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26/03/2015 | FRANCE | N°69

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Chambre coutumière, 26 mars 2015, 69


COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 26 Mars 2015

Chambre coutumière

Numéro R. G. : 14/ 00145

Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 17 Février 2014 par le Tribunal de première instance de Nouméa, Section détachée de Koné (RG no : 13/ 139)

Saisine de la cour : 03 avril 2014

APPELANT

M. Henri François Djéo Y...
né le 25 Septembre 1975 à NOUMEA (98800)
demeurant ...-98822 POINDIMIE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2014/ 703 du 18/ 07/ 2014 accordée par le bureau d'aide juridic

tionnelle de NOUMEA)
Représenté par Me Siggrid KLEIN, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ

Mme Marie-Laurence Wakétima...

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 26 Mars 2015

Chambre coutumière

Numéro R. G. : 14/ 00145

Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 17 Février 2014 par le Tribunal de première instance de Nouméa, Section détachée de Koné (RG no : 13/ 139)

Saisine de la cour : 03 avril 2014

APPELANT

M. Henri François Djéo Y...
né le 25 Septembre 1975 à NOUMEA (98800)
demeurant ...-98822 POINDIMIE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2014/ 703 du 18/ 07/ 2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de NOUMEA)
Représenté par Me Siggrid KLEIN, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ

Mme Marie-Laurence Wakétima A...
née le 05 Novembre 1978 à HIENGHENE (98815)
demeurant ...-98800 NOUMEA
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/ 646 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de NOUMEA)
Représentée par Me Julien MARTY, avocat au barreau de NOUMEA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 Mars 2015, en chambre du conseil, devant la cour composée de :

M. Yves ROLLAND, Président de Chambre, président,
M. Régis LAFARGUE, Conseiller,
M. François DIOR, Conseiller,
Mme Scholastique BOIGUIVIE, assesseur coutumier de l'aire de HOOT MA WAAP,
M. Elia PAWA, assesseur coutumier de l'aire de PAICI CAMUKI

qui en ont délibéré, sur le rapport de M. Régis LAFARGUE.

Greffier lors des débats : Mme Cécile KNOCKAERT

ARRÊT :
- contradictoire,
- prononcé en chambre du conseil, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par M. Yves ROLLAND, président, et par, Mme Cécile KNOCKAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

Des relations hors mariage de Mme Maire-Laure A...et de M. Henri Y... (débutées en 1999 et terminées en 2007), sont nés trois enfants :
- Atéa le 08 janvier 2000 à Poindimié ;
- Tchéou le 28 mars 2004 à Poindimié, et
-Sara le 29 septembre 2007 à Nouméa.
Tous trois ont été reconnus à l'état civil coutumier par leur père, dont ils portent le nom patronymique.

Pendant la durée de la vie commune le couple a vécu à Wagap, la tribu de M. Y... au sein du clan Beleote.

Lors de la séparation du couple un geste coutumier a été effectué par M. Y... qui a ramené son ancienne compagne chez sa mère biologique à Hienghène en présence des membres de la famille pour mettre un terme à leur relation de couple (cf. rapport d'enquête sociale).

La maman a vécu chez sa soeur à Nouméa puis dans un squatt, avant d'obtenir un logement social. Pendant toute cette période, soit pendant 6 (six) ans les enfants sont demeurés chez le père à la ...(Poindimié). Ils y demeuraient encore lorsque la mère a introduit une requête le 17 mai 2013 tendant à modifier la résidence des enfants motif pris de ce qu'elle aurait les plus grandes difficultés pour voir les enfants, et que leur père ne pourrait assumer leur éducation en raison de ses problèmes d'alcool et de ses accès de violence. Elle faisait état d'un incident récent : le fait que sa fille Sara ait été baptisée sans qu'elle en soit informée. A l'audience le père avait réfuté ces arguments.

