La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/03/2000 | FRANCE | N°1998/14119

France | France, Cour d'appel de Paris, 08 mars 2000, 1998/14119


COUR D'APPEL DE PARIS 16è chambre, section A ARRÊT DU 8 MARS 2000

(N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 1998/14119 Pas de jonction Décision dont appel : Jugement rendu le 18/05/1998 par le TRIBUNAL DE COMMERCE de PARIS 1ère Ch. RG n : 1997/62466 Date ordonnance de clôture : 13 décembre 1999 Nature de la décision :

CONTRADICTOIRE Décision : INFIRMATION PARTIELLE APPELANT : S.A. SEBOL prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège CENTRE COMMERCIAL CARREFOUR Chemin de Saint Claude 06600 ANTIBES représenté par Maître PAMART, av

oué assisté de Maître JEAN-PAUL CLEMENT, Toque B405, Avocat au Barreau de PAR...

COUR D'APPEL DE PARIS 16è chambre, section A ARRÊT DU 8 MARS 2000

(N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 1998/14119 Pas de jonction Décision dont appel : Jugement rendu le 18/05/1998 par le TRIBUNAL DE COMMERCE de PARIS 1ère Ch. RG n : 1997/62466 Date ordonnance de clôture : 13 décembre 1999 Nature de la décision :

CONTRADICTOIRE Décision : INFIRMATION PARTIELLE APPELANT : S.A. SEBOL prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège CENTRE COMMERCIAL CARREFOUR Chemin de Saint Claude 06600 ANTIBES représenté par Maître PAMART, avoué assisté de Maître JEAN-PAUL CLEMENT, Toque B405, Avocat au Barreau de PARIS APPELANT : S.A.R.L. B. etamp; O. prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège Rond-Point Weiseller - Route de Grasse 06600 ANTIBES représenté par Maître PAMART, avoué assisté de Maître CLEMENT JEAN-PAUL, Toque B405, Avocat au Barreau de PARIS APPELANT : Monsieur X... Y... ... par Maître PAMART, avoué assisté de Maître CLEMENT JEAN-PAUL, Toque B405, Avocat au Barreau de PARIS APPELANT : S.A.R.L. LES PINS prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 32 Avenue de Cannes 06160 JUAN LES PINS représenté par Maître PAMART, avoué assisté de Maître CLEMENT JEAN-PAUL, Toque B405, Avocat au Barreau de PARIS INTIME : STE MAC DONALD'S FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 1 rue Gustave Eiffel 78045 GUYANCOURT CEDEX FRANCE représenté par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, avoué assisté de Maître JEAN-MARIE LELOUP, Avocat au Barreau de POITIERS COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré Monsieur DUCLAUD, Président Madame CONTENT, Conseiller Madame COBERT, Conseiller DÉBATS : A l'audience publique du 14 décembre 1999 GREFFIER : Lors des débats et du prononcé de l'arrêt : N. ESTEVE ARRÊT : Prononcé publiquement par Monsieur DUCLAUD, Président, lequel a signé la minute assisté de N. ESTEVE,

Greffier. [*

La Cour a déjà été saisie de l'appel interjeté par la S.A. SEBOL, la SARL B etamp; O, la SARL LES PINS, et, Monsieur Y... X... du jugement du Tribunal de Commerce de PARIS du 18 mai 1998 qui a notamment: - débouté ces parties de l'ensemble de leurs demandes dirigées à l'encontre de la société MAC DONALD'S FRANCE, - constaté la résiliation de plein droit le 2 janvier 1998 des contrats de location-gérance et de licence conclus entre la société MAC DONALD'S FRANCE d'une part, et, la société SEBOL et M. Y... X... le 31 août 1987, la société B etamp; O et celui-ci le 9 octobre 1996, la société LES PINS et celui-ci le 18 juin 1997 par l'effet de la clause résolutoire insérée dans chacun des contrats, - ordonné l'expulsion de toutes les sociétés, locataires gérants, et de M. Y... X... des lieux d'exploitation, - ordonné la remise des clés, de la liste du personnel ainsi que des dossiers afférents à chaque salarié et des comptes d'exploitation sous astreintes de 32.000 francs par jour à la charge de la société SEBOL et M. X... (Antibes 1), de 37.000 francs par jour à la charge de la société B etamp; O et de M. X... (Antibes 2), et, de 26.350 francs par jour à la charge de la société LES PINS et de M. X... (les Pins) et ce, après dix jours ouvrables à compter de sa signification avec limitation à 30 jours, - a nommé Maître ZONINO, huissier de justice à Cagnes-sur-Mer en qualité de constatant afin de voir dresser contradictoirement dans chaque restaurant, l'inventaire de stock de marchandises et consommables, articles d'exploitation mobilier et équipement du fonds et l'état des encaisses, - condamné solidairement à payer à la société MAC DONALD'S FRANCE :

*] la société SEBOL et M. X... les sommes de 1. 867.247,84F à titre de redevances impayées avec intérêts de droit, à compter du ler

août 1997 sur 1.266.300 F à compter du ler décembre 1997 sur 361.800 F à compter du ler janvier 1998 sur 239.147,84 F et 16.000 F à titre d'indemnité d'occupation par jour à compter du 2 janvier 1998 jusqu'au jour du constat de l'huissier de justice dont la nomination est demandée ci-dessus avec intérêts de droit,

[* la société B etamp; O et Monsieur Y... X... la somme de 1.533.548,87F à titre de redevances impayées avec intérêts de retard au taux de base bancaire augmenté de 3 points par chaque échéance à partir de la date à laquelle elle aurait dû être payée, et 24.000F à titre d'indemnité d'occupation par jour à compter du 2 janvier 1998 jusqu'au jour du constat de l'huissier de justice dont la nomination est demandée ci-dessus avec intérêts de droit,

*] la société LES PINS et M. Y... X... les sommes de 504.474,42 francs à titre de redevances impayées avec intérêts de retard au taux de base bancaire augmenté de 3 points par chaque échéance à partir de la date à laquelle elle aurait dû être payée, et 16.000F à titre d'indemnité d'occupation par jour à compter du 2 janvier 1998 jusqu'au jour du constat de l'huissier de justice dont la nomination est demandée ci-dessus avec intérêts de droit, - dit que les intérêts dus à la SA Mc DONALD'S porteront eux-mêmes intérêts conformément à l'article 1154 du Code civil, - donné acte à la SA Mc DONALD'S de ce qu'elle se réserve de parfaire ses demandes au vu des conditions de restitution des fonds de commerce occupés illicitement par Monsieur Y... X... et ses trois sociétés et de demander tous dommages et intérêts justifiés pour les préjudices qui apparaîtraient, - débouté la SA Mc DONALD'S de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, - ordonné l'exécution provisoire de la décision à intervenir sous réserve de constitution par la SA Mc DONALD'S d'une caution bancaire égale aux condamnations prononcées au titre des redevances impayées, - condamné in solidum. les sociétés

SEBOL, B etamp; O, LES PINS et Monsieur Y... X... à verser à la SA Mc DONALD'S la somme de 50.000F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile déboutant pour le surplus et aux dépens.

