No de minute : 258
COUR D'APPEL DE NOUMÉA
Arrêt du 30 août 2021
Chambre civile
Numéro R.G. : No RG 20/00371 - No Portalis DBWF-V-B7E-RMN
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 7 septembre 2020 par le tribunal de première instance de NOUMEA (RG no :19/65)
Saisine de la cour : 6 octobre 2020
APPELANTS
S.A.S. T.P.N.C., prise en la personne de son représentant légal en exercice,
Siège social : [Adresse 2]
Représentée par Me Philippe REUTER de la SELARL D'AVOCATS REUTER-DE RAISSAC-PATET, avocat au barreau de NOUMEA
S.A. ALLIANZ, délégation ALLIANZ en Nouvelle Calédonie, prise en la personne de son représentant légal en exercice,
Siège social : [Adresse 5]
Représentée par Me Philippe REUTER de la SELARL D'AVOCATS REUTER-DE RAISSAC-PATET, avocat au barreau de NOUMEA
INTIMÉS
M. [U] [Z]
né le [Date naissance 3] 1967 à [Localité 8] ([Localité 8]),
demeurant [Adresse 1]
Représenté par Me Jean-Victor BONIFAS de la SELARL JEAN VICTOR BONIFAS, avocat au barreau de NOUMEA désigné au titre de l'Aide judiciaire No 18/1869 du 23-02-2018
CAISSE DE COMPENSATION DES PRESTATIONS FAMILIALES DES ACCIDENTS DU TRAVAIL ET DE PREVOYANCE (CAFAT),
Siège : [Adresse 4]
Non comparante ni représentée
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 12 juillet 2021, en audience publique, devant la cour composée de :
M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,
M. Charles TELLIER, Conseiller,
Mme Nathalie BRUN, Conseiller,
qui en ont délibéré, sur le rapport de M. Philippe ALLARD.
Greffier lors des débats : M. Petelo GOGO
Greffier lors de la mise à disposition : M. Petelo GOGO
ARRÊT :
- réputé contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par M. Philippe ALLARD, président, et par M. Petelo GOGO, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.
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PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE
Le 22 septembre 2017, aux environs de 19 heures, M. [Z] a fait une chute alors qu'il marchait [Adresse 9].
Il a été hospitalisé du 24 au 29 septembre 2017 dans le service de chirurgie viscérale au CHT [M] [T] pour un traumatisme thoracique.
Selon ordonnance du 21 mars 2018, le juge des référés de [Localité 6], à la requête de M. [Z], a commis le docteur [R] aux fins de déterminer les conséquences médico-légales de la chute du 22 septembre 2017.
L'expert a déposé son rapport le 2 août 2018.
Selon requête introductive d'instance déposée le 23 novembre 2018, M. [Z], qui affirmait avoir trébuché sur un des plots destinés à soutenir les barrières métalliques du chantier de construction du Néobus et imputait sa chute à une négligence de l'entreprise en charge du chantier, a introduit devant le tribunal de première instance de Nouméa une action en responsabilité dirigée contre la société T.P.N.C. et son assureur, la société Allianz.
Les sociétés T.P.N.C. et Allianz ont sollicité leur mise hors de cause en dénonçant le manque d'attention et de prudence de M. [Z] aux abords du chantier ; subsidiairement, elles ont conclu à la réduction des indemnités réclamées.
Par jugement en date du 7 septembre 2020, la juridiction saisie, retenant que la matérialité des faits n'était pas contestée et qu'aucune faute d'inattention de la victime n'était démontrée, a :
- déclaré la société T.P.N.C. entièrement responsable des conséquences dommageables de « l'accident survenu le 19 avril 2016 à [Localité 7] » dont M. [Z] avait été victime,
- rejeté les demandes au titre des frais de transport et du préjudice d'agrément,
- fixé à la somme de 1 324 284 FCFP l'indemnisation de l'entier préjudice de M. [Z] se décomposant comme suit :
174 738 FCFP pour les dépenses de santé restées à charge,
197 748 FCFP au titre de la perte de gains professionnels actuels,
177 968 FCFP au titre de la perte de gains futurs,
73 835 FCFP pour le déficit fonctionnel temporaire,
700 000 FCFP au titre des souffrances endurées,
- condamné la société T.P.N.C., sous la garantie de son assureur, la société Allianz, à payer à M. [Z] la somme de 1 324 284 FCFP en indemnisation de ses préjudices, avec intéréts au taux légal à compter du jugement,
- débouté M. [Z] du surplus de ses demandes,
- condamné la société T.P.N.C., sous la garantie de son assureur, la société Allianz, à payer à la Cafat la somme de 403 884 FCFP, outre les intéréts au taux légal à compter du 18 avril 2019,
- dit n'y avoir lieu à réserver les débours futurs de la caisse,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum la société T.P.N.C. et la société Allianz aux dépens de l'instance,
- fixé à quatre le nombre d'unités de valeur revenant à Me [K], avocat du requérant, bénéficiaire de l'aide judiciaire totale.
PROCÉDURE D'APPEL
Selon requête d'appel déposée le 5 octobre 2020, la société T.P.N.C. et la société Allianz ont interjeté appel de cette décision. M. [Z] a formé un appel incident.