Par jugement avant dire droit, en date du 5 août 2013, des mesures provisoires ont été ordonnées ainsi qu'une enquête sociale. Le père a été confirmé dans ses droits au titre de la garde des trois enfants.

L'enquête sociale (de Mme B...) a été déposée le 25 septembre 2013.
Au vu de ce rapport, la mère des enfants demandait que la résidence des deux plus jeunes enfants (Tchéou et Sara) soit fixée chez elle, tandis que Atéa demeurerait chez leur père ; d'organiser un droit de visite et d'hébergement pour l'autre parent ; et de fixer la contribution du père à l'entretien de Tchéou et Sara à 20. 000 F CFP par mois chacun soit 40 000 F CFP.

Devant le premier juge le père des enfants exposait que lors de la séparation du couple il avait fait la démarche de raccompagner sa concubine dans son clan d'origine, et que s'il avait gardé les enfants c'était en accord avec leur mère. Il s'opposait au transfert de la garde des deux plus jeunes enfants craignant pour leur développement et leur éducation en milieu urbain. Il disait vouloir les garder jusqu'à ce qu'ils intègrent le collège et puissent faire eux-mêmes un choix raisonné.

Par jugement du 17 février 2014, le tribunal statuant hors la présence des assesseurs coutumiers à laquelle les parties avaient renoncé, a :
- dit que l'autorité parentale s'exercerait conjointement puisqu'en application de l'article 35 de la délibération du 3 avril 1967 le père avait reconnu les enfants avec l'accord préalable de la mère ;

- sur la garde/ résidence habituelle des enfants (le terme " garde " étant plus conforme à la réalité du monde kanak), le tribunal a confié la fille Sara à sa mère et les deux autres enfants (Atéa et Tchéou) au père malgré les conclusions du rapport d'enquête sociale qui soulignaient que les enfants avaient leurs repères dans le clan paternel (en milieu coutumier) où ils étaient très bien entourés, alors que les horaires de travail et les conditions de vie de la mère dans les tours de Magenta pouvaient être source de perte de repères, ce qui conduisait l'enquêtrice à privilégier le maintien de la garde des enfants chez le père en milieu tribal.

Le premier juge a considéré que la situation de l'aîné (son maintien dans le clan paternel) n'était pas discutée, et que l'intérêt du second (Tchéou) était de demeurer auprès de son frère aîné, tandis que Sara, compte tenu de son âge, avait besoin de relations plus affirmées avec sa mère, d'autant que son père s'étant remarié, sa belle-mère ne pouvait remplir le rôle de la mère sans risque de créer une confusion dans l'esprit de l'enfant.

C'est dans ces conditions que seule Sara a été confiée à la garde de sa mère et qu'un droit de visite et d'hébergement croisé a été organisé. Le tribunal a fixé la contribution du père à l'entretien de Sara à la somme de 20 000 F CFP.

PROCÉDURE D'APPEL

Par requête du 3 avril 2014, M. Y... a interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 13 mars 2014.

Il a contesté l'attribution de la garde de Sara à sa mère en précisant que, lors de la séparation, il avait effectué une démarche coutumière au terme de laquelle il avait été autorisé à garder les enfants chez lui avec l'accord des deux clans qui avaient accepté ce geste.

Il estime que le prétendu risque que Sara confonde, si elle reste chez lui, le rôle de sa belle-mère avec celui de sa mère, n'existe pas dans le contexte d'un système coutumier qui amène les enfants à être éduqués par un collectif (des papas et des mamans) et non pas un père et une mère. Il précise que dans la société kanake il est admis " sans difficulté plusieurs parents, les biologiques comme les ¿ élevants'qu'ils soient les grands-parents ou d'autres membres de la famille ou encore des adoptants, ce point conférant aux enfants la certitude d'un ancrage familial dans la mesure du respect des gestes coutumiers. La distinction est alors naturellement faite par les enfants puisque l'éducation donnée prend en compte cette donnée et la transmet ".

