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29/08/2013 | FRANCE | N°12/106

France | France, Cour d'appel de Nouméa, 29 août 2013, 12/106


COUR D'APPEL DE NOUMÉA


Arrêt du 29 Août 2013


Chambre Civile


Numéro R. G. :
12/ 106




Décision déférée à la cour :
rendue le : 27 Février 2012
par le : Tribunal de première instance de NOUMEA


Saisine de la cour : 12 Mars 2012






PARTIES DEVANT LA COUR


APPELANTS


M. Patrick X...

demeurant ...-...-98804 NOUMEA CEDEX
Profession : Architecte


représenté par Me Laurent AGUILA de la SELARL AGUILA-MORESCO, avocat au barreau de NOUMEA
LA SA

RL ART CONCEPT, prise en la personne de son représentant légal en exercice
213 rue Bénébig-BP. 16026-98804 NOUMEA CEDEX




représenté par Me Laurent AGUILA de la SELARL AGUILA-M...

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 29 Août 2013

Chambre Civile

Numéro R. G. :
12/ 106

Décision déférée à la cour :
rendue le : 27 Février 2012
par le : Tribunal de première instance de NOUMEA

Saisine de la cour : 12 Mars 2012

PARTIES DEVANT LA COUR

APPELANTS

M. Patrick X...

demeurant ...-...-98804 NOUMEA CEDEX
Profession : Architecte

représenté par Me Laurent AGUILA de la SELARL AGUILA-MORESCO, avocat au barreau de NOUMEA
LA SARL ART CONCEPT, prise en la personne de son représentant légal en exercice
213 rue Bénébig-BP. 16026-98804 NOUMEA CEDEX

représenté par Me Laurent AGUILA de la SELARL AGUILA-MORESCO, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉS

M. Laurent Y...

né le 11 Janvier 1966 à NOUMEA (98800)
demeurant ...-...-98800 NOUMEA

représenté par Me Philippe GANDELIN de la SELARL D'AVOCATS PHILIPPE GANDELIN, avocat au barreau de NOUMEA
LA SARL ALTECH, représentée par son mandataire ad'hoc Mme Réjance X..., ...-98800 Nouméa-selon ordonnance du TMC de Nouméa en date du 28 Août 2008
Dont le siège social est sis 213 rue Bénébig-BP. 16026-98804 NOUMEA CEDEX

LA SA GARONNE ALUMINIUM, prise en la personne de son représentant légal en exercice
Dont le siège social est sis 14-16 rue Lavoisier-BP. 4174-98846 NOUMEA CEDEX

LA SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS-SMABTP, prise en la personne de son représentant légal en exercice
Dont le siège social est sis 23 Route de l'Anse Vata-BP. 234-98845 NOUMEA CEDEX

représenté par Me John LOUZIER de la SELARL LOUZIER-FAUCHE-CAUCHOIS, avocat au barreau de NOUMEA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 25 Juillet 2013, en audience publique, devant la cour composée de :

Jean-Michel STOLTZ, Conseiller, président,
François BILLON, Conseiller,
Régis LAFARGUE, Conseiller,
qui en ont délibéré,
François BILLON, Conseiller, ayant présenté son rapport.

Greffier lors des débats : Stéphan GENTILIN

ARRÊT :
- contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par François BILLON, conseiller, le président empêché, et par Stéphan GENTILIN, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

*******************************************

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

Par acte sous seing privé du 7 février 2006, Laurent Y...a confié à Patrick X...la maîtrise d'oeuvre de la construction d'une maison d'habitation située sur la Commune de NOUMÉA, ......
.

Exposant que dans le cadre de cette construction, Patrick X...n'avait pas mis les entreprises du marché en concurrence mais avait au contraire proposé des entreprises dans lesquelles il avait des intérêts financiers telle la société ART CONCEPT et que, par ailleurs, des anomalies et manquements étaient apparus sur le chantier ainsi qu'il résultait du rapport d'expertise amiable du cabinet EXCAL, Laurent Y...a saisi le président du tribunal statuant en matière de référés qui a, par décision du 22 octobre 2008, ordonné une expertise technique.

En exécution de cette décision, Yves-Alain Z..., expert désigné, a établi un rapport en date du 24 février 2009.

