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28/03/2024 | FRANCE | N°22/00078

France | France, Cour d'appel de Papeete, Cabinet c, 28 mars 2024, 22/00078


N° 92



CG

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Copies authentiques

délivrées à :

- Me Quinquis,

- Me Tracqui-Pyanet,

le 28.03.2024.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PAPEETE



Chambre Civile



Audience du 28 mars 2024



RG 22/00078 ;



Décision déférée à la Cour : jugement n° 119/add, rg n° 19/00580 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete du 2 mars 2022 ;



Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel

le 14 mars 2022 ;



Appelants :



M. [P] [T], né le [Date naissance 5] 1961 à [Localité 19], de nationalité française, demeurant à [Adresse 16] ;



M. [G] [B] [T], né le [Date naissance 6] 1982...

N° 92

CG

--------------

Copies authentiques

délivrées à :

- Me Quinquis,

- Me Tracqui-Pyanet,

le 28.03.2024.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PAPEETE

Chambre Civile

Audience du 28 mars 2024

RG 22/00078 ;

Décision déférée à la Cour : jugement n° 119/add, rg n° 19/00580 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete du 2 mars 2022 ;

Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 14 mars 2022 ;

Appelants :

M. [P] [T], né le [Date naissance 5] 1961 à [Localité 19], de nationalité française, demeurant à [Adresse 16] ;

M. [G] [B] [T], né le [Date naissance 6] 1982, de nationalité française, demeurant à [Adresse 16] ;

Mme [K] [T], née le [Date naissance 11] 1944 à Huahine, de nationalité française, demeurant à [Adresse 21] ;

Ayant pour avocat la Selarl Jurispol, représentée par Me François QUINQUIS, avocat au barreau de Papeete ;

Intimés :

M. [J] [C] [T], né le [Date naissance 12] 1946 à Huahine, de nationalité française, demeurant à [Adresse 26] ;

Mme [S] [O] [T], née le [Date naissance 12] 1969 à [Localité 22], de nationalité française, demeurant à [Adresse 25] ;

M. [I] [E] [T], né le [Date naissance 2] 1971 à [Localité 17], de nationalité française, demeurant à [Adresse 23] ;

Mme [H] [T], née le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 17], de nationalité française, demeurant à [Adresse 25] ; ces trois derniers ayants-droit de [F] [Y] [T], né le [Date naissance 10] 1948 à Huahine et décédé l 30 mai 2027 ;

Mme [M] [T], née le [Date naissance 3] 1953 à [Localité 22], de nationalité française, demeurant à [Adresse 16] ;

M. [W] [U] [T], né le [Date naissance 9] 1955 à Huahine, de nationalité française, demeurant [Adresse 20] ;

M. [D] [T], née le [Date naissance 14] 1958 à Huahine, de nationalité française, demeurant à [Adresse 24] ;

Représentés par Me Hina TRACQUI-PYANET, avocat au barreau de Papeete ;

Ordonnance de clôture du 1er décembre 2023 ;

Composition de la Cour :

La cause ait été débattue et plaidée en audience publique du 22 février 2024, devant Mme GUENGARD, président de chambre, Mme SZKLARZ, conseiller, Mme BOUDRY, vice présidente placée auprès du premier président, qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;

Arrêt contradictoire ;

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Signé par Mme GUENGARD, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A R R E T,

EXPOSE DU LITIGE :

M. [P] [T], né le [Date naissance 8] 1924 à Huahine, est décédé le [Date décès 4] 2009 à [Localité 22].

Son épouse, Mme [A] [N], née le [Date naissance 13] 1925 à [Localité 22] est décédée le [Date décès 7] 2016.

Ils ont tous deux laissé pour leur succéder les sept héritiers réservataires suivants :

[K] [T],

[J] [T],

[F] [T],

[M] [T],

[L] [T],

[D] [T],

[P] [T].

Par acte transcrit le 30 avril 1999 volume 2639 n°13 les époux [P] [T] ont fait donation à leur petit fils M. [G] [B] [T], fils de M. [P] [T] (fils) du lot n° 2 d'un terrain sis [Adresse 18].

M. [P] [T] avait établi le 19 novembre 2008 un testament en la forme olographe 'en faveur de [P] [T] né le [Date naissance 5] 1961, mon fils, mes droits sur la terre sise à [Localité 22], le lot 11 de la terre [Localité 15] d'une superficie de 422 m2, la maison acquise en pleine propriété, les affaires de la maison, le mobilier existant'.

[F] [T] est décédé laissant pour lui succéder: Mme [S] [O] [T], M. [I] [E] [T], Mme [H] [T].

