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19/11/1999 | FRANCE | N°JURITEXT000006935714

France | France, Cour d'appel de Paris, 19 novembre 1999, JURITEXT000006935714


COUR D'APPEL DE PARIS 5è chambre, section B ARRET DU 19 NOVEMBRE 1999 (N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 1998/02978 Pas de jonction Décision dont appel : Jugement rendu le 06/11/1997 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de PARIS 4/2è Ch. RG n :

1996/05441 Date ordonnance de clôture : 24 Septembre 1999 Nature de la décision : X... Décision :

ARRET AU FOND APPELANT : Monsieur DE GANAY Y... ... par la SCP LAGOURGUE, avoué assistée de Maître GAUZERE, Toque B257, Avocat au Barreau de PARIS INTIMEE : Société COFRATEL COMPAGNIE FRANCAISE DE TELECOMMUNI

CATION prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 3O...

COUR D'APPEL DE PARIS 5è chambre, section B ARRET DU 19 NOVEMBRE 1999 (N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 1998/02978 Pas de jonction Décision dont appel : Jugement rendu le 06/11/1997 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de PARIS 4/2è Ch. RG n :

1996/05441 Date ordonnance de clôture : 24 Septembre 1999 Nature de la décision : X... Décision :

ARRET AU FOND APPELANT : Monsieur DE GANAY Y... ... par la SCP LAGOURGUE, avoué assistée de Maître GAUZERE, Toque B257, Avocat au Barreau de PARIS INTIMEE : Société COFRATEL COMPAGNIE FRANCAISE DE TELECOMMUNICATION prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 3O rue de Cambrai 75O19 PARIS représentée par Maître RIBAUT, avoué assisté de Maître REGNIER, Toque C299, Avocat au Barreau de PARIS COMPOSITION DE LA COUR Lors des débats et du délibéré Président : Monsieur MAIN Z... : Monsieur A... et Madame RIFFAULT B... à l'audience publique du 3O SEPTEMBRE 1999 GREFFIER Lors des débats et du prononcé de l'arrêt Madame LAISSAC ARRET X... prononcé publiquement par Monsieur MAIN, Président, lequel a signé la minute avec Madame LAISSAC, greffier La Cour statue sur l'appel formé par Monsieur Jean C... de GANAY contre le jugement contradictoire rendu le 6 novembre 1997 par le Tribunal de grande instance de PARIS, qui, après avoir rejeté l'exception d'inopposabilité de l'action opposée par la société COFRATEL, partie défenderesse, a débouté Monsieur de GANAY de ses demandes, mis les dépens à sa charge et dit n'y avoir lieu à application de l'article 7OO du Nouveau Code de procédure civile au profit de la société COFRATEL. L'appelant expose que, propriétaire du château de Courances à Courances (Essonne), doté depuis 1988 d'un système de protection installé par la société COFRATEL, il a commandé à celle-ci, le 14 juin 1995, à la suite d'une tentative d'effraction,

le remplacement et la modernisation du système de sécurité ; qu'une barrière anti intrusion extérieure, installée à proximité de la grille principale est tombée définitivement en panne le 2O septembre 1995, lendemain de la réception des travaux et n'était pas réparée lorsque, dans la nuit du 11 au 12 octobre 1995, un vol par effraction a été commis dans le château, qui lui a causé un important préjudice, des objets d'art de grande valeur, dont une pendule ancienne exceptionnelle, lui ayant été dérobés. Monsieur de GANAY qui estime que la responsabilité de la société COFRATEL est engagée et qu'elle doit réparer le dommage résultant de la défaillance du matériel qu'elle a vendu et mis en place, reproche au jugement déféré d'avoir rejeté sa demande au motif qu'ayant été informé de la panne par l'installateur, il savait ne pouvoir se fier au dispositif défectueux et devait prendre toutes mesures nécessaires à la sauvegarde de ses biens. Faisant valoir que la société COFRATEL a manqué à son obligation de livrer un système en état de fonctionnement, qu'elle ne justifie d'aucune cause d'exonération de sa responsabilité ni d'aucune faute de négligence de son co contractant ayant contribué à la production du dommage, qu'elle a également manqué à son obligation de remédier à la panne, entraînant l'inefficacité globale du système, ainsi qu'à son obligation de conseil, l'appelant demande à la Cour , par voie de réformation du jugement de - déclarer la société COFRATEL entièrement responsable du préjudice par lui subi, - condamner ladite société à lui payer 3.2OO.OOO francs à titre de dommages-intérêts ainsi que 2O.OOO francs au titre de l'article 7OO du Nouveau Code de procédure civile. La société COFRATEL, intimée, conclut à la confirmation du jugement, réclamant en outre 25.OOO francs au titre de l'article 7OO du nouveau Code de procédure civile, en faisant valoir pour l'essentiel - qu'elle a conclu avec Monsieur de GANAY un contrat de vente et non un contrat d'entreprise et n'était donc pas

