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15/10/1999 | FRANCE | N°1998-24730

France | France, Cour d'appel de Paris, 15 octobre 1999, 1998-24730


COUR D'APPEL DE PARIS 16ème chambre, section B ARRET DU 15 OCTOBRE 1999

(N , 14 pages) Numéro d'inscription au répertoire général :

1998/24730 Pas de jonction Décision dont appel : Jugement rendu le 03/09/1998 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de PARIS 18ème Chambre 2ème Section RG n : 1995/21885 Date ordonnance de clôture : 9 Septembre 1999 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision :

CONFIRMATION APPELANT : Monsieur X... Dominique né(e) le 26/12/1957 à CHATEAU-RENAULT (71) demeurant 299 rue du Faubourg Saint Antoine 75011 PARIS représenté par Maîtr

e HARDOUIN-HERSCOVICI, avoué assisté de Maître GERMAIN DREYFUS, Toque B005, Avoca...

COUR D'APPEL DE PARIS 16ème chambre, section B ARRET DU 15 OCTOBRE 1999

(N , 14 pages) Numéro d'inscription au répertoire général :

1998/24730 Pas de jonction Décision dont appel : Jugement rendu le 03/09/1998 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de PARIS 18ème Chambre 2ème Section RG n : 1995/21885 Date ordonnance de clôture : 9 Septembre 1999 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision :

CONFIRMATION APPELANT : Monsieur X... Dominique né(e) le 26/12/1957 à CHATEAU-RENAULT (71) demeurant 299 rue du Faubourg Saint Antoine 75011 PARIS représenté par Maître HARDOUIN-HERSCOVICI, avoué assisté de Maître GERMAIN DREYFUS, Toque B005, Avocat au Barreau de PARIS APPELANTE : Madame Y... Isabelle épouse X... né(e) le 05/06/1958 à SAVIGNY SUR SEILLE (71) demeurant xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx75011 PARIS représentée par Maître HARDOUIN-HERSCOVICI, avoué assistée de Maître GERMAIN DREYFUS, Toque B005, Avocat au Barreau de PARIS INTIMEE : S.A.R.L. FONCIERE DU CENTRE (ayant absorbée la SCI CAILLAUX) prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 27 rue de Lévis 75017 PARIS représentée par la SCP D'AURIAC-GUIZARD, avoué assistée de Maître PHILIPPE SMADJA, Toque L223, Avocat au Barreau de PARIS, de la SCP SMADJA etamp; Associés INTIMEE : S.C.P. PAVEC COURTOUX es qualité de mandataire liquidateur de la société M.P.C.I. ayant son siège 62 Boulevard de Sébastopol 75003 PARIS représentée par la SCP VARIN-PETIT, avoué INTIME :

Monsieur UZAN Victor demeurant 66 rue Pierre Charron 75008 PARIS représenté par la SCP D'AURIAC-GUIZARD, avoué assisté de Maître PHILIPPE SMADJA, Toque l223, Avocat au Barreau de PARIS, de la SCP SMADJA etamp; Associés COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré PRESIDENT :

A.F. PASCAL CONSEILLER :

C. LE BAIL CONSEILLER :

M. PROVOST-LOPIN DEBATS : A l'audience publique du 10 septembre 1999 GREFFIER : Lors des débats et du prononcé de l'arrêt M.F. MEGNIEN ARRET : Contradictoire Prononcé publiquement, par A.F. PASCAL, Président, laquelle a signé la minute avec M.F. MEGNIEN, Greffier.

*****************

Et après avoir entendu Madame le Président PASCAL en son rapport oral.

Par acte sous seings privés du 11 juillet 1986, les consorts GAGON ont donné en location aux époux Z..., aux droits desquels se trouvent les époux Dominique X.../Isabelle Y... (cession de fonds de commerce du ler juillet 1987), pour 9 ans à compter du 1er janvier 1984, des locaux à usage d'atelier de réparation automobile et station service situés 299 rue du Faubourg Saint Antoine à PARIS 11 ème.

Le 12 novembre 1986, la SNC LEROC et Cie a acquis l'immeuble du 299 rue du Faubourg Saint Antoine.

Le 16 mai 1988, la SNC LEROC et Cie a fait signifier aux époux X... un congé fondé sur les articles 3.1 et 10 du décret du 30 septembre 1953 en vue de mettre fin au bail à l'issue de la deuxième période triennale, au 31 décembre 1990, pour démolition et reconstruction de l'immeuble.