En outre, il fait valoir que la mère avait refusé par le passé de prendre en charge les enfants au titre du droit de visite et d'hébergement pendant les vacances scolaires. Il s'étonne donc de la volonté de la mère de prendre les enfants avec elle après des années de silence de sa part depuis leur séparation. D'autant que pendant toutes ces années les enfants ont été élevés au sein du clan paternel. Il s'étonne en outre de la volonté de la mère de ne prendre avec elle que deux enfants, en séparant la fratrie au risque de déstabiliser les deux enfants qui iraient vivre avec elle.

M. Y... ayant constitué avocat, par écritures complémentaires en date du 18 juin 2014 et conclusions récapitulatives du 27 novembre 2014, il demande au principal l'annulation de la décision rendue en première instance et l'évocation. Il soutient n'avoir pas été touché par la convocation et n'avoir pu être présent à l'audience.

A titre subsidiaire, si la nullité n'était pas prononcée, il sollicite l'infirmation du jugement. Il rappelle qu'il a fait le geste pour garder les enfants, et que ceci n'a pas été contesté par la mère durant les 6 années écoulées avant qu'elle ne saisisse le tribunal.

Il fait valoir que le rapport d'enquête sociale souligne ses qualités éducatives renforcées par le fait qu'il s'est marié avec Mme H...dont il a deux autres enfants qui, avec ceux issus du premier lit, constituent une fratrie soudée. C'est la raison pour laquelle le père des enfants ne comprend pas la raison pour laquelle le premier juge a décidé de " révolutionner la vie " de l'un des enfants, en l'espèce Sara, aujourd'hui âgée de 8 ans et qui fréquente la même école que ses autres frères et soeurs et dans laquelle enseigne sa belle-mère (l'épouse du père est professeur de Français) en la coupant de sa famille de Poindimié, de sa fratrie, et de son environnement scolaire pour la plonger seule dans un monde inconnu à Nouméa (les Tours de Magenta). Selon l'appelant non seulement cette décision viole les engagements coutumiers pris lors de la séparation du couple, mais encore méconnaît l'intérêt de l'enfant.

Il ajoute qu'en 2013, lors de la confirmation du second, Atéa, une coutume a été organisée entre le père et la mère de l'enfant afin d'officialiser l'appartenance des trois enfants au clan Y..., en présence des deux familles ce dont atteste M. Jean-Luc I....

M. Y... demande donc à conserver la garde des trois enfants en organisant le droit de visite et d'hébergement de leur mère. Il ne réclame aucune contribution de celle-ci à leur entretien.

En réponse (conclusions récapitulatives du 13 novembre 2014) Mme A...soutient qu'elle a été chassée fin 2007 du clan d'où elle est partie en amenant avec elle Sara (née en septembre 2007), et en laissant provisoirement les deux garçons chez leur père. Elle ajoute que si elle a perdu la garde de Sara, c'est en raison du refus du père de la lui rendre à l'issue d'un droit de visite et d'hébergement.

Elle forme appel incident en ce que le tribunal a fixé la résidence de Tchéou au domicile du père.

Elle conteste les conclusions de l'enquête sociale au motif que l'enquêtrice travaille avec la soeur de M. Y... et connaît donc personnellement une des parties. Elle conteste l'affirmation de l'enquêtrice selon laquelle depuis 2007 les deux parties se seraient entendues pour que les enfants demeurent auprès du père. Elle conteste encore l'affirmation de l'enquêtrice selon laquelle le père tiendrait la mère informée de la situation des enfants.

Elle demande la confirmation de la garde d'Atéa (15 ans) au père, mais sollicite la garde de Tchéou (11 ans) décrit comme un enfant " rêveur " qui souffrirait de la séparation d'avec sa mère, ce qui aurait amené le père à le faire suivre par un psychologue.