Par ordonnance du 3 juillet 1998, le Premier Président de cette Cour a arrêté l'exécution provisoire des dispositions de ce jugement relatives aux condamnations pécuniaires.

Les faits et la procédure peuvent être résumés ainsi qu'il suit :

l°) Par contrat du 5 août 1987, la Société Me DONALD'S France donnait en location gérance à Monsieur Y... X..., pour une durée de vingt ans, un fonds de restauration rapide situé au centre commercial Carrefour, chemin Saint-Claude à Antibes moyennant :

- une redevance de base de 12 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé par le restaurant, avec un minimum de 1.800.000F par an,

- une redevance de service de 5% du chiffre d'affaires hors taxes.

Par avenant du 31 août 1987, Monsieur X... cédait et transportait à une société SEBOL, dont il possède la quasi-totalité des actions, l'intégralité des droits et obligations résultant du constat du 5 août 1987.

Ce restaurant a connu un essor rapide et continu jusqu'en 1993, tant en termes d'activité que de résultats, suivi d'une stabilisation en 1994. Pour cette dernière année, la Société SEBOL a réalisé un chiffre d'affaires de 27,1 millions de francs et un résultat net après impôt sur les sociétés de 1,3 millions de francs.

Ces données s'inscrivaient dans le cadre des prévisions présentées à Monsieur X... par Mc DONALD'S lors de la signature du contrat soit, le rythme de croisière une fois atteint (troisième année, donc 1990), un chiffre d'affaires de 19 millions, effectivement dépassé cette année là (21,3 millions de francs).

2°) En juillet 1995, un restaurant concurrent à l'enseigne QUICK, comprenant un service drive permettant aux clients d'être servis dans leurs véhicules, ouvrait ses portes à quelques centaines de mètres du restaurant exploité par SEBOL, sur un rond-point de la voie conduisant de l'agglomération d'Antibes au péage de l'autoroute A8. Cette concurrence allait rapidement affecter l'évolution de l'activité de SEBOL, dont le chiffre régressait de 27,1 à 24,8 millions de francs en 1995 et le résultat net à un million de francs. Afin de contrer cette implantation, Mc DONALD'S décidait en 1996 l'ouverture, en face du restaurant QUICK, et par voie de conséquence non loin du restaurant exploité par SEBOL, d'un restaurant Mc DONALD'S aménagé avec un drive.

La location-gérance de ce nouveau restaurant, dit "Antibes Nord", était confiée à Monsieur X... pour vingt ans à partir du 9 octobre 1996, moyennant :

- une redevance de base de 20% du chiffre d'affaires hors taxe avec un minimum de 2.940.000F par an, ramenée, pour 1997 exclusivement à 17 % du chiffre d'affaires avec un minimum de 2.160. 000F.

- une redevance de service de 5 % du chiffre d'affaires hors taxe.

Par un avenant de cession, les droits et obligations de ce contrat

étaient transférés à une EURL dénommée B etamp; O dont Monsieur X... est l'associé unique.

Les prévisions de résultats établies par les services de Mc DONALD'S faisaient état d'un chiffre d'affaires de 20 millions de francs dès la première année, identique pendant les neuf années suivantes et d'un résultat net de 161.000F la première année devant atteindre en moyenne 791.000F au long des dix premières années d'activité, et enfin d'une marge brute d'autofinancement après remboursement du capital des emprunts, de respectivement 452.000F puis 891.000F.

Pour 1997, première année pleine d'exploitation, la société B etamp; O a réalisé un chiffre d'affaires de 13,5 millions de francs seulement, inférieur du tiers aux prévisions et devrait enregistrer une perte nette de 1,2 millions de francs.

3°) Peu après, Mc DONALD'S poursuivait sa politique d'implantation en décidant notamment l'ouverture d'un troisième restaurant à Antibes (dit "Antibes Ouest") et d'un autre point de vente proche à Vallauris. Ces restaurants sont respectivement à moins de cinq et sept kilomètres des sites d'Antibes/Centre commercial Carrefour et Antibes Nord.

Monsieur X... demandait à Mc DONALD'S que lui soit attribuée la location-gérance de ces deux nouveaux fonds, mais seule celle du restaurant d'Antibes Ouest lui était accordée par contrat du 18 juin 1997.

Ce contrat, dont le terme était fixé au 28 avril 2000, avec possibilité pour le locataire-gérant de le prolonger jusqu'au 28

avril 2017, stipule:

- une redevance de base de 15 % du chiffre d'affaires hors taxe avec un minimum de 1.200.000F.

- une redevance de service de 5 % du chiffre d'affaires.

- une redevance d'équipement de 4,5 % du chiffre d'affaires, contrepartie du financement des agencements et matériels du restaurant, dont l'achat et le financement étaient assurés, contrairement aux deux autres locations-gérance, par la société propriétaire et non par le locataire-gérant.

Par avenant du même jour, Monsieur X... transférait à la SARL Les Pins dont il possède l'intégralité du capital, l'intégralité des droits et obligations de ce contrat.

Les prévisions d'exploitation remises par Mc DONALD'S à Monsieur X... étaient les suivantes :

- un chiffre d'affaires initial de 13 millions de francs, devant augmenter de 2% par an,

- un bénéfice net de 133.000F la première année, devant atteindre en moyenne 861.000F par an au cours des dix premières années d'exploitation,

- une marge brute d'autofinancement de 426.000F la première année et de 957.000F par an en moyenne au cours de dix premières années.

Huit mois après son ouverture, au 31 décembre 1997, la société Les Pins (Antibes Ouest) avait fait un chiffre d'affaires de 6,4 millions de francs, soit une tendance annuelle de 9,3 millions de francs, la perte subie pour les huit premiers mois d'activités étant de 440.000F.