Le 26 septembre 1991, la SNC LEROC et Cie a vendu à la SCI CAILLAUX l'immeuble du 299 rue du FAUBOURG SAINT ANTOINE. En ce qui concerne la situation locative, cet acte mentionnait uniquement que l'immeuble était "loué à des conditions bien connues de l'acquéreur".

Un jugement du tribunal de grande instance de PARIS du 29 mai 1992, rendu entre la SNC LEROC et Cie et les époux X..., a fixé l'indemnité d'éviction due à ceux-ci à 2.381.000.Francs et à 105.300.Francs le montant annuel de l'indemnité d'occupation due par les époux X... à compter du 1er janvier 1990.

Un arrêt de la cour d'appel de PARIS du 9 novembre 1993, rendu entre les mêmes parties a : - réformé le jugement du 29 mai 1992 sur le montant de l'indemnité d'éviction et fixé celle-ci à 3.563. 000. Francs, - confirmé la décision sur le montant de l'indemnité d'occupation, - donné acte à la SARL MODERNISATION PROJETS CONSTRUCTION IMMOBILIERES (MPCI) de son intervention en qualité de propriétaire de l'immeuble du 299 rue du Faubourg Saint Antoine aux droits de la SNC LEROC et Cie qu'elle avait absorbée.

Cet arrêt a été signifié le 23 décembre 1993 par les époux X... à la SNC LEROC et Cie devenue SARL MPCI.

L'arrêt a fait l'objet d'un pourvoi en cassation de la part la SNC LEROC et Cie devenue SARL MPCI, le 22 février 1994. Par ordonnance du 26 octobre 1994, le premier président de la Cour de Cassation a ordonné le retrait du rôle de l'instance ouverte suite au pourvoi formé, en application de l'article 1009.1 du nouveau code de procédure civile, la SNC LEROC et Cie n'ayant pas réglé les causes de l'arrêt du 9 novembre 1993.

Le 3 avril 1995, la SARL MPCI et la SCI CAILLAUX ont fait signifier aux époux X... qu'elles entendaient exercer le droit de repentir prévu à l'article 32 du décret du 30 septembre 1953 et qu'en conséquence la SCI CAILLAUX offrait le renouvellement du bail pour 9

ans à compter du même jour, aux mêmes clauses et conditions que le bail expiré et moyennant un loyer de 150.000.Francs par an.

Le 9 août 1995 ces deux sociétés ont notifié aux époux X... un mémoire préalable à la fixation du prix du bail renouvelé en demandant un loyer de 150.000.Francs à compter du 3 avril 1995.

Le 11 septembre 1995 la SCI CAILLAUX a été dissoute par la réunion de toutes ses parts en les seules mains de la SARL FONCIERE DU CENTRE, laquelle vient depuis à ses droits.

Le 26 octobre 1995, les époux X... ont notifié un mémoire en réponse indiquant que la demande était sans objet, le repentir n'étant pas valable et l'arrêt du 9 novembre 1993 devant s'appliquer. Un jugement du tribunal de commerce de PARIS du 13 mai 1997 a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la SARL MPCI et désigné en qualité de liquidateur la SCP PAVEC COURTOUX.

Le 1er juillet 1997, les époux X... ont déclaré leur créance entre les mains de la SCP PAVEC COURTOUX pour un montant de 4.740.376. Francs.

*

* *

Entre temps, par acte du 19 octobre 1995, la SARL MPCI et la SCI CAILLAUX avaient assigné les époux X... devant le tribunal de grande instance de Paris pour faire juger qu'elles avaient valablement exercé leur droit de repentir, fixer le loyer du bail

renouvelé ainsi que l'indemnité d'occupation due du 1er janvier 1990 jusqu'au 3 avril 1995.

Les époux X..., qui ont appelé en intervention forcée la SCP PAVEC COURTOUX en qualité de liquidateur de la SARL MPCI, la SARL FONCIERE DU CENTRE et Victor UZAN, ont soutenu que le droit de repentir était tardif, que l'indemnité d'éviction devait être mise à la charge des différents propriétaires successifs ainsi que de Victor UZAN.

