No de minute :310/2022
COUR D'APPEL DE NOUMÉA
Arrêt du 19 décembre 2022
Chambre civile
Numéro R.G. : No RG 21/00216 - No Portalis DBWF-V-B7F-SE7
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 juin 2021 par le tribunal de première instance de NOUMEA (RG no :19/848)
Saisine de la cour : 13 juillet 2021
APPELANT
Mme [E] [K]
née le [Date naissance 5] 1986 à [Localité 13] (LA REUNION),
demeurant [Adresse 4]
Représentée par Me Virginie BOITEAU de la SELARL VIRGINIE BOITEAU, avocat au barreau de NOUMEA
INTIMÉS
Mme [U] [A] épouse [Z]
née le [Date naissance 3] 1953 à [Localité 8] (TUNISIE),
demeurant [Adresse 11]
Représentée par Me Martin CALMET de la SARL DESWARTE-CALMET, avocat au barreau de NOUMEA
Mme [V] [K]
née le [Date naissance 2] 1984 à [Localité 13] (LA REUNION),
demeurant [Adresse 9]
Représentée par Me Martin CALMET de la SARL DESWARTE-CALMET, avocat au barreau de NOUMEA
M. [C] [K]
né le [Date naissance 6] 1988 à [Localité 13] (REUNION),
demeurant [Adresse 11]
Représenté par Me Martin CALMET de la SARL DESWARTE-CALMET, avocat au barreau de NOUMEA
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 14 novembre 2022, en audience publique, devant la cour composée de :
M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,
Mme Marie-Claude XIVECAS, Conseiller,
Madame Béatrice VERNHET-HEINRICH,Conseiller,
qui en ont délibéré, sur le rapport de M. Philippe ALLARD.
Greffier lors des débats : M. Petelo GOGO
Greffier lors de la mise à disposition : Mme Isabelle VALLEE
ARRÊT :
- contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, le délibéré fixé au 15/12/2022 ayant été prorogé au 19/12/2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par M. Philippe ALLARD, président, et par Mme Isabelle VALLEE, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.
***************************************
M. [R] [K], divorcé en premières noces de Mme [O] [L] avec laquelle il avait eu un enfant, M. [S] [K], et époux en secondes noces de Mme [U] [A] avec laquelle il avait eu trois enfants, Mme [V] [K], Mme [E] [K] et M. [C] [K], est décédé le [Date décès 7] 1995, en laissant pour recueillir sa sucession :
- Mme [U] [A]
- M. [S] [K]
- Mme [V] [K]
- Mme [E] [K]
- M. [C] [K].
Selon ordonnance du 21 août 2000, le juge des tutelles de Nouméa a autorisé Mme [U] [A] veuve [K], ès qualités d'administratrice légale sous contrôle judiciaire de ses enfants [V], [E] et [C], à concourir et procéder au partage amiable des actifs dépendant de la communauté [A] / [K] et de la succession de M. [R] [K] sur la base d'un projet d'acte de partage établi par Me [H], notaire à [Localité 10].
Par jugement du 6 avril 2001, le tribunal de première instance de Nouméa a homologué l'état liquidatif de la communauté [A] / [K] et de la succession de M. [R] [K] dressé le 7 novembre 2000 par Me [H]. Aux termes de cet état liquidatif, il a été notamment attribué en toute propriété à :
- Mme [U] [A] : 3/6èmes indivis de l'immeuble bâti sis à [Adresse 11]
- Mme [V] [K] : 1/6ème indivis de l'immeuble bâti sis à [Adresse 11]
- Mme [E] [K] : 1/6ème indivis de l'immeuble bâti sis à [Adresse 11]
- M. [C] [K] : 1/6ème indivis de l'immeuble bâti sis à [Adresse 11].
