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25/08/2022 | FRANCE | N°19/00234

France | France, Cour d'appel de Papeete, Cabinet c, 25 août 2022, 19/00234


N° 302





SE

--------------



Copie exécutoire

délivrée à :

- Me Dubois,

le 26.08.2022.





Copie authentique

délivrée à :

- Me Vergier,

le 26.08.2022.

REPUBLIQUE FRANCAISE



COUR D'APPEL DE PAPEETE



Chambre Civile





Audience du 25 août 2022





RG 19/00234 ;



Décision déférée à la Cour : jugement n° 19/106, rg n° 16/00614 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete du 20 février 201

9 ;



Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 3 juillet 2019 ;



Appelantes :



Mme [L] [K] [E], née le 26 juin 1939 à [Localité 6], représentée par Mme [F] [V], née le 27 décembre 1986 à...

N° 302

SE

--------------

Copie exécutoire

délivrée à :

- Me Dubois,

le 26.08.2022.

Copie authentique

délivrée à :

- Me Vergier,

le 26.08.2022.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PAPEETE

Chambre Civile

Audience du 25 août 2022

RG 19/00234 ;

Décision déférée à la Cour : jugement n° 19/106, rg n° 16/00614 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete du 20 février 2019 ;

Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 3 juillet 2019 ;

Appelantes :

Mme [L] [K] [E], née le 26 juin 1939 à [Localité 6], représentée par Mme [F] [V], née le 27 décembre 1986 à [Localité 5] ;

Et :

Mme [X] [A] épouse [T] [B] [W], née le 3 mars 1969 à [Localité 5], demeurant à [Adresse 2], nantie de l'aide juridictionnelle n° 2019/001827 du 9 décembre 2019 ;

Représentées par Me Jean-Michel VERGIER, avocat au barreau de Papeete ;

Intimés :

M. [U] [H] [P], né le 6 mars 1926 au Chili, et décédé le 25 juin 2016 à [Localité 4] (Chili) ;

Mme [U] [I] [D] [R], née le 17 dcembre 1984 au Chili, de nationalité chilienne, fille de M. [U] [H] [P] ; agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritière et ayant-droit de feu son père ;

Elisant domicile au Cabinet de Maître Vincent DUBOIS, Avocat au Barreau de Papeete, 415 boulevard Pomare, BP 3279 ' 98713 Papeete, Tahiti, Polynésie française ;

Ayant pour avocat la Selarl Fenuavocats, représentée par Me Vincent DUBOIS, avocat au barreau de Papeete ;

Ordonnance de clôture du 16 mai 2022 ;

Composition de la Cour :

La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 23 juin 2022, devant M. SEKKAKI, conseiller faisant fonction de président, Mme SZKLARZ, conseiller, Mme TEHEIURA, magistrat honoraire de l'ordre judiciaire aux fins d'exercer à la cour d'appel de Papeete en qualité d'assesseur dans une formation collégiale, qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;

Arrêt contradictoire ;

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Signé par M. SEKKAKI, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A R R E T,

Exposé du litige :

Faits :

Par acte sous seing privé en date du 19 décembre 2012, M. [U] [H] [P] donnait mandat général à Mme [U] [I] [D] [R] incluant notamment la gestion de ses biens et la représentation dans tous les domaines, procédures judiciaires et transactions de tout ordre, autorisant le mandataire à donner ou prendre en location et en gestion, céder et transférer tous types de biens, incluant les biens immobiliers.

Suivant acte sous seing privé en date du 20 juin 2006, M. [U] [H] [P] donnait à bail à Mme [L] [K] [E], un terrain nu situé à Pamatai d'une superficie de 673 m², pour une durée de 5 ans, pour un loyer de 20 000 F CFP.

A ce contrat de bail était joint un écrit de M. [U] [H] [P] en date du 29 octobre 2011 précisant «prolonger le contrat pour une durée de 5 ans à compter du 21 juin 2011 pour se terminer au 20 juin 2016», avec la précision « 35 000 F (nouveau loyer)».

Le 21 juillet 2016, Mme [U] [I] [D] [R] faisait signifier un commandement de payer avec insertion de la clause résolutoire à Mme [L] [K] [E], faisant état de loyers impayés de mai 2015 à juillet 2016 inclus, soit 14 mois x 35 000 F CFP, pour l'occupation de la parcelle M-[Cadastre 1], lot 10 du lot A du Domaine PAMATAI à [Localité 3].

Par acte d'huissier du même jour elle lui signifiait une lettre donnant congé par le bailleur.