Invoquant l'effondrement du chiffre d'affaires de la société SEBOL (de 24,7 millions de francs en 1995 à 18,3 millions en 1996 et, à 11,7 millions de francs en 1997), les forts écarts entre les prévisions d'exploitation remises par la société Mc DONALD'S lors des ouvertures des restaurants (Antibes Nord et Antibes Ouest) et la réalité, l'absence de rentabilité des trois restaurants, la société SEBOL, la société B etamp; O, et, Monsieur Y... X..., ont par acte du 26 juin 1997, assigné la société Mc DONALD'S France devant le Tribunal de commerce de Paris aux fins de la voir condamner à verser en indemnisation du préjudice subi par chacun des demandeurs :

- la somme de 30.000.000F à la société SEBOL, sauf à parfaire,

- la somme de 5.000.000F à la société B etamp; O sauf à parfaire,

- la somme de 10.250F à Monsieur X..., sauf à parfaire,

- la somme de 50.000F à chacun des demandeurs, au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile, et au paiement des dépens.

Par acte du 9 janvier 1998 et conclusions ultérieures après jonction, la société Mc DONALD'S a assigné la société Les Pins aux fins de voir notamment constater la résiliation de plein droit intervenue le 2 janvier 1998 des trois contrats de location-gérance litigieux et condamner solidairement :

a) la société SEBOL, et Monsieur X... à lui payer, au titre des redevances, les sommes de : - 1.867.247,84F avec intérêts au taux légal à compter du ler août 1997 sur 1.266.300F, - 361.800F avec intérêts au taux légal à compter du ler décembre 1997, - 239.147,84F avec intérêts au taux légal à compter du ler janvier 1998 et 16.000F à titre d'indemnité d'occupation journalière à compter du 2 janvier 1998,

b) la société B etamp; O et Monsieur X... à lui verser la somme de 1.533.548,87F avec intérêts de retard au taux bancaire augmentés

de trois points par chaque échéance (article IX-2-3 du contrat), - 24.000F à titre d'indemnité d'occupation journalière à compter du 2 janvier 1998 avec intérêts au taux légal,

c) la société Les Pins et Monsieur X... à lui verser les sommes de: - 504.474,42F à titre de redevances impayées avec intérêts de retard au taux de base bancaire augmentés de trois points pour chaque échéance (article IX-2-3 du contrat), - 16.000F à titre d'indemnité d'occupation journalière à compter du 2 janvier 1998 avec intérêts au taux légal, - et ce, avec anatocisme.

Les parties défenderesses ont complété leurs demandes initiales en invitant le Tribunal à :

- suspendre les effets de la clause résolutoire et leur accorder un délai de deux ans pour régler leurs dettes,

- "fixer la redevance supportable" à 252.000F H.T. pour SEBOL, 794.000F HT pour B etamp; O, et, 934.000F pour Les Pins,

- condamner la société Mc DONALD'S à verser à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi au ler janvier 1998 les sommes de : - 2.000.000F à la société SEBOL, - 2.500.000F à la société B etamp; O, - 2.500.000F à la société Les Pins, à titre très subsidiaire,

- prononcer la résiliation judiciaire des contrats aux torts exclusifs de la société Mc DONALD'S et la condamner à verser : - 9.600.000F à la société SEBOL, - 22.200.000F à la société B etamp; O, - 200.000F à la société Les Pins.

C'est dans ces conditions qu'est intervenu le jugement déféré lequel, il faut le rappeler, a, pour l'essentiel, constaté la résiliation de plein droit le 2 janvier 1998 des trois contrats de location-gérance litigieux, et, condamné chacune des sociétés qui étaient

locataires-gérantes, solidairement avec Monsieur X..., à payer à la société Mc DONALD'S les redevances arriérées que celles-ci avaient cessé de régler dans le courant de l'année 1997.

La Cour a, par arrêt du 9 décembre 1998 : - déclaré irrecevable :

- la demande de la société SEBOL, la société B etamp; O, la société LES PINS et de Monsieur X..., tendant à la requalification des contrats de location-gérance litigieux en baux commerciaux éventuellement complétés par un contrat de licence de marque à titre d'enseigne,

- la demande des mêmes parties appelantes pour son prononcé de la nullité desdits contrats de location-gérance soit pour non application de la loi du 20 mars 1956, soit pour dol, erreur ou défaut de cause, Avant dire droit sur le fond, - désigné Monsieur Jean-Luc Z..., expert, 15 rue Beaujon 75008 PARIS et Monsieur Alain A..., expert, 101 rue de Prony, 75017 PARIS, aux fins, connaissance prise des rapports amiables GANDUR et DUMONTIER (société SEPT) et des pièces qu'ils jugeront utiles de se faire communiquer par les parties, de répondre aux questions que la Cour leur a posées dans les motifs de l'arrêt concernant tant la période antérieure au 1er juillet 1997 que celle postérieure, - dit que la société Mc DONALD'S d'une part, et, les sociétés SEBOL, B etamp; O, LES PINS et Monsieur X..., d'autre part, seront respectivement tenus à titre d'avances sur la rémunération des experts à verser la somme de 20.000 francs, soit 10.000 francs à chacun d'eux, au service de la Régie d'avances et de recettes de la Cour d'appel de PARIS, ce qui fera un total de 40.000 francs.

Les experts Alain A... et Jean-Luc Z... ont déposé leur rapport le 15 octobre 1999.

Dans leurs conclusions récapitulatives après expertise, la société SEBOL, la société B etamp; O, la société LES PINS, et, Monsieur X..., appelants, demandent à la Cour de :

- recevoir les sociétés SEBOL, B etamp; O et LES PINS ainsi que Monsieur Y... X... en leur appel, et les y déclarer fondés,

- infirmer en totalité le jugement rendu par le Tribunal de commerce de PARIS le 18 mai 1998, sauf en ce qu'il a ordonné la jonction des instances 97/062466 et 97/0100823 et débouté la société MC DONALD'S de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, Statuant à nouveau à la lumière du rapport déposé par Messieurs Alain A... et Jean-Luc Z..., Experts,

- dire et juger que la société MC DONALD'S n'a pas exécuté ses obligations contractuelles et n'a pas exécuté de bonne foi les obligations résultant des contrats signés avec les sociétés SEBOL, B etamp; O et LES PINS,

- dire et juger que les sociétés SEBOL, B etamp; O et LES PINS étaient en droit d'opposer l'exception non adimpleti contractu, les contrats n'ayant pas été exécutés de bonne foi par la société MC DONALD'S,

- dire et juger que la société MC DONALD'S est entièrement responsable du non paiement des redevances en 1997 et ne pouvait invoquer ce motif pour résilier de plein droit les contrats,

- dire et juger que la société MC DONALD'S a résilié abusivement les contrats de location gérance, le non paiement partiel des redevances étant dû à sa propre faute,

- la débouter purement et simplement de sa demande en résiliation,

- à titre tout à fait subsidiaire, dire et juger que les fautes commises par la société MC DONALD'S sont de nature délictuelle,

