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10/03/2000 | FRANCE | N°1997/17033

France | France, Cour d'appel de Paris, 10 mars 2000, 1997/17033


COUR D'APPEL DE PARIS 15è chambre, section B ARRET DU 10 MARS 2000

(N , 14 pages) Numéro d'inscription au répertoire général :

1997/17033 Pas de jonction Décision dont appel : Jugement rendu le 09/05/1997 par le TRIBUNAL DE COMMERCE de PARIS 5/è Ch. RG n :

1995/01310 Date ordonnance de clôture : 21 Janvier 2000 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : CONFIRMATION PARTIELLE APPELANTE : CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE PARIS ET D'ILE DE FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 26 Quai de la Rapée 75012 - PA

RIS représentée par la SCP TAZE-BERNARD-BELFAYOL-BROQUET, avoué assistée de Maî...

COUR D'APPEL DE PARIS 15è chambre, section B ARRET DU 10 MARS 2000

(N , 14 pages) Numéro d'inscription au répertoire général :

1997/17033 Pas de jonction Décision dont appel : Jugement rendu le 09/05/1997 par le TRIBUNAL DE COMMERCE de PARIS 5/è Ch. RG n :

1995/01310 Date ordonnance de clôture : 21 Janvier 2000 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : CONFIRMATION PARTIELLE APPELANTE : CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE PARIS ET D'ILE DE FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 26 Quai de la Rapée 75012 - PARIS représentée par la SCP TAZE-BERNARD-BELFAYOL-BROQUET, avoué assistée de Maître X... ARNAULD, Toque C 2049, Avocat au Barreau de PARIS INTIMEE : S.A. SOCODIS prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 105 rue d'Aubervilliers 75018 - PARIS représentée par la SCP BERNABE-RICARD-CHARDIN-CHEVILLER, avoué assistée de Maître L. NAJBERG BRAMI, Toque E 431, Avocat au Barreau de PARIS INTIMEE : S.A. BRASSERIE FISCHER prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 7 Route de Bischwiller 67800 - SCHILTIGHEIM représentée par la SCP LECHARNY-CALARN, avoué assistée de Maître A. GARNON, Avocat au Barreau de STRASBOURG INTIME :

Monsieur Y... Z... ... par Maître BLIN, avoué assisté de Maître M. A..., Toque D 1293, Avocat au Barreau de PARIS COMPOSITION DE LA COUR : lors des débats et du délibéré, Président : Monsieur SALZMANN B... : Monsieur BINOCHE B... : Madame LE GARS C... : à l'audience publique du 4 février 2000 GREFFIER : Lors des débats et du prononcé de l'arrêt Monsieur D... agent du secrétariat-greffe ayant prêté le serment de Greffier ARRET : Contradictoire, prononcé publiquement par Monsieur SALZMANN, Président, lequel a signé la minute du présent arrêt avec Monsieur G. D..., Greffier.

La Cour statue sur l'appel formé suivant déclaration remise au Secrétariat-Greffe de la Cour le 11 Juillet 1997 par la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Paris et d'Ile de France à l'encontre du jugement rendu le 9 Mai 1997 par la 5° Chambre du Tribunal de Commerce de PARIS, qui, sur l'assignation de la C.R.C.A.M. de Paris et d'Ile de France, a : - joint les causes, - dit la C.R.C.A.M. de Paris et d'Ile de France recevable mais mal fondée en ses demandes et l'en a déboutée, - débouté la S.A. SOCODIS de sa demande de dommages et intérêts, et les parties de leurs plus amples demandes, fins et conclusions respectives, - dit n'y avoir lieu à exécution provisoire, - condamné la C.R.C.A.M. de Paris et d'Ile de France au paiement à la S.A. SOCODIS et la S.A. BRASSERIE FISCHER de la somme de 7.000 francs à chacune sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et aux dépens. LES ÉLÉMENTS DU LITIGE

La Cour se réfère au jugement qui lui est soumis pour l'exposé des faits de la cause et de la procédure, sous réserve des points suivants, essentiels à la compréhension de l'affaire ; il est renvoyé, au sujet des demandes et prétentions des parties, pour un plus ample exposé des moyens, aux écritures échangées devant elle.