Enfin elle demande la confirmation du jugement déféré en ce qui concerne Sara (8 ans), laquelle s'est adaptée à son nouvel environnement à Nouméa. Elle ajoute qu'un nouveau transfert de garde serait déstabilisant pour l'enfant.

Elle propose d'adapter le droit de visite et d'hébergement compte-tenu de la distance géographique (totalité des petites vacances scolaires et moitié des grandes vacances).

Elle réclame 20 000 F CFP par mois et par enfant, soit 40 000 F CFP, au titre de la contribution du père à leur entretien.

Par ordonnance du 03 décembre 2014 la clôture a été prononcée au 02 février 2015 et l'affaire fixée à l'audience du 02 mars 2015.

MOTIFS

1o/ Sur le demande de nullité du jugement :

Attendu qu'il résulte des énonciations du jugement statuant au fond que l'appelant était présent à l'audience de jugement même s'il n'était pas présent le 17 février 2014, lors du prononcé du délibéré ; que le moyen soulevé, qui procède d'une confusion, manque donc en fait et doit être rejeté ; qu'au demeurant l'appelant a déclaré y renoncer lors de l'audience de la cour d'appel ;

2o/ Sur le rappel des principes coutumiers :

Attendu, selon la coutume kanak, que la naissance d'un enfant est un événement social en ce que l'enfant, indépendamment du fait de savoir si ses parents sont mariés ou non, appartient au clan maternel, sauf s'il a été demandé par le clan paternel et effectivement donné à celui-ci par le clan maternel au terme d'un " geste coutumier ", lequel recouvre un " don de vie ", et que le fait d'être géniteur n'emporte pas en soi de statut juridique, ni de droit ni d'obligation à l'égard de l'enfant, la paternité même fondée sur une réalité biologique étant exclusivement un fait social institué par la norme coutumière ; qu'ainsi le rattachement de l'enfant à un clan et à une Terre est déterminant, au regard des principes du droit coutumier, pour définir l'identité et l'intérêt supérieur de l'enfant apprécié au regard des normes coutumières que désigne son statut personnel constitutionnellement garanti (CA Nouméa, 9 septembre 2013 RG no 2012/ 59 C...c. D...; CA Nouméa 11 octobre 2012 RG no2011/ 531, E...c. F...) ;

Qu'il s'en déduit que, dans la coutume Kanak, l'enfant appartient au clan du père, dès lors que le clan maternel le lui a donné, de manière publique et solennelle, à l'occasion d'un geste coutumier ; qu'en principe il incombe au clan paternel, auquel il a été donné, d'entretenir et élever l'enfant ; mais que s'il incombe au clan paternel de pourvoir seul aux besoins et à l'éducation de l'enfant, il incombe toujours au clan utérin d'exercer un droit de regard sur la façon dont le clan paternel s'acquitte de son engagement de protéger cette vie que les utérins lui ont confiée ;

Qu'ainsi, les principes coutumiers loin d'inviter à exclure l'un ou l'autre parent de la vie des enfants, visent, au contraire, à permettre aux enfants de " naviguer " entre les paternels et les maternels pour demeurer au contact de ces deux entités familiales, afin de " recueillir les paroles des deux clans " ;

Qu'enfin, l'intérêt supérieur des enfants est de demeurer auprès du clan paternel dont ils sont devenus les membres, par la volonté des clans (CA Nouméa 15 janvier 2013 RG no2011/ 452, K...épouse L...c. M...) ;

