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16/04/2015 | FRANCE | N°13/00350

France | France, Cour d'appel de Nouméa, 16 avril 2015, 13/00350


COUR D'APPEL DE NOUMÉA


Arrêt du 16 Avril 2015


Chambre Civile








Numéro R. G. : 13/ 00350


Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 02 Septembre 2013 par le Tribunal de première instance de NOUMEA (RG no : 09/ 366)


Saisine de la cour : 30 Septembre 2013




APPELANTS


M. Alain X..., agissant es-qualité de liquidateur amiable de la SARL A. J. R
siège social : ...

Représenté par la SELARL LOUZIER-FAUCHE-CAUCHOIS, avocat au barreau de NOUMEA


LA SC

I 883 ORPHELINAT, prise en la personne de son représentant légal en exercice
Siège social : 7 avenue du Maréchal Foch-98800 NOUMEA
Représentée par la SELARL D & S ...

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 16 Avril 2015

Chambre Civile

Numéro R. G. : 13/ 00350

Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 02 Septembre 2013 par le Tribunal de première instance de NOUMEA (RG no : 09/ 366)

Saisine de la cour : 30 Septembre 2013

APPELANTS

M. Alain X..., agissant es-qualité de liquidateur amiable de la SARL A. J. R
siège social : ...

Représenté par la SELARL LOUZIER-FAUCHE-CAUCHOIS, avocat au barreau de NOUMEA

LA SCI 883 ORPHELINAT, prise en la personne de son représentant légal en exercice
Siège social : 7 avenue du Maréchal Foch-98800 NOUMEA
Représentée par la SELARL D & S LEGAL, avocat au barreau de NOUMEA

BESTPARK INTERNATIONAL LIMITED venant aux droits de TRENWICK INTERNATIONAL LIMITED, prise en la personne de son représentant légal en exercice
Siège social : 3 rue de Sébastopol-BP. 8069-98807 NOUMEA CEDEX
Représentée par la SELARL de GRESLAN, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉS

LA SARL PONTONI, prise en la personne de son représentant légal en exercice
Siège social : 11 rue des Frères Guépy-DUCOS-BP. 8296-98807 NOUMEA CEDEX
Représentée par la SELARL ETUDE BOISSERY-DI LUCCIO-VERKEYN, avocat au barreau de NOUMEA

LA SARL SOCOTEC CALEDONIE, prise en la personne de son représentant légal en exercice
Siège social : 4 rue Paul Montchovet-Pointe Brunelet-BP. 3443-98846 NOUMEA CEDEX
Représentée par la SELARL REUTER-DE RAISSAC, avocat au barreau de NOUMEA

LA COMPAGNIE D'ASSURANCES " GAN PACIFIQUE IARD ", prise en la personne de son représentant légal en exercice
Siège social : 30 route de la Baie des Dames-DUCOS-98800 NOUMEA
Représentée par la SELARL DUMONS & ASSOCIES, avocat au barreau de NOUMEA

LE SYNDICAT DE COPROPRIETAIRES DE LA RESIDENCE " CRYSTAL BAY ", représenté par son Syndic en exercice, l'Agence VERON
Siège social : 2 rue de Suffren-Quartier Latin-BP. 486-98845 NOUMEA CEDEX
Représentée par la SELARL CALEXIS, avocat au barreau de NOUMEA

M. Emmanuel Y...

né le 01 Janvier 1929 à CHAMBERY (73000)
demeurant ...

Représenté par la SELARL CALEXIS, avocat au barreau de NOUMEA

Mme Annick Z...

née le 11 Janvier 1959 à PORT-VILA (NOUVELLES-HÉBRIDES)
demeurant ...

Représentée par la SELARL CALEXIS, avocat au barreau de NOUMEA

M. Robert A...

né le 27 Novembre 1923 à NOUMEA (98800)
demeurant ...

Représenté par la SELARL CALEXIS, avocat au barreau de NOUMEA

M. William B...

né le 02 Octobre 1966 à ANGERS (49000)
demeurant ...

Représenté par la SELARL CALEXIS, avocat au barreau de NOUMEA

M. Franck C...

né le 04 Juin 1968 à LYON (69000)
demeurant ...

Représenté par la SELARL CALEXIS, avocat au barreau de NOUMEA

M. Alain D...

né le 18 Mai 1946 à BINGES (21270)
demeurant ...

Représenté par la SELARL CALEXIS, avocat au barreau de NOUMEA

M. Henri E...

né le 13 Juillet 1945 à VOH (98833)
demeurant ...

Représenté par Me Fabien MARIE de la SELARL CALEXIS, avocat au barreau de NOUMEA

M. Stéphane F...

né le 03 Octobre 1968 à COULOMMIERS (77120)
demeurant ...

Représenté par la SELARL CALEXIS, avocat au barreau de NOUMEA

M. Georges G...

né le 18 Mai 1944 à MARACKECH (MAROC)
demeurant ...

Représenté la SELARL CALEXIS, avocat au barreau de NOUMEA

Mme Josiane H...

née le 12 Octobre 1950 à LUXEY (40430)
demeurant ...

Représentée la SELARL CALEXIS, avocat au barreau de NOUMEA

M. Samuel I...

né le 08 Mai 1975
demeurant ...

Représenté par la SELARL CALEXIS, avocat au barreau de NOUMEA

Mme Nathalie I...

née le 22 Juin 1974
demeurant ...

Représentée par la SELARL CALEXIS, avocat au barreau de NOUMEA

M. Jean-Malo J...

né le 25 Février 1966 à ANNECY (74000)
demeurant ...

Représenté par la SELARL CALEXIS, avocat au barreau de NOUMEA

M. Thierry K...

né le 07 Octobre 1963 à MAGNY EN VEXIN (95420)
demeurant ...

Représenté par la SELARL CALEXIS, avocat au barreau de NOUMEA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 12 Mars 2015, en audience publique, devant la cour composée de :

M. Yves ROLLAND, Président de Chambre, président,
M. Christian MESIERE, Conseiller,
M. François DIOR, Conseiller,
qui en ont délibéré, sur le rapport de M. François DIOR.