tenue d'une obligation de résultat, - qu'elle a exécuté son obligation de livraison, l'installation ayant été réceptionnée sans protestation ni réserve, - qu'à la date du vol Monsieur de GANAY n'avait pas conclu un contrat d'entretien pour l'installation, - qu'elle n'a donc commis aucune faute, ne s'étant pas contractuellement engagée à maintenir en état de bon fonctionnement les éléments de l'installation vendue, - que le vol est la conséquence des propres négligences de Monsieur de GANAY, qui connaissait la panne, n'avait pas souscrit de contrat d'entretien, n'était pas assuré pour ce risque et n'avait pris aucune précaution particulière pour se prémunir contre la défaillance du système, - qu'en toute hypothèse, compte tenu des circonstances connues du vol, le fonctionnement de l'alarme litigieuse n'aurait rien changé, cependant que son non-fonctionnement n'affectait en rien les autres éléments du dispositif de protection, - que la panne ne peut avoir un lien causal direct avec le vol et pourrait tout au plus être à l'origine d'une perte de chance, non démontrée, d'empêcher le vol ou d'en réduire le montant, - que le montant du préjudice n'est pas justifié.

Cela étant exposé, Considérant que l'installation livrée par la sciété COFRATEL comportait une barrière à infra-rouge installée à l'extérieur du château, au niveau de la deuxième porte donnant accès à la cour, destinée à détecter toute intrusion et déclenchant à la fois, selon l'installateur, une alarme audible seulement par le personnel de gardiennage du château et l'éclairage du site par une batterie de spots lumineux puissants ; que ce dispositif de protection était le dernier à franchir par d'éventuels malfaiteurs avant de parvenir au château lui-même, dont la porte d'entrée était protégée par une grille cependant que l'intrusion dans les locaux du château entraînait le déclenchement d'une alarme sonore ; Qu'il

résulte du procès-verbal de la brigade de gendarmerie de Milly la Forêt, versé aux débats, que, lors du vol, commis vers 2H3O le 12 octobre 1995, les cambrioleurs, après avoir fracturé deux portails en fer ainsi que la grille de protection de la porte vitrée donnant accès aux salons du château et brisé un carreau de cette porte, ont pu pénétrer dans deux pièces du rez-de-chaussée, déclenchant alors l'alarme qui, entendue par le gardien, a permis à celui-ci d'appeler la gendarmerie ; qu'en dépit de la promptitude des militaires de la gendarmerie, présents sur les lieux à 2h4O, il n'a pas été possible d'appréhender les auteurs du vol, qui avaient apparemment déjà quitté les lieux avec quelques objets choisis, de belle facture et de grande valeur ; Considérant qu'il est constant que la barrière infra-rouge Nord ne fonctionnait plus depuis le 2O ou le 21 septembre 1995, alors que l'ensemble de l'installation avait été réceptionné après travaux le 19 septembre 1995 par Monsieur D..., gardien, représentant le propriétaire Jean C... de GANAY ; que Monsieur de GANAY ne conteste pas que cette défaillance lui a été signalée par la société COFRATEL; que , selon sa lettre du 31 Octobre 1995, cette société avait diagnostiqué une défaillance nécessitant un remplacement du matériel- sans d'ailleurs préciser quel était le matériel défectueux- mais n'avait pu encore procéder à ce remplacement- ce qui n'a été fait que le 17 octobre 1995, après le vol, ledit matériel étant "en rupture de stock" et ayant dû être commandé au fabricant ; Considérant que la société COFRATEL, vendeur et installateur du dispositif de protection et d'alarme, avait l'obligation de fournir un matériel remplissant son office et apte à fonctionner normalement ; qu'en livrant un dispositif dont un élément essentiel s'est trouvé hors d'état de fonctionner dès le lendemain ou au plus tard le surlendemain de sa livraison et de sa réception, elle a manqué à son obligation, quand bien même la réception était intervenue sans