Par jugement du 24 octobre 2016, le tribunal de première instance de Nouméa, sur assignation d'une créancière de Mme [E] [K], a :
- ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision immobilière [A] / [K] portant sur le bien sis à [Adresse 12],
- attribué de manière préférentielle ce bien immobilier à Mme [U] [A], à charge pour elle de verser comptant aux co-indivisaires la soulte éventuellement due qui sera déterminée par le notaire,
- dit que l'indivision était titulaire contre Mme [U] [A] d'une créance au titre de l'indemnité d'occupation mensuelle due pour l'occupation de ce bien à compter du 1er juin 2010 jusqu'au partage, sauf libération effective anticipée des lieux, en fonction des pièces produites par les parties et des termes de comparaison dans le secteur concerné, qui serait déterminée par le notaire, au besoin en s'adjoignant tout sapiteur de son choix, en cas de contestation sur l'évaluation proposée, avec application d'un coefficient de précarité de 30 % sur la valeur locative retenue, et qui procéderait au calcul de rétro-indexation en fonction de l'indice du coût de la construction pour la période allant du 1er juin 2010 au jour de l'évaluation, puis d'indexation à compter de cette date, pour liquider le montant de l'indemnité d'occupation à la date du partage, sauf libération anticipée des lieux,
- dit que Mme [U] [A] était titulaire contre l'indivision d'une créance au titre des dépenses de conservation qui serait déterminée par le notaire au regard des factures présentées pour le montant des sommes engagées et justifiées et au titre des dépenses d'amélioration qui serait déterminée par le notaire au regard des factures présentées, au besoin en s'adjoignant tout sapiteur de son choix en cas de contestation sur l'évaluation proposée, par la plus forte des deux sommes entre d'une part les dépenses faites et d'autre part le profit subsistant,
- débouté Mme [U] [A], Mme [V] [K] et M. [C] [K] de leur demande d'expertise,
- commis pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision immobilière portant sur l'immeuble litigieux la SCP Lillaz - Coste - Burtet - Mougel, notaires à [Localité 10].
Ce jugement a été confirmé par un arrêt du 7 juin 2018.
Le 15 janvier 2019, Me [P], notaire associé, a dressé un procès-verbal de difficultés en raison d'un désaccord des parties sur la valorisation de l'immeuble, sur le montant de l'indemnité d'occupation due par Mme [U] [A], sur le montant de la créance de Mme [U] [A] à l'encontre de l'indivision au titre des dépenses de conservation et d'amélioration, sur la créance de Mme [E] [K] à l'encontre de l'indivision au titre du paiement de la taxe foncière.
Selon requête introductive déposée le 1er avril 2019, Mme [U] [A], Mme [V] [K] et M. [C] [K] ont saisi le tribunal de première instance de Nouméa.
Par jugement en date du 21 juin 2021, la juridiction saisie a :
- débouté Mme [E] [K] de sa demande d'expertise judiciaire,
- fixé la valeur du bien immobilier indivis, situé à [Adresse 11], à la somme de 43.000.000 FCFP,
- rappelé que l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision immobilière [A] / [K] portant sur ce bien avait été ordonnée,
- rappelé que ce bien immobilier avait été attribué de manière préférentielle à Mme [U] [A], à charge pour elle de verser comptant aux co-indivisaires une soulte déterminée par le notaire,
- dit que Mme [U] [A] était redevable à l'égard de l'indivision, pour sa jouissance exclusive de ce bien immobilier, d'une indemnité d'occupation à compter du 1er juin 2010 et jusqu'à la date du partage effectif,
- fixé à la somme de 14.118.705 FCFP les indemnités d'occupation dues par Mme [U] [A] à l'indivision, arrêtées au 31 décembre 2018,
- dit qu'il appartiendrait au notaire d'y ajouter les indemnités d'occupation dues pour l'année 2019, 2020 et jusqu'à la date de signature de l'acte de partage,
- dit que l'indivision successorale était redevable envers Mme [U] [A] au titre des dépenses de conservation et d'amélioration du bien indivis, de la somme de 8.012.392 FCFP,
- dit que l'indivision successorale était redevable envers Mme [U] [A] des dépenses de taxe foncière de 2010 à 2017, à hauteur de 394.208 FCFP,
- dit que l'indivision successorale était redevable envers Mme [E] [K] des dépenses de taxe foncière 2018, à hauteur de 49.276 FCFP,
- dit que les frais d'expertise immobilière et frais notariés seraient partagés entre les co-héritiers à hauteur de leurs droits respectifs,
- renvoyé les parties devant le notaire commis, Me [P], chargé sur la base des éléments retenus dans la décision de dresser l'état liquidatif et pacte de partage, qui serait soumis à la signature des indivisaires,
- conféré à la SCP Lillaz - Coste - Burtet -Mougel tous pouvoirs pour faire tout ce qui serait nécessaire pour l'exécution du partage et la signature de tous actes et pièces quelconques, élire domicile, substituer et généralement faire le nécessaire,
- dit qu'en cas d'abstention d'un indivisaire de comparaître ou de constituer mandataire dans les trois mois de la mise en demeure adressée par l'étude susvisée, il appartiendrait au notaire, par requête, de demander au juge de désigner une personne qualifiée qu'il proposerait pour le représenter,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les dépens seraient employés en frais privilégiés de partage,
- dit que la décision serait communiquée à Me [P] par les soins du greffe.
