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27/03/2008 | FRANCE | N°07/00520

France | France, Cour d'appel de Papeete, 27 mars 2008, 07/00520


No 162



RG 520/CIV/07





Expéditions délivrées à

Me Quinquis et Polynésie

française

le

REPUBLIQUE FRANCAISE



COUR D'APPEL DE PAPEETE



Chambre Civile





Audience du 27 mars 2008





Monsieur Roger MONDONNEIX, conseiller à la Cour d'Appel de Papeete, assisté de Mme Maeva SUHAS-TEVERO, greffier ;



En audience publique tenue au Palais de Justice ;



A prononcé l'arrêt dont la teneur suit :



Entre :



1- La S

ociété AGRITECH, SARL au capital de 20.000.000 FCFP, immatriculée au RC de Papeete sous le no 2009-B, dont le siège social est à Papeete, 20 rue des Remparts, BP 3140 Papeete, représenté par M. Gilles YAU, son directeur...

No 162

RG 520/CIV/07

Expéditions délivrées à

Me Quinquis et Polynésie

française

le

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PAPEETE

Chambre Civile

Audience du 27 mars 2008

Monsieur Roger MONDONNEIX, conseiller à la Cour d'Appel de Papeete, assisté de Mme Maeva SUHAS-TEVERO, greffier ;

En audience publique tenue au Palais de Justice ;

A prononcé l'arrêt dont la teneur suit :

Entre :

1- La Société AGRITECH, SARL au capital de 20.000.000 FCFP, immatriculée au RC de Papeete sous le no 2009-B, dont le siège social est à Papeete, 20 rue des Remparts, BP 3140 Papeete, représenté par M. Gilles YAU, son directeur Général, domicilié audit siège ;

2- La Fédération Générale du Commerce, poursuites et diligences de son Président, M. Gilles YAU, dont le siège est Immeuble Farnham, BP 1607 Papeete ;

Appelantes par requête en date du 17 septembre 2007, déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'Appel le 21 septembre 2007, sous le numéro de rôle 07/00520, ensuite d'un jugement no 07/00210 du Tribunal Civil de première instance de Papeete en date du 13 août 2007 ;

Représentées par Me QUINQUIS, avocat à Papeete ;

d'une part ;

Et :

La Polynésie Française, prise en la personne de son Président, dont le siège social est sis quartier Broche Avenue Bruat, BP 2551 - 98714 Papeete ;

Intimée ;

Concluante ;

d'autre part ;

Après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique du 14 février 2008, devant Mme TEHEIURA, conseillère, faisant fonction de présidente, Mme PINET-URIOT, conseillère et M. MONDONNEIX, conseiller, assistés de Mme SUHAS-TEVERO, greffier, le prononcé de l'arrêt ayant été renvoyé à la date de ce jour ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

A R R E T,

EXPOSE DU LITIGE :

Le Conseil des Entreprises de Polynésie Française (CEPF), l'Union Patronale de Polynésie Française (UPPF), le Syndicat des Industriels de Polynésie Française (SIPOF), le Conseil des Professionnels de l'Hôtellerie (CPH), la Chambre Syndicale des Entrepreneurs du Bâtiment et des Travaux Publics (CSEBTP), la Chambre Syndicale des Métiers du Génie Civil et des Travaux Publics (CSMGCTP), l'Association Française des Banques / Comité de Polynésie Française (AFB/CPF) d'une part, et, d'autre part, la Confédération des Syndicats des Travailleurs Polynésiens (CSTP/FO) et le Syndicat OTAHI ont conclu un accord interprofessionnel relatif à la prime à l'emploi en date du 20 décembre 2005.

Par arrêté pris en conseil des ministres en date du 11 janvier 2006, cet accord interprofessionnel a été rendu obligatoire pour tous les employeurs et les travailleurs compris dans son champ d'application, soit l'ensemble des activités professionnelles de Polynésie française, tel que prévu par les dispositions de l'article 13 de la loi no 86-845 du 17 juillet 1986.

Par requête en date du 25 janvier 2006, la société AGRITECH et la Fédération Générale du Commerce ont saisi le tribunal administratif aux fins de voir annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté dont s'agit.