Le Tribunal a retenu pour l'essentiel que les sociétés SOCODIS et BRASSERIE FISCHER, suivant l'acte de prêt, avaient renoncé au bénéfice de discussion, mais non au bénéfice de division, aucune preuve n'étant apportée des actions ayant pu être mises en oeuvre à l'encontre du débiteur principal et de la caution solidaire.

Il était ensuite relevé que le Crédit Agricole, en ne faisant pas usage de la clause résolutoire, avait commis une faute à l'égard des cautions, en ne tentant pas de récupérer le fonds de commerce et en

les privant de toutes possibilités de recours et de subrogation dans les droits et privilèges de la Banque au sens des dispositions de l'article 2037 du Code Civil.

Enfin, le Tribunal constatait que la Banque ne versait aucun document pour justifier de ses demandes à l'encontre de M. Y.... PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES EN APPEL

Les parties ayant conclu en dernier lieu respectivement les 2 Décembre 1999 pour M. Y... et la S.A. BRASSERIE FISCHER, 3 Décembre 1999 pour la S.A. SOCODIS et 6 Janvier 2000 pour la C.R.C.A.M. de Paris et d'Ile de France, seules ces écritures seront prises en compte par la Cour quant aux prétentions et moyens présentés, en application des dispositions de l'article 954 2 du Nouveau Code de Procédure Civile, tel que modifié par le Décret 98-1231 du 28 Décembre 1998 ;

M. Z... Y... demande à la Cour de dire et juger la C.R.C.A.M. non fondée en son appel, et de confirmer le Jugement en ce qu'il a débouté le Crédit Agricole de sa demande à son égard, subsidiairement, de prononcer la nullité de son engagement de caution, de condamner le Crédit Agricole à lui payer la somme de 15.000 francs à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et la même somme sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et aux dépens.

Il fait valoir que la caution devait faire précéder sa signature de la mention manuscrite prescrite par les dispositions de l'article 1326 du Code Civil, en soulignant que la qualité de commerçant de M. Y... ne ressort pas de l'acte de cession du fonds de commerce incluant son engagement, et que le Crédit Agricole n'a pu s'assurer de sa surface financière ; il demande donc de prononcer la nullité de l'engagement.

Il invoque encore des fautes à l'encontre du Crédit Agricole, en ce

qu'il s'est abstenu de réclamer la distribution judiciaire du prix de vente, observant que pour un capital restant dû au 31 Janvier 1991 de 403.525,39 francs, la somme séquestrée s'élevait à 600.000 francs, le cessionnaire du fonds n'étant placé en liquidation judiciaire que le 14 Avril 1994.

Le Crédit Agricole s'abstenait d'introduire l'action résolutoire, ce qui lui aurait permis de récupérer un fonds de commerce libre de toute inscription, et de le vendre dans de meilleures conditions.

Il demande de retenir que c'est en conséquence de sa négligence que des intérêts avaient couru entre la cession du fonds et la distribution amiable, visant les dispositions de l'article 1382 du Code Civil, et relève l'absence de toute information de la caution.

La S.A. BRASSERIE FISCHER demande à la Cour la confirmation du Jugement entrepris, la condamnation de la C.R.C.A.M. de Paris et d'Ile de France au paiement d'une somme de 5.000 francs à titre de dommages et intérêts et de celle de 20.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux dépens.

Elle se réfère d'abord au mandat adressé au rédacteur de l'acte du 2 Mars 1989, donné pour se porter caution simple, et à l'acte de cautionnement adressé le 16 Mars 1989 à la C.R.C.A.M., qui prévoit expressément que la caution ne pourra être mise en jeu qu'après épuisement de toutes les autres garanties, pour faire valoir qu'elle n'a jamais renoncé au bénéfice de discussion, la mention de "caution solidaire" n'apparaissant pas expressément dans l'acte de cession.

Elle se fonde sur les dispositions des articles 1156 et 1162 du Code Civil; elle estime avoir suffisamment indiqué les biens des débiteurs principaux susceptibles d'être discutés, et fait valoir que du fait du droit de suite le fait que le fonds de commerce ne soit plus entre les mains du débiteur principal est sans incidence.