Selon requête déposée le 13 juillet 2021, Mme [E] [K] a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses conclusions récapitulatives transmises le 30 mars 2022, Mme [E] [K] demande à la cour de :
- à titre principal, en cas d'accord de Mme [U] [A] de voir attribuer le bien immobilier indivis, sur la base de la somme de 43 00 00 00 FCFP à Mme [E] [K], infirmer le jugement entrepris en ce qu'il fixe à la somme de 14 118 705 FCFP les indemnités d'occupation dues par Mme [U] [A] à l'indivision, arrêtées au 31 décembre 2018, dit que l'indivision successorale est redevable envers Mme [U] [A] au titre des dépenses de conservation et d'amélioration du bien indivis, de la somme de 8 012 392 FCFP, dit que les frais d'expertise immobilière ([M]) seront partagés entre les cohéritiers à hauteur de leurs droits respectifs, renvoie les parties devant le notaire commis, chargé sur la base des éléments retenus dans la décision de dresser l'état liquidatif et acte de partage, qui sera soumis à la signature des indívisaires ;
- à titre subsidiaire, infirmer le jugement rendu entrepris en ce qu'il déboute Mme [E] [K] de sa demande d'expertise, fixe la valeur du bien immobilier indivis à la somme de 43 000 000 FCFP, fixe à la somme de 14 118 705 FCFP les indemnités d'occupation dues par Mme [U] [A] à l'indivision, arrêtées au 31 décembre 2018, dit que l'indivision successorale est redevable envers Mme [U] [A] au titre des dépenses de conservation et d'amélioration du bien indivis, de la somme de 8 012 392 FCFP, dit que les frais d'expertise immobilière seront partagés entre les cohéritiers à hauteur de leurs droits respectifs, renvoie les parties devant le notaire commis, chargé sur la base des éléments retenus dans la décision de dresser l'état liquidatif et acte de partage, qui sera soumis à la signature des indívisaires ;
- avant de dire droit, en cas de refus de Mme [U] [A] de voir attribuer le bien immobilier indivis, sur la base de la somme de 43 000 000 FCFP à Mme [E] [K], ordonner une expertise judiciaire du bien destinée à déterminer sa valeur, chiffrer les dépenses de conservation et d'amélioration, évaluer l'indemnité d'occupation due par Mme [U] [A], faire le compte entre les parties, établir un projet d'état liquidatif ;
à titre principal,
- dire que les demandes de Mme [U] [A] au titre des créances de l'indivision à son égard sont prescrites ;
à titre subsidiaire,
- dire en particulier que l'expert devra déterminer précisément les sommes à prendre en compte dans la valorisation des dépenses faites par Mme [U] [A] pour le bien immobilier, et, une fois la preuve apportée que lesdites sommes ont été payées effectivement par Mme [U] [A], déterminer s'il y a un profit subsistant pour l'indivision ;
- dire que les frais d'expertise seront supportés par l'indivision ;
- dire que le notaire commis devra dresser sur la base de l'expertise judiciaire réalisée un état liquidatif et acte de partage qui sera soumis à la signature des indivisaires ;
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que Mme [U] [A] est redevable à l'égard de l'indivision, pour sa jouissance exclusive du bien immobilier d'une indemnité d'occupation à compter du 1er juin 2010, jusqu'à la date du partage effectif, dit que l'indivision successorale est redevable envers Mme [U] [A] des dépenses de taxe foncière de 2010 à 2017, à hauteur de 394 208 FCFP, dit que l'indivision successorale est redevable envers Mme [E] [K] des dépenses de taxe foncière 2018, à hauteur de 49 276 FCFP ;
à titre reconventionnel,
- dire que Mme [U] [A] devra rapporter et justifier à l'indivision successorale l'ensemble des sommes perçues pour le compte de l'indivision au titre des loyers versés par la société La présence de Manou évalué à 16 000 000 FCFP ;
- débouter les autres parties de l'ensemble de leurs demandes plus amples ou contraires à ce titre ;
- condamner Mme [U] [A], Mme [V] [K] et M. [C] [K] à verser solidairement à l'appelante une somme de 500 000 FCFP au titre des frais irrépétibles en cause d'appel, ainsi qu'aux dépens d'instance et d'appel, dont distraction au profit de la selarl Virginie Boiteau.