Par jugement réputé contradictoire du 3 septembre 1998, le mandataire liquidateur de la SARL MPCI n'ayant pas constitué avocat, le tribunal a - déclaré irrecevables en la forme, comme n'ayant pas été reprises en cours d'instance par le mandataire liquidateur, et contraires à l'article 152 de la loi du 25 janvier 1985, l'ensemble des demandes formées par la SARL MPCI agissant en la personne de son gérant Victor Yves UZAN , - déclaré recevable en la forme l'action de la SCI CAILLAUX, - déclaré nul et de nul effet, comme formé hors délai, l'exercice du droit de repentir signifié par la SARL MPCI et la SCI CAILLAUX aux époux X... le 3 avril 1995, - déclaré irrecevables, comme contraires à l'autorité de la chose jugée par l'arrêt de la cour d'appel de PARIS du 9 novembre 1993, les demandes de la SCI CAILLAUX relatives à l'indemnité d'occupation, - dit que la SARL MPCI est seule est débitrice de l'indemnité d'éviction fixée par l'arrêt de la cour d'appel de PARIS du 9 novembre 1993, - dit que la SCI CAILLAUX, la SARL FONCIERE DU CENTRE et Victor UZAN ne sont tenus à aucun titre au paiement de cette indemnité d'éviction, - dit n'y avoir lieu à exécution provisoire, - dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - rejeté toute autre demande plus ample ou contraire et en particulier celle de dommages et intérêts, - dit que les dépens

seront supportés par moitié d'une part par la SCP PAVEC COURTOUX en qualité de liquidateur de la SARL MPCI et la SCI CAILLAUX, et, d'autre part, par les époux X....

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* *

Les époux X... ont relevé appel de ce jugement.

Ils en sollicitent la confirmation en ce qu'il a dit irrecevables les demandes de la SARL MPCI agissant en la personne de son gérant, en ce qu'il a déclaré nul et de nul effet l'exercice du droit de repentir signifié aux époux X... le 3 avril 1995 et en ce qu'il a dit irrecevables comme contraires à l'autorité de la chose jugée les demandes de la SCI CAILLAUX relatives à l'indemnité d'occupation.

Pour le surplus, ils concluent à la réformation de la décision et demandent à la cour de : - dire que l'indemnité d'éviction doit être mise à la charge solidaire des différentes sociétés successivement propriétaires de l'immeuble ainsi que de Victor UZAN, - dire que la SCI CAILLAUX, la société FONCIERE DU CENTRE et Victor UZAN sont tenus solidairement de l'indemnité d'éviction fixée à la somme de 3 563 000 francs par l'arrêt du 9 novembre 1993 outre tous intérêts de retard dans les termes de l'article 20 du décret du 30 septembre 1953 et du droit commun, - les condamner solidairement au paiement conformément aux dispositions de l'article 20, - faire application de l'article 1154 du code civil, - constater qu'ils ont déclaré leur créance à la liquidation judiciaire de la SARL MPCI à hauteur de 4 740 376 francs, - condamner solidairement les intimés, ou les uns à défaut des autres, outre aux dépens, à leur payer une somme de 50 000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Ils soutiennent que la charge de l'indemnité d'éviction peut et doit peser sur les acquéreurs successifs de l'immeuble ; qu'en effet la SCI CAILLAUX, professionnel de l'immobilier, a acquis l'immeuble en connaissance de cause et en particulier du congé donné aux époux X... par son prédécesseur pour démolir et reconstruire ; que cette société s'est engagée à payer l'indemnité d'éviction aux preneurs, la SCI CAILLAUX ayant été purement et simplement subrogée dans les droits et actions de son vendeur, la SNC LEROC ; que, si la vente de l'immeuble loué ne décharge pas les vendeurs de l'obligation de payer l'indemnité d'éviction, il n'en résulte pas que les acquéreurs ne soient pas également tenus à ce paiement ; que d'ailleurs, en application de l'article 1743 du code civil, l'acquéreur est tenu conjointement avec le bailleur des obligations du bail à condition que le bail ait date certaine.

Ils invoquent également une fraude commise par les différentes sociétés ainsi que par Victor UZAN qui est soit associé soit gérant de chacune des sociétés et prétendent que les cessions ont été faites en fraude de leurs droits, ce qui empêche les intimés de se prévaloir de l'inopposabilité de l'arrêt du 9 novembre 1993.

Ils affirment que la transmission universelle de son patrimoine par la SCI CAILLAUX à la société FONCIERE DU CENTRE a transféré à celle-ci les droits et obligations de celle-là et estiment que la SCI CAILLAUX est tenue au paiement de l'indemnité d'éviction dans la mesure où elle a participé à la notification du droit de repentir.