réserves, et doit supporter les conséquences dommageables de cette faute contractuelle ; Que l'éventuelle faute du fabricant , au demeurant non démontrée puisque COFRATEL s'abstient de fournir la moindre indication quant aux causes précises du défaut de fonctionnement constaté, ne saurait en toute hypothèse exonérer le vendeur-installateur qu'est COFRATEL de sa responsabilité propre vis à vis de son co- contractant ; Que ne saurait davantage produire un effet exonératoire l'information donnée à Monsieur de GANAY que "le contrôle de ce passage a été neutralisé jusqu'à livraison d'une nouvelle barrière", sauf à considérer que celui qui est tenu d'une obligation pourrait s'en exonérer par un simple avertissement donné au créancier de l'obligation ; Que la rupture de stock invoquée, liée à la gestion interne de la société COFRATEL, ne peut, à la supposer établie, être opposée au cocontractant comme une cause d'exonération de responsabilité ; Considérant qu'il n'importe que Monsieur de GANAY n'ait pas encore signé, à la date du vol, le nouveau contrat d'entretien proposé par la société COFRATEL, le manquement reproché à cette société portant sur son obligation de livraison et d'installation conforme d'un matériel en état de fonctionnement et non sur une obligation d'entretien, le matériel litigieux n'ayant en réalité jamais fonctionné correctement ; Qu'au demeurant et à titre surabondant il doit être relevé que la société COFRATEL était liée à Monsieur de GANAY par un contrat d'entretien pour la période du 1er Juin 1995 au 31 Mai 1996 ; que ce contrat n'avait pas été dénoncé par la société COFRATEL, bien qu'il concernât la précédente installation, et pouvait fort bien se poursuivre pour la nouvelle installation, aucune disposition contractuelle ne prévoyant la résiliation de plein droit en cas de changement d'installation, cependant que la société COFRATEL n'a soumis que le 4 octobre 1995, quinze jours après la livraison de la nouvelle installation, un nouveau contrat à la

signature de Monsieur de GANAY; Considérant que la société COFRATEL n'établit à la charge de celui-ci aucune faute ayant pu être à l'origine du dommage ou concourir à sa production ; Que le défaut de souscription d'un contrat d'entretien est, pour les motifs ci-dessus précisés, sans lien avec le dommage, alors qu'en se proposant elle-même à remplacer le matériel défectueux après avoir averti Monsieur de GANAY de son non fonctionnement, la société COFRATEL a nécessairement reconnu qu'elle y était obligée, même en l'absence du contrat d'entretien, au titre de la vente et de l'installation ; Que le défaut d'assurance ne saurait constituer une faute susceptible d'être invoquée par la société COFRATEL, n'ayant pu avoir aucune incidence sur la production du dommage et l'assurance ne pouvant profiter qu'à l'assuré, non au tiers responsable d'un dommage couvert par l'assurance, qui demeure tenu envers l'assureur subrogé dans les droits de l'assuré à concurrence de l'indemnité versée ; Que la société COFRATEL ne peut davantage imputer à faute à Monsieur de GANAY de n'avoir pas pris de précautions particulières destinées à pallier les conséquences de la défaillance de l'installation qu'il lui avait vendue, c'est à dire de l'inexécution de sa propre obligation ; qu'on ne voit d'ailleurs pas quelles mesures eussent permis de remplacer efficacement et à un coût non prohibitif la détection électronique placée sur un point de passage obligé, alors que le château de Courances était déjà protégé par un dispositif assez complet, comprenant la présence d'un gardien à l'intérieur du château lui-même ; Considérant que, s'il est vrai que les autres éléments du système de protection et d'alarme n'étaient pas affectés par la défaillance de la barrière de détection infra-rouge Nord, la société COFRATEL ne peut soutenir sérieusement que le fonctionnement du dispositif litigieux n'aurait rien changé, puisqu'elle a vendu un système complet de sécurité dont tous les éléments, y compris