- en conséquence, et quel que soit le régime de responsabilité retenu, condamner la société MC DONALD'S à réparer le préjudice subi

en la condamnant à verser : - à la société SEBOL la somme de 9 600 000 francs ainsi que celle de 1 540 868 francs, montant de ses pertes (y compris carry back) - à la société B etamp; O la somme de 22 200 000 francs ainsi que celle de 2 743 103 francs, au titre de ses pertes - à la société LES PINS la somme de 13 250 000 francs ainsi que celle de 567568 francs pour ses pertes avec intérêts de droit à compter du 2 janvier 1998, date de la résiliation,

- condamner en tout état de cause la société MC DONALD'S à verser les immobilisations à leur valeur comptable, à chacune des sociétés, soit globalement 4 528 333 francs, comme la société MC DONALD'S l'a reconnu dans les deux jeux de conclusions constituant un contrat judiciaire,

- condamner en tout état de cause la société MC DONALD'S à verser à titre de préjudice complémentaire subi du fait de l'exécution forcée faite par la société MC DONALD'S à ses risques et périls : - 2 000 000 francs à la société SEBOL - 2 000 000 francs à la société B etamp; O - 2 000 000 francs à la société LES PINS - 2 000 000 francs à Monsieur Y... X...

- condamner la société MC DONALD'S en tout état de cause et quelle que soit la solution donnée au litige, à verser à Monsieur X... à titre de dommages et intérêts pour le préjudice matériel causé la somme de 7 740 000 francs et la somme de 2 000 000 francs à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral causé,

- à titre infiniment subsidiaire, si la Cour estimait qu'une expertise soit nécessaire pour déterminer le préjudice, condamner la société MC DONALD'S à verser : - à la société SEBOL la somme de 5 000 000 francs à titre de provision - à la société B etamp; O la somme de 10 000 000 francs à titre de provision - à la société LES PINS la somme de 7 000 000 francs à titre de provision - à Monsieur Y... X... la somme de 5 000 000 francs à titre de provision

- condamner la société MC DONALD'S à verser à chacune des sociétés et à Monsieur Y... X... la somme de 100 000 francs au titre de l'article 700 du N.C.P.C.

- condamner la société MC DONALD'S aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement sera effectué directement par Me PAMART Avoué, dans les conditions de l'article 699 du N.C.P.C. La société MAC DONALD'S France, intimée, prie la Cour de :

- débouter Monsieur X..., et les sociétés SEBOL, B etamp; O et LES PINS, de toutes leurs demandes, fins et conclusions.

- confirmer dans toutes ses dispositions le jugement du Tribunal de Commerce de PARIS du 18 mai 1998.

- condamner in solidum les sociétés SEBOL, B etamp; O et LES PINS et Monsieur X... à verser à la S.A. MC DONALD'S FRANCE une somme de 200 000 francs en application de l'article 700 du N.C.P.C.

- les condamner en tous dépens qui comprendront notamment les frais d'expertise, et autoriser la SCP FISSELIER - CHILLOUX - BOULAY à mettre en oeuvre l'article 699 du N.C.P.C. CECI ETANT EXPOSE, LA COUR Considérant que s'agissant de contrats de location-gérance emportant des contraintes exceptionnelles pour leur bénéficiaire (obligations allant de l'obligation de résidence jusqu'à celle de paiement des investissements mobiliers en passant par le respect d'heures et de jours d'ouverture) et de la durée nécessaire pour bénéficier du "retour sur investissement", la Cour ne peut qu'apprécier de la manière la plus attentive qui soit la mise en oeuvre des clauses résolutoires et doit rechercher si les résiliations sont ou non intervenues abusivement à raison du comportement fautif de la société

MAC DONALD'S qui aurait elle-même sciemment laisser les trois sociétés de Monsieur X... tomber en état de déconfiture ; I - Sur le caractère abusif de la résiliation intervenue par le jeu de la clause résolutoire insérée dans les trois contrats de location-gérance en cause :

a) Sur la résiliation des contrats de location-gérance liant les sociétés SEBOL (Carrefour) et B etamp; O, à la société MAC DONALD'S FRANCE :

Considérant que le premier de ces contrats a été conclu le 5 août 1987 et donne à la société SEBOL dont Monsieur X... détient la totalité du capital la location gérance d'un fonds de commerce de restauration rapide situé au Centre Commercial Carrefour à ANTIBES selon les modalités financières suivantes : - dépôt de garantie :

100 000 francs H.T. - paiement initial (frais de dossier) :

120 000 francs H.T. - redevance de base (mensuelle) :

12% du chiffre d'affaires H.T. avec un minimum de 150 000 francs H.T. - redevance de service (mensuelle) :

5% du chiffre d'affaires H.T.

Que le second de ces contrats de location lie la société MAC DONALD'S FRANCE et la société B etamp; O, E.U.R.L dont Monsieur X... est propriétaire, a été conclu le 9 octobre 1996, est situé à cinq cent mètres du restaurant exploité par la société SEBOL avec un "drive"

(service des produits MAC DONALD'S directement aux conducteurs restés au volant de leur voiture), juste en face d'un restaurant QUICK qui avait ouvert quelques mois auparavant ; que ce second restaurant est appelé par les parties "ANTIBES NORD" ; que les modalités financières de cette location-gérance sont les suivantes: - dépôt de garantie :

100 000 francs H.T. - paiement initial (frais de dossier) :

250 000 francs H.T. - redevance de base (mensuelle) :

20% du chiffre d'affaires H.T. avec un minimum de 235.000 francs H.T. - redevance de service (mensuelle) :

5% du chiffre d'affaires H.T.

Que ce contrat a fait l'objet d'un avenant en date du 10 juin 1997 quant aux redevances pour l'année 1997 uniquement : - redevance de base (mensuelle) :

* du 01/01/97 au 31/12/97:

17% H.T. avec un minimum de

180.000 francs H.T.