Par requête enregistrée au greffe de céans le 15 mai 2009, Laurent Y...a saisi le tribunal de première instance de NOUMÉA sur le fondement de l'article 1147 du code civil, afin de voir homologuer le rapport d'expertise de M. Z..., condamner M. Patrick X...à lui payer les sommes de 4 015 200 F CFP au titre des erreurs de conception, majorée de l'indexation sur l'indice BT21 à compter du 24 février 2009, 400 000 F CFP au titre du préjudice de jouissance, 4 600 000 F CFP au titre du retard dans l'exécution du chantier, 2 700 837 F CFP au titre de l'inexécution du contrat de maîtrise d'oeuvre, ordonner à M. X...de remettre sous astreinte l'assurance décennale, condamner Mme Réjane X...en sa qualité de liquidatrice de la S. A. R. L. ART CONCEPT, à lui payer la somme de 1 019 550 F CFP au titre de l'exécution des marchés de travaux, avec indexation sur l'indice BT21 à compter du 24 février 2009 et la somme de 157 500 F CFP au titre du remboursement du trop perçu, condamner les Sociétés GARONNE ALUMINIUM et ALTECH à lui payer la somme de 27 300 F CFP au titre des travaux de reprise avec indexation sur l'indice BT21 à compter du 24 février 2009, condamner solidairement les époux X...à lui payer la somme de 350 000 FCFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions du 8 juillet 2009, la SOCIÉTÉ MUTUELLE D'ASSURANCE DU BÂTIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS dite SMABTP a demandé au tribunal de lui donner acte de son intervention volontaire sous les plus extrêmes réserves de garantie.

Par conclusions déposées le 4 février 2010, Patrick X...et la S. A. R. L. ART CONCEPT ont invoqué l'absence de fondement juridique de la requête de M. Y...et ont réclamé sa condamnation reconventionnelle à leur payer la somme de 100 000 F CFP à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et celle de 300 000 F CFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile de NOUVELLE-CALÉDONIE.

Par écritures reçues le 12 avril 2010, M. Y...rappelait qu'il avait expressément fondé ses demandes sur l'article 1147 du code civil.

Par courrier reçu le 20 septembre 2010, la société LA GARONNE ALUMINIUM justifiait avoir procédé aux reprises préconisées par l'expert Z...et produisait un écrit du 3 août 2010 dans lequel M. Y...confirmait que cette société avait vérifié les volets roulants en attente et avait remis en place une trappe et qu'il avait ainsi réceptionné ces ouvrages. La société LA GARONNE ALUMINIUM demandait au tribunal de dire que la demande de M. Y...dirigée à son encontre et à l'encontre de la société ALTECH (société de pose ayant agi pour le compte de la société LA GARONNE ALUMINIUM) n'avait plus d'objet.

Par conclusions reçues le 4 octobre 2010, la SMABTP soulignait qu'à défaut de réception et dans le cadre de vices apparents relevant de l'obligation d'achèvement, il ne pouvait être évoqué de garantie décennale. Elle discutait les conclusions de l'expert mais rappelait n'avoir pas été appelée à ses opérations. Elle déclarait ne connaître M. X...qu'en tant que maître d'oeuvre et non en qualité d'architecte, et ajoutait ignorer l'existence de la S. A. R. L. ART CONCEPT.

Par conclusions déposées le 3 mai 2011, Patrick X...et la S. A. R. L. ART CONCEPT demandaient au tribunal de mettre Mme X...hors de cause celle-ci n'ayant jamais eu de lien contractuel avec M. Y..., de dire que la responsabilité de M. X...ne pouvait être engagée qu'en cas de faute caractérisée dans l'exécution du contrat, d'ordonner une contre-expertise au contradictoire de la SMABTP, subsidiairement de débouter M. Y...de ses demandes, à titre infiniment subsidiairement de dire que M. X...sera garanti par la compagnie d'assurances SMABTP et de condamner M. Y...à leur payer la somme de 200 000 F CFP au titre des frais irrépétibles.

Dans d'ultimes écritures du 17 juin 2011, Laurent Y...s'opposait à la demande de contre-expertise injustifiée et présentée plus de deux ans et demi après la saisine du juge des référés, relavant que cette prétention avait un caractère dilatoire. Il faisait observer que M. X...avait attendu un an pour déposer ses premières écritures au fond dans cette procédure. Il rappelait que Mme X...était attraite en qualité de mandataire ad hoc de la société ART CONCEPT, antérieurement dirigée par M. X..., et que cette Société était intervenue sur le chantier en exécution du contrat de maîtrise d'oeuvre signé le 7 février 2006 avec M. X....

M. Y...s'étonnait que la SMABTP, qui ne déclarait pas garantir le sinistre, s'immisce dans le débat sur la responsabilité de M. X..., en relevant que nul ne plaide par Procureur, et soulignait que la compagnie d'assurances n'avait aucun intérêt à agir à l'encontre du demandeur à l'action principale.