S'agissant du bénéfice de division, elle soutient que le Crédit Agricole doit rapporter la preuve de l'épuisement de toutes les actions contre les débiteurs principaux et solidaires, et relève que la Banque n'a jamais actionné MM. Emmanuel Y... et Didier E..., ni rapporté la preuve de l'insolvabilité de M. Y..., caution solidaire.

Elle fait grief à la Banque de s'être abstenue de demander la distribution judiciaire du prix de vente, pour soutenir que les cautions n'ont pas à en supporter les conséquences.

Elle invoque les dispositions de l'article 2037 du Code Civil, pour reprocher à la Caisse de ne pas avoir mis en oeuvre la clause résolutoire, relevant qu'en s'abstenant de le faire, elle s'est trouvée en concours avec d'autres créanciers privilégiés.

Soutenant que le Crédit Agricole aurait dû percevoir la totalité du prix de vente, elle estime cependant que la somme perçue, soit 511.179,01 francs représente le remboursement de la totalité de la créance, les intérêts de retard n'étant imputables qu'à sa seule inaction, la clause pénale devant être réduite à néant, et la Brasserie Fischer ne s'étant pas engagée comme caution à garantir le paiement des accessoires.

Elle invoque encore le fait que la Banque est déchue du droit de percevoir tous intérêts en application de l'article 48 de la Loi du 1° Mars 1984, en rappelant que le solde de 290.697,24 francs ne représente que des intérêts.

La S.A. SOCODIS demande aussi la confirmation du Jugement, sauf en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, et demande à la Cour de la recevoir en son appel incident, et statuant à nouveau de condamner la C.R.C.A.M. de Paris et d'Ile de France à lui payer la somme de 15.000 francs à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, et celle de 18.000

francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et aux dépens.

Elle fait valoir que son engagement de caution a été souscrit par acte séparé, et donné en dernier recours, sans avoir jamais renoncé au bénéfice de discussion : elle s'appuie en particulier sur un courrier adressé le 28 Février 1989 et annexé à l'acte ; la discussion devait porter sur l'action résolutoire afférente à la vente du fonds de commerce, peu important que le bien ne soit plus la propriété des débiteurs principaux.

Elle soutient que la Caisse ne divise pas son action, car elle n'établit pas qu'elle poursuit la société SOCODIS après épuisement de toutes les actions contre les débiteurs principaux et solidaires.

Elle demande comme la société Brasserie FISCHER l'application des dispositions de l'article 2037 du Code Civil, en soutenant que si l'action résolutoire avait été mise en oeuvre, la Caisse ne se serait pas trouvée en concours avec les créanciers nantis du chef des cessionnaires du fonds ; comme celle-ci, elle demande de confirmer le Jugement en ce qu'il a estimé que les intérêts échus entre la revente du fonds et la répartition amiable du prix ne pouvaient être mis à sa charge, et soutient qu'en acceptant la répartition amiable, la Caisse s'est privée d'une partie du prix, compte tenu de la facturation de frais de rédaction d'acte, de mainlevée de taxe professionnelle par exemple.

Elle fait encore valoir la déchéance du droit à percevoir des intérêts, le solde réclamé étant uniquement constitué d'intérêts.

La Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Paris et d'Ile de France demande à la Cour l'infirmation du Jugement en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau, de condamner les sociétés SOCODIS et BRASSERIE FISCHER à payer chacune la somme de 50.000

francs au titre de leur engagement de caution, outre les intérêts au taux conventionnel à compter du 21 Septembre 1995, date de la mise en demeure et jusqu'à parfait paiement.

Elle demande aussi la condamnation de M. Z... Y... au paiement de la somme de 290.697,24 francs outre les intérêts au taux conventionnel à compter du 15 Octobre 1995.

Elle sollicite la condamnation solidaire des sociétés SOCODIS, BRASSERIE FISCHER et de M. Y... à lui payer la somme de 15.000 francs sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et aux dépens.

Elle fait valoir que M. Z... Y... avait la qualité de commerçant, et, ayant paraphé toutes les pages de l'acte de cession du fonds de commerce, avait pris parfaite connaissance de l'étendue de son engagement ; elle ajoute qu'il était client à titre professionnel de son établissement, avec un compte créditeur en moyenne de 140.000 francs.