Procédure :

Par requête enregistrée au greffe le 19 octobre 2016 et acte d'huissier délivré le 27 octobre 2016, M. [U] [H] [P], représenté par Mme [U] [I] [D] [R], a assigné Mme [L] [K] [E] devant le tribunal civil de première instance de Papeete aux fins de :

- Constater la résiliation de plein droit du bail conclu le 20 juin 2006 et renouvelé le 20 juin 2011, et ce à compter du 21 août 2016,

- Ordonner l'expulsion de Mme [L] [E], et ce avec le concours de la force publique si nécessaire,

- Condamner Mme [L] [E] à payer à M. [U] [H] [P], représenté par Mme [U] [D] [R], une somme globale de 621 438 F CFP outre les intérêts échus, correspondant aux loyers impayés, à une indemnité d'occupation et aux frais d'huissier,

- La condamner à lui payer la somme de 200 000 F CFP au titre des frais non compris dans les dépens, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par jugement n° RG 16/00614 en date du 20 février 2019, le tribunal civil de première instance de Papeete a :

- Condamné Mme [L] [K] [E] à payer à M. [U] [H] [P] :

' Au titre des loyers et charges demeurés impayés et arrêtés au 21 août 2016, la somme de 525 000 F CFP, avec intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation,

' Et à compter du 1er septembre 2016, une indemnité d'occupation mensuelle équivalente au montant du dernier loyer prévu au contrat au moment de la résiliation,

- Constaté à compter du 21 août 2016 la résiliation du bail consenti le 20 juin 2006 par M. [U] [H] [P] à Mme [L] [K] [E],

- Dit qu'à défaut pour Mme [L] [K] [E] d'avoir libéré les lieux situés à PAMATAI (Iles de Tahiti), d'une superficie de 673 m², UN MOIS après la signification du présent jugement, il sera procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef avec l'assistance de la force publique, si besoin est, au transport des meubles laissés dans les lieux aux frais de l'expulsé dans tel garde-meuble désigné par l'expulsé, ou à défaut par le bailleur,

- Rejeté tous les autres chefs de demandes plus amples ou contraires,

- Condamné Mme [L] [K] [E] à payer à M. [U] [H] [P] la somme de 200 000 F CFP sur le fondement de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française,

- Condamné Mme [L] [K] [E] aux entiers dépens de l'instance, comprenant les frais d'huissier au titre du congé délivré, avec bénéfice de distraction au profit du conseil du demandeur.

Le tribunal a considéré qu'aucun élément ne permettait de remettre en cause la pérennité du contrat de mandat à Mme [D] [R]. Il a jugé que le contrat de bail renvoyait aux textes relatifs aux baux à usage d'habitation, que les omissions sur l'origine de propriété étaient sans effet sur la validité du contrat, que la clause sur la propriété des constructions édifiées a été critiquée dans conséquences, et qu'il y avait lieu de faire application des dispositions de l'article 1728 sur le paiement du prix au terme convenu.

Par suite, il a jugé que Mme [E] était tenue des loyers impayés, que le congé avait été valablement donné entraînant la résolution du bail au 21 août 2016 et qu'elle devait payer depuis une indemnité d'occupation, pour être occupante sans droit ni titre, outre que son expulsion était ordonnée.

Mme [L] [K] [E] représentée par son successeur et petite fille, Mme [F] [V] a relevé appel de ce jugement par requête enregistrée au greffe le 3 juillet 2019.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 mai 2022, et l'affaire fixée à l'audience de plaidoirie du 23 juin 2022.

A l'issue de celle-ci, les parties ont été informées que la décision, mise en délibéré, serait rendue le 25 août 2022 par mise à disposition au greffe.

Prétentions et moyens des parties :

Mme [L] [K] [E], représentée par Mme [F] [V] et par Mme [X] [A] épouse [T] [B] [W], appelante, demande à la Cour par dernières conclusions régulièrement transmises le 5 juillet 2021, de :

- Débouter M. [H] [P] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions d'intimé, dont celles tendant à faire juger irrecevable l'appel de Mme [E],

- Accueillir l'appel en le disant recevable et bien fondé,

- Réformer le jugement n° RG 16/00614 du 20 février 2019, en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- Constater que Mme [U] [I] [D] [R] n'apporte aucune preuve de ce que le mandant d'ester en justice, dont elle se prévaut dans le cadre de la présente procédure, demeure en vigueur et que son mandant est toujours vivant et apte à le conférer, opposer de ce fait une fin de non-recevoir à Mme [U] [I] [D] [R],

- Débouter M. [H] [P] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- Subsidiairement, si la cour devait admettre qu'il soit mis un terme à l'occupation de l'immeuble bâti, donc sa perte par celle qui l'a édifié et ses ayant-droits, la nature léonine de la convention, devrait conduire à l'allocation de dommages et intérêts à la concluante, qui ne sauraient être inférieurs à la valeur du bâti, estimé à dire d'expert, qu'il plaira à la cour de désigner,

- Condamner M. [H] [P] à payer à Mme [E], la somme de 113 000 F CFP au titre de l'article 407 du CPCPF, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Elle fait valoir que l'appel a été interjeté le 3 juillet 2019 soit dans le délai d'appel et est donc recevable.