Greffier lors des débats : Mme Cécile KNOCKAERT

ARRÊT :
- contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par M. Yves ROLLAND, président, et par Mme Cécile KNOCKAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

Courant 1999, la SCI 883 Orphelinat, agissant en qualité de maître d'ouvrage, a fait construire un ensemble immobilier dénommé Résidence Crystal Bay situé à Nouméa, lot 60 du quartier de l'Orphelinat composé notamment de 13 appartements et de parkings.

Une mission partielle de maîtrise d'oeuvre relative au pilotage et à la coordination des travaux a été confiée à la société AJR selon un contrat du 3 mai 1999 et une assurance de responsabilité décennale a été souscrite auprès de la société Trenwick International devenue Bestpark International Limited.

Le lot " terrassements-fondations-gros oeuvre " a été confié à la société Pontoni par contrat en date du 10 novembre 1999 et la société SOCOTEC a été chargée d'une mission de vérification technique par acte du 23 juin 1999.

Selon différents contrats de vente intervenus à partir de 1999, la SCI 883 Orphelinat a vendu en état futur d'achèvement les biens et droits immobiliers afférents à cette réalisation.

La réception devait intervenir le 30 avril 2001.

Se plaignant de désordres, le syndicat des copropriétaires de la Résidence Crystal Bay (le syndicat) et certains copropriétaires ont obtenu la désignation d'un expert par ordonnance de référé du 11 janvier 2006.

Après extension de ses opérations à d'autres intervenants à l'acte de construire, l'expert a déposé son rapport le 9 octobre 2007.

Par ordonnance de référé du 2 avril 2008 les opérations d'expertise ont été rouvertes afin de permettre à l'expert de répondre précisément à la mission confiée précédemment s'agissant des désordres relevés et de leur caractère.

L'expert a établi son rapport le 9 juin 2008.

Au vu de ce rapport et par actes délivrés les 12, 11, 16 février et 19 et 20 août 2009, le syndicat des copropriétaires et M. L..., M. Y..., Mme M..., Mme Z..., M. A..., M. B..., M. C..., M. D..., M. E..., M. F..., M. G... et Mme H... ont respectivement fait citer devant le tribunal de première instance de Nouméa la SCI 883 Orphelinat (la SCI), la société Trenwick International et la société GAN Pacifique IARD aux fins de voir la SCI déclarée responsable des désordres affectant l'immeuble et d'obtenir sa condamnation sous la garantie de la société Trenwick à payer diverses sommes tant au syndicat qu'aux copropriétaires au titre des réfections réalisées et à réaliser sur les parties communes ainsi que dans les parties privatives, outre des dommages-intérêts.

Par acte du 24 août 2009, M. K..., co-propriétaire, est intervenu volontairement à la procédure pour solliciter le paiement d'une somme de 300 000 F à titre de dommages-intérêts en réparation du trouble de jouissance subi du fait des débordements des réseaux sanitaires et de celle de 157 500 F au titre des frais irrépétibles.

Par acte du 29 juillet 2009, la SCI a assigné en intervention forcée M. X..., es-qualités de liquidateur amiable de la société AJR, la société Pontoni et la société SOCOTEC aux fins d'obtenir leur garantie.

Cette procédure a été jointe au dossier par mention du 3 août 2009.

Par conclusions récapitulatives des demandeurs des 7 octobre 2010 et 20 avril 2012, M et Mme I... et M. J... sont intervenus aux lieu et place de Mme M... pour les premiers et de M. L... pour le second ;

Par jugement en date du 2 septembre 2013, le tribunal de première instance a statué comme suit :

" Donne acte à M et Mme I... et à M. J... de leurs interventions volontaires aux lieu et place de Mme M... pour les premiers et de M. L... pour le second.

Constate le désistement implicite de Mme M... et de M. L... et le dessaisissement de la juridiction.

Donne acte à M. K... de son intervention volontaire.

Déclare la SCI 883 Orphelinat responsable, en application de l'article 1147 du code civil, des dommages affectant l'immeuble construit par elle dénommé Résidence Crystal Bay, situé à Noumea, lot 60 du quartier de l'Orphelinat.

Dit que ces désordres relèvent de la garantie décennale pour laquelle une assurance a été souscrite auprès de la société Trenwick International devenue Bestpark International Limited.

Condamne solidairement la SCI 883 Orphelinat et la société Bestpark International Limited à payer les sommes suivantes :

- au syndicat des copropriétaires : trente-cinq millions quatre cent quarante-six mille quatre cent quatre cent quatre-vingt-cinq (35 446 485) francs CFP,

- à M. E... : cent cinquante mille (150 000) francs CFP,

- à M. B... : quarante-cinq mille (45 000) francs CFP,

- à M. Y... : quatre cent cinquante mille (450 000) francs CFP,

- à Mme Z... : sept cent soixante-neuf mille (769 000) francs CFP,

- à M. F... : huit cent mille (800 000) francs CFP,

- à M. G... et Mme H... : trois cent mille (300 000) francs CFP,

- à M. D... : trois cent mille (300 000) francs CFP,

Les condamne solidairement à payer au syndicat des copropriétaires la somme de huit cent mille (800 000) francs CFP au titre des frais irrépétibles.

Déclare la société Pontoni et M. X..., es-qualités de liquidateur de la société AJR responsables in solidum, sur le fondement des dispositions de l'article 1792 du code civil, des dommages affectant l'immeuble.

Les condamne in solidum à garantir la SCI 883 Orphelinat et la société Bestpark des condamnations qui viennent d'être prononcées à leur encontre à hauteur de 80 %.

Dit qu'entre co-obligés, la dette se répartira comme suit :
- à la charge de la société Pontoni : soixante-dix (70) %
- à la charge de M. X... : dix (10) %

Condamne la SCI 883 Orphelinat à payer à la société GAN Assurances Pacifique IARD la somme d'un million trois cent trente-sept mille cent quarante-trois (1 337 143) francs CFP.

Condamne la société Bestpark à garantir la SCI de cette condamnation.

Déboute les parties de toutes leurs autres demandes.

Condamne solidairement la SCI 883 Orphelinat et la société Bestpark aux entiers dépens qui comprendront les frais d'expertise.

Dit qu'elles seront garanties de cette condamnation par la société Pontoni et M. X..., es-qualités, dans la même proportion que précédemment indiquée.