Régulièrement assignée, la Société ALTECH n'a pas conclu.

Par jugement du 27 février 2012, le tribunal de première instance de NOUMÉA a statué, par décision réputée contradictoire, ainsi qu'il suit :

PREND ACTE de l'intervention volontaire de la compagnie d'assurances SMABTP ;

DIT que cette décision lui est opposable ;

VU l'ordonnance de référé du 22 octobre 2008 et le rapport d'expertise de M. Z...du 24 février 2009 ;

DIT n'y avoir lieu à contre-expertise ;

VU les dispositions de l'article 1147 du code civil ;

CONDAMNE M. Patrick X...à payer à M. Laurent Y...la somme de CINQ MILLIONS TROIS CENT QUATRE VINGT TREIZE MILLE CINQ CENT CINQUANTE (5 393 550) F CFP à titre de dommages et intérêts, majorée des intérêts au taux légal à compter du 24 février 2009 ;

CONDAMNE la S. A. R. L. ART CONCEPT, représentée par son liquidateur Réjane X..., à payer à monsieur Laurent Y...la somme de CENT CINQUANTE SEPT MILLE CINQ CENTS (157 500) F CFP à titre de remboursement d'un trop perçu ;

CONSTATE que la société LA GARONNE ALUMINIUM et la société ALTECH ont procédé en cours d'instance aux travaux de reprise préconisés par l'expert ;

CONDAMNE M. Patrick X...à payer à M. Laurent Y...la somme de CENT SOIXANTE DIX MILLE (170 000) F CFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile de NOUVELLE-CALÉDONIE ;

DÉBOUTE les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires, non fondées ni justifiées ;

CONDAMNE M. Patrick X...aux entiers dépens, comprenant le coût du rapport d'expertise de monsieur Z..., lesquels pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile de la NOUVELLE-CALÉDONIE.

PROCÉDURE D'APPEL

Par requête déposée au greffe le 12 mars 2012, M. X...et la société ART CONCEPT ont interjeté appel de la décision qui leur avait été signifiée le 6 mars 2012.

Ils ont déposé leur mémoire ampliatif le 12 juin 2012.

Par ordonnances des 11 et 21 mars 2013, le magistrat chargé de la mise en état a, par application de l'article 910-19-1 du Code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie, enjoint aux parties de formuler, dans le dispositif de leurs ultimes conclusions, le dernier état de leurs demandes.

Par conclusions récapitulatives du 16 avril 2013, M. X...et la société ART CONCEPT font valoir, pour l'essentiel :

- que la mission de M. X..., définie à l'article 2 du contrat signé entre les parties, a été exécutée en son intégralité, à l'exception du procès-verbal de réception, faute pour M. Y...d'avoir participé à la réception prévue malgré son engagement pris quelques jours plus tôt ; que M. X...a donc mené à bien sa mission jusqu'à son terme et qu'il ne peut lui être opposé un quelconque manquement à ses obligations ; qu'il a été ainsi satisfait aux prescriptions de l'article 3 du contrat qui prévoyait que le devoir général du maître d'¿ uvre était de faire concevoir l'ouvrage conforme à sa destination selon le programme indiqué par le maître d'ouvrage ;

- que s'agissant des réseaux d'évacuation, il n'existe aucune défaillance de M. X...dans le cadre de sa mission relative à la question d'altimétrie des réseaux d'évacuation qui ont été déclarés conformes et qui avaient reçu l'aval de la division eau et assainissement ; que le deck mis en place par M. Y..., ne relevait pas de la mission comprise dans le contrat signé entre les parties et qu'il n'appartient pas à M. X...d'en assurer le paiement contrairement aux conclusions de l'expert ; qu'en effet l'article 2-7 intitulé " Missions complémentaires " du contrat précisait bien que ne font pas parties de la mission normale de maîtrise d'¿ uvre, " les aménagements extérieurs et jardins paysagés " ;

- que les problèmes d'étanchéité survenus au pied du mur et au seuil de la porte sont survenus faute pour M. Y...d'avoir accepté la préconisation qui lui avait été faite de recourir à un enduit noir, de son souhait de descendre la peinture extérieure au rez-de-jardin pour des raisons esthétiques et de poser lui-même un seuil en kohu ; que les désordres liés à l'étanchéité de la toiture ne peuvent être imputés à M. X..., faute pour M. Y...d'avoir accepté de participer à la réception de l'immeuble ; qu'enfin aucune démonstration d'une faute dans l'exécution des plans n'est rapportée ;