*du 01/01/98 au 08/10/2016 :

20% H.T. (Inchangé) avec un minimum de 245.000 francs H.T. (donc augmentation de 10.000 francs par rapport au contrat initial) - redevance de service (mensuelle) :

5% du chiffre d'affaires

H.T.(inchangée) ;

Qu'il faut noter ici qu'un troisième contrat de location-gérance sera signé le 18 juin 1997 mais entré en vigueur le 30 avril 1997 ; qu'il portera sur un restaurant qui sera ouvert le 1er mai 1997 à ANTIBES également, et, que les parties désignent sous le nom d'ANTIBES-OUEST, la gestion en étant assurée par la société LES PINS dont Monsieur X... est porteur de la quasi-totalité des parts ;

Considérant que la Cour dira pour les motifs qui suivent que la résiliation des trois contrats litigieux par le jeu des clauses résolutoires qu'ils contiennent est abusive car si celles-ci s'imposent au juge, il n'en demeure pas moins que leur application reste subordonnée aux exigences de l'article 1134 du Code civil, c'est-à-dire qu'elles doivent être exécutées de bonne foi ;

Que tel n'est pas le cas ;

Considérant en effet que les deux premiers contrats de location-gérance, seuls présentement examinés, ont été conclus dans un contexte que les experts ont appelé de "guerre économique" ; que la location-gérance afférente à "ANTIBES NORD" a été le résultat de la construction par la société MAC DONALD'S d'un second restaurant qui a ouvert ses portes en octobre 1996, certes à cinq mètres du premier dit "Centre Commercial Carrefour", mais ce, uniquement aux fins de contenir la concurrence d'un restaurant "QUICK" qui avait ouvert ses portes en juillet 1995, situé en face, et, d'éviter les effets prévisibles d'une perte de clientèle pour le restaurant "Centre Commercial Carrefour" consécutifs à l'arrivée de cet établissement concurrent dans la zone de chalandise du premier ;

Que c'est pourquoi la Cour dit que le restaurant "Centre Commercial Carrefour" (Société SEBOL) et le restaurant "ANTIBES NORD" (Société B etamp; O) forment une entité économique, les deux ayant été conçus pour travailler en synergie contre l' "ennemi commun", QUICK ;

Que si la société MAC DONALD'S FRANCE ne peut donc se voir reprocher d'avoir décidé dans son seul intérêt d'implanter le second restaurant, elle se devait aussi dans la logique de sa réplique stratégique au restaurant "QUICK" d'aider temporairement la société SEBOL ("Carrefour") au cas où l'effet "vases communicants" entre la société SEBOL et la société B etamp; O serait insuffisant à rétablir les conditions de rentabilité de la société SEBOL ;

Que certes, il n'est pas contractuellement prévu comme dans les contrats pétroliers - distributeurs de carburant, mandataires des premiers -, que la société MAC DONALD'S verse des aides à ses

locataires-gérants en cas de pertes -, l'article 2000 du Code civil n'étant pas applicable ici -, - ladite société MAC DONALD'S ayant au contraire inséré nombre de clauses tendant à l'exonération de toute responsabilité ou solidarité quant aux conséquences de la gestion du locataire-gérant (Exemple : Article I - 4 du contrat de location-gérance: "La société loueuse ne garantit ni la valeur ni la rentabilité présente ou future dudit fonds de commerce") ;

Que cependant, il convient d'appliquer les dispositionsté loueuse ne garantit ni la valeur ni la rentabilité présente ou future dudit fonds de commerce") ;

Que cependant, il convient d'appliquer les dispositions de l'article 1156 du Code civil selon lequel "on doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes" ; Que la clause précitée (article I - 4 du contrat de location-gérance) et celles qui excluent toute participation de la société MAC DONALD'S aux pertes de rentabilité de la location-gérance sont stipulées qu'en vue d'une application en temps normal et non comme en l'espèce, en présence d'un cas de "guerre économique" topique ;

Que la société MAC DONALD'S FRANCE a nécessairement admis cette analyse puisque alors qu'à s'en tenir à la rigueur des clauses du bail, rien ne l'obligeait à le faire, elle a le 10 Juin 1997 signé un avenant avec la société B etamp; O prévoyant pour l'année 1997 un abaissement du taux de la redevance ;

Qu'il faut aussi avoir à l'esprit que certes si le locataire-gérant "exploite le fonds de commerce pour son propre compte en qualité de commerçant indépendant" (article IV - 4 du contrat de location-gérance), il l'est pour vingt ans; qu'à l'issue de ce délai, il n'a pas capitalisé la valeur du fonds, n'étant pas propriétaire alors qu'il a été tenu d'investir dans l'aménagement et le matériel d'équipement ; que l'économie de cette convention implique donc que les bénéfices tirés de l'exploitation dudit fonds lui permettent à la fois de rémunérer son travail et de lui assurer un "retour sur investissement" ;

Que les experts A... et Z... ont, avec précision, démonté le mécanisme qui a conduit les sociétés SEBOL et B etamp; O au manque de trésorerie, et, au-delà plus gravement encore, à l'absence de leur rentabilité, en 1997 ;

Qu'ils ont conclu à une bonne gestion des sociétés SEBOL et B etamp; O par Monsieur X... ; que la société MAC DONALD'S prétend en vain qu'il aurait mieux fait de créer une "holding" plutôt qu'un G.I.E., au motif que cela lui aurait permis d'alléger les charges financières ; qu'en effet, les experts, qui ne reprennent pas leur remarque à ce sujet dans leurs conclusions, se sont interrogés à ce sujet mais sans montrer les effets possibles au cas d'espèce, étant observé que la société MAC DONALD'S déconseille fortement à ses gérants de créer une holding ;

Que lesdits experts estiment en réponse à la première question de la Cour que même si un supplément de trésorerie de 3 323 000 francs aurait pu être tiré du maintien des dividendes dans la société et de l'économie résultant d'une diminution de moitié des salaires de

Monsieur X..., cette somme de 3323000 francs aurait été insuffisante pour couvrir les redevances des trois sociétés (SEBOL, B etamp; O et LES PINS) au 31 décembre 1997 qui étaient de 3 905 270 francs ; que plus grave, les experts précisent qu'au rythme des pertes enregistrées par l'ensemble SEBOL-B etamp; O pour les six premiers mois de l'année 1997, ce supplément de trésorerie n'aurait pas plus permis à Monsieur X... de faire face aux pertes ultérieures et qu' "il aurait fallu sensiblement plus que les mesures évoquées (par la Cour dans sa première question) pour que ces sociétés retrouvent de façon durable leur seuil de rentabilité" ;

Considérant que face à cette situation, la société MAC DONALD'S, après de nombreuses et pressantes réclamations de Monsieur X..., a fini par consentir l'avenant du 10 juin 1997 qui contenait un aménagement des redevances de la société B etamp; O pour la seule année 1997 qui passaient de 20% à 17% avec un minimum passant de 235.000 francs H.T. à 180.000 francs ; qu'une première observation s'impose, il est incompréhensible que, compte tenu de la "guerre économique", la société MAC DONALD'S ait demandé un taux de 20% alors que celui de la société SEBOL était de 12% ; que la seconde remarque, c'est que la société MAC DONALD'S se rattrapait de son "geste" puisque à compter du 1er janvier 1998, la redevance de base minimum passait de 235 000 francs H.T. (chiffre initial) à 245.000 francs H.T. ;