Attendu qu'il est de jurisprudence constante que " même en cas de vie commune hors mariage, l'enfant se voit conférer une place dans le clan du père, à la condition que celui-ci vienne présenter un geste coutumier afin de " réserver l'enfant et la mère ". ¿ est considéré légitimement comme père celui qui a accompli vis-à-vis de la mère de ses frères et de leur clan le geste pour prendre l'enfant. L'appartenance au clan paternel est alors manifestée publiquement par le nom. ¿ lorsque les clans ont donné leur parole, la réalité de la filiation n'est plus réversible, l'enfant ¿ " appartient " au clan dont il porte le nom. L'échange propre à la coutume implique qu'il n'est pas permis de revenir sur la parole qui a été donnée, surtout quand cette parole scelle l'avenir d'un enfant. Dès lors l'enfant est lié aux maternels et aux paternels par rapport au geste coutumier qui a été fait ; plus particulièrement il est lié aux paternels à travers l'échange intervenu entre les clans (en ce sens : TPI Nouméa, 21 février 2011, RG no09/ 1428 N...c. O...) ;

Attendu que les règles d'appartenance des enfants au clan qui déterminent les titulaires du droit de garde, peuvent toutefois céder devant la considération des manquements avérés et graves du père dans l'exécution de ses obligations à l'égard des enfants qui lui ont été donnés et donc aux paroles échangées entre les clans : le clan paternel s'engageant à protéger cette vie que les maternels lui ont confiée ;

3o/ Sur l'application des principes coutumiers au cas d'espèce :

Attendu, qu'en l'espèce, les parties ont vécu en concubinage jusqu'en 2007 ; que le père a reconnu les enfants avec l'accord de leur mère ce qui laisse présumer qu'il a fait les gestes pour prendre l'enfant lors de chacune des naissances ; que lorsque les parties ont décidé de mettre un terme à leur vie commune, c'est de façon régulière que le père a fait une coutume auprès de la mère de sa compagne pour la raccompagner dans son clan d'origine ; que celle-ci ne le nie pas ;
Que le statut des trois enfants est à cet égard lié, s'ils appartiennent tous trois au clan paternel rien ne justifie de faire un sort différent à l'un ou à l'autre des trois enfants en séparant la fratrie ;

Que la mère convient de laisser l'aîné chez son père en confirmant son appartenance clanique qu'elle remet en cause s'agissant des deux autres en demandant à ce qu'ils viennent vivre avec elle à Nouméa ;

Attendu que si la mère tente de jeter le doute sur le contenu du rapport d'enquête sociale, elle ne demande pas plus à hauteur d'appel que devant le premier juge une contre-enquête, pas plus qu'elle ne tente de rapporter la preuve contraire des constatations de l'enquêtrice ;

- Sur la situation contestée de Tchéou :

Attendu que la mère invoque, pour faire exception au principe de la résidence de l'enfant dans son clan d'appartenance, les manquements du père à l'égard du cadet qui serait " rêveur " en classe et que le père a fait suivre par un psychologue ;

Que, toutefois, le certificat du Dr J...qui a suivi l'enfant confirme bien que l'enfant a été amené par son père à la demande de l ¿ institutrice qui s'interrogeait sur la cause de ses troubles de l'attention, mais que l'examen pratiqué par le Dr J...n'a révélé aucune anomalie particulière ; que ce certificat démontre donc que le père est à l'écoute des observations du corps enseignant et n'a nullement démérité à l'égard de Tchéou ; que rien ne justifie de remettre en cause la garde exercée par le père ;

Que le père produit en outre une attestation de son propre père, M. Noël Y...chef de clan, en date du 18 août 2014 qui affirme qu'une démarche coutumière a été faite par son propre clan vis-à-vis du clan utérin Z... et de la mère des enfants ; qu'il précise que " ce geste par lequel les deux parties ont reconnu que les enfants de Y... Henri et de A...Laurence, faisaient partie totalement du clan du père, s'est déroulé le dimanche 29 septembre 2013 à mon domicile, sis à la ..., commune de Poindimié. Cette démarche a été scellée par un geste, un échange coutumier entre les clans Z.../ A..., d'une part, et Y... d'autre part " (pièce no16) ;