Par jugement en date du 3 octobre 2006, le tribunal administratif de PAPEETE a sursis a statuer sur la requête de la société AGRITECH et de la Fédération Générale du Commerce jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur la question de savoir si les stipulations de l'accord interprofessionnel du 20 décembre 2005 relatif à la prime à l'emploi, invoquées par les requérantes, sont légales.

Par requête notifiée par acte d'huissier de justice en date du 26 février 2007, la SARL AGRITECH et la Fédération Générale du Commerce ont fait assigner la POLYNESIE FRANCAISE aux fins de voir constater l'illégalité de l'accord professionnel litigieux.

La défenderesse s'opposait à cette demande.

Par jugement en date du 13 août 2007, le tribunal de première instance de PAPEETE constatait que les stipulations de l'accord interprofessionnel du 20 décembre 2005 relatif à la prime à l'emploi étaient légales.

La SARL AGRITECH et la Fédération Générale du Commerce ont interjeté appel de ce jugement par requête déposée au greffe de la cour d'appel le 21 septembre 2007.

Par acte en date du 3 octobre 2007, La SARL AGRITECH et la Fédération Générale du Commerce, autorisées par ordonnance du premier président en date du 25 septembre 2007, ont fait assigner la POLYNESIE FRANCAISE à l'audience du 15 novembre 2007.

Aux termes de leur déclaration d'appel, La SARL AGRITECH et la Fédération Générale du Commerce exposent d'abord que la loi du 17 juillet 1986, qui encadre le champ d'application des conventions et accords collectifs du travail, est exclusive d'une application générale à tous les salariés de droit privé dans la mesure où l'article 13 alinéa 1 de la dite loi prévoit que le champ d'application est défini en termes d'activités économiques.

Elles précisent que la seule procédure possible eut été le recours à une loi du pays telle que prévue par l'article 140 de la loi organique du 27 février 2004 portant statut de la Polynésie française.

La SARL AGRITECH et la Fédération Générale du Commerce critiquent ensuite l'extension de l'accord aux entreprises ne dépendant pas des secteurs économiques signataires dont en particulier les entreprises du commerce.

Elles font valoir également que l'accord interprofessionnel ne peut avoir d'existence en tant qu'accord collectif du travail qu'après sa validation par une commission paritaire.

Elles dénoncent aussi une atteinte aux principes de la liberté contractuelle et de l'immutabilité des contrats en cours, précisant que seule une loi de pays aurait pu s'appliquer à ces derniers.

La SARL AGRITECH et la Fédération Générale du Commerce stigmatisent encore l'inanité de l'accord litigieux en ce qu'il est contraire aux grilles salariales.

Enfin, elles considèrent que le champ d'application de l'accord, qui ne concerne que les salariés de droit privé, crée une rupture d'égalité avec ceux du statut de droit public qui peuvent travailler ensemble au sein d'une même administration.

C'est pourquoi, La SARL AGRITECH et la Fédération Générale du Commerce demandent à la cour de constater l'illégalité de l'accord interprofessionnel du 20 décembre 2005.

Elles demandent également de condamner la Polynésie française au paiement d'une somme de 250 000 francs CFP au titre des frais irrépétibles.

Par conclusions déposées le 8 novembre 2007, la Polynésie française a développé ses observations tendant à démontrer que c'est à bon droit que le conseil des ministres a pris l'arrêté attaqué.

Par arrêt en date du 27 décembre 2007, la cour a ordonné la réouverture des débats et le renvoi de l'affaire à une audience ultérieure à l'effet de permettre aux parties de conclure sur la recevabilité de la demande en ce qu'elle est dirigée contre la POLYNESIE FRANCAISE.

Par conclusions déposées le 11 janvier 2008, la société AGRITECH et la Fédération Générale du Commerce exposent que la question préjudicielle ne constituant pas une action en justice autonome, il est naturel que celle-ci oppose, y compris devant le juge judiciaire, les parties au procès, savoir la Fédération du Commerce et la Polynésie française.

Elles ajoutent que la cour n'est pas saisie d'une "demande" au sens de l'article 1o du code de procédure civile, mais en quelque sorte d'une prise de position dans un domaine relevant de sa compétence et de nature à déterminer une décision d'un autre ordre de juridiction (et que) dans la logique de l'arrêt ADD du 27/12/07, les exposants n'auraient pas la qualité pour agir en déclaration d'illégalité du protocole en raison du principe de relativité du contrat, (ce qui) reviendrait à refuser de statuer sur la question préjudicielle alors même que la réponse à celle-ci est un préalable nécessaire à la décision du juge administratif.

