N° 146
SE
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Copie exécutoire
délivrée à :
- Me Gonzalez,
le 17.04.2023.
Copies authentiques
délivrées à :
- Me Gaultier,
- Me Abgrall,
le 17.04.2023.
REPUBLIQUE FRANCAISE
COUR D'APPEL DE PAPEETE
Chambre Civile
Audience du 13 avril 2023
RG 21/00304 ;
Décision déférée à la Cour : ordonnance JME n°17/595, rg 17/00595 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete du 23 août 2019 ;
Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 10 août 2021 ;
Appelant :
M. [F] [K], né le [Date naissance 1] 1934 à [Localité 11], de nationalité française, demeurant à [Adresse 7] ;
Représenté par Me Brigitte GAULTIER, avocat au barreau de Papeete ;
Intimés :
Les ayants droit de [P] [S] :
Mme [T] [S], née le [Date naissance 3] 1965 à [Localité 5], de nationalité française, demeurant à [Adresse 9] ;
M. [H] [S], né le [Date naissance 4] 1964 à [Localité 5], de nationalité française, demeurant à [Adresse 12] ;
Mme [V] [S], née le [Date naissance 2] 1951 à [Localité 13], de nationalité française, retraitée, demeurant [Adresse 10], ayant domicile élu chez Mme [T] [S], demeurant à [Adresse 9] ;
Représentés par Me Anne GONZALEZ, avocat au barreau de Papeete ;
La Snc La Maison Blanche, n° Tahiti 380824, dont le siège social est sis à [Localité 6] à côté libre service Moorea ;
Représentée par Me Patrick ABGRALL, avocat au barreau de Papeete ;
Ordonnance de clôture du 22 août 2022 ;
Composition de la Cour :
La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 27 octobre 2022, devant M. SEKKAKI, conseiller faisant fonction de président, Mme SZKLARZ, conseiller, Mme TEHEIURA, magistrat honoraire de l'ordre judiciaire aux fins d'exercer à la cour d'appel de Papeete en qualité d'assesseur dans une formation collégiale, qui ont délibéré conformément à la loi ;
Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;
Arrêt contradictoire ;
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;
Signé par M. SEKKAKI, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
A R R E T,
EXPOSE DU LITIGE :
Faits :
Par acte authentique en date du 14 mai 1979, M. [P] [S] a donné à bail à M. [F] [K] un terrain dépendant de la terre [Localité 8] 1 sis à [Localité 6] de 5418 m² 20 dm² et les constructions y édifiées consistant en une maison d'habitation en cours de construction et un abri pour groupe électrogène, pour une durée de 40 années consécutives ayant commencé à courir le 1er mai 1979 et moyennant un loyer annuel de 720 000 F CFP.
Par acte authentique en date du 9 juillet 1996, M. [F] [K] a sous- loué à M. [W] [A] et Mme [E] [G] épouse [A] une partie de l'immeuble ci-dessus moyennant un loyer de 190 000 F CFP.
Procédure :
Par requête enregistrée au greffe le 4 juillet 2017 et suivant acte d'huissier des 22, 23 et 30 juin 2017, M. [F] [K] a fait assigner [T] [S], [H] [S], [V] [S] et [J] [O] devant le juge des référés du tribunal civil de première instance de Papeete afin de :
- Voir déclarer le commandement de payer délivré au requérant nul et de nul effet,
- Se déclarer incompétent au regard d'une contestation sérieuse,
- Condamner [J] [O] à le relever et le garantir de tout condamnation éventuellement prononcée à son encontre,
- Condamner conjointement et solidairement les consorts [S] à lui verser la somme de 150 000 F CFP par application de l'article 407 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
[J] [O] et la SNC LA MAISON BLANCHE («la SNC») sont intervenues volontairement à l'instance.