Selon conclusions récapitulatives transmises le 29 avril 2022, Mme [U] [A] et Mme [V] [K] demandent à la cour de :
- confirmer le jugement déféré ;
- débouter Mme [E] [K] de l'ensemble de ses demandes ;
- donner acte à Mme [U] [A] de sa volonté de renoncer à l'attribution préférentielle sur le bien dont question ;
- dire y avoir lieu à la licitation du bien litigieux avec une mise à prix de 43 000 000 FCFP ;
en tout état de cause,
- condamner Mme [E] [K] à verser à Mme [U] [A] et Mme [V] [K] la somme de 500 000 FCFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner Mme [E] [K] aux dépens de l'instance, dont distraction au profit de la sarl Deswarte-Calmet.
Selon note de Me Calmet déposée le 2 août 2021, M. [C] [K] a déclaré se désister de l'instance d'appel.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 29 juin 2022.
Sur ce, la cour,
1) Les données du litige ont évolué depuis la première instance puisque Mme [U] [A], à laquelle le bien litigieux a été attribué par le jugement du 24 octobre 2016, entend renoncer à cette attribution préférentielle. Mme [E] [K] n'accepte cette renonciation que si le bien lui est attribué pour une valeur de 43.000.000 FCFP. Mme [U] [A] et Mme [V] [K] s'opposent à l'attribution préférentielle sollicitée par leur adversaire en observant d'une part que cette dernière ne remplit pas les conditions pour bénéficier de l'attribution du bien indivis, d'autre part qu'elle ne sera pas en mesure de régler la soulte.
Non seulement, Mme [E] [K] qui reconnaît ne plus résider dans la maison de longue date ne peut revendiquer l'attribution préférentielle telle qu'instituée par l'article 831-2 du code civil, mais encore elle ne démontre pas avoir la capacité à acquitter la soulte qui serait mise à sa charge, étant rappelé que le partage du bien a été ordonné sur l'assignation d'un créancier de Mme [E] [K], qui se prévalait d'une dette locative.
La demande d'attribution préférentielle présentée par Mme [E] [K] ne sera pas accueillie.
La décision ayant fait droit à la demande d'attribution préférentielle de Mme [U] [A] est aujourd'hui définitive. Puisque la bénéficiaire ne démontre pas que les conditions édictées par l'article 834 alinéa 2 sont remplies et qu'il n'est pas établi que tous les autres coindivisaires acquiescent à cette volte-face, Mme [E] [K] ayant subordonné son accord à une condition qui n'est pas remplie, la volonté de Mme [U] [A] de renoncer à l'attribution ne saurait être prise en compte, ni produire des effets.
En conséquence, la licitation de l'immeuble ne sera pas ordonnée et le partage se poursuivra selon les modalités décrites par le jugement du 24 octobre 2016.
2) Les dispositions relatives aux créances de Mme [U] [A] et de Mme [E] [K] au titre de la taxe foncière ne sont pas discutées. En revanche, Mme [E] [K] remet en cause la valorisation de l'immeuble, le montant de l'indemnité d'occupation due par Mme [U] [A] et le montant de sa créance au titre de la conservation et de l'amélioration du bien.
3) Le premier juge a arrêté la valeur du bien en s'appuyant sur un rapport établi par M. [M], expert foncier mandaté par Mme [U] [A]. Reprenant son argumentation développée en première instance, Mme [E] [K] conteste cet avis qui sous-estimerait la valeur du bien ; elle observe qu'elle n'a pas été associée aux opérations d'expertise et sollicite la mise en oeuvre d'une expertise judiciaire.
M. [M] propose dans un rapport daté du 22 mai 2017 une description précise du bien, à savoir de la maison d'habitation proprement dite et de ses dépendances, qui aurait pu servir de base à une critique argumentée de l'avis de M. [M].