Par acte en date du 8 février 2008, la société AGRITECH et la Fédération Générale du Commerce ont appelé en la cause le Conseil des Entreprises de Polynésie Française (CEPF), l'Union Patronale de Polynésie Française (UPPF), le Syndicat des Industriels de Polynésie Française (SIPOF), le Conseil des Professionnels de l'Hôtellerie (CPH), la Chambre Syndicale des Entrepreneurs du Bâtiment et des Travaux Publics (CSEBTP), la Chambre Syndicale des Métiers du Génie Civil et des Travaux Publics (CSMGCTP), l'Association Française des Banques / Comité de Polynésie Française (AFB/CPF), la Confédération des Syndicats des Travailleurs Polynésiens (CSTP/FO) et le Syndicat OTAHI.

Ces derniers n'ont pas comparu bien que cités à personne.

EXPOSE DES MOTIFS :

Attendu qu'en vertu de l'article 1o alinéa 2 du code de procédure civile, l'action n'est ouverte qu'à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention ;

Attendu que si la POLYNESIE FRANCAISE n'est pas partie à l'accord interprofessionnel du 20 décembre 2005, elle est néanmoins intéressée au succès ou au rejet de la question posée à titre préjudiciel dans la mesure où la solution retenue aura une nécessaire incidence sur la validité de l'arrêté du 11 janvier 2006 du Conseil des ministres de la Polynésie française portant extension de l'accord interprofessionnel sus-visé ; que par suite, la demande est recevable en ce qu'elle formée au contradictoire de la POLYNESIE FRANCAISE ;

Attendu que c'est à bon droit que la société AGRITECH et la Fédération Générale du Commerce ont appelé en la cause les parties à l'accord interprofessionnel litigieux ; que si la cour n'est pas saisie d'une demande en annulation du dit accord ou d'une demande en inopposabilité, comme elle le rappelait déjà dans son arrêt du 27 décembre 2007, en revanche, il est important que le débat sur la légalité de l'accord intervienne au contradictoire des membres signataires ;

Attendu qu'en vertu de l'article 13 alinéa 1 de la loi numéro 86-845 du 17 juillet 1986, les conventions et accords collectifs de travail ont pour but de définir les règles suivant lesquelles s'exerce le droit des salariés à la négociation collective, ainsi que l'ensemble de leurs conditions d'emploi et de travail et de leurs garanties sociales dans le cadre d'un champ d'application qui est, et territorial ou local, et professionnel ou interprofessionnel. Le champ d'application est défini en termes d'activités économiques ;

Attendu qu'aux termes de l'article 1 de l'accord interprofessionnel relatif à la prime à l'emploi, le présent accord est un accord interprofessionnel couvrant l'ensemble des activités de la Polynésie française, tel que prévu par les dispositions de l'article 13 de la loi no 86-845 du 17 juillet 1986 ;

Attendu que le champ d'application de cet accord n'est pas défini en termes d'activités économiques et qu'en visant, sans restriction, l'ensemble des activités de la Polynésie française, il est entaché d'irrégularité ;

Attendu que par suite, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens, l'accord interprofessionnel du 20 décembre 2005 relatif à la prime à l'emploi est illégal ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu à application de l'article 407 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, en matière civile et en dernier ressort ;

Dit que la demande est recevable en ce qu'elle formée au contradictoire de la POLYNESIE FRANCAISE ;

Déclare recevables les appels en cause des parties à l'accord interprofessionnel relatif à la prime à l'emploi en date du 20 décembre 2005 ;

Dit que cet accord interprofessionnel est illégal ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 407 du code de procédure civile ;

Condamne la POLYNESIE FRANCAISE aux dépens.

Prononcé à Papeete, le 27 mars 2007.

Le Greffier, La Présidente,

M. SUHAS-TEVERO C. TEHEIURA


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Papeete
Numéro d'arrêt : 07/00520
Date de la décision : 27/03/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de première instance de Papeete


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-03-27;07.00520 ?
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