celui-ci, étaient réputés utiles ; Considérant que, si le système installé par la société COFRATEL, dans son ensemble et le dispositif défaillant en particulier ne pouvaient constituer pour le propriétaire une garantie d'immunité contre le vol, Monsieur de GANAY était fondé à en attendre une réduction des risques de vol et une augmentation des chances d'en appréhender, le cas échéant, les auteurs ; Que le fonctionnement de la barrière infra-rouge aurait permis au gardien d'être alerté plus tôt par l'alarme, silencieuse à l'extérieur mais retentissant chez lui, et donc d'avertir plus tôt la gendarmerie, cependant que l'illumination brutale du site eût été de nature à dissuader les malfaiteurs, même s'il n'est pas certain que ce résultat aurait été atteint ; que le succès d'un vol avec effraction de la nature de celui dont a été victime Monsieur de GANAY repose pour une part essentielle sur la rapidité d'exécution, ainsi que le montre la brièveté du délai -environ 1O minutes- qui a séparé l'intrusion des malfaiteurs dans le château de l'arrivée des militaires de la gendarmerie, qui les ont manifestement manqués de peu ; que, dès lors, tout retard apporté à la progression et à l'action des auteurs du vol et toute minute gagnée dans l'alerte donnée à la gendarmerie auraient donné une chance supplémentaire sérieuse, soit d'empêcher le vol, soit plus vraisemblablement d'en appréhender les auteurs avant qu'ils n'aient disparu avec les objets volés, ou à tout le moins de les mettre en fuite sans qu'ils puissent emporter leur butin ou la totalité de celui-ci ; Considérant que c'est la perte de cette chance, et non l'entier dommage occasionné par le vol, qui constitue le préjudice dont la société COFRATEL doit réparation, puisqu'il est la conséquence directe de sa faute ; que tel n'est pas le cas du vol, la société COFRATEL ne s'étant jamais engagée à fournir un matériel garantissant une protection absolue contre le vol ; Considérant que la Cour trouve dans les pièces

versées aux débats les éléments suffisants pour fixer à 1.5OO.OOO francs le montant de l'indemnité dont l'allocation réparera le préjudice subi par Monsieur de GANAY ; Considérant que la société COFRATEL, qui succombe, devra supporter les dépens de première instance et d'appel et ne peut qu'être déboutée de sa demande fondée sur l'article 7OO du nouveau Code de procédure civile ; Qu'il est équitable de la condamner à payer à Monsieur de GANAY, par application de ce texte, la somme de 2O.OOO francs ; PAR CES MOTIFS - Infirme le jugement attaqué et, statuant à nouveau, - Condamne la société COFRATEL à payer à Monsieur Jean C... de GANAY2O.OOO francs en application de l'article 7OO du Nouveau code de procédure civile, - Déboute ladite société de sa demande fondée sur l'article 7OO du nouveau Code de procédure civile, - La condamne aux dépens de première instance ainsi qu'aux dépens d'appel et, pour le recouvrement de ceux-ci, admet la SCP LAGOURGUE, avoué, au bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. Le Greffier Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006935714
Date de la décision : 19/11/1999

Analyses

VENTE

ommage - Réparation - Perte d'une chance - Système d'alarme défectueux - Vol - Réparation du préjudice total résultant du vol - Possibilité.Est responsable au titre de la perte d'une chance la société qui vend et installe un dispositif de protection et d'alarme dont un des éléments essentiels s'est trouvé hors d'état de fonctionner le lendemeain de sa réception, quand bien même celle-ci serait intervenue sans protestation ni réserve. Le cocontractant, fondé à attendre une réduction des risques de vol, a perdu une chance sérieuse, soit d'empêcher le vol, soit d'en appréhender les auteurs. Le vendeur installateur ne peut s'exonérer de sa responsabilité pour manquement à son obligation de fournir un matériel apte à fonctionner normalement s'il ne rapporte pas la preuve d'une faute du fabricant et se contente d'avertir le créancier de l'obligation du dysfonctionnement considéré.La rupture de stock ayant empêché un remplacement rapide du matériel est également inopposable au cocontractant en ce qu'elle constitue une cause propre à la gestion interne de la société . Dès lors que le manquement porte sur une obligation de livraison et d'installation conforme du matérie, l'absence de contrat d'entretien ne peut être opposée à la victime du vol .Le cocontractant n'a commis aucune faute susceptible d'exonérer la société en ne souscrivant pas de contrat d'assurance , celle-ci ne profitant qu'à l'assuré lui-même et non au tiers responsable du dommage , ni en ne prenant pas les précautions supplémentaires destinées à pallier les défaillances de l'installation, conséquences de l'inéxécution des obligations du vendeur installateur .


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;1999-11-19;juritext000006935714 ?
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