Par ordonnance du 16 novembre 2017, le juge des référés du tribunal civil de première instance de Papeete a :
- Débouté [J] [O] et la SNC LA MAISON BLANCHE de leur demande d'irrecevabilité de qualité à agir de [T] [S], [H] [S], [V] [S] et de nullité subséquente du commandement de payer,
- Dit n'y avoir lieu à référé au regard d'une contestation sérieuse,
- Vu l'urgence,
- Renvoyé l'affaire à l'audience du tribunal civil de première instance de Papeete en date du 6 décembre 2017 à 8 heures pour qu'il soit statué au fond,
- Laissé à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles qu'elle a pu engager,
- Condamné [T] [S], [H] [S] et [V] [S] aux dépens.
Par ordonnance en date du 23 août 2019, le juge de la mise en état du tribunal civil de première instance de Papeete a :
- Ordonné à [F] [K] et à la SNC de libérer les lieux, à savoir l'immeuble sis à [Localité 6] comprenant un terrain dépendant de la terre [Localité 8] de 5418m² 20dm²,
- Ordonné en tant que de besoin l'expulsion de [F] [K] ainsi que tout occupant de son chef, au besoin avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier,
- Ordonné en tant que de besoin l'expulsion de la SNC ainsi que tout occupant de son chef, au besoin avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier,
- Condamné in solidum [F] [K] et la SNC à payer aux consorts [S] ès qualité d'ayants droit de [P] [S] une indemnité mensuelle et provisionnelle d'occupation de 153 714 F CFO du 1er mai 2019, date du terme du bail, jusqu'au jour de la libération des lieux,
- Condamné in solidum [F] [K] et la SNC à payer aux consorts [S] ès qualité d'ayants droit de [P] [S] la somme de 120 000 F CFP sur le fondement de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française,
- Condamné in solidum [F] [K] et la SNC aux dépens de l'incident.
Le juge de la mise en état, après avoir rappelé sa compétence d'attribution, a souligné que le bail initial interdisait toute sous-location, constatait qu'une sous-location était consentie en 1996 et que la SNC occupait les lieux. Il a jugé que [F] [K] qui excipait d'une novation du contrat n'apportait aucun élément en ce sens. Il a rappelé que les consorts [S] avait par acte d'huissier rappelé à [F] [K] la fin des 40 années du bail et son obligation de quitter les lieux à son terme le 1er mai 2019, puis lui avait adressé une sommation le 22 mai 2019, qu'aucune reconduction tacite ne peut être invoquée et que la SNC occupe les lieux sans droits ni titre, de sorte que l'obligation de quitter les lieux n'est pas sérieusement contestable.
Par jugement n° RG 17/00595 - N° Portalis DB36-W-B7B-CHHX en date du 21 juin 2021, le tribunal civil de première instance de Papeete a :
- Déclaré sans objet les demandes aux fins d'acquisition de la clause résolutoire ou d'extinction en raison du terme du bail,
- Condamné M. [F] [K] à payer à Mme [T] [S], M. [H] [S] et Mme [V] [S] la somme totale de 7 139 673 F CFP au titre de l'arriéré locatif au 11 décembre 2019,
- Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 24 mai 2017 pour la somme de 5 824 846 F CFP et pour le surplus à compter de la décision,
- Condamné la SNC LA MAISON BLANCHE à payer à Mme [T] [S], M. [H] [S] et Mme [V] [S] la somme de 823 114 F CFP correspondant aux indemnités d'occupation dues entre le 1er mai et le 11 décembre 2019, outre intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision,
- Dit que la SNC LA MAISON BLANCHE et M. [F] [K] seront condamnés in solidum au paiement des sommes susvisées à l'égard de Mme [T] [S], M. [H] [S] et Mme [V] [S] dans la limite des sommes mises à leur charge respective,
- Dit que la SNC LA MAISON BLANCHE sera tenue de garantir M. [F] [K] des condamnations prononcées à son encontre dans la limite des sommes mises à sa charge,
- Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil,
- Débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- Dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire de la présente décision,
- Condamné M. [F] [K] et la SNC LA MAISON BLANCHE in solidum à payer à Mme [T] [S], M. [H] [S] et Mme [V] [S] la somme de 150 000 F CFP au titre de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française,
- Condamné M. [F] [K] aux dépens de la présente procédure, lesquels comprendront, en outre, le coût du commandement de payer du 24 mai 2017, la signification de la lettre du 24 octobre 2018, la sommation de restituer les lieux du 22 mai 2019, ainsi que les frais des actes résultants de l'ordonnance du 3 octobre 2019,
- Condamné la SNC LA MAISON BLANCHE au paiement du coût de signification de la lettre du 20 décembre 2018 et de la sommation de quitter les lieux du 22 mai 2019.