Aux termes de leurs conclusions récapitulatives déposées le 26 février 2021, la société T.P.N.C. et la société Allianz demandent à la cour de :
à titre principal,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré la société T.P.N.C. entièrement responsable des conséquences dommageables de l'accident,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société T.P.N.C., sous la garantie de son assureur, la société Allianz, à payer à M. [Z] la somme de 1 324 284 FCFP en indemnisation de ses préjudices, avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;
- prononcer la mise hors de cause de la société T.P.N.C. , faute pour M. [Z] d'avoir pu démontrer d'une part que le plot litigieux était bien l'instrument du dommage et d'autre part d'avoir pu démontrer la faute de négligence ou d'imprudence de la société T.P.N.C.;
- prononcer la mise hors de cause de la société Allianz ;
à titre infiniment subsidiaire,
- confirmer le jugement entrepris concernant le montant de l'indemnisation de 1'entier préjudice de M. [Z] à la somme de 1 324 284 FCFP ;
- confirmer le montant du recours de la Cafat à la somme de 403 884 FCFP ;
- confirmer qu'il n'y a lieu à réserver les débours futurs de la caisse ;
en tout état de cause,
- condamner M. [Z] au paiement de la somme de 150 000 FCFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans des conclusions déposées le 29 janvier 2021, M. [Z] prie de :
confirmant le jugement déféré,
- déclarer la société T.P.N.C. entièrement responsable des conséquences donnnageables de l'accident ;
- condamner la société T.P.N.C., sous la garantie de son assureur, la société Allianz, à lui payer les sommes ci-après détaillées, en réparation de son entier préjudice:
dépenses de santé actuelles : 174.738 FCFP
perte de gains professionnels actuels : 197.743 FCFP
souffrances endurées : 700.000 FCFP
- condamner la société T.P.N.C., sous la garantie de son assureur, la société Allianz, à payer à la Cafat la somme totale de 403.884 FCFP outre les intérêts au taux légal à compter du 18 avril 2019 ;
- condamner in solidum la société T.P.N.C. et la société Allianz aux dépens de l'instance ;
- ordonner l'exécution provisoire de la décision ;
réformant sur les autres points suivants le jugement déféré,
- condamner la société T.P.N.C., sous la garantie de son assureur, la société Allianz à lui payer les sommes ci-après détaillées, en réparation de son entier préjudice :
frais de transport : 120.000 FCFP
déficit fonctionnel temporaire : 84.900 FCFP
perte de gains futurs : 328.392 FCFP
préjudice d'agrément : 200.000 FCFP ;
- dire que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir ;
- fixer les unités de valeur revenant à Me [K] au titre de son intervention dans le cadre de l'aide judiciaire selon décision no 2017/1869.
La requête d'appel et les conclusions des appelantes ont été signifiées le 19 mai 2021 à la Cafat (acte remis à personne habilitée).
SUR CE, LA COUR,
M. [Z] recherche la responsabilité de la société T.P.N.C. tant au titre de la responsabilité du fait des choses qu'au titre de la responsabilité du fait personnel.
1) Ainsi que le soulignent les appelantes, il appartient à M. [Z], qui prétend avoir trébuché sur un des plots en béton utilisés pour soutenir les barrières de sécurité mises en place autour du chantier, de rapporter la preuve qu'un plot a été, de quelque manière, l'instrument du dommage.
Aucune enquête n'a été réalisée à la suite de l'accident.
La seule relation des faits est fournie par M. [Y] qui dans une attestation explique:
« Ce vendredi 22 septembre 2017 vers 19 h 30 à l'angle de la rue de l'Alma Austerlitz République en allant récupérer ma voiture je vois monsieur [Z] parterre je le aider a marchait et aparamment blesser et jai lui et demandé ceux qui y a et il ma dit que je suis tombai et de l'emmener chez lui ceu que jai fait en laissant mes cordonnées sur sa demande et je sui rentrer cher moi. »
Ce témoignage établit que M. [Z] a effectivement chuté [Adresse 9] mais M. [Y] ne fournit pas une relation de l'accident. Si les explications données par M. [Z] sont plausibles, comme le confirme l'expert judiciaire qui retient que « les faits du 23 septembre 2017 », tels que décrits par la victime, sont « cohérents avec le diagnostic retenu », les circonstances exactes dans lesquelles M. [Z] a trébuché, sont inconnues.
La cour ne dispose pas des éléments pour affirmer qu'un plot déposé par la société T.P.N.C. a provoqué la chute de M. [Z].
La responsabilité de la société T.P.N.C. ne peut pas être retenue sur le fondement de l'article 1384 du code civil.
2) De même, cette absence de toute certitude sur les circonstances de l'accident ne permet pas d'imputer une faute à l'entreprise, notamment celle que stigmatise l'intimé dans ses conclusions, qui aurait résidé dans le placement anormal du plot en béton.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Infirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a fixé à quatre le nombre d'unités de valeur revenant à Me [K] ;
Statuant à nouveau,
Déboute M. [Z] de ses demandes ;
Déboute les sociétés appelantes de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [Z] aux dépens de première instance et d'appel ;
Fixe à cinq le nombre d'unités de valeur revenant à Me [K], intervenant au titre de l'aide judiciaire pour le compte de M. [Z].
Le greffier,Le président.