Ils arguent d'une faute grave au sens de l'article 1382 du code civil commise par chacune des sociétés et par Victor UZAN qui ont laissé

croire jusqu'en 1995 aux époux X... que la SNC LEROC était toujours propriétaire de l'immeuble et qui n'ont pas indiqué aux juridictions saisies de la fixation de l'indemnité d'éviction que l'immeuble avait été vendu le 25 octobre 1991.

Ils en tirent la conclusion qu'ils sont fondés à exercer une action directe à l'encontre de la SCI CAILLAUX, qui se survit pour les besoins de sa liquidation, de la société FONCIERE DU CENTRE et de Victor UZAN.

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*] [*

La SCI CAILLAUX, visée dans l'acte d'appel et contre laquelle des demandes sont formulées par les appelants, n'a pas constitué avoué spontanément et n'a pas été assignée selon les prescriptions de l'article 908 du nouveau code de procédure civile.

*]

La SCP PAVEC COURTOUX en qualité de mandataire liquidateur de la SARL MPCI s'en rapporte à justice sur les demandes formées par les époux X... contre la société FONCIERE DU CENTRE, la SCI CAILLAUX et M. UZAN. Elle soulève l'irrecevabilité des demandes de condamnation formées contre la société MPCI en application des articles 47 et 48 de la loi du 25 janvier 1985 et rappelle que les époux X... qui ont déclaré une créance à hauteur de 4 740 376 francs ne peuvent prétendre à une fixation supérieure à la somme déclarée. Elle réclame la condamnation des époux X... à lui payer une somme de 10 000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

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* *

La société FONCIERE DU CENTRE ET Victor UZAN demandent à la cour de :

- dire que le droit de repentir notifié par l'acte du 3 avril 1995 n'était pas tardif en raison du pourvoi en cassation introduit par la société MPCI, - dire que la FONCIERE DU CENTRE, aux droits de la SCI CAILLAUX, n'est pas débitrice de l'indemnité d'éviction, celle-ci ne pouvant être due que par la société MPCI elle-même, bailleresse qui avait notifié aux époux X... un refus de renouvellement de bail, - dire que Victor UZAN n'est pas débiteur d'une quelconque somme à l'égard des époux X..., - rejeter en conséquence toutes les demandes des époux X..., - les condamner, outre aux dépens, à leur payer à chacun une somme de 10.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Ils indiquent qu'au cours de la procédure en fixation de l'indemnité d'éviction, par acte du 26 septembre 1991, la société LEROC a vendu l'immeuble à la SCI CAILLAUX, l'acte ne transmettant pas à l'acquéreur la charge de payer l'indemnité d'éviction et ne subrogeant pas la SCI CAILLAUX dans les droits et obligations de la société LEROC. Ils rappellent que la procédure de fixation de l'indemnité d'éviction s'est entièrement déroulée entre la société LEROC, devenue SARL MPCI, et les époux X..., la SCI CAILLAUX, non concernée par cette instance, n'intervenant à aucun moment.

Ils expliquent qu'en raison de la durée de la procédure, les permis de démolir et de construire ont été atteints par la péremption et qu'un nouveau permis ne pouvant être obtenu dans les mêmes conditions compte tenu de la modification du P.O.S., la SARL MPCI, seule

débitrice de l'indemnité d'occupation, et la SCI CAILLAUX, qui seule pouvait consentir un nouveau bail, ont notifié un droit de repentir ; Ils prétendent que, nonobstant l'introduction dans le code de procédure civile de l'article 500, l'interprétation de l'article 32 du décret du 30 septembre 1953 donnée en 1971 par la cour de cassation doit être maintenue, le délai de pourvoi et le pourvoi en cassation empêchant la décision de passer en force de chose jugée. Ils en tirent la conclusion que le droit de repentir a été valablement exercé.

Ils disent que la SCI CAILLAUX a été absorbée par la SARL FONCIERE DU CENTRE qui a constaté la dissolution de la SCI avec dévolution de son actif et de son passif, que la SCI qui n'a plus d'existence légale a été radiée du registre du commerce et qu'en conséquence la SCI n'est pas "intimée" dans ce dossier.