Accorde à la SELARL CALEXIS le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile de la Nouvelle Calédonie. "

PROCÉDURE D'APPEL

M. X... ès qualités de liquidateur amiable de la SARL AJR, la SCI 883 Orphelinat et la société Bestpark International Limited, venant aux droits de Trenwick International Limited, ont respectivement interjeté appel de ce jugement les 30 septembre, 16 octobre et 8 novembre 2013.

Par conclusions récapitulatives du 12 mai 2014, M. X... ès qualités, faisant valoir que le contrat conclu entre la SCI et la SARL AJR stipule que le maître d'oeuvre n'assumera ses responsabilités que dans la mesure de ses fautes personnelles et qu'il ne pourra être tenu responsable des fautes commises par d'autres intervenants à l'opération, qu'AJR n'a pas été le concepteur du projet, que l'entreprise de gros ¿ uvre est responsable de la qualité des bétons, que l'assureur décennal doit assumer les réparations à l'exception des dégâts des eaux, demande à la cour de réformer le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité in solidum de la société AJR à l'égard de la SCI et de l'assureur, d'écarter toute demande de garantie formée contre cette société, prononcer sa mise hors de cause, condamner la SCI ainsi que toutes parties succombantes à lui payer la somme de 500 000 F CFP au titre des frais irrépétibles et accorder à son avocat le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile de la Nouvelle Calédonie.
Par conclusions récapitulatives du 22 juillet 2014, la SCI 889 Orphelinat faisant valoir principalement qu'aucune faute contractuelle n'est établie à son encontre, que la garantie décennale ne lui est pas applicable, demande à la cour à titre principal de débouter les demandeurs de toutes leurs demandes dirigées contre elle, subsidiairement, si la cour devait retenir sa responsabilité, rejeter les demandes fondées sur les dispositions contractuelles liant la SCI aux acquéreurs, dire que sa garantie est limitée à la réparation des seuls désordres de nature décennale, rejeter la demande du syndicat des copropriétaires qui ne justifie pas d'un préjudice distinct de celui des copropriétaires, dire bien fondé son recours en garantie dirigé contre les locateurs d'ouvrage, condamner in solidum la SARL Pontoni, M. X... ès qualités et la SOCOTEC à la garantir des condamnations qui seraient prononcées contre elle, dire que la société Bestpark doit sa garantie pour les désordres de nature décennale, subsidiairement sur ce point, dire que cet assureur a manqué à son devoir de conseil et d'information et le condamner à ce titre à lui payer l'équivalent des condamnations qu'elle devrait supporter, en tout état de cause, débouter le GAN de ses demandes dirigées contre elle et plus généralement les locateurs d'ouvrage de toutes leurs demandes dirigées contre elle, condamner enfin la société Bestpark à lui payer la somme de 500 000 F CFP sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle Calédonie et accorder à son avocat le bénéfice de l'article 699 du même code.

Par conclusions récapitulatives du 29 août 2014, la société Bestpark faisant valoir que les désordres ne rentrent pas dans la couverture de la garantie car 1) ils sont dus à des erreurs de conception non couvertes par l'assurance, 2) ils sont dus aux défauts d'étanchéité exclus de la garantie de l'assureur ou affectent des aménagements extérieurs qui sont hors du champ de la garantie, 3) ils ne répondent pas aux critères de l'article 1792 du code civil dans sa version applicable en Nouvelle Calédonie, demande à la cour d'infirmer le jugement qui l'a condamnée, à titre principal de débouter le syndicat des copropriétaires et la SCI de leurs demandes, subsidiairement de dire que l'aggravation des dommages à concurrence de 2 771 000 F CFP ne devra pas être mise à sa charge et que les réparations seront réduites de la franchise de 1 000 000 F CFP, en tout état de cause, condamner le syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 1 000 000 F CFP par application de l'article 700 du code de procédure civile de Nouvelle Calédonie ainsi qu'aux dépens distraits au profit de son avocat.

Par conclusions récapitulatives du 31 juillet 2014, le syndicat des copropriétaires de la résidence Crystal Bay et les copropriétaires demandeurs prient la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a accueilli les interventions volontaires de M. et Mme I..., de M. J... et de M. K..., déclaré la SCI responsable des dommages affectant l'immeuble sur le fondement de l'article 1147 du code civil, dit que les désordres relèvent de la garantie décennale pour laquelle une assurance a été souscrite auprès de la compagnie Bestpark, et réformant le jugement pour le surplus, condamner in solidum la SCI, la société Pontoni, la société AJR et la société SOCOTEC, sous la garantie de la société Bestpark et subsidiairement sous la garantie de la Cie GAN, à payer :

-1) au syndicat des copropriétaires les sommes de 4 002 704 F CFP au titre des travaux réalisés en cours d'expertise, 33 024 115 F CFP au titre des travaux à réaliser, 2 000 000 F CFP au titre des préjudices financiers, moraux et des tracas et soucis occasionnés,

-2) Aux époux E... les sommes de 72 700 F CFP au titre des reprises de fissures et 150 000 F CFP au titre des dégâts des eaux,

-3) A M. Y... les sommes de 122 700 F CFP au titre des travaux de reprise, 1 000 000 F CFP au titre des pertes et troubles de jouissance, 150 000 F CFP au titre des dégâts des eaux,

-4) A M. A... la somme de 60 000 F CFP au titre des travaux de reprise,

-5) A M. C... la somme de 60 000 F CFP au titre des travaux de reprise,

-6) A M. B... les sommes de 190 000 F CFP au titre des travaux de reprise et 45 000 F CFP au titre des dégâts des eaux,

-7) A Mme Z... les sommes de 65 000 F CFP au titre des travaux de reprise de fissures, 1 200 000 F CFP au titre de la perte de jouissance du jardin, 1 000 000 F CFP au titre de la réalisation du deck en remplacement du jardin, 500 000 F CFP pour la perte définitive du jardin et des tracas, 169 000 F CFP au titre des dégâts des eaux,

-8) A M. F... les sommes de 45 000 F CFP au titre des travaux de reprise de fissures, 200 000 F CFP au titre des pertes de loyers, 94 000 F CFP au titre de la perte de l'indexation de loyer, 500 000 F CFP pour la perte définitive du jardin suspendu attenant à la terrasse couverte, 200 000 F CFP au titre de la dégradation du jardin privatif existant imposant une remise en état intégrale, 257 250 F CFP au titre des travaux de reprise du deck provisoire et du curage des jardinières, 1 200 000 F CFP au titre de la perte de jouissance du jardin privatif, 300 000 F CFP au titre des dégâts des eaux,