Le tribunal a constaté que les lieux avaient été libéré rendant sans objet les demandes aux fins d'acquisition de la clause résolutoire ou d'extinction en raison du terme du bail.
Il a considéré ensuite que comme justement relevé par le juge de la mise en état, aucune novation n'était démontrée et M. [K] était encore titulaire du bail jamais dénoncé et restait tenu des obligations à l'égard du bailleur de sorte que les consorts [S] étaient fondés à réclamer l'intégralité des loyers impayés.
Il a également jugé qu'il était constant que la SNC était occupante des lieux sans droit ni titre faute de démonstration de l'existence d'un bail avec le locataire ou les sous-locataires, mais qu'aucune charge ne saurait être mise à la charge de la SNC avant le 1er mai 2019, la cession de leurs parts par Mme [A] n'étant pas démontré et la co-gérante de la NSC ne pouvant être tenue à titre personnel des sommes réclamées.
M. [F] [K] a relevé appel de l'ordonnance du juge de la mise en état et de ce jugement par requête enregistrée au greffe le 10 août 2021.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 août 2022, et l'affaire fixée à l'audience de plaidoirie du 27 octobre 2022.
A l'issue de celle-ci, les parties ont été informées que la décision, mise en délibéré, serait rendue le 8 décembre 2022 par mise à disposition au greffe, délibéré prorogé au 13 avril 2023.
Prétentions et moyens des parties :
M. [F] [K], appelant, demande à la Cour par dernières conclusions régulièrement transmises le 28 avril 2022, de :
- Recevoir le concluant en son appel formé à l'encontre des ordonnance mise en état du 23 août 2019 et jugement du 21 juin 2021,
- L'y déclarant bien fondé, infirmer ces décisions en toutes leurs dispositions, et statuant à nouveau,
-Dire et juger que le concluant a résilié amiablement le bail liant les parties et n'a plus la qualité de preneur,
- Dire et juger que le preneur est la SNC LA MAISON BLANCHE, et qu'elle est seule à l'origine des loyers impayés,
- En conséquence, déclarer le commandement de payer délivré au concluant nul et de nul effet,
- Débouter les consorts [S] de toutes leurs demandes, fins et conclusions contraires,
- Les débouter de toute demande en paiement dirigée contre le concluant,
- Les condamner conjointement et solidairement à rembourser au concluant la somme de 561 172 F CFP perçue par voie de saisie attribution, majorée des intérêts légaux à compter du 4 novembre 2019,
- Condamner conjointement et solidairement les consorts [S] à payer au concluant la somme de 500 000 F CFP par application de l'article 407 du code de procédure civile local, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction d'usage,
- A titre subsidiaire confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SNC LA MAISON BLANCHE à garantir le concluant de toute condamnation prononcée à son encontre, et la débouter de ses demandes à titre de frais irrépétibles.
M. [K] expose avoir contracté un bail avec [P] [S] le 14 mai 1979 puis, n'ayant plus l'usage de ce bien l'avoir donné en sous-location, sans souvenir d'avoir régularisé un contrat à ce titre ni conservé une copie. Il affirme que les époux [A] avaient libéré lies lieux de fort longue date et que les consorts [S] en étaient parfaitement informés. Il affirme n'avoir réglé aucun loyer depuis toutes ces années, ni se l'être fait réclamer, n'ayant jamais été destinataire de la mise en demeure du 20 mars 2017.