Ils affirment que la société FONCIERE DU CENTRE n'est pas débitrice de l'indemnité d'éviction en l'absence de clause particulière de l'acte de vente de l'immeuble, de subrogation et en l'état d'une jurisprudence particulièrement claire de la cour de cassation mettant l'indemnité d'éviction à la charge du bailleur ayant délivré le congé, vendeur de l'immeuble.

Ils contestent toute fraude, la vente de l'immeuble ayant eu lieu six ans avant la liquidation judiciaire de la société MPCI, les différentes ventes ou absorption ayant fait l'objet de publicités régulières et aucun élément de preuve n'étant apporté par les époux X.... Sur ce, la Cour,

Considérant qu'il résulte des conclusions non contestées sur ce point de la société FONCIERE DU CENTRE que la SCI CAILLAUX a été absorbée par la société FONCIERE DU CENTRE qui, ayant réuni entre ses mains la totalité des parts de la SCI dont elle était d'ailleurs la gérante, a constaté la dissolution de la SCI avec dévolution de son actif et de son passif par application de l'article 1844-5 du code civil ; qu'il convient donc de constater que la SCI CAILLAUX n'a à ce jour plus d'existence légale ;

Considérant que les dispositions du jugement ayant déclaré irrecevables les demandes de la société MPCI non reprises par le mandataire liquidateur et déclaré irrecevables comme contraires à l'autorité de la chose jugée les demandes de la SCI CAILLAUX relatives à l'indemnité d'occupation ne sont pas contestées en appel ; Sur le droit de repentir :

Considérant que la société FONCIERE DU CENTRE prétend que le repentir notifié le 3 avril 1995 n'était pas tardif dans la mesure où la société MPCI avait formé un pourvoi en cassation contre l'arrêt fixant le montant de l'indemnité d'éviction ; qu'elle soutient que, selon une jurisprudence ancienne, le délai de pourvoi et le pourvoi en cassation empêchent la décision relative à l'indemnité d'éviction de passer en force de chose jugée ;

Considérant que l'article 32 du décret du 30 septembre 1953 est ainsi rédigé :

"Le propriétaire peut, jusqu'à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle la décision est passée en force de chose jugée, se soustraire au paiement de l'indemnité..."

Que l'article 500 du nouveau code de procédure civile dispose :

"A force de chose jugée le jugement qui n'est susceptible d'aucun recours suspensif d'exécution.

Le jugement susceptible d'un tel recours acquiert la même force à l'expiration du délai de recours si ce dernier n'a pas été exercé dans le délai" ;

Considérant qu'il est constant que l'arrêt d'appel, qui n'est en principe susceptible d'aucun recours suspensif, a immédiatement force de chose jugée ; qu'il peut être mis à exécution dès sa notification ; que l'article 32 précité ne fait pas partie des cas expressément précisés par la loi dans lesquels le délai de pourvoi et l'exercice du pourvoi sont suspensifs ;

Considérant que l'arrêt du 9 novembre 1993 a été signifié le 23 décembre 1993 ; que la société MPCI et la SCI CAILLAUX en ayant eu connaissance au plus tard à cette dernière date, le repentir notifié le 3 avril 1995 est tardif ainsi que l'a justement dit le tribunal ; que le jugement doit être confirmé sur ce point ; Sur la charge de l'indemnité d'éviction :

Considérant que les époux X... soutiennent que la charge de l'indemnité d'éviction peut et doit peser sur les acquéreurs successifs de l'immeuble ; qu'ils affirment que la SCI CAILLAUX qui a acquis l'immeuble en connaissance du congé donné aux époux X... et qui est purement et simplement subrogée dans les droits et actions de son vendeur s'est engagée à payer l'indemnité d'éviction ; qu'ils ajoutent que le fait que le vendeur demeure débiteur de l'indemnité d'éviction n'exclut pas que l'acquéreur de l'immeuble en soit

également tenu ; qu'ils estiment qu'en application de l'article 1743 du code civil, l'acquéreur est tenu conjointement avec le bailleur des obligations du bail à condition que ce bail ait date certaine ;

Mais considérant que l'indemnité d'éviction constitue une dette personnelle à la charge du bailleur ayant refusé le renouvellement et non pas une sûreté réelle attachée à la propriété de l'immeuble donné à bail ; que, par suite, la vente d'un immeuble loué ne saurait décharger le vendeur de l'obligation de payer cette indemnité au preneur auquel il a refusé le renouvellement avant cette vente ;