-9) A M. J... la somme de 82 800 F CFP au titre des travaux de reprise,

-10) A M. et Mme I... la somme de 75 000 F CFP au titre des travaux de reprise,

-11) A M. G... et Mme H... les sommes de 765 220 F CFP au titre des travaux de reprise et 500 000 F CFP à titre de dommages et intérêts,

-12) A M. D... les sommes de 765 220 F CFP au titre des travaux de reprise et 500 000 F CFP à titre de dommages et intérêts,

-13) A M. K... la somme de 300 000 F CFP au titre des dégâts des eaux,

Dire que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal majoré avec anatocisme,

Condamner les mêmes au paiement de la somme de 1 800 000 F CFP par application de l'article 700 du code de procédure civile de Nouvelle Calédonie ainsi qu'aux dépens.

La société Pontoni, par mémoire d'appel valant appel incident en date du 6 mars 2014, demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a retenu sa responsabilité et l'a condamné à garantir la SCI et la société Bestpark des condamnations prononcés à leur encontre, débouter ces deux parties de leurs demandes, confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré la SCI responsable des désordres affectant la résidence, dire que les désordres relèvent de la garantie décennale couverte par l'assurance chantier, condamner la société Bestpark à la garantir des éventuelles condamnations prononcées contre elle, condamner la SCI ainsi que toutes les parties succombantes à lui payer la somme de 250 000 ainsi qu'aux dépens.
Par conclusions récapitulatives du 25 septembre 2014, la SOCOTEC conclut à titre principal à la confirmation du jugement en ce qu'il l'a mise hors de cause, subsidiairement au cas où sa responsabilité serait retenue, à la garantie de la société Pontoni, de la SARL AJR et de la société Trenwick ; en tout état de cause, elle sollicite la condamnation de la SCI à lui payer la somme de 500 000 F CFP par application de l'article 700 du code de procédure civile de Nouvelle Calédonie ainsi qu'aux dépens.

La Cie GAN, par des conclusions récapitulatives du 19 novembre 2014, sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a dit que la totalité des désordres relevaient de la garantie décennale et la condamnation de la SCI, sous la garantie de la société Bestpark, à lui payer la somme de 1 888 318 F CFP avec intérêts au taux légal à compter du dépôt de la requête et celle de 375 560 F CFP au titre des frais d'expertise de l'expert d'assurance, outre la condamnation in solidum de la SCI et du syndicat des copropriétaires au paiement de la somme de 350 000 F CFP par application de l'article 700 du code de procédure civile de Nouvelle Calédonie, ainsi qu'aux dépens.

Par ordonnance datée du 20 novembre 2014, l'affaire a été fixée au 12 mars 2015.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I-Les demandes du syndicat des copropriétaires et des copropriétaires

A) SUR LA NATURE DES DÉSORDRES

Attendu que l'expert a répertorié les désordres comme suit :

- Flexion et fissuration des dalles entraînant la fissuration des carrelages ;
Cause : fluage du béton et/ ou un mauvais positionnement des aciers en chapeaux sur appuis ;
- Fissuration de la structure verticale ;
Cause : mouvement des fondations ;
- Fissuration des dalles et des voiles soutenant les terres ;
Cause : défaut de conception ; la surcharge est trop importante faute de drainage ;
une telle masse de terre se devait d'être drainée ;
- Fissures de la dalle du garage par l'action de sous pressions qui l'ont fait travailler dans le sens inverse de son renforcement, désordre aggravé par l'absence de drainage ;
Cause : dalle du garage coulée au sol alors que l'étude de sol recommandait fortement sa réalisation sur vide sanitaire ;
- Les eaux de ruissellement s'accumulent dans le vide sanitaire qui est de taille importante et entraînent une détérioration des bétons armés ; l'étanchéité du mur séparant la cage d'escalier du vide sanitaire est décollée et doit être refaite ;
Cause : absence de fermeture périphérique du vide sanitaire qui constitue un point bas ; Problème aggravé par l'absence d'accès au vide sanitaire ;
- Débordement de la fosse sceptique ;
Cause : le système dépuration a été posé sur du remblai non compacté et en perpétuel tassement du fait du mauvais drainage ; le haut de l'étanchéité du mur séparant la cage d'escalier du vide sanitaire a été dépassé par l'effluent qui s'est déversé dans le vide sanitaire après rupture des canalisations de la fosse sceptique ;
- Infiltrations dans les appartements à travers l'étanchéité ;
Cause : fissures infiltrantes ou étanchéité défectueuse ;

Attendu que le caractère non apparent des désordres lors de la réception n'est pas remis en cause ;

Attendu que les flexions et les fissures, infiltrantes pour certaines, des dalles et de la structure verticale, le mouvement des fondations, atteignent les éléments constitutifs de l'immeuble et compromettent sa solidité ; que l'expert (page 38 du rapport) indiquait en octobre 2008 qu'il y avait urgence à faire les travaux de réfection, faute de quoi l'immeuble tomberait en ruine ;

Que par ailleurs, les infiltrations dans les appartements et les vices affectant la fosse sceptique rendent en tout état de cause l'ouvrage impropre à sa destination ;

Attendu que l'expert a cru devoir qualifier les désordres résultant d'infiltrations à travers l'étanchéité et ceux résultant de débordement des réseaux sanitaires comme relevant de la catégorie " dégâts des eaux ", non couverts par la garantie décennale ;

Mais attendu qu'un désordre ne constitue pas un " dégât des eaux " du seul fait qu'il se traduit par une entrée ou un déversement d'eau dans l'immeuble ; que les seuls critères devant être pris en considération sont ceux de savoir d'une part si le désordre est lié à l'acte de construire et d'autre part s'il compromet la solidité de l'ouvrage ou s'il le rend impropre à sa destination ; que le premier juge a répondu pertinemment sur ce point que les " dégâts des eaux " constatés par l'expert ne constituent en réalité que les conséquences des désordres de nature décennale ;

Attendu que le jugement sera confirmé de ce chef ;