Estimant que les Premiers Juges ont opéré une confusion entre les notions de discussion et de division, elle soutient qu'il ressort de l'acte de prêt que les sociétés SOCODIS et BRASSERIE FISCHER ont expressément renoncé au bénéfice de discussion dans le cadre de l'article 2, se référant à la lettre adressée par le rédacteur d'acte le 24 Février 1989 et annexée à l'acte, à laquelle les réponses de sociétés se référaient elles-mêmes.

L'engagement étant clair, elle demande d'écarter l'application des dispositions des articles 1156 et 1162 du Code Civil.

De plus, les sociétés cautions ne font pas l'inventaire des biens susceptibles d'être discutés, le fonds de commerce n'appartenant plus aux débiteurs principaux, et le droit de suite ne pouvant plus s'exercer du fait de la purge des sûretés opérée lors de la répartition du prix.

Rappelant que le bénéfice de division ne joue que dans les rapports entre les cautions, elle fait valoir qu'en application de l'article 2026 du Code civil, elle ne demande à chacune des cautions que le paiement de la somme de 50.000 francs conformément à l'engagement contractuel, et qu'elle a assigné M. Y... ; quant aux débiteurs principaux, elle invoque leur insolvabilité.

S'agissant de l'application de l'article 2037 du Code Civil, elle relève qu'en application de l'article 1654 du Code Civil, l'application de la cause résolutoire ne peut s'envisager que si l'acheteur ne paie pas le prix ; or, en l'occurrence, l'acheteur a payé le prix, qui a été séquestré.

Elle soutient que le résultat aurait été identique si elle avait exercé l'action résolutoire ; il lui aurait fallu chercher un acheteur, alors que les échéances cessaient d'être payées en juin 1990, et que la cession amiable intervenait dès janvier 1991 ; elle invoque la liquidation judiciaire ensuite prononcée, et le fait que les sociétés SOCODIS et BRASSERIE FISCHER ne chiffrent pas leur préjudice, le fait de ne pas réclamer l'attribution judiciaire du fonds ne constituant pas une faute de sa part.

Elle ajoute que rien ne lui permettait de présumer que les fonds ne seraient distribués qu'en 1994, la lenteur ne lui étant pas imputable, et que la distribution judiciaire du prix ne représentait qu'une simple possibilité qu'il ne peut lui être reproché de n'avoir pas mise en oeuvre ; cette procédure aurait entraîné des frais et honoraires s'imputant sur la somme à répartir.

Admettant que les dispositions de l'article 48 de la loi du 1° Mars 1984 n'ont pas été respectées, elle soutient cependant que les intérêts au taux conventionnel n'en sont pas moins dus à compter de l'assignation pour ce qui concerne M. Y..., et de la mise en demeure pour ce qui concerne les sociétés SOCODIS et BRASSERIE FISCHER.

L'ordonnance de clôture était prononcée le 21 Janvier 2000. C E C I E T A N T E X P O X... E, SUR L'ENGAGEMENT DE M. Z... Y...

Considérant que l'acte du 2 Mars 1989, portant cession du fonds de commerce à MM. Emmanuel Y... et Didier E..., comportait en page 14, sous l'intitulé "CAUTIONNEMENT SOLIDAIRE" l'intervention de M. Z... Y... ;

Que la dernière page de l'acte ne comportait l'apposition que de sept signatures, précédées de la seule mention "Lu et approuvé" ;

Qu'ainsi la signature attribuée à M. Z... Y... n'était nullement précédée de la mention, en chiffres et en lettres portée de sa main de la somme pour laquelle il s'engageait à garantir le remboursement des sommes dues par les débiteurs principaux ;

Considérant que la C.R.C.A.M. de Paris et d'Ile de France ne verse aux débats aucun élément de nature à justifier son affirmation suivant laquelle M. Z... Y... avait la qualité de commerçant à la date de souscription de son engagement ;

Qu'en conséquence, la Cour ne pourra que constater que la Caisse ne rapporte pas la preuve de ce que M. Y... avait souscrit ce cautionnement en pleine connaissance de la portée et de l'étendue de celui-ci ;

Que celle-ci sera déboutée de ses demandes à son encontre ; SUR L'ENGAGEMENT DES SOCIÉTÉS SOCODIS ET BRASSERIE FISCHER