La contestation de l'appelante n'est étayée que :
- par un courriel de M. [J] qui mentionne le prix de l'are dans le quartier de Sainte-Marie (de 4.000.000 FCFP à 5.000.000 FCFP selon ce sachant tandis que M. [M] retient une valeur de référence identique de 5.000.000 FCFP/a) et celui du mètre carré d'une « villa neuve en dur » alors que l'habitation litigieuse est âgée de trente cinq ans, « d'une conception relativement simple et économique » « sérieusement endommagée par des désordres importants » et donc susceptible de « rebuter plus d'un candidat acquéreur »,
- par des annonces immobilières relatives à deux villas situées Vallée des colons, dont l'une était proposée à la vente pour 46.500.000 FCFP, soit pour un montant proche de l'évaluation retenue par M. [M].
Ces éléments sont insuffisants pour douter de la pertinence de l'avis de M. [M] qui a retenu une valeur vénale de 43.000.000 FCFP en distinguant la valeur du foncier (20.600.000 FCFP) et celle des constructions (22.500.000 FCFP).
Il n'y a pas lieu d'ordonner une expertise judiciaire et le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a évalué l'immeuble litigieux à 43.000.000 FCFP.
4) Le premier juge, entérinant l'évaluation faite par M. [M] qui avait été spécifiquement interrogé sur ce point par le notaire (réponse du 31 août 2017), a chiffré l'indemnité d'occupation due par Mme [U] [A] à 14.118.705 FCFP pour la période du 1er juin 2010 au 31 décembre 2018.
Mme [E] [K] conteste ce chiffre en observant que « les loyers actuels se situent autour de 250 000 FCFP à 350 000 FCFP pour une villa sur terrain avec piscine. »
La comparaison à laquelle procède l'appelante n'est pas pertinente en ce qu'elle néglige l'état quelconque de l'habitation qui, selon M. [M], ne serait pas « en état d'être louée ».
Dans ces conditions, les évaluations proposées par M. [M], conformes à l'état réel de l'habitation, ne sont pas préjudiciables aux intérêts de Mme [E] [K] : elles doivent être entérinées.
Sur ce point, le jugement sera également confirmé.
5) Le premier juge a retenu que Mme [U] [A] détient une créance de 8.012.392 FCFP au titre des dépenses de conservation et d'amélioration du bien indivis, étant observé que ce montant avait été proposé par le notaire.
Mme [E] [K] excipe de la prescription de cette créance en soulignant l'ancienneté des dépenses. Mme [U] [A] et Mme [V] [K] rétorquent que la prescription doit « être considérée comme suspendue tant que dure l'indivision » et qu'elle a été suspendue par le procès-verbal de difficultés.
Il convient de distinguer les dépenses d'amélioration des dépenses de conservation.
La créance de Mme [U] [A] sur l'indivision en raison des dépenses de conservation qu'elle affirme avoir engagées, se prescrit selon les règles de droit commune édictées par l'article 2224 du code civil, en raison de son exigibilité immédiate (en ce sens, 1re Civ., 14 avril 2021, pourvoi no 19-21.313).
Mme [U] [A] ne démontre pas avoir invoqué une créance au titre des dépenses de conservation antérieurement à ses conclusions déposées le 19 octobre 2015 dans l'instance ayant abouti au jugement du 24 octobre 2016 qui a reconnu le principe même de cette créance, tout en laissant au notaire commis le soin d'en déterminer le montant. Il en résulte que Mme [U] [A] n'est pas recevable à se prévaloir d'une quelconque créance pour des dépenses de conservation engagées avant le 15 octobre 2010.
Le procès-verbal de difficultés dressé le 15 janvier 2019 donne la liste des dépenses de conservation et d'amélioration que le notaire propose de retenir ainsi que leurs montants. Il ne ressort pas de cette liste que des travaux de conservation ont été exécutés après le 15 octobre 2010.
S'agissant des travaux d'amélioration, qui doivent être indemnisés « selon l'équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation » (article 815-13 du code civil), aucune prescription ne peut être opposée à Mme [U] [A] puisque l'indemnité éventuellement due à l'héritier qui a engagé des dépenses ne peut être arbitrée qu'au moment du partage et que sa demande d'indemnisation a été formulée dans les cinq ans qui ont suivi le jugement ordonnant l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision immobilière.