- qu'en tout état de cause, il résulte des termes de l'article 3-5 du contrat signé par les parties intitulé " responsabilité ", que si le maître d'¿ uvre assume les responsabilités professionnelles définies par la loi et les règlements en vigueur et particulièrement celles édictées par l'article 1792 du Code Civil dans la mesure où des fautes professionnelles sont établies, il ne peut, même subsidiairement, être rendu responsable des fautes du maître d'ouvrage, des travaux que celui-ci s'est réservé ou des moyens de mise en ¿ uvre (plans et calculs d'exécution) par les entreprises ou des défauts internes de conception ou de fabrication des matériaux et éléments préfabriqués ou encore des fautes d'autres tiers ou intervenants tels qu'ingénieurs, conseils, techniciens spécialisés qui sont intervenus ; qu'il est enfin stipulé, aux termes de ce même article, que le maître d'¿ uvre n'est pas chargé de la surveillance du chantier mais simplement de la direction des travaux et qu'il ne peut, même subsidiairement, être rendu responsable des faute d'exécution d'une entreprise ;

- que le préjudice de jouissance demandé (4 600 000 F CFP) n'a aucun fondement, aucune faute ne pouvant être reprochée à M. X...et aucune clause relative à des indemnités de retard n'ayant été prévue ; qu'en outre, M. Y..., qui occupe la maison depuis de nombreuses années et qui est à l'origine par son refus de l'absence de réception de l'ouvrage, est particulièrement malvenu à former une telle demande ;

- que la prétendue déloyauté contractuelle de M. X...au motif qu'il aurait fait appel à la Société ART CONCEPT dans laquelle il était associé et gérant, est sans fondement ; qu'il était effectivement prévu par les parties, dans l'article 4-7 relatif aux " Relation avec les entreprises ", que le maître d'ouvrage décidait s'il ferait ou non appel à la concurrence et qu'il " fixe (rait) librement son choix sur le ou les entrepreneurs qui seront chargés par lui de l'exécution des travaux " ; que M. X...n'est pas un architecte, profession soumise à une déontologie particulière, et que le maître d'¿ uvre pouvait ainsi, à sa demande, lui indiquer des entreprises mais que cette simple indication n'était nullement de nature à faire obstacle à la liberté de choix du maître d'ouvrage ; que M. Y...a ainsi accepté, en toute connaissance de cause, la SARL ART CONCEPT et qu'il doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts de 2 700 837 F CFP correspondant à l'intégralité des sommes perçues par M. X...et la société ART CONCEPT ;

- que M. Y...doit également être débouté de sa demande de transmission sous astreinte de l'assurance décennale, celle-ci ne pouvant être effective faute de procès-verbal de réception ; que M. Y...qui n'a jamais accepté la réception proposée, au besoin en y mentionnant des réserves, ne peut donc aujourd'hui être accueilli en sa demande ;

- que la SMABTP ne saurait venir prétendre que dès lors qu'elle est intervenue volontairement devant le premier juge, aucune prétention ne pourrait être sollicitée à son encontre à titre reconventionnel et qu'il s'agirait en outre d'une demande nouvelle en appel ; qu'en effet, dans une instance, la seule demande de l'assuré contre l'assureur en garantie créé un lien d'instance de nature à permettre à M. X...de demander, qu'en cas de condamnation, il soit garanti par son assureur, la SMABTP ;

En conséquence, M. X...et la société ART CONCEPT demande à la Cour de statuer ainsi qu'il suit :

Vu l'article 1147 du Code Civil,
Vu le contrat signé le 7 février 2006 entre les parties,
Vu l'article 2 énonçant la mission du contrat et excluant les missions complémentaires d'aménagements extérieurs et jardin paysagé,
Vu l'article 3-5 « responsabilité »,
Vu l'article 4-7 « relation avec les entreprises »,
Vu l'article 4-11 « assurance décennale »,
Vu la lettre recommandée avec accusé de réception adressée le 5 mai 2008 par M. X...à M. Y...,
Vu le contrat d'assurance SMABTP,

METTRE hors de cause Mme X..., celle-ci n'ayant jamais eu un quelconque lien contractuel avec M. Y...pouvant justifier sa mise en cause sur le fondement de l'article 1147 du Code Civil, et infirmer le jugement dont appel sur ce point ;

CONSTATER qu'aucune réception n'a eu lieu du fait de M. Y..., qui confirme en page 6 du rapport d'expertise avoir refusé la signature de celle-ci ;

DIRE et