Que la société MAC DONALD'S FRANCE, qui se faisait communiquer au moins une fois par mois, (le 5 de chaque mois) les comptes de la société, ne pouvait pas ne pas avoir prévu que le 30 juin 1997, - l'avenant ayant été signé le 10 juin précédent - la perte de la société B etamp; O allait être de 955 000 francs environ, celle de

SEBOL de 850 000 francs (et celle d'ANTIBES OUEST ouvert en mai 1997 de 90.000 francs environ) ;

Qu'elle savait donc d'emblée que l'allégement temporaire de 3 points du taux de redevance de la société B etamp; O était sans aucune mesure avec les remèdes nécessaires à la survie des sociétés SEBOL et B etamp; O ; qu'en effet, les experts A... et Z... ont estimé que l'impact de l'avenant entre le 1er janvier et le 30 juin 1997 n'a entraîné une diminution des redevances de la société B etamp; O que de 265.656 francs seulement (soit une redevance de 1 181 736 francs au lieu de 1 447 392 francs) ;

Considérant que quant à savoir ce que devait faire immédiatement en juin-juillet 1997 la société MAC DONALD'S FRANCE, la Cour estime que:

1°) Celle-ci devait, au lieu d'adresser des réponses presque constamment dilatoires à Monsieur X... (en faisant usage d'un tutoiement, peut-être "partenarial", en tout cas discutable dès lors que les problèmes posés mettaient en jeu l'avenir professionnel d'un locataire-gérant, - une telle situation devant interdire à un dirigeant d'une grande société de jouer sur un tel registre et ce, même s'il a par ailleurs des liens personnels avec son interlocuteur) devait courant juillet 1997 au plus tard, à raison des pertes connues alors au 31 juin, proposé à Monsieur X..., non une mesure ponctuelle telle que la baisse très faible (de trois points) du taux de la redevance 1997 pour la société B etamp; O, mais un plan d'ensemble à valoir jusqu'au 31 décembre 1998 : baisse des redevances pour cette période par application d'un taux très faible et hors norme (puisqu'il fallait selon les experts descendre en dessous de 12% pour que les sociétés SEBOL et B etamp; O "renouent avec la rentabilité" (car à 12%, taux le plus bas normalement pratiqué, il

n'y aurait eu qu'une économie de 608.000 francs en 1997 (rapport page 41 in fine));

Que l'application éventuelle d'un taux très faible "hors de la fourchette de 12 à 18% pour les contrats STRAIGHT LICENCE" est d'ailleurs envisagée à l'article 2 - 1 du VIII "Le contrat de location-gérance" dans le document intitulé "Information précontractuelle" : "le taux de redevance déterminé en fonction des investissements respectifs de la société MAC DONALD'S FRANCE, afin de garantir un juste retour sur investissement pour les deux parties, pourrait en conséquence être sorti de cette fourchette" ; qu'en l'espèce, le retour sur investissement n'était plus assuré pour les sociétés SEBOL et B etamp; O ; 2°) Ce plan de dix-huit mois aurait certes conduit la société MAC DONALD'S à donner le conseil à Monsieur X... de renoncer à une partie de son salaire et de consentir à une compression des frais financiers de ses sociétés, - "recommandations" que cette société pouvait d'autant plus facilement donner que pour respecter la Charte de la Franchise, elle gère elle-même en direct plus de 10% des restaurants et connaît donc parfaitement leurs modalités de gestion ; 3°) Ce plan aurait dû prévoir ce qui se passerait au bout de dix huit mois (1er juillet 1997 - 31 décembre 1998) au vu des résultats des mesures de redressement prises lesquelles devaient être envisagées sous un double aspect, le renflouement de la trésorerie et le dégagement de marges bénéficiaires pour assurer un juste "retour sur investissement" ;

Considérant encore que l'analyse juridique que fait ainsi la Cour du manquement de la société MAC DONALD'S à ses obligations de la convention de location gérance rejoint les observations financières

des experts A... et Z... qui écrivent à la page 64 de leur rapport, après avoir constaté que le résultat net global des trois restaurants (donc y compris "ANTIBES OUEST"), était en 1997 en déficit de 2 700 000 francs et qu'en 1998 il était de 1 400 000 francs, que "cette analyse met en évidence le fait que dans un contexte d'amélioration de la rentabilité des restaurants, des efforts de la part des parties (aménagement des redevances et conseils financiers de la part de MAC DONALD'S pour maîtriser d'avantage les charges fixes, attente d'une amélioration de la situation de ses restaurants avec de la part de Monsieur X..., acceptation d'une perte temporaire de rémunération) auraient pu permettre aux sociétés de traverser la "passe difficile" provoquée par l'ouverture d'un restaurant QUICK en juillet 1995 et par la réplique stratégique de MAC DONALD'S (ouverture d'ANTIBES NORD en octobre 1996)" ; que la Cour rappelle qu'elle a estimé qu'il appartenait à la société MAC DONALD'S de proposer à Monsieur X... de diminuer son salaire dans une proposition d'ensemble sur dix-huit mois ;

Considérant que dans ces conditions, les commandements de payer visant la clause résolutoire ont donc été délivrés de mauvaise foi par la société MAC DONALD'S FRANCE ; que la résiliation de plein droit des contrats de location-gérance n'a pu s'ensuivre ;

b) Sur la résiliation de la société LES PINS :

Considérant que les experts A... et Z... font remarquer que le restaurant ANTIBES OUEST (LES PINS) est viable "sinon en lui-même, tout au moins au sein du groupe composé des deux autres restaurants Centre Commercial Carrefour et ANTIBES NORD, en tout cas sans VALLAURIS" (restaurant non attribué à Monsieur X... mais qu'il

avait souhaité gérer);

Considérant qu'ainsi est souligné le caractère économique indivisible des trois sociétés de Monsieur X... ;

Que par-là même, la résiliation du contrat de location-gérance y afférent est donc tout aussi fautive que celle des locations gérances SEBOL et B etamp; O ; II - Sur les préjudices nés du caractère abusif des résiliations

Considérant que la seule obligation à l'exécution de laquelle la société MAC DONALD'S a failli consistant à présenter à Monsieur X... un plan de dix-huit mois avec "sacrifice" de part et d'autre n'emportait pas garantie du rétablissement de la situation bénéficiaire des sociétés mais avait pour objet de laisser loyalement une chance à Monsieur X... et à ses sociétés de tendre vers ce but ;

Considérant que le préjudice que Monsieur X... a subi du fait de cette absence de "période d'observation" est très limité ;

Qu'il ne peut invoquer la perte de la chance d'exploiter ses sociétés jusqu'à leur terme de manière bénéficiaire puisque les mesures qu'aurait dû proposer la société MAC DONALD'S apparaissent avec le recul du temps inefficaces ;