Il expose que Mme [A] a constitué avec Mme [O] une SNC LA MAISON BLANCHE en 1996 pour exploiter un fonds de commerce au sein de la maison louée à M. [S], Mme [A] cédant ses parts à Mme [O] le 10 février 1999 qui elle-même cédait une partie de ses parts à son époux, M. [B] le 9 mars 1999. M. [K] indique que les consorts [O]-[B] occupaient les lieux depuis 1999, ce que devait bien savoir les consorts [S] mais qu'il ignorait, respectant le contrat de location jusqu'en juillet 2011. M. [K] indique que dès le mois de décembre les loyers étaient versés directement par la SNC LA MAISON BLANCHE.
Il considère qu'une novation s'est opérée créant un lien contractuel entre la SNC LA MAISON BLANCHE et M. [S] qui a accepté le paiement des échéances par ce nouvel occupant, qu'il ne peut être tenu d'aucune solidarité avec la SNC, qu'il ne lui a rien été demandé depuis 2011. Il précise qu'il ignorait devoir être encore tenu d'une quelconque obligation, évoquant un bail verbal conclu entre la SNC et M. [S] dès 2011, de sorte qu'il n'est en rien concerné par les décomptes d'arriérés de loyers, ni ne peut être blâmé pour n'avoir pas respecté le formalisme lié à la résiliation du bail.
Il conteste enfin le décompte effectué, ne pouvant être tenu des loyers dus entre l'ordonnance du juge de la mise en état et le départ des lieux de la SNC.
La SNC LA MAISON BLANCHE, intimée et appelante incidente, par dernières conclusions régulièrement déposées le 21 mars 2022, demande à la cour de :
- Infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a prononcé des condamnations à l'encontre de la SNC LA MAISON BLANCHE et dit pour le surplus qu'elle sera tenue de garantir M. [F] [K],
- Constater que les époux [A] sont restés les sous locataires de M. [F] [K] et qu'ils n'ont pas été appelés à la cause par celui-ci,
- En tout état de cause constater que M. [F] [K] est demeuré titulaire du bail signé le 14 mai 1979 et qu'il reste tenu de ses obligations à l'égard du bailleur,
- Débouter M. [F] [K] et les consorts [S] de toutes leurs demandes, en ce qu'elles sont dirigées contre la SNC LA MAISON BLANCHE,
- Condamner M. [F] [K] à payer à la SNC LA MAISON BLANCHE la somme de 300 000 F CFP pour frais irrépétibles en cause d'appel, ce par application de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française,
- Condamner le même aux entiers dépens.
Elle rappelle que le bail de sous-location du 9 juillet 1996 précise expressément que le bail n'emporte ni novation, ni dérogation et que [F] [K] reste garant et répondant solidaire des époux [A]. Elle indique également que la publicité légale du 9 octobre 1996 prévoit que Mme [A] a apporté à la SNC LA MAISON BLANCHE des éléments de son fonds de commerce étant précisé que le droit au bail ne fait pas partie de cet apport et reste la propriété des époux [A]. Elle n'est donc titulaire d'aucun droit et tenue d'aucune somme.
Mme [T] [S], M. [H] [S] et Mme [V] [S], intimés, par dernières conclusions régulièrement transmises le 15 juin 2022, demandent à la Cour de :
- Déclarer l'appel de M. [F] [K] irrecevable, en tout cas mal fondé,
- Débouter M. [F] [K] de l'intégralité de ses demandes,
- Débouter la SNC LA MAISON BLANCHE de son appel partiel,
- Confirmer l'ordonnance du 23 août 2019 de même que le jugement du 21 juin 2021 en toutes leurs dispositions,
Y ajoutant,
- Condamner M. [F] [K] au paiement d'une indemnité de 200 000 F CFP au bénéfice des consorts [S], pour appel abusif et dilatoire,
- Condamner M. [F] [K] à payer aux ayant droit de M. [S] la somme de 550 000 F CFP au titre des frais irrépétibles d'appel ainsi que les entiers dépens de première instance, en ce compris les frais de commandement de payer à hauteur de 29 950 F CFP et de notifications par huissier des courriers et sommation de quitter les lieux à hauteur de 103 119 F CFP et d'appel.