Considérant que celui-ci, aux termes de l'acte du 2 Mars 1989 ( page 14 et 15 ), n'est stipulé que par référence à la lettre en date du 24 Février 1989 adressé par le rédacteur à ces sociétés, et aux termes des lettres de réponse en date des 28 Février et 2 Mars 1989 de celles-ci ;

Que l'acte du 2 mars l989 n'est pas signé par les SOCIETES SOCODIS et BRASSERIES FISCHER;

Qu'il peut être observé qu'au chapitre des conditions particulières ( page 10 ), s'il était expressément fait mention de la caution solidaire de M. Y..., il n'était question que de la "caution" des sociétés SOCODIS et FISCHER dans la référence y faisant immédiatement suite ;

Que si le rédacteur visait dans sa correspondance la renonciation au bénéfice de discussion, tant la société SOCODIS que la société BRASSERIE FISCHER dans leurs réponses respectives, faisaient référence expressément à une caution "simple" ;

Considérant que la renonciation à un droit ne se présume pas ; que la renonciation au bénéfice de discussion stipulée à l'acte ( page 15 ) ne correspondait nullement à des termes clairs et dénués d'équivoque en ce sens ayant pu être portés dans les lettres de sociétés cautions, alors que celles-ci avaient bien entendu limiter la portée de leur engagement en montant, soit à 10% de la somme prêtée ;

Que les dispositions de l'article 1162 du Code Civil sont en conséquence applicables ;

Que la société BRASSERIE FISCHER précisait bien dans un acte du 16 Mars 1989, tant dans le corps de l'acte que dans le cadre de la mention manuscrite, qu'il s'agissait à ses yeux d'une caution simple ;

Considérant qu'il n'est par conséquent nullement établi que les sociétés SOCODIS et BRASSERIE FISCHER avaient renoncé au bénéfice de discussion; que s'agissant du bénéfice de division, il n'était pas même question d'une quelconque renonciation, ni dans l'acte lui-même, ni dans la lettre adressée par le rédacteur de celui-ci ;

Qu'en conséquence, la Cour retiendra que c'est bien par un engagement de caution non assorti de renonciation au bénéfice de discussion et de division que les sociétés SOCODIS et BRASSERIE FISCHER se sont engagées ; SUR LA PORTÉE DE LA DISCUSSION ET LA CRÉANCE

Considérant que s'il est justifié par la C.R.C.A.M. de Paris et d'Ile de France de ce qu'elle a déclaré sa créance auprès du mandataire liquidateur de M. F..., cessionnaire du fonds de commerce le 31 Janvier 1991, avec son épouse et M. G..., créance d'ailleurs rejetée du fait de l'acceptation par la Banque de la procédure de répartition amiable, il n'est en revanche nullement justifié de l'action que la Banque aurait pu engager à l'encontre de MM. Didier E... et Emmanuel Y..., ses débiteurs principaux ;

Qu'il n'est cependant pas sérieusement contesté que le seul bien pouvant faire l'objet de discussion préalable était le fonds de commerce situé 19 Avenue de Choisy à VILLENEUVE SAINT GEORGES 94190 ; Qu'il convient donc d'examiner les conditions dans le cadre desquelles le Crédit Agricole a cherché à se faire rembourser des sommes lui étant dues ;

Que cet examen est indissolublement lié à celui de la détermination de la créance, et de la question de savoir si, compte tenu de la somme perçue dans le cadre de la distribution amiable du prix de la cession du fonds réalisée le 31 Janvier 1991, la Caisse peut justifier d'une créance à l'égard des cautions, eu égard à l'application des dispositions de l'article 48 de la Loi du 1° Mars 1984 ; que la Banque ne conteste pas en effet qu'elle a été défaillante dans le respect de son obligation d'information annuelle ;

Qu'elle encourt dès lors la déchéance du droit de percevoir tous intérêts sur les sommes dues, étant observé que de ce fait les intérêts moratoires éventuellement dus par les cautions ne peuvent être calculés qu'au taux légal ;