Qu'en effet les trois sociétés de Monsieur X... ont été à compter de son départ forcé des lieux le 10 juin 1998 gérées par une filiale à 100% de la société MAC DONALD'S FRANCE ; qu'au 31 décembre 1998, soit à l'expiration de la période de dix-huit mois du plan

qu'aurait dû proposer la société MAC DONALD'S FRANCE, malgré de drastiques économies de frais d'administration et de réduction du nombre des salaires "cadres", ce que le "plan" n'aurait pas manqué de prévoir, la société SEBOL présente encore un résultat déficitaire de 132 042 francs, la société B etamp; O celui de 412 107 francs (en accroissant de 136% par rapport au résultat du 2ème trimestre 1997) et la société LES PINS (ANTIBES OUEST), n'est bénéficiaire que de 129 728 francs ; qu'au total le résultat avant impôts des trois sociétés est déficitaire de 414 421 francs au lieu de 549 950 francs au 31 décembre 1998 ;

Que Monsieur X... n'a donc perdu aucune chance de voir dans les dix-huit mois suivant le 1er juillet 1997 ses sociétés redevenir bénéficiaires ;

Qu'en revanche, Monsieur X... a indûment perdu son salaire du 10 juin au 31 décembre 1998, lequel était, après impôts, de 430 000 francs par an

430 000 x 204 = 240 328,77

365 somme arrondie à 240 330 francs ; que la société MAC DONALD'S FRANCE sera donc condamnée à lui verser cette somme à titre de dommages-intérêts ;

Considérant que par ailleurs quant aux immobilisations corporelles figurant dans les bilans des sociétés SEBOL, B etamp; O et LES PINS et

du G.I.E SODEVA pour une valeur nette d'amortissement de 4 528 333 francs et que la société MAC DONALD'S a "récupérées", celle-ci en doit paiement à Monsieur X... et à ses sociétés ;

Qu'au total, la société MAC DONALD'S FRANCE sera condamnée à payer à Monsieur X... la somme de 4 768 663 francs ; III - Sur la demande de réparation du préjudice complémentaire subi par les trois sociétés du fait de l'exécution forcée

Considérant que les sociétés appelantes reprochent à la société MAC DONALD'S d'avoir procédé à leur expulsion forcée alors qu'elle avait connaissance de l'introduction de l'instance en référé introduite devant le Premier Président de la Cour d'appel aux fins de suspension de l'exécution provisoire ; que "cette expulsion perpétrée dans des conditions totalement illégale a causé un très gros préjudice, tant aux trois sociétés qu'à Monsieur Y... X..."; que les quatre appelants estiment leur préjudice à 2 000 000 francs pour chacun d'eux;

Que les appelants soutiennent que la société MAC DONALD'S s'est ainsi rendue coupable de la violation de l'article 31 du décret du 31 juillet 1992 qui prescrit la suspension des poursuites jusqu'au prononcé de l'ordonnance de référé;

Mais considérant que ce texte ne vise que la saisine du Premier Président aux fins de surseoir à l'exécution des mesures ordonnées par le Juge de l'exécution ; que le Juge de l'exécution du Tribunal de grande instance de GRASSE a, par ordonnance du 9 juin 1998, rejeté la demande d'un délai de grâce; qu'il n'a pas été interjeté appel de cette décision ; que le fait que le Premier Président de la Cour

d'appel ait été saisi sur les bases de l'article 524 du Nouveau Code de Procédure Civile de l'arrêt de l'exécution provisoire des chefs du jugement déféré avant l'expulsion, encore que la date de sa saisie ne soit pas mentionnée dans l'ordonnance elle-même, n'était pas un obstacle juridique à la mise en oeuvre des mesures d'expulsion ; qu'il s'ensuit que, compte tenu de la situation juridique respective des parties alors, la société MAC DONALD'S n'a pas commis la faute qui lui est reprochée ;

Que les appelants seront donc déboutés de leur demande de ce chef; IV - Sur le préjudice personnel de Monsieur X...

Considérant que Monsieur X... soutient qu'il a subi un préjudice matériel qui lui est propre au motif qu'il a été chassé dans des conditions odieuses de ces restaurants après y avoir consacré onze ans de sa vie ; que cette "notion" n'est en aucune façon "étrangère aux relations d'affaires" comme le soutient la société MAC DONALD'S FRANCE ;

Considérant, ceci étant, que la Cour a sanctionné le comportement abusif de la société MAC DONALD'S FRANCE dans sa mise en oeuvre de la clause résolutoire; qu'elle en a tiré les conséquences notamment en accordant des dommages-intérêts pour réparation sur perte temporaire de son salaire ; que Monsieur X... ne justifie pas d'un préjudice matériel autre spécifique ;

Qu'en revanche celui-ci invoque à juste titre un préjudice moral ; que les relations d'affaires ayant existé entre les parties n'excluent nullement qu'au-delà des admissibles appréciations divergentes des parties sur les aspects financiers des problèmes,

Monsieur X... ait très mal ressenti le fait qu'après avoir été félicité pendant des années pour ses qualités professionnelles qui étaient telles que son restaurant était un établissement-témoin, la société MAC DONALD'S lui ait opposé avec brutalité la "lettre" de la convention de location-gérance au lieu de son "esprit", - ce que le tutoiement utilisé dans les lettres qui sont adressées à celui-ci à cette époque rend encore plus surréaliste ;

Que la Cour lui accordera la somme de 100 000 francs à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral ; V - Sur la politique d'implantation des restaurants MAC DONALD'S :

Considérant que pour le surplus, la Cour n'accueillera pas l'argumentation que les appelants voudraient tirer d'une prétendue politique d'implantation "sauvage" de restaurants MAC DONALD'S FRANCE au motif que ce serait pour cette société le moyen d'accentuer ses profits en multipliant les redevances dans une zone de chalandise donnée ; que le cas présent n'illustre nullement la thèse des appelants : le restaurant ANTIBES NORD (B etamp; O) a été ouvert pour lutter contre un restaurant QUICK dans la zone de chalandise d'ANTIBES Carrefour (SEBOL), et, le restaurant ANTIBES OUEST (LES PINS) est viable, selon les experts, avec l'ensemble "ANTIBES-NORD-CARREFOUR";

Qu'il s'ensuit que la Cour ne tirera aucune conséquence pécuniaire de cette argumentation qu'elle rejette ; VI - Sur les sommes dues par Monsieur X... et les sociétés SEBOL, B etamp; O et LES PINS à la société MAC DONALD'S FRANCE