Par requête enregistrée le 20 juin 2019, M. [J] [T], Mme [S] [O] [T], M. [I] [E] [T], Mme [H] [T], Mme [M] [T], M.[W] [U] [T] et Mme [Z] [T] ont saisi le tribunal foncier de la Polynésie française afin de voir, au visa des articles 901 et 912 du code civil prononcer la nullité du testament de [P] [V] [T] en date du 18 novembre 2008 pour insanité d'esprit, constater que les legs consentis représentent la totalité du patrimoine des époux [P] [T], ordonner la réduction des legs consentis par les époux [T] à M. [P] [T] et à son fils [G] [B] [T] à la quotité disponible, nommer tel expert qu'il appartiendra au tribunal avec pour mission d'estimer les biens de la succession des époux [T], estimer les legs consentis par les époux [T], déterminer la quote-part de chaque héritier dans la succession et la quotité disponible,condamner M. [P] [T] à leur payer la somme de 339.000 cfp en application des dispositions de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française.

Par ordonnance en date du 11 décembre 2019 le juge de la mise en état, siégeant au tribunal foncier de la Polynésie française a, sur le fondement des dispositions de l'article 449-3 du code de procédure civile de la Polynésie française, déclaré le tribunal foncier incompétent pour connaitre de la demande au profit de la chambre civile du tribunal de première instance de Papeete, constatant qu'aucun partage successoral n'est sollicité.

Par jugement en date du 2 mars 2022 le tribunal de première instance de Papeete a :

Rejeté le moyen d'irrecevabilíté soulevée en défense ;

Dit que l'action introduite par M. [R] [T], Mme [S] [O] [T], M. [I] [E] [T], Mme [H] [T], Mme [M] [T] M. [L] [U] [T] et Mme [Z] [T] à l'encontre de M. [P] [T], Mme [K] [T] et M. [G] [T] n'est pas prescrite ;

Renvoyé l'examen de la procédure à l'audience de la mise en état du mercredi 16 mars 2022 et fait injonction à JURISPOL de conclure sur le fond ;

Dans l'attente, sursis à statuer sur les demandes, au fond, des requérants ;

Réservé les dépens.

Par requête en date du 14 mars 2022, M. [P] [T], M. [G] [T] et Mme [K] [T] ont relevé appel de cette décision en demandant à la cour de :

Infirmer en toutes ses dispositions le jugement avant dire droit rendu par le tribunal civil de première instance de Papeete en date du 2 mars 2022,

Et, statuant à nouveau,

Tous moyens au fond étant réservés,

Vu les articles 901 et 1304 du code civil, et 45 et suivants du CPCPF,

Dire et juger les requérants irrecevables en leur action en nullité pour insanité d'esprit du testament en date du 18 novembre 2008 de M. [P] [V] [T], décédé le [Date décès 4] 2009, en raison de la prescription,

Condamner au paiement de la somme de 400.000 F CFP au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par leurs dernières conclusions en date du 24 avril 2023 M. [P] [T], M. [G] [T] et Mme [K] [T] maintiennent leurs demandes ajoutant celle de voir rejeter toute demandes, fins et conclusions contraires.

Par leurs dernières conclusions en date du 30 novembre 2023 M. [R] [T], M. [L] [U] [T], Mme [S] [O] [T], M. [I] [E] [T], Mme [H] [T], Mme [M] [T] et Mme [Z] [T] demandent à la cour de bien vouloir :

Vu l'article 2262 du code civil applicable en Polynésie française,

Débouter les appelants de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

Déclarer l'action en nullité du testament de M. [P] [V] [T] pour insanité d'esprit recevable,

A titre subsidiaire,

Vu l'article 2234 du code civil,

Vu le principe général du droit en matière de prescription,

Débouter les appelants de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

Dire et juger que la prescription quinquennale a été suspendue contre les exposants qui ont été dans l'impossibilité d'agir à défaut d'avoir connaissance avant le 15 mars 2019 du testament de M. [P] [V] [T] du 18 novembre 2008,

Confirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions,

Condamner M. [P] [T] à leur payer la somme de 450.000 FCP au titre de l'article 407 du code de procédure civile local, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction d'usage au profit de l'avocat soussigné.

L'ordonnance de clôture est inervenue le 1er décembre 2023.

MOTIFS DE LA DECISION :

Aux termes des dispositions de l'article 1304 du code civil dans sa version applicable en Polynésie française, dans tous les cas où l'action en nullité ou en réscision d'une convention n'est pas imitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans.