Aucune indemnité ne sera allouée au titre des travaux d'amélioration réalisés en 1996 (fermeture de la terrasse, agrandissement du bureau), en 1998 (construction d'une mezzanine, rehausse du garage), en 1999 (aménagement du carport, changement du portail et de sa motorisation), en 2001 (prolongement de la terrasse), en 2002 (mise en place d'une fenêtre dans la buanderie) et en 2003 (aménagement de placards dans les chambres) dans la mesure où Mme [U] [A] ne démontre pas que ces travaux qui ont été réalisés, il y a plus de quinze ans, procurent aujourd'hui à l'immeuble une quelconque plus-value. Les travaux de réfection de la buanderie réalisés en 1998 ou le remplacement du chauffe-eau en 2007, rendus nécessaires par l'usure résultant de l'usage normal du logement, relèvent de l'entretien et ne peuvent donner lieu à indemnisation.
Aucune indemnité ne sera davantage allouée au titre de la rénovation de la cuisine menée en 2008/2009 qui ne procure, compte tenu de son ancienneté, aucune plus-value résiduelle à l'immeuble.
S'agissant des travaux d'aménagement de la terrasse côté piscine réalisés en 2011, que le notaire a entendu admettre à hauteur de 602.351 FCFP, il résulte des factures produites que ces travaux ont consisté en la pose d'une bache et d'une barrière en PVC. La plus-value procurée par la bache, qui a été exposée en permanence aux intempéries depuis sa pose et dont il n'est pas démontré qu'elle est toujours installée, est nulle. En revanche, la barrière en PVC, que Mme [U] [A] a financée (facture Alustyl du 7 septembre 2011 d'un montant de 255.386 FCFP), a une bonnne durabilité. Il n'est pas prétendu qu'elle n'aurait pas été correctement entretenue. En l'état de ces éléments, la cour évaluera la plus-value procurée par cette amélioration à 120.000 FCFP.
S'agissant du changement des portes et parquets dans deux chambres réalisé en 2012, le notaire a retenu :
- une facture ER travaux du 5 mai 2012 d'un montant de 321.095 FCFP TTC, afférente à la livraison et à la pose d'une porte et de persiennes,
- une facture MCM du 24 avril 2012 d'un montant de 73.502 FCFP TTC, afférente à la livraison de 11,63 m² de parquet en bambou,
- une somme de 6.336 FCFP que la cour n'identifie pas.
Ce dernier montant ne sera pas retenu par la cour.
Par ailleurs, Mme [E] [K] observe que les deux factures ER travaux et MCM désignent « La présence de Manou » comme client et non Mme [U] [A]. La facture ET travaux indique « [Adresse 1] », soit une adresse distincte de celle du bien litigieux. Mme [U] [A] ne démontrant pas avoir personnellement pris en charge ces dépenses, directement ou indirectement, la cour ne retiendra pas qu'elle est l'auteur des améliorations alléguées.
En conclusion, la créance de Mme [U] [A] au titre des dépenses d'amélioration s'établit à 120.000 FCFP.
6) Mme [E] [K] réclame à Mme [U] [A] une somme de 16 000 000 FCFP au titre de loyers que lui aurait versés la société La présence de Manou du 9 juin 2008 au 1er septembre 2016.
Aucun élément du dossier ne démontre que Mme [U] [A] aurait perçu des loyers de la location du bien indivis, pour la période antérieure au 1er juin 2010. Cette preuve n'est pas davantage rapportée pour la période ultérieure, étant observé que Mme [U] [A] est déjà redevable d'une indemnité d'occupation pour cette période.
En conséquence, ce chef de demande sera rejeté.
Par ces motifs
La cour,
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a dit que l'indivision successorale était redevable envers Mme [U] [A] au titre des dépenses de conservation et d'amélioration du bien indivis, de la somme de 8.012.392 FCFP ;
Statuant à nouveau de ce chef, fixe à 120.000 FCFP la créance que Mme [U] [A] détient à l'encontre de l'indivision au titre des travaux d'amélioration ;
Y ajoutant, déboute Mme [E] [K] de sa demande tendant à la restitution de loyers, dirigée contre Mme [U] [A] ;
Déboute les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [E] [K] aux dépens d'appel.
Le greffier, Le président.