Elle souligne que le mandat, M. [H] [P] est né en mars 1926 et rappelle qu'en vertu de l'article 2003 du code civil, le mandat finit par la mort naturelle du mandant. Elle considère que c'est à Mme [D] [R] de prouver que son mandat est encore valable.

Sur le fond elle fait valoir que le bail comprenait une obligation de construire à la charge du preneur et que la clause, dans le délai cour du bail, imposant à sa cessation le transfert de la propriété des constructions est léonine et doit conduire à l'allocation de dommages et intérêts.

Elle souligne enfin le caractère imprécis de la désignation du bien loué tout comme la réalité de la qualité de propriétaire du mandant.

Mme [U] [D] [R], agissant en son nom personnel et en qualité d'héritière et ayant-droit de feu son père [U] [H] [P], intimée, par dernières conclusions régulièrement transmises le 21 mars 2022 demande à la Cour de :

In limine litis et à titre principal,

- Dire et juger irrecevable l'appel formé par Mme [L] [E] représentée par Mmes [F] [V] et [X] [T] [B] [W],

A titre subsidiaire,

- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 20 février 2019,

- Ordonner l'expulsion des appelantes sous astreinte de 50 000 F CFP par jour de retard passé un délai d'un mois suivant la signification de l'arrêt, avec intérêt au taux légal à compter du 21 août 2016 et anatocisme à compter du 21 août 2017,

- Condamner solidairement Mmes [V] et [T] [B] [W] à payer à Mme [D] [R] la somme de 2 870 000 F CFP comprenant les loyers impayés du 1er mai 2012 eu 21 août 2016 et l'indemnité d'occupation mensuelle de 35 000 F CFP pour les mois de septembre 2016 à mars 2022 inclus, avec intérêts au taux légal à compter du jugement.

En toutes hypothèses,

- Assortir l'intégralité des sommes allouées du taux d'intérêt légal,

- Ordonner l'anatocisme,

- Ordonner l'exécution provisoire,

- Condamner solidairement Mmes [V] et [T] [B] [W] à payer une amende civile de 200 000 F CFP sur le fondement de l'article 351 du code de procédure civile pour appel abusif,

- Les condamner à lui payer 300 000 F CFP pour les frais d'appel non compris dans les dépens, ainsi qu'aux dépens dont distraction et comprenant les frais d'huissier.

Elle expose que le jugement a été signifié le 3 mai 2019 à Mme [E], ou sa succession dès lors que son décès n'a pas été notifié aux bénéficiaires du jugement, qui disposait d'un délai de 2 mois pour interjeter appel conformément aux article 336 et 337 du code de procédure civile, délai courant jusqu'au 4 juillet 2019 au plus tard, or Mme [U] [D] [R] n'était assignée que par exploit d'huissier du 2 septembre 2020 soit 14 mois après la signification. L'appel est selon elle manifestement irrecevable.

Elle précise relativement à la fin de non-recevoir que M. [U] [H] [P] est décédé le 25 juin 2016 laissant pour lui succéder Mme [U] [D] [R], laquelle agit en qualité d'héritière et pour son propre compte.

Sur la qualification du bail, elle considère que le fait d'édifier une construction sur le terrain nu était une faculté et non une obligation, sans aucune confusion par ailleurs sur le bien désigné.

Au visa de l'article 1728 du code civil elle souligne que Mme [E] ne s'est pas acquitté de l'obligation de payer le prix du bail et ce depuis le 1er mai 2015 de sorte que la résiliation est encourue de plein droit de ce fait.

Elle indique ensuite subir un préjudice du fait de l'occupation sans droit ni titre depuis le 21 août 2016 de Mme [E] puis ses ayant-droit, laquelle lui cause un préjudice qu'il convient d'indemniser par une indemnité d'occupation mensuelle équivalente au loyer.

Elle considère que l'appel est abusif du fait du maintien dans les lieux en dépit de la décision de Justice intervenue, conférant à cet appel non fondé un caractère abusif et dilatoire justifiant la condamnation à une amende civile.

Elle demande l'application des intérêts au taux légal et leur capitalisation par année entière en raison de l'absence de commencement de paiement des sommes dues par les ayant droit de Mme [E].

Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions et moyens dont la Cour est saisie, il est renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions d'appel des parties. L'exposé des moyens des parties, tel que requis par les dispositions de l'article 268 du code de procédure civile de la Polynésie française, sera renvoyé à la motivation ci-après à l'effet d'y répondre.

Motifs de la décision :

La cour rappelle, à titre liminaire, qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de « constatations » ou à « dire et juger » qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions, en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques, mais uniquement des moyens.

1. Sur la recevabilité de l'appel :

S'il résulte des articles 336 et 337 du code de procédure civile de la Polynésie française que le délai d'appel est de deux mois francs et court à compter du jour de la signification à personne pour les jugements contradictoires, l'article 440-1 dudit code dispose que l'appel est formé par une requête déposée, enregistrée et communiquée, selon les dispositions des articles 17 à 31. Or l'article 21 prévoit que la requête est déposée au greffe de la juridiction compétente et que le greffe enregistre le dépôt qui saisit la juridiction.

En l'espèce, le jugement a été signifié à Mme [E] le 3 mai 2019, le délai pour faire appel expirant le 4 juillet 2019, et la requête d'appel ayant été déposée au greffe le 3 juillet 2019, saisissant la cour dans le délai d'appel, de sorte que la date à laquelle les intimés ont été assignés par la suite est sans conséquence, l'appel étant recevable pour avoir été formé selon les formes et délais prévus par la loi.

2. Sur la fin de non-recevoir tiré du défaut de qualité à agir de Mme [U] [D] [R] :

L'article 45 du code de procédure civile de la Polynésie française dispose que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfixé, la chose jugée.

En l'espèce Mme [D] [R] justifie d'un mandat régulier et valable jusqu'au décès de M. [U] [H] [P], dont elle est l'héritière directe et par conséquent l'ayant droit de sorte qu'elle a qualité et intérêt à agir.

La fin de non-recevoir sera rejetée.

3. Sur le fond :

Il n'est pas contesté qu'un bail a été conclu entre M. [U] [H] [P] et Mme [L] [K] [E], la contestation sur l'origine de la propriété ou la qualité de propriétaire du bailleur étant sans conséquence dans les rapports entre le bailleur et le locataire. Par ailleurs il n'est pas contesté que Mme [L] [E] puis ses ayants-droit occupent le terrain visé par ce bail, l'imprécision alléguée du bail étant contredite par les éléments factuels et de procédure relevés par la cour, tenant au lieu de vie des intimées, adresse à laquelle les actes leurs sont notifiées et qu'elles mentionnent dans leurs propres écritures et qui correspondent pour l'essentiel à la dénomination du bien loué.

Le contrat signé par M. [H] [P] et Mme [E] le 20 juin 2006 prévoit dans son article 7 « Constructions » que « Le Preneur aura la faculté de faire édifier sr le terrain présentement loué, une maison à usage d'habitation et de faire sur ce terrain tous les aménagements qu'il jugera utiles. » Cette disposition particulièrement claire, le terme « faculté » étant sans équivoque une option offerte au preneur avec le choix de ne pas en user, ne permet pas de qualifier le contrat de bail à construction.

L'article 1728 du code civil qui trouve ainsi à s'appliquer à ce contrat, tout comme les obligations résultant du contrat et de la modification du montant du loyer, acceptée par la locataire qui a commencé à l'exécuter avant de cesser tous paiements en mai 2015, lui imposaient de s'acquitter du prix de la location du terrain ce qu'elle n'a pas fait à compter de cette date.

Après commandement de payer infructueux et résolution du bail, signifiés par voie d'huissier, la cour considère, comme l'a fait le tribunal, que le bail a cessé par l'effet de sa résolution le 21 août 2016.

C'est de manière justifiée que le tribunal a jugé que l'expulsion devait être ordonnée.

De même, le décompte exact des loyers impayés entre le mois de mai 2015 et le 21 août 2016, non contesté par la locataire ou ses ayants-droit qui n'ont pas prouvé s'être déchargés de leur obligation de s'acquitter de ces sommes, a conduit le tribunal a une condamnation pour le montant correspondant de 525 000 F CFP.

Enfin, l'occupation à compter de cette date par Mme [E] puis ses ayants-droit justifie l'indemnisation du propriétaire et de Mme [E], son héritière, par la condamnation à une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du dernier loyer dû, la cour partageant l'analyse du tribunal sur cette modalité d'indemnisation à compter du 1er septembre 2016.

Il convient pour l'ensemble de ces motifs de confirmer la décision du tribunal en toutes ses dispositions.