Ce temps ne court dans les cas de violence que du jour où elle a cessé, dans les cas d'erreur ou de dol du jour où ils ont été découverts.

Le temps ne court, à l'égard des actes faits par un mineur que du jour de la majorité ou de l'émancipation et à l'égard des actes faits par un majeur protégé que du jour où il en a eu connaissance , alors qu'il était en situation de les refaire valablement. Il ne court contre les héritiers de l'incapable que du jour du décès s'il n'a commencé à courir auparavant.

M. [R] ([J]) [T], Mme [S] [O] [T], M. [I] [E] [T], Mme [H] [T], Mme [M] [T] M. [L] [U] [T] et Mme [Z] [T] poursuivent l'action en nullité du testament établi par son père sur le fondement des dispositions des articles 414-1 du code civil .

Aux termes des dispositions de l'article 414-1 du code civil pour faire un acte valable, il faut être sain d'esprit. C'est à ceux qui agissent en nullité pour cette cause de prouver l'existence d'un trouble mental au moment de l'acte. L'article 901 du code civil prévoit quant à lui que pour faire une libéralité, il faut être sain d'esprit. La libéralité est nulle lorsque le consentement a été vicié par l'erreur, le dol ou la violence.

Les dispositions de l'article 1304 du code civil telles que rappelées s'appliquent à la fois aux nullités pour vices de consentement mais également aux actions en nullité d'actes unilatéraux, sanctionnant la transgression de règles protectrices d'intérêt privé.

Tel est le cas de l'action en nullité engagée contre un testament poursuivie sur le fondement de l'article 414-1 du code civil.

Dès lors l'action en nullité du testament du 19 novembre 2008 était ouverte à compter du décès de M. [P] [T] soit le [Date décès 4] 2009 et, en considération du délai de prescription de cinq ans applicable, ce délai expirait le 17 novembre 2014.

Sur l'interruption de la prescription :

L'adage contra non valentem invoqué par les intimés n'a vocation à s'appliquer que si le demandeur à l'action, souhaitant faire courir le délai de prescription uniquement à compter du jour de la connaissance des causes de la nullité, établit son impossibilité absolue d'agir, ce qu'ils rappellent au demeurant, ajoutant en leurs conclusions que cette impossibilité absolue doit résulter d'un empêchement résultant soit de la loi, soit de la convention, soit de la force majeure.

Si un légataire peut ne pas avoir connaissance de l'acte qui l'institue comme tel avant le décès, les intimés sont en l'espèce les enfants du de cujus et ses héritiers réservataires, de sorte qu'ils étaient, conformément à l'article 724 du code civil, saisis des biens, droits et actions du défunt à la date de son décès et il leur appartenait de saisir immédiatement un notaire pour s'en informer.

Ce n'est donc que par leur manque de diligence dans la demande d'ouverture de la succession de leur père et de la connaissance de ses dernières volontés qu'ils déclarent avoir ignoré le testament qu'ils contestent et qui avait été ouvert le 12 août 2010 par Me [X], notaire, un tel défaut de diligence ne revêtant pas les caractéristiques de la force majeure.

A la date de l'introduction de leur action celle-ci était donc prescrite et le jugement attaqué sera infirmé en ce qu'il a statué autrement.

La procédure se poursuivra néanmoins devant le premier juge afin de statuer sur la demande de réduction du legs.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Chaque partie conservera la charge de ses dépens d'appel sans qu'aucune raison d'équité ne commande de faire application des dispositions de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement attaqué en ce qu'il a :

Rejeté le moyen d'irrecevabilíté soulevée en défense,

Dit que l'action introduite par M. [R] [T], Mme [S] [O] [T], M. [I] [E] [T], Mme [H] [T], Mme [M] [T] M. [L] [U] [T] et Mme [Z] [T] à l'encontre de Monsieur [P] [T], Mme [K] [T] et M. [G] [T] n'est pas prescrite,

Statuant sur le chef infirmé :

Déclare M. [R] [T], Mme [S] [O] [T], M. [I] [E] [T], Mme [H] [T], Mme [M] [T], M.[W] [U] [T] et Mme [Z] [T] irrecevables en leur action en nullité de testament,

Confirme pour le surplus le jugement attaqué,

Déboute les parties de toute demande plus ample ou contraire,

Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens d'appel.

Prononcé à Papeete, le 28 mars 2024.

Le Greffier, Le Président,

signé : M. SUHAS-TEVERO signé : C. GUENGARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Papeete
Formation : Cabinet c
Numéro d'arrêt : 22/00078
Date de la décision : 28/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-28;22.00078 ?
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