Que l'article 1743 du code civil, aux termes duquel l'acquéreur est tenu des obligations nées du bail envers le preneur dont le bail a date certaine, est en effet inapplicable, lorsque la location a pris fin, par l'effet d'un congé, et que l'ancien locataire, devenu simple occupant, ne se maintient dans les lieux que par application de l'article 20 du décret du 30 septembre 1953 ;

Considérant que la dette d'indemnité d'éviction peut cependant être transmise à l'acquéreur par une clause particulière expresse du contrat de vente ; qu'en l'espèce, contrairement aux affirmations des époux X... l'acte de vente passé le 26 septembre 1991 entre la SNC LEROC et la SCI CAILLAUX ne contient aucune clause de ce genre ; qu'en effet il y est simplement dit que l'immeuble "est loué à des conditions bien connues de l'acquéreur" et que "les parties déclarent qu'elles se régleront directement entre elles de tout prorata de loyers et dépôts de garantie s'il y a lieu" ;

Considérant que, si le droit au maintien dans les lieux, droit de rétention légal, est opposable à l'acquéreur même non tenu au

paiement de l'indemnité d'éviction, la notification d'un droit de repentir par celui-ci, aux côtés du vendeur de l'immeuble tenu de l'indemnité d'éviction, n'emporte nullement acceptation d'assumer avec lui la charge de cette indemnité ;

Considérant par suite que le jugement doit être confirmé sur ce point ; Sur la fraude :

Considérant encore que les époux X... invoquent une fraude commise par les différentes sociétés ainsi que par M. Victor UZAN, qui est soit associé soit gérant de chacune de ces sociétés, les cessions ayant été faites en fraude de leurs droits ; qu'ils ajoutent que constitue une faute grave le fait de leur avoir laissé croire que la société LEROC était toujours propriétaire et de ne pas avoir indiqué aux juridictions saisies de la fixation de l'indemnité d'éviction que l'immeuble avait été vendu le 25 octobre 1991 ;

Mais considérant que le tribunal, par des motifs exacts en fait et pertinents en droit que la cour adopte, a dit que l'ensemble des opérations et mutations entre les sociétés et à l'intérieur de celles-ci ont été réalisées conformément aux règles de forme et de publicité en vigueur, qu'elles sont intervenues entre des personnes morales distinctes et que les époux X... qui exploitent toujours les lieux avec le bénéfice de la garantie de maintien prévue à l'article 20 du décret du 30 septembre 1953 n'apportent aucune preuve d'une faute ou d'une fraude ; qu'il suffit d'ajouter que l'acquéreur, non tenu du paiement de l'indemnité d'éviction, n'était pas tenu d'intervenir à la procédure en fixation de cette indemnité ;

Que le jugement doit encore être confirmé en ce qu'il a dit que la

société FONCIERE DU CENTRE et M. UZAN n'étaient pas solidairement tenus du paiement de l'indemnité d'éviction ; Sur les autres demandes :

Considérant qu'il convient, tant à la demande de la SCP PAVEC COURTOUX que des époux X..., de constater que ceux-ci ont déclaré leur créance à la liquidation judiciaire de la SARL MPCI à hauteur de 4 740 376 francs ;

Considérant que chacune des parties succombant sur partie de ses prétentions et l'appel en cause du mandataire liquidateur de la SARL MPCI étant nécessaire, l'équité n'impose pas de faire application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; que les époux X... doivent supporter les dépens d'appel ;

Par ces motifs, - constate que la SCI CAILLAUX, qui a été absorbée par la SARL FONCIERE DU CENTRE n'a plus d'existence légale et n'est donc pas partie à l'instance d'appel, - confirme le jugement déféré dans toutes ses dispositions, - constate que les époux X... ont déclaré leur créance à la liquidation judiciaire de la SARL MPCI à hauteur de 4 740 376 francs, - rejette toute autre demande des parties, - condamne les époux X... aux dépens et admet les SCP D'AURIAC GUIZARD et VARIN PETIT, avoués, au bénéfice de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

LE GREFFIER,

LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 1998-24730
Date de la décision : 15/10/1999

Analyses

BAIL COMMERCIAL - Indemnité d'éviction - Paiement - Charge - Bailleur ayant délivré congé - Vente de l'immeuble - Portée - /

L'indemnité d'éviction constitue une dette personnelle à la charge du bailleur ayant refusé le renouvellement du bail au preneur et dont il n'est pas déchargé par la vente de l'immeuble


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;1999-10-15;1998.24730 ?
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