B) SUR LES RÉPARATIONS

1) Les parties communes

Attendu que l'expert a chiffré les réparations nécessaires sur les parties communes à 35 446 485 F CFP + 539 648 F CFP, soit au total : 35 986 133 F CFP, somme actualisée au jour du rapport ;

Attendu que le premier juge a distingué les travaux déjà réalisés et validés par l'expert (inclus dans son chiffrage : 2 422 370 F CFP (pièces 3 à 5) et les travaux restant à réaliser : 33 024 115 F CFP, comprenant les travaux dans les appartements au titre du gros oeuvre, soit au total : 35 446 425 F CFP ; qu'il a rejeté une demande du syndicat des copropriétaires de 1 580 334 F CFP, non justifiée pour une part et prise en charge par le GAN pour le reste ; qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts complémentaires non justifiée ;

Attendu que le syndicat des copropriétaires observe que le tribunal n'a retenu que les trois dernières factures alors que d'autres travaux ont été faits et que le total des travaux effectués s'élève à la somme de 4 002 704 F CFP ; qu'il reste, selon lui, 33 024 115 F CFP de travaux à réaliser d'après l'expert se décomposant ainsi :

- gros oeuvre : 17 391 786 F CFP,
- erreurs de conception : 10 760 163 F CFP,
- ouvrages extérieurs : 7 294 536 F CFP,
et qu'après déduction les travaux déjà réalisés pour 2 422 370 pris en compte par le tribunal, le solde restant dû s'élève à 33 024 115 F CFP, outre les dommages et intérêts : 2 000 000 F CFP (tracas, frais divers...) ;

Attendu qu'il résulte des pièces du dossier que les travaux réalisés pouvant être considérés comme ayant un lien direct avec les désordres sont les suivants :

- ceux pris en compte par l'expert : gros oeuvre : 2 422 370 (pièces 3, 4 et 5 communiquées le 4 février 2009) + ouvrages extérieurs : 558 825 (pièces 10, 7 et 12 communiquées le 3 juillet 2014),
- ceux justifiés par des factures produites en appel : 894 589 F CFP (pièces 6, 9, 8, 5, 15, 17, 16, 18 communiquées le 3 juillet 2014)
soit au total : 3 875 784 F CFP ;

Qu'une facture Velayoudon de 126 920 F CFP n'est pas produite et que la somme réclamée de ce chef doit être rejetée ;

Attendu que les travaux à réaliser sont les suivants :

- gros oeuvre y compris dans les appartements dès lors qu'ils concernent les parties communes : 14 381 232 F CFP à actualiser : x 1, 0499 = 15 098 855 F CFP,
- erreurs de conception : somme actualisée : 10 760 163 F CFP
-ouvrages extérieurs : 6 713 205 à actualiser = 7 048 193 F CFP
soit au total : 32 907 211 F CFP

Attendu que le montant global des travaux concernant les parties communes s'élève donc à la somme de 36   782   995 F CFP ;

Attendu que le syndicat des copropriétaires réclame en outre une somme de 2 millions de francs CFP au titre des préjudices financiers moraux et des tracas et soucis occasionnés ; qu'il a été justement débouté de cette demande faute de rapporter la preuve d'un préjudice personnellement subi par lui ;

2) Parties privatives

Attendu que plusieurs copropriétaires demandent à nouveau devant la cour, au titre de leurs parties privatives, le paiement des réparations que l'expert a classées dans le chapitre " reprise gros oeuvre " ;

- M. E... : 72   700 F CFP
-Y... : 122   700 F CFP
-A... : 60   000 F CFP
-B... : 190   000 F CFP
-Z... : 65   000 F CFP
-F... : 45   000 F CFP
-J... (ex L...) : 82   800 F CFP
-I... (ex M...) : 75   000 F CFP
-G...- H... : 765   220 F CFP
-D... : 765   220 F CFP
-M. C... : 60 000 F CFP ;

Que le tribunal a justement accordé ces réparations " reprise gros oeuvre " au syndicat des copropriétaires au titre des parties communes et que les copropriétaires sont mal fondés à en réclamer le paiement à titre personnel ;

Attendu que M. C... ne figure pas dans la liste des copropriétaires ayant subi des désordres ; qu'il n'est pas mentionné dans le rapport d'expertise et que le tribunal a rejeté implicitement ses demandes ; qu'en cause d'appel, il ne produit aucune pièce justificative d'un quelconque préjudice ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Attendu qu'au vu des éléments de preuve produits, les copropriétaires sont en droit de se voir indemniser les dégâts privatifs et les troubles personnels qu'ils ont subis de la manière suivante :

- M. E... :

Attendu que le préjudice a été correctement évalué à la somme de 150   000 F CFP, selon l'évaluation de l'expert, pour les reprises d'infiltrations d'eau en plafond de la terrasse ;

- M. Y... :

Attendu que le préjudice a été correctement évalué à la somme de 150   000 F CFP, selon l'évaluation de l'expert, pour les reprises d'infiltrations d'eau en plafond de la terrasse ;

Attendu que dans cet appartement, la chambre d'enfant a été le siège d'infiltrations d'eau vanne par les prises de courant et les murs rendant la pièce humide et insalubre ; qu'une étanchéité des murs par l'intérieur a été nécessaire (référence 26 231 du rapport d'expertise page 16) ; que le trouble de jouissance peut-être évalué à la somme de 600   000 F CFP ;

- M. B... :

Attendu que le préjudice a été correctement évalué à la somme de 45   000 F CFP pour la reprise d'infiltrations d'eau dans la chambre numéro 2 ;

- Mme Z... :

Attendu que le préjudice a été correctement évalué à la somme de 169   000 F CFP pour des reprises d'infiltrations d'eau en terrasse et au plafond de la salle de bain ; que cet appartement situé au premier étage disposait d'un jardin en élévation qui a dû être supprimé en raison des désordres affectant le voile de béton qui retenait les terres ; que le préjudice global en résultant, toutes causes confondues (perte de jouissance définitive du jardin, nécessité de réaménager le décor) peut-être évalué à 1   500   000 F CFP ;

- M. F... :

Attendu que cet appartement disposait d'un jardin en élévation qui a dû être supprimé en raison des désordres affectant le voile de béton qui retenait les terres ; qu'un deck provisoire a été réalisé dans l'attente de la réalisation des travaux d'assainissement ; que des travaux de consolidation et de reprises ont été avancés par le copropriétaire ; qu'en outre, l'appartement a subi pendant plusieurs jours des reflux des eaux vannes provenant des appartements voisins ; que le préjudice global en résultant, peut-être évalué comme suit :

- perte de jouissance définitive du jardin, nécessité de réaménager le décor : 1   500   000 F CFP
-perte de loyer : 200   000 F CFP
-Travaux de reprise du deck provisoire et curage des jardinières : 257   250 Fr. (Pièce 12 et 13 des demandeurs)
- reflux des eaux vannes (pièces 1 à 5 de la communication du 30 juin 2009) : 200 000 F CFP

-M. et Mme G...- H...