4. Sur l'astreinte et les intérêts :

Sur la demande d'exécution provisoire, la cour rappelle que ses décisions sont exécutoires par provision.

Sur l'astreinte, il convient de constater que les lieux sont occupés par Mme [E] puis ses ayants-droit depuis désormais 6 ans, et ce alors même qu'une décision de Justice est intervenue pour ordonner son expulsion et celle de toute personne de son chef, ce qui inclus ses ayants- droit.

La résistance ainsi manifestée justifie qu'une astreinte de 50 000 F CFP par jour de retard assortisse la décision d'expulsion du tribunal confirmée par le présent arrêt et ce à compter d'un mois après la signification de cet arrêt et pendant un an, et ce en application de l'article 716 du code de procédure civile de la Polynésie française.

De même les intérêts légaux et leur capitalisation par année entière sera due, s'agissant des loyers impayés à compter du 21 août 2016, date du commandement de payer, et s'agissant de l'indemnité d'occupation, à compter du 3 mai 2019, date de signification du jugement.

5. Sur le sort des constructions et la demande de dommages et intérêts :

Les intimées, auxquelles incombent d'apporter la preuve du préjudice dont elles entendent demander réparation, puisqu'il s'agit des seules prétentions qu'elles tirent du moyen tiré du caractère déséquilibré de la clause réglant le sort des constructions édifiées sur le terrain loué, n'apportent pas même un commencement de preuve ni de la présence d'une habitation, ni, puisque celle-ci semble être admise, de la paternité de la construction et des frais engagés pour la mettre en 'uvre. Par conséquent, elles seront déboutées de leur demande de dommages et intérêts.

6. Sur l'amende civile :

Devant l'incertitude réelle sur le mandat de Mme [D] [R], dont elle n'a justifié que tardivement, il ne peut être considéré que l'appel était abusif ou dilatoire et la demande d'amende civile sera rejetée.

7. Sur les frais et dépens :

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Mme [U] [D] [R], agissant ès qualité d'héritière de M. [U] [H] [P] et en son nom personnel, les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, il convient par conséquent confirmer la décision du tribunal qui a condamné Mme [E] à payer la somme de 200 000 F CFP, de condamner in solidum Mme [F] [V] et Mme [X] [A] épouse [T] [B] [W] à lui payer 300 000 F CFP au titre des frais d'appel non compris dans les dépens et de débouter les appelantes de leurs demandes au titre de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française.

Les dépens de première instance ont été justement mis à la charge de Mme [E] et la décision en ce sens sera confirmée et les dépens d'appel, comprenant les frais d'huissier, seront supportés par Mme [F] [V] et Mme [X] [A] épouse [T] [B] [W] qui succombent conformément aux dispositions de l'article 406 du code de procédure civile de la Polynésie française et pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 409 du code de procédure civile de la Polynésie française.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant par mise à disposition, publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;

DECLARE l'appel recevable ;

REJETTE la fin de non-recevoir des appelantes ;

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement n° RG 16/00614 en date du 20 février 2019 du tribunal civil de première instance de Papeete ;

Y ajoutant,

DIT que l'expulsion ordonnée contre Mme [L] [E] et s'appliquant notamment à Mme [F] [V] et Mme [X] [A] épouse [T] [B] [W] sera assortie d'une astreinte de 50 000 F CFP (cinquante mille francs pacifique) par jour de retard commençant à courir un mois après la signification du présent arrêt et pendant une durée d'un an ;

DIT que la somme de 525 000 F CFP à laquelle Mme [E] a été condamnée sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 21 août 2016, lesquels pourront être capitalisés par année entière ;

DIT que l'indemnité d'occupation due à compter du 1er septembre 2016, sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 mai 2016, lesquels pourront être capitalisés par année entière ;

CONDAMNE in solidum Mme [F] [V] et Mme [X] [A] épouse [T] [B] [W] à payer à Mme [U] [D] [R], agissant ès qualité d'héritière de M. [U] [H] [P] et en son nom personnel la somme de 300 000 F CFP (trois cent mille francs pacifique) au titre de ses frais d'appel non compris dans les dépens par application de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

CONDAMNE in solidum Mme [F] [V] et Mme [X] [A] épouse [T] [B] [W] aux dépens d'appel, y compris les frais d'huissier, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 409 du code de procédure civile de la Polynésie française.

Prononcé à Papeete, le 25 août 2022.

Le Greffier, Le Président,

signé : M. SUHAS-TEVEROsigné : K. SEKKAKI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Papeete
Formation : Cabinet c
Numéro d'arrêt : 19/00234
Date de la décision : 25/08/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-08-25;19.00234 ?
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