Considérant que la Cour disant que les résiliations intervenues le 2

janvier 1998 sont intervenues abusivement, les obligations des appelants vis à vis de la société MAC DONALD'S FRANCE continuent à être régie par les contrats de location gérance dans la mesure où leur exploitation dans les lieux loués a continué jusqu'au 10 juin 1998 ; qu'aucune redevance n'est due en revanche pour la période du 11 juin au 31 décembre 1998, les relations ayant cessé entre les parties par suite de l'expulsion intervenue le 10 juin 1998 ;

Considérant que la société SEBOL et Monsieur X... sont redevables envers la société MAC DONALD'S FRANCE de la somme de : - 1 867 247,84 francs au titre des redevances impayées antérieures au 2 janvier 1998 avec intérêts précisés plus loin, - 1 272 000 francs au titre des redevances postérieures au 2 janvier 1998 : au 9 juin 1998 sur la base de 8.000 francs par jour au titre des redevances calculées sur le chiffre d'affaires de 1997, soit 159 jours (8.000 x 159 = 1.272.000) ;

Considérant que la société B etamp; O et Monsieur X... doivent également verser à la société MAC DONALD'S FRANCE les sommes de: - 1 533 548,87 francs au titre des redevances impayées au 2 janvier 1998 avec intérêts que seront précisés dans le dispositif, - 1 113 000 francs au titre des redevances du 2 janvier 1998 au 9 juin 1998 sur la base de 7.000 francs par jour calculée sur le chiffre d'affaires 1997 ;

Considérant que la société LES PINS et Monsieur X... seront condamnés à verser à la société MAC DONALD'S FRANCE les sommes de: - 504.474,42 francs au titre des redevances impayées au 2 janvier 1998 avec intérêts précisés plus loin, - 1 272 000 francs au titre des redevances du 2 janvier 1998 au 9 juin 1998 sur la base de 8.000

francs par jour au titre des redevances calculées sur le chiffre d'affaires 1997 ; VII - Sur les demandes des parties relatives à l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

Considérant qu'il ne paraît pas inéquitable que chacune des parties supporte la charge des frais irrépétibles qu'elle a exposés ; PAR CES MOTIFS

Vu l'arrêt de cette Cour du 9 décembre 1998,

Infirme le jugement déféré sauf en son principe de condamnation des sociétés SEBOL, B etamp; O, et LES PINS et de Monsieur Y... X... aux redevances dues avant le 2 janvier 1998,

Statuant à nouveau,

Dit que la résiliation des baux liant les sociétés précitées et la société MAC DONALD'S FRANCE par le jeu de la clause résolutoire est abusive,

Dit que celle-ci ne pouvait intervenir qu'au terme d'une période de dix-huit mois à compter du 1er juillet 1997 en cas d'échec des mesures que la société MAC DONALD'S FRANCE avait l'obligation de mettre en oeuvre afin de tendre vers un retour à une situation bénéficiaire des sociétés précitées conforme à l'esprit de l'économie des contrats de location-gérance,

Dit en conséquence que lesdits contrats ont continué à être en vigueur jusqu'au 30 décembre 1998 avec des effets différents selon les périodes, I - Période du 2 janvier 1998 au 10 juin 1998

Dit que pour la période qui s'est poursuivie du 2 janvier au 10 juin 1998, date du départ des lieux, les contrats de location-gérance ont continué de produire leurs pleins effets,

En conséquence,

Condamne solidairement la société SEBOL et Monsieur Y... X... à verser à la société MAC DONALD'S FRANCE les sommes de: 1 272 000 francs au titre des redevances du 2 janvier 1998 au 9 Juin 1998 sur la base de 8000 francs par jour calculée sur le chiffre d'affaire 1997,

Condamne solidairement la société B etamp; O et Monsieur X... à verser à la société MAC DONALD'S FRANCE les sommes de: 1 113 000 francs au titre des redevances du 2 janvier 1998 au 9 juin 1998 sur la base de 7.000 francs par jour calculée sur le chiffre d'affaires 1997,

Condamne solidairement la société LES PINS et Monsieur X... à verser à la société MAC DONALD'S FRANCE les sommes de: 1 272 000 francs au titre des redevances du 2 janvier 1998 au 9 Juin 1998 sur la base de 8000 francs par jour

calculée sur le chiffre d'affaires 1997, II - Période du 10 Juin 1998 au 31 décembre 1998 :

Dit qu'aucune redevance n'est due par les sociétés SEBOL, B etamp; O et LES PINS pour cette période, celles-ci ayant été expulsées des lieux,

Dit que les sociétés en cause présentant des pertes très importantes au 10 juin 1998 ne peuvent prétendre à invoquer un préjudice né de la perte de chance de faire des bénéfices si elles avaient fonctionné durant ce laps de temps,

Sur le préjudice des sociétés SEBOL, B etamp; O et LES PINS :

Condamne la société MAC DONALD'S FRANCE à verser à Monsieur Y... X... la somme de 240.330 francs à titre de dommages et intérêts en réparation de sa perte de chance d'avoir ce revenu salarial au cours de ce délai,

Dit que les intérêts échus depuis plus d'un an au 16 mars 1998 et à chaque date anniversaire de celle-ci porteront eux-mêmes intérêts, au profit de la société MAC DONALD'S FRANCE,

Sur les immobilisations corporelles :

Condamne la société MAC DONALD'S FRANCE à verser aux sociétés SEBOL, B etamp; O, LES PINS et Monsieur X... la somme de 4.528.333 francs à ce titre avec intérêts au taux légal à compter du 13 décembre 1999,

Sur le préjudice personnel de Monsieur X... :

Condamne la société MAC DONALD'S FRANCE à lui verser la somme de 100.000 francs à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,

Sur les demandes fondées sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile :

Déboute les parties de leur demande de condamnation réciproque fondée sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile tant en paiement de leurs frais de première instance que d'appel, - le jugement déféré étant infirmé en ce qu'il a condamné les sociétés SEBOL, B etamp; O, LES PINS et Monsieur Y... X... à verser à la société MAC DONALD'S FRANCE la somme de 50.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Condamne la société MAC DONALD'S FRANCE à payer les 3/4 des dépens de première instance et d'appel, et, Monsieur Y... X..., le 1/4; autorise les avoués des parties à les recouvrer dans cette proportion conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. Le Greffier

Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 1998/14119
Date de la décision : 08/03/2000

Analyses

CONTRATS ET OBLIGATIONS CONVENTIONNELLES - Résolution et résiliation - Résiliation conventionnelle

Etant établi que la société Mac donald's France n'a pas présenté un plan loyal de rétablissement de la situation financière à son locataire-gérant, il s'ensuit que la mise en oeuvre des clauses résolutoires des contrats de location-gérance est entachée de mauvaise foi


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2000-03-08;1998.14119 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award