Attendu que selon l'expert, cet appartement est situé au dernier étage de l'immeuble ; qu'il a présenté des fissures en particulier dans les poutres garde corps de la mezzanine qui semblait se désolidariser des murs sur lesquels elles prennent appui ; qu'en outre, des fissures horizontales étaient visibles dans les murs béton des façades latérales qui sont des murs porteurs ; que sur le balcon terrasse, les gardes corps en béton présentaient une importante fissuration liée aux mouvements du bâtiment ; que le trouble de jouissance résultant de ces désordres a été correctement évalué à la somme de 300   000 F CFP ;

- M. D...

Attendu que selon l'expert, cet appartement est situé au dernier étage de l'immeuble ; qu'il a présenté des fissures en particulier dans les poutres garde corps de la mezzanine qui semblaient se désolidariser des murs sur lesquels elles prennent appui ; qu'en outre, des fissures horizontales étaient visibles dans les murs béton des façades latérales qui sont des murs porteurs ; que sur le balcon terrasse, les gardes corps en béton présentaient une importante fissuration liée aux mouvements du bâtiment ; que des fissures déjà reprises se sont recréées.

Attendu que le tribunal a omis d'évaluer le trouble de jouissance résultant de ces désordres ; qu'il peut être fixé à la somme de 300   000 F CFP ;

- M. K...

Attendu que le préjudice allégué résultant du reflux des eaux vannes n'est justifié par aucune pièce et que ce copropriétaire a été à juste titre débouté de sa demande ;

C) SUR LES RESPONSABILITÉS

1) La SCI

Attendu que la SCI était maître de l'ouvrage jusqu'à la réception et vendeur d'immeuble en l'état futur d'achèvement ; qu'en cette dernière qualité, sa responsabilité ne peut être recherchée sur un fondement légal, l'article 1642-1 du code civil métropolitain n'étant pas repris dans le code applicable en Nouvelle-Calédonie ;
que cependant, le contrat fait la loi des parties et la SCI s'est contractuellement soumise, dans les contrats de vente, à la garantie décennale des constructeurs telle qu'elle résulte de la loi du 7 janvier 1978, les articles 1792, 1792-1, 1792-2, 1792-3, dans leur rédaction issue de ladite loi, étant entièrement reproduits dans le contrat ;

Attendu que la SCI soulève à tort l'irrecevabilité des demandes formées par le syndicat des copropriétaires au motif qu'il n'est pas partie aux actes de vente ;
qu'en effet, l'article 14 loi du 10 juillet 1965 dispose que la collectivité des copropriétaires est constituée en un syndicat qui a la personnalité civile et qui a pour objet la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes ;
qu'à ce titre le syndicat des copropriétaires a qualité pour agir contre les responsables des désordres affectant les partis communes ;

Attendu que la SCI prétend par ailleurs que sa responsabilité ne pourrait plus être recherchée depuis que la garantie décennale a été prise en charge par l'assureur (cf contrats de vente chapitre IV, section 3, modalités d'application des garanties) ; que la clause contractuelle est valable dans la mesure où l'engagement ne résulte pas d'une loi d'ordre public mais d'un contrat ; que cependant, la SCI ne prouve pas avoir justifié aux acquéreurs de " la signature après achèvement des constructions de l'avenant de prise en charge de la garantie décennale par la Cie d'assurance et du paiement par elle de la prime afférente ", condition prévue au contrat pour qu'elle puisse être exonérée de ses obligations ;

Attendu que la SCI est donc tenue à l'égard des acquéreurs de la totalité des réparations dès lors que le caractère décennal-au demeurant non contesté par elle-est retenu pour l'ensemble des désordres ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Attendu que la SCI conteste sa condamnation solidaire avec l'assureur décennal ;
Qu'en effet, l'article 1202 du code civil de la Nouvelle-Calédonie dispose que la solidarité ne se présume pas ;
Qu'en revanche, la SCI peut être condamnée " in solidum " avec d'autres co-responsables ou avec l'assureur tenu à garantie dès lors que les copropriétaires peuvent réclamer la totalité de leur créance à l'un quelconque des co-obligés ;

b) Les locateurs d'ouvrage

-L'entreprise Pontoni :

Attendu que les désordres ont leur siège dans le gros ¿ uvre dont l'entreprise était titulaire du lot ; que la SARL Pontoni ne s'exonère pas de la présomption de responsabilité que fait peser sur elle l'article 1792 ;

- La société AJR : maître d'oeuvre chantier

Attendu que selon l'expert (P 26), elle a rédigé les CCTP notamment celui de l'entreprise Pontoni ; qu'elle a donc participé dans une certaine mesure à la conception de l'ouvrage ;

Qu'en outre et surtout, elle était contractuellement chargée de la direction des travaux : " contrôle de la conformité de l'exécution des travaux aux prescriptions des pièces du marché " ;

Qu'elle ne s'exonère pas davantage de la présomption de responsabilité pesant sur elle ; que la disposition contractuelle dont elle se prévaut (article 4, § 2 du contrat signé le 3 mai 1999), stipulant que sa responsabilité ne peut être engagée que dans la mesure de ses fautes personnelles, ne saurait faire échec à l'application de l'article 1792 qui constitue une disposition légale d'ordre public ;

- La SOCOTEC

Attendu qu'aux termes de l'article 2, alinéa 1 de la convention de vérification technique, l'intervention de la SOCOTEC avait pour objet, d'une façon générale, de fournir aux assureurs les informations techniques nécessaires à l'appréciation du risque pris en charge au titre des polices de responsabilité décennale ;