Après un long résumé des faits, ils s'emploient à contredire les arguments de M. [K], pour parvenir finalement à développer un moyen unique résultant de ce que celui-ci était tenu du bail jusqu'à son terme, que le bail de sous-location l'engageait solidairement avec ses sous-locataires, aucune novation ne pouvant résulter de la situation faute de démonstration d'une quelconque volonté en ce sens, le paiement des loyers par un tiers étant indifférent.
Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions et moyens dont la Cour est saisie, il est renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions d'appel des parties.
MOTIFS DE LA DECISION :
La cour rappelle, à titre liminaire, qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de «constatations» ou à «dire et juger» qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions, en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques, mais uniquement des moyens.
1. Sur la recevabilité de l'appel :
Par ce qui est manifestement une clause de style sans mesure de ses implications juridiques, les consorts [S] demandent dans le dispositif de leurs conclusions de déclarer l'appel irrecevable, sans jamais préciser quel fondement juridique, quelle méconnaissance d'un délai ou d'une forme quelconque viendrait appuyer leur demande.
L'appel a été interjeté dans les formes et délai légaux et doit être déclaré recevable.
2. Sur le fond :
Il résulte de l'article 1134 du code civil dans sa version applicable en Polynésie française que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
M. [F] [K] a contracté avec M. [P] [S] un bail devant notaire le 14 mai 1979, l'engageant pour 40 années du 1er mai 1979 au 1er mai 2019.
Il n'apporte à aucun moment la preuve de ses allégations sur la fin anticipée de ce bail, sur l'existence d'un bail verbal qui y aurait mis fin et ne justifie à aucun moment d'une novation, ni par des éléments factuels étayés par des preuves, ni même par une démonstration juridique suffisante : il ne justifie pas d'un lien juridique entre le bailleur et de nouveaux locataires, ni même d'une quelconque manifestation de volonté de le décharger de son obligation au bail.
Son début d'argumentation est du reste contredite par sa propre démonstration : s'il entend fondé l'existence d'une novation du bail litigieux dès 1999, par le paiement des loyers par un tiers, ce qu'il ne démontre pas, il explique lui-même avoir poursuivi le paiement desdits loyers jusqu'en 2011.
Au contraire, les actes des consorts [S] démontrent leur volonté de réclamer à M. [K] l'exécution de ses obligations, par l'envoi d'une lettre de mise en demeure le 20 mars 2017, puis d'un commandement de payer le 24 mai 2017, aucun autre acte antérieur ne venant confirmer les assertions de M. [K].
Il est également démontré qu'il a conclu un contrat de sous-location le 9 juillet 1996, lequel, loin de le désengager, stipule au contraire son engagement solidaire avec ses sous-locataires, aucun acte ultérieur n'étant venu modifier cet état juridique, M. [K] admettant lui-même ne pas avoir eu connaissance des changements d'occupants pour s'être désintéressé de ce bail, sans pour autant justifier en quoi il n'y aurait plus été tenu.
Par conséquent, la situation juridique créé par le bail initial a perduré jusqu'à son terme, M. [K] étant tenu du paiement des loyers. C'est donc de manière justifiée que le juge de la mise en état a ordonné l'expulsion de l'intéressé et tous occupants de son chef et prévu sa condamnation à une indemnité d'occupation et que le tribunal l'a condamné au paiement des arriérés de loyers jusqu'au 1er mai 2019 et y a appliqué les intérêts au taux légal à compter du commandement de payer du 24 mai 2017 pour la somme de 5 824 846 F CFP réclamée et à compter du jugement pour le surplus. Par ailleurs, pour avoir créé la situation d'occupation des lieux ayant perduré après ce terme, en les sous-louant, M. [K] est tenu des sommes dues jusqu'à leur libération.