Que l'événement est confirmé par l'attestation de M. I...affirmant : " En 2013 à l'occasion de la confirmation d'Atea une coutume est organisée entre Henri Y... et son ex-femme pour officialiser l'appartenance des trois enfants (Atea, Tchéou et Sara) au clan Y... de Wagap à Poindimié. Cela s'est fait en présence des membres de leurs familles respectives " (pièce no13) ;

Qu'il résulte de ces deux attestations la confirmation de l'intégration des enfants dans le clan paternel ;

- Sur la situation contestée de Sara

Attendu que les même principes et motifs valent pour Sara qui apparaît, à l'instar de ses deux frères aînés, comme appartenant au clan paternel ;

Que pour justifier cette remise en cause de l'intégration de Sara dans le clan paternel, la mère ne prouve aucun manquement du père, ou du clan paternel, à l'égard de Sara, sauf à émettre l'hypothèse que Sara puisse finir par confondre les rôles de sa mère et de sa belle-mère, ce qui ne relève pas d'une réalité constatée ;

Que rien ne justifiait donc d'éloigner Sara du clan paternel (ce qui a pourtant été le cas depuis le 28 mars 2014) étant rappelé que le père respectait les prérogatives de la mère en lui permettant de voir l'enfant autant que faire se peut, en fonction d'un éloignement géographique qui est la conséquence du choix de la mère d'aller vivre à Nouméa ;
Que le père est donc parfaitement fondé à réclamer la garde des trois enfants ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu, par principe de fixer de contribution (que le père ne réclame d'ailleurs pas) à charge de l'autre parent pour l'entretien des enfants, lequel incombe au clan d'appartenance des enfants ;

Attendu qu'il est important que les enfants puissent conserver des contacts avec le clan utérin et singulièrement avec leur mère ; que le droit de visite et d'hébergement devra donc être scrupuleusement respecté pour que les engagements pris à l'égard des utérins soient véritablement tenus ;

Qu'il convient donc d'infirmer la décision entreprise en ce qui concerne la garde de Sara et de confirmer le jugement pour le surplus, notamment sur le droit de visite et d'hébergement de la mère qui s'exercera sur les trois enfants durant la totalité des petites vacances outre la moitié des grandes vacances compte tenu de l'éloignement géographique ;

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Attendu que les dépens seront partagés par moitié ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant, publiquement et en formation coutumière, par arrêt contradictoire, déposé au greffe ;

Déboute M. Y... de sa demande de nullité du jugement déféré ;

Vu le rapport d'enquête sociale ;

Constate l'existence de gestes coutumiers présentés par les paternels aux utérins et acceptés par ces derniers, tendant à intégrer les enfants dans le clan paternel ;

Dit que les trois enfants qui portent le nom de leur père sont membres du clan paternel ;

En conséquence,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a transféré à la mère la garde de l'enfant Sara et fixé à la charge du père une contribution à son entretien, et le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau :

Dit que la garde de Sara comme de ses deux frères revient au père et au clan paternel ;

Rappelle que l'exercice de l'autorité parentale par le clan paternel l'est sous la surveillance du clan utérin ;

Dit qu'il incombe au seul clan paternel de pourvoir à l'éducation et à l'entretien des enfants ;

Supprime la contribution versée par le père à la mère pour l'entretien de Sara ;

Dit que le droit de visite et d'hébergement de la mère sur Sara s'exercera dans les conditions fixées par le premier juge pour les deux autres enfants du couple ;

Déboute les parties de leurs demandes contraires ;

Dit que les dépens seront supportés par les parties à parts égales ;

Fixe à 4 (quatre) les unités de valeurs pour la rémunération de Mo Klein avocat commis au titre de l'aide judiciaire ;

Fixe à 4 (quatre) les unités de valeurs pour la rémunération de Mo Marty, avocat commis au titre de l'aide judiciaire ;

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Chambre coutumière
Numéro d'arrêt : 69
Date de la décision : 26/03/2015

Analyses

Infirmation


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.noumea;arret;2015-03-26;69 ?
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