Attendu que l'expert retient un manquement au devoir de conseil de la part de la SOCOTEC en ce qui concerne la mauvaise qualité du drainage, tout en reconnaissant que cette partie des travaux se situait hors du cadre de sa mission ;

Mais attendu que les organismes de contrôle technique ne sont pas tenus d'une obligation générale de conseil et d'information à l'égard du maître de l'ouvrage ; que c'est à juste titre que la SOCOTEC a été mise hors de cause par le premier juge ;

***

Attendu que la SCI, la société Pontoni et M. X... ès qualités seront donc tenus in solidum d'indemniser le syndicat des copropriétaires et les copropriétaires ;

Qu'il convient de préciser à ce stade que la somme allouée au syndicat des copropriétaires sera amputée du montant des travaux avancés par le GAN (1 337 143 F CFP au vu des quittances produites) ainsi qu'il sera précisé ci-après, le syndicat des copropriétaires ne pouvant prétendre bénéficier d'une double indemnisation ;

4) L'Assureur décennal

Attendu que la société Bestpark fait valoir tout d'abord qu'elle assure les constructeurs, locateurs d'ouvrage, à l'exclusion du maître de l'ouvrage qu'est la SCI et qui a seulement souscrit l'assurance ; que ce moyen est inopérant dès lors que la SCI sera subrogée dans les droits des acquéreurs quand elle les aura indemnisés ; qu'elle est recevable à solliciter la garantie de l'assureur décennal ;

Attendu que les conditions générales de la police d'assurance (chapitre un article 1. 2) stipulent que sont assurés les architectes, techniciens maître d'¿ uvre, bureau d'études techniques et entrepreneurs désignés pour la conception et la réalisation de la construction, dès lors qu'ils ont passé contrat avec le maître de l'ouvrage ;

Attendu que les conditions particulières signées le 17 août 2000 et qui ont fait l'objet d'un avenant signé le 12 décembre 2001 stipulent que sont assurées l'ensemble des entreprises titulaires des différents lots mentionnées sur l'état final des travaux ; que le formulaire de demande d'assurance construction annexé aux documents précédents comporte la liste des différents intervenants, notamment l'architecte Osmont, le bureau d'étude BRH, Monsieur N..., la SOCOTEC, le bureau d'étude des sols A 2 EP Nouméa et l'entreprise de gros ¿ uvre Pontoni ; que force est de constater que la société AJR ne figure pas dans cette liste ; qu'elle ne peut donc être considérée comme faisant partie des " assurés " au sens de la police ; qu'en outre, le montant des honoraires de bureau d'études n'a pas été pris en compte dans le montant prévisionnel des travaux, mais que cet élément n'est pas déterminant dans la mesure où il en est de même pour l'architecte Osmont qui figure pourtant dans la liste des assurés ;

Attendu que la société Bestpark assure donc dans la présente espèce la société Pontoni dont la responsabilité a été retenue ;

Attendu que l'appelante fait encore valoir que sont exclus de la garantie les désordres causés par les " défauts d'étanchéité " et d'autre part les " aménagements extérieurs " ; que le premier juge a cependant justement répondu que les désordres affectant les ouvrages extérieurs sont couverts dans la mesure où ils compromettent la solidité de l'ensemble de l'ouvrage ou le rendent impropre à sa destination ; qu'en outre il y a lieu de noter que l'étanchéité des toitures terrasses figure dans les options d'assurance demandées (6. 2) ;

Attendu que ne saurait être retenu l'argument selon lequel le syndicat des copropriétaires aurait été négligeant en tardant à diligenter les réparations nécessaires, ce qui aurait eu pour effet d'aggraver les désordres ; qu'en effet, aucune avance de fonds spontanée de la part des intervenants quels qu'ils soient, n'a permis au syndicat des copropriétaires d'entreprendre rapidement les travaux qui s'imposaient ; qu'au contraire, depuis le début de la procédure, chacun des défendeurs cherche à s'exonérer de sa responsabilité ;

Qu'enfin, le défaut d'entretien concernant l'évacuation des eaux de pluie est sans lien avec les désordres qui touchent le gros oeuvre, vu leur ampleur ;

Attendu en conclusion que la société Bestpark couvre la société Pontoni pour l'ensemble des désordres ;

Attendu qu'en vertu des dispositions de l'article 8 de la délibération de l'assemblée territoriale no 591 du 1er décembre 1983 sur l'obligation d'assurance en matière de travaux de bâtiment, la franchise n'est pas opposable aux bénéficiaires des indemnités ; que la société Bestpark est donc mal fondée à demander que les indemnités mises à sa charge soient réduites du montant de la franchise contractuelle de 1 000 000 F CFP ;

II ¿ Les demandes de garantie

-la répartition des responsabilités entre les locateurs d'ouvrage

Attendu qu'ainsi que l'a justement relevé le tribunal, il ressort des constatations de l'expert que les désordres affectant l'immeuble provienne d'erreurs de conception
ainsi que de malfaçons dans la mise en ¿ uvre ;

Attendu que s'agissant des erreurs de conception (absence de vide sanitaire sous le garage, absence de fermeture périphérique et d'accès au vide sanitaire, absence d'étanchéité et dysfonctionnement du drainage des eaux de percolation qui cheminent dans le sol et qui ont perturbé le système de fondation et le gros ¿ uvre), elles doivent être en partie supportée par la SCI qui a omis de mettre en cause l'architecte concepteur ;

Attendu que selon l'expert, la société AJR voit sa responsabilité engagée dans un premier temps en ce qu'elle a participé à la conception de l'ouvrage, en qualité de rédactrice du CCTP, document fondamental qui décrit avec précision les divers ouvrages à réaliser ; que s'agissant de la dalle sol en béton armé, l'expert déplore l'absence de recommandations concernant le vide sanitaire, le drainage ou l'étanchéité des jardins suspendus ;

Attendu par ailleurs que l'expert relève une insuffisance de contrôle des travaux par le pilote qui en avait la charge directe ;

Attendu que l'entreprise de gros ¿ uvre est responsable au premier chef des travaux de son lot qui n'ont pas donné satisfaction (fluage du béton, mauvais positionnement des aciers, mauvaise exécution du drainage, compactage défaillant des remblais sur lesquels la fosse septique a été installée) ;