De même, le juge de la mise en état et le tribunal ont considéré à juste titre que la SNC LA MAISON BLANCHE était occupante des lieux sans droit ni titre, l'argument de l'absence de qualité de titulaire du bail ne l'exonérant pas des sommes dues au titre d'une occupation qui a été constatée, et qu'elle ne nie pas, les arguments selon lesquels d'autres qu'elle seraient tenus au paiement des loyers étant sans emport, dès lors qu'elle est occupante des lieux, justifiant son expulsion, en a la jouissance jusqu'à son départ le 11 décembre 2019, et doit à ce titre la somme correspondant à cette occupation au propriétaire des lieux.
Par conséquent, les décisions querellées seront confirmées.
3. Sur la demande de condamnation pour appel abusif :
Il résulte de l'article 1382 du code civil que celui qui a agi en justice de manière abusive peut être condamné à des dommages et intérêts au profit de celui qui en a subi un préjudice.
Il résulte de l'article 351 du code de procédure civile de la Polynésie française qu'en cas d'appel jugé dilatoire ou abusif, l'appelant peut être condamné à une amende civile de 500 à 200.000 francs sans préjudice de tous dommages-intérêts.
La cour n'a décelé dans l'appel interjeté par Monsieur [K] ni la mauvaise foi, ni volonté dilatoire, ni d'absence manifeste de fondement, ni de caractère malveillant de l'action, ni intention de nuire, ni aucun comportement permettant de considérer que son droit d'appel en Justice a dégénéré en abus. La demande sera rejetée.
4. Sur les frais et dépens :
Il serait inéquitable de laisser à la charge des consorts [S] les sommes exposées par eux et non compris dans les dépens, il convient par conséquent confirmer la décision du juge de la mise en état qui a condamné in solidum M. [K] et la SNC à lui payer la somme de 120 000 F CFP à ce titre et tribunal qui a les condamné à lui payer la somme de 150 000 F CFP, de condamner [F] [K] à leur payer 550 000 F CFP au titre des frais d'appel non compris dans les dépens et de débouter [F] [K] et la SNC LA MAISON BLANCHE de leurs demandes au titre de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française.
Les dépens de l'incident et de première instance ont été justement mis à la charge de [F] [K] et la SNC et les décisions en ce sens seront confirmées, dans les distinctions opérées par ces décisions sur les actes mis à la charge de chacun d'eux, et les dépens d'appel seront supportés par [F] [K] qui succombe conformément aux dispositions de l'article 406 du code de procédure civile de la Polynésie française.
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant par mise à disposition, publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;
DECLARE l'appel recevable,
CONFIRME en toutes leurs dispositions l'ordonnance en date du 23 août 2019 du juge de la mise en état du tribunal civil de première instance de Papeete et le jugement n° RG 17/00595 - N° Portalis DB36-W-B7B-CHHX en date du 21 juin 2021 du tribunal civil de première instance de Papeete,
Y ajoutant,
DEBOUTE Mme [T] [S], M. [H] [S] et Mme [V] [S] de leur demande de condamnation de [F] [K] à des dommages et intérêts pour appel abusif,
CONDAMNE M. [F] [K] à payer à Mme [T] [S], M. [H] [S] et Mme [V] [S] la somme de 550 000 F CFP (cinq cent cinquante mille francs pacifique) au titre de ses frais d'appel non compris dans les dépens par application de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française,
DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
CONDAMNE M. [F] [K] aux dépens d'appel.
Prononcé à Papeete, le 13 avril 2023.
Le Greffier, Le Président,
signé : M. SUHAS-TEVERO signé : K. SEKKAKI