Considérant à cet égard que la Caisse a perçu la somme de 511.173,01 francs le 4 Octobre 1994 ; que sa créance invoquée le 28 Juillet 1994

pour justifier cette attribution se montait au total à 694.458,60 francs, montant se répartissant ainsi : * 102.734,64 francs d'échéances impayées entre le 25 Juin 1990 et le 25 Mai 1991, * 52.873,62 francs d'intérêts, *378.764,38 francs représentant le capital restant dû après échéance du 25 Juillet 1994, *6.944,01 francs d'indemnité pour remboursement anticipé, *131.936,25 francs d'intérêts sur la période du 25 Juillet 1991 au 25 Juillet 1994, *21.206,70 francs de primes d'assurances échues et non réglées ;

Qu'ainsi, le Crédit Agricole, compte tenu de l'indemnité ci-dessus invoquée, entendait se placer dans le cadre d'un remboursement anticipé par l'emprunteur de son prêt, suite à la cession de son fonds de commerce le 31 Janvier 1991, observation étant faite que le dossier de la Banque ne contient aucune demande de celui-ci en ce sens; que la somme de 378.764,38 francs correspond bien au capital restant dû avant échéance du 25 Juin 1991, et le terme contractuel du contrat de prêt se situe au 25 Février 1996, suivant le tableau d'amortissement ;

Qu'il n'apparaît donc pas que la Banque ait fait jouer la clause d'exigibilité anticipée ; qu'elle a donc choisi, non pas de discuter les débiteurs principaux dans leurs biens, ni de faire jouer la clause résolutoire prévue par l'article 1654 du Code Civil, mais d'utiliser la garantie dont elle disposait, soit le privilège de vendeur et de nantissement, comme cela résulte de l'acte non daté en vertu duquel elle a pu prétendre à la distribution amiable du prix obtenu par la cession ultérieure ;

Que dans le cadre de la mise en demeure adressée le 21 Septembre 1995 aux cautions, c'est la somme de 290.697,24 francs qui était réclamée , se décomposant ainsi : *189.512,72 francs au titre du capital à rembourser après l'échéance du 25 Mai 1991, *74.757,50 francs d'intérêts entre le 25 Mai 1991 et le 26 Décembre 1994, * 26.427,02

francs d'indemnité pour frais de recouvrement ;

Que suivant enfin un décompte au 3 Juillet 1997, il est question, outre de la même somme de 189.512,72 francs, de 1.737,20 francs d'intérêts, de 163.657,54 francs d'intérêts de retard et de 35.490,74 francs d'indemnité au taux de 10 % pour frais de recouvrement ;

Considérant que la Caisse ne remet à la Cour aucun décompte permettant de discerner la manière dont elle calcule sa créance résiduelle, après perception de la somme évoquée ci-dessus le 4 Octobre 1994, et en particulier l'affectation qui en a été faite; qu'ainsi, aucun détail n'est donné sur la manière dont est calculé le capital à rembourser suivant la mise en demeure ou le décompte du 3 Juillet 1997, ainsi que les intérêts mentionnés sur ces pièces ;

Qu'elle se borne dans le cadre de ses écritures d'appel de faire référence pour le calcul de la somme restant due au seul décompte arrêté au 26 Décembre 1997 pour 290.697,24 francs ;

Que pour prétendre exiger la somme de 50.000 francs de chacune des cautions, encore lui faut-il démontrer qu'après déchéance des intérêts il lui reste dû au total au moins la somme de 100.000 francs ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 48 2 de la Loi du 1° Mars 1984, telles que modifiées par l'article 114 de la loi n°99-532 du 25 Juin 1999, les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés dans les rapports entre la caution et l'établissement affectés prioritairement au règlement du principal de la dette ; qu'eu égard au caractère d'ordre public des dispositions de la loi du 1° Mars 1984, ces dispositions, dérogatoires à celles de l'article 1254 du Code Civil, s'appliquent aux cautionnements antérieurs à l'entrée en vigueur de la loi du 25 Juin 1999, mais alors en cours ;