Attendu que la cour ne voit pas de motif de modifier la répartition des responsabilités entre les locateurs d'ouvrage à laquelle le tribunal a procédé, soit :
- société Pontoni 70 %
- société AJR 10 %
- les derniers 20 % restant à la charge de la SCI qui a omis de mettre en cause l'architecte responsable de la conception de l'ouvrage ;

Attendu que compte tenu de ce qui précède, la SCI sera garantie in solidum par la société Pontoni, la société Bestpark et M. X... es qualités à hauteur de 80 % des condamnations prononcées ;

Attendu que le tribunal a condamné à tort la société Pontoni à garantir son assureur la société Bestpark alors qu'aucune demande-qui devrait être limitée en tout état de cause à la franchise contractuelle-n'est formulée en ce sens ; que le jugement sera réformé de ce chef ;

III-Les demandes contre la Cie GAN

Attendu que la Cie GAN est l'assureur " dégâts des eaux " de la copropriété ; qu'à ce titre, sa garantie a été sollicitée par le syndicat des copropriétaires en 2006 et elle a été amenée à préfinancer des travaux de réparations ; qu'elle dit avoir payé la somme totale de 1 888 318 F CFP ;

Attendu que la garantie de la Cie GAN n'étant pas retenue du fait que tous les désordres sont de nature décennale, cet assureur est subrogé dans les droits de son assuré et est donc fondé à réclamer le remboursement des sommes qu'il a avancées pour le compte des responsables ;

Attendu qu'au vu des justifications produites tant en première instance qu'en cause d'appel, le tribunal a justement fixé à la somme de 1 337   143 F CFP le montant des sommes avancées par la Cie GAN ; qu'à cette somme il convient cependant d'ajouter celle de 357   500 F CFP correspondant au montant des honoraires d'expertise que la compagnie a dû diligenter ;

Mais attendu que la condamnation prononcée par le tribunal à l'encontre de la SCI à ce titre est venue s'ajouter au montant global des réparations, ce qui revient à indemniser doublement le syndicat des copropriétaires ; que le jugement sera réformé de ce chef, ainsi qu'il sera précisé ci-après ;

Attendu que la SCI sera garantie de cette condamnation in solidum par la société Pontoni et la société Bestpark d'une part et par M. X... ès qualités d'autre part, à hauteur de 80 % ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par dispositions tant confirmatives qu'infirmatives et complémentaires,

Donne acte à M et Mme I... et à M. J... de leurs interventions volontaires aux lieu et place de Mme M... pour les premiers et de M. L... pour le second,

Constate le désistement implicite de Mme M... et de M. L... et le dessaisissement de la juridiction,

Donne acte à M. K... de son intervention volontaire,

Dit que les désordres affectant l'immeuble construit par la SCI 883 Orphelinat, dénommé résidence Crystal Bay relèvent de la garantie décennale des constructeurs,

Déclare la SCI 883 Orphelinat, la société Pontoni, la société AJR responsables in solidum des désordres à l'égard du syndicat des copropriétaires et des copropriétaires,

Condamne in solidum la SCI 883 Orphelinat, la société Pontoni et son assureur la société Bestpark, M. X... ès qualités de liquidateur amiable de la société AJR, à payer :

- au syndicat des copropriétaires de la résidence Crystal Bay la somme de trente-cinq millions quatre-vingt-huit mille trois cent cinquante-deux (35 088 352) F CFP représentant le montant total des réparations (36 782 995) F CFP diminué de l'avance faite par la Cie GAN (1 694 643 F CFP),

- à M. E... la somme de cent cinquante mille (150 000) F CFP au titre de la réparation des infiltrations,
- à M. Y... la somme de cent cinquante mille (150 000) F CFP au titre de la réparation des infiltrations et celle de six cent mille (600 000) F CFP en réparation du trouble de jouissance,
- à M. B... la somme de quarante-cinq mille (45 000) F CFP au titre de la réparation des fissures,
- à Mme Z... la somme de cent soixante-neuf mille (169 000) F CFP au titre de la réparation des fissures et celle de un million cinq cent mille (1 500 000) F CFP en réparation de la perte de jouissance du jardin,
- à M. F... la somme de deux cent mille (200 000) F CFP au titre de la perte de loyer, celle de un million cinq cent mille (1 500 000) F CFP en réparation de la perte de jouissance du jardin, celle de deux cent cinquante-sept mille deux cent cinquante (257 250) F CFP représentant le coût du deck provisoire et celle deux cent mille (200 000) F CFP pour le préjudice résultant du reflux des eaux vannes,
- à M. G... et Mme H... la somme de trois cent mille (300 000) F CFP en réparation du trouble de jouissance,
- à M. D... la somme de trois cent mille (300 000) F CFP en réparation du trouble de jouissance,

Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du jugement déféré,

Condamne in solidum la SCI 883 Orphelinat et la société Bestpark à payer à la Cie GAN la somme de un million six cent quatre-vingt-quatorze mille six cent quarante-trois (1 694 643) F CFP dont elle a fait l'avance, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

Dit que dans leurs rapports entre eux, la responsabilité finale des désordres incombe pour 70 % à la société Pontoni garantie par la société Bestpark, 10 % à la société AJR, la SCI conservant à sa charge une part de 20 % correspondant aux erreurs de conception,

Dit que la SCI 883 Orphelinat sera garantie à hauteur de 80 % des condamnations prononcées contre elle in solidum par la société Pontoni, la société Bestpark et M. X... ès qualités de liquidateur amiable de la société AJR,

Rejette toutes demandes plus amples ou contraires des parties,

Condamne in solidum la SCI 883 Orphelinat, la société Pontoni et son assureur la société Bestpark, M. X... ès qualités de liquidateur amiable de la société AJR aux dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais d'expertise, ainsi qu'au paiement au syndicat des copropriétaires et aux copropriétaires demandeurs de la somme de un million quatre cent mille (1 400 000) F CFP en application de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle Calédonie,

Dit que la charge finale de cette condamnation sera répartie conformément au partage de responsabilité ci-dessus fixé,

Accorde à la SELARL Calexis et à la SELARL Reuter-De Raissac qui le requièrent le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile de la Nouvelle Calédonie.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Numéro d'arrêt : 13/00350
Date de la décision : 16/04/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-04-16;13.00350 ?
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