le tribunal, d'avoir un capital constitué majoritairement par des fonds publics ;

Considérant que le jugement sera donc infirmé en toutes ses dispositions et les demandes des liquidateurs rejetées ;

Considérant que la situation économique des parties et l'équité ne commandent pas qu'il soit fait application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

Infirme en toutes ses dispositions le jugement attaqué,

Déboute Maîtres X... et Y..., es qualités de liquidateurs de la société LE CHEVAL BLANC, de toutes leurs demandes,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Condamne Maîtres X... et Y..., es qualités de liquidateurs de la société LE CHEVAL BLANC, aux dépens de première instance et d'appel

qui seront recouvrés par l'avoué concerné comme il est dit à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

LE GREFFIER

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 1997/16176
Date de la décision : 24/03/2000

Analyses

VENTE - Promesse de vente - Promesse unilatérale

Lorsqu'une promesse de vente d'un fonds de commerce est devenue caduque en cas de défaillance de la condition suspensive dont elle est assortie , la prise de possession par l'ancien bénéficiaire se révèle sans effet s'il n'établit pas l'existence d'un accord avec l'ancien promettant au terme duquel ce dernier lui concède la location du fonds. La situation de fait née de l'entrée dans les lieux et du commencement d'exploitation est insuffisante à rapporter la preuve de l'accord du promettant ou de l'existence du contrat de location du fonds


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2000-03-24;1997.16176 ?
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