Que si l'on considère la déclaration faite le 28 Juillet 1994, les

sommes de 52.873,62 francs et 131.936,25 francs constituant des intérêts, ainsi que la part des intérêts incluse dans les échéances impayées pour 102.734,64 francs étant atteintes par la déchéance prévue par l'article 48 de la loi en question, la somme de 511.173,01 francs doit être réputée d'abord imputée sur le capital restant dû, soit 378.764,38 francs, et la part en capital des échéances impayées, soit au vu du tableau d'amortissement 57.582,25 francs, de sorte qu'il en résulte que la somme disponible résiduelle de 74.827,48 francs couvre les autres sommes restant dues;

Qu'en se dispensant au surplus de fournir à la Cour les éléments indispensables au calcul de sa créance à l'égard des cautions, la Banque se prive de la possibilité de démontrer qu'il pourrait lui rester dû la moindre somme ;

Que de plus et surtout, elle s'était privée, en faisant choix de la procédure de répartition, de la possibilité de discuter ses débiteurs dans leurs biens, et ne peut dès lors venir rechercher les cautions ; qu'elle sera déboutée de ses demandes à leur encontre;

SUR LES AUTRES DEMANDES

Considérant, pour infondés que puissent être les moyens de la Banque compte tenu de la stratégie adoptée par elle, les sociétés SOCODIS et BRASSERIE FISCHER ne démontrent pas pour autant que la C.R.C.A.M. de Paris et d'Ile de France a laissé dégénérer l'exercice de son droit de recours en abus, et non qu'elle en a fait usage pour tenter de faire prévaloir ce qu'elle estimait être ses droits ;

Que la demande reconventionnelle tendant à l'allocation de dommages et intérêts sera en conséquence rejetée ;

Considérant que les

Que la demande reconventionnelle tendant à l'allocation de dommages

et intérêts sera en conséquence rejetée ;

Considérant que les dépens exposés en cause d'appel seront laissés à la charge de la Caisse de Crédit Agricole qui succombe dans ses prétentions ;

Qu'il serait inéquitable, eu égard aux circonstances de la cause, de laisser aux sociétés SOCODIS et BRASSERIE FISCHER la charge de leurs frais irrépétibles exposés devant la Cour ; que la Caisse de Crédit Agricole sera condamnée à leur verser à chacune la somme de QUINZE MILLE FRANCS ( 15.000 f ) 2.286,74 euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, pour les frais exposés en cause d'appel ;

P A R C E X... M O T I F X... ,

Statuant par décision contradictoire,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a déclaré la Caisse de Crédit Agricole mal fondée en ses demandes, et mis à la charge de celle-ci les dépens en allouant aux défendeurs une indemnité pour frais irrépétibles,

LE REFORMANT pour le surplus et statuant à nouveau,

Vu l'article 1326 du Code Civil,

Constate qu'il n'est pas démontré que M. Z... Y... a pris pleine connaissance de la portée et de l'étendue de son engagement, et que son engagement de caution ne peut avoir aucun effet,

DIT que les sociétés SOCODIS et BRASSERIE FISCHER ont souscrit un engagement de caution sans renoncer au bénéfice de discussion et

division,

Vu les dispositions des articles 2021 du Code Civil et 48 de la Loi du 1° Mars 1984, modifiée par la loi n° 99-532 du 25 juin l999,

DIT que la Caisse de Crédit Agricole Mutuel de Paris et d'Ile de France les a privés du bénéfice de discussion, et ne justifie pas d'une créance à leur encontre,

DÉBOUTE la Caisse de Crédit Agricole Mutuel de Paris et d'Ile de France de toutes ses demandes,

Condamne la Caisse de Crédit Agricole Mutuel de Paris et d'Ile de France au paiement à chacune de la somme de QUINZE MILLE FRANCS ( 15.000 f ) 2.286,74 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, au titre des frais exposés en appel,

REJETTE toutes autres demandes plus amples ou contraires,

CONDAMNE la C.R.C.A.M. de Paris et d'Ile de France aux dépens d'appel, lesquels pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 1997/17033
Date de la décision : 10/03/2000

Analyses

CAUTIONNEMENT - Caution - Bénéfice de discussion

Lorsqu'il est établi que la renonciation au bénéfice de discussion stipulée à l'acte de cautionnement ne correspond nullement à des termes clairs et dénués d'équivoque en ce sens,et selon le principe que la renonciation à un droit ne se présume pas, il s'ensuit que l'article 1162 du Code civil s'applique


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2000-03-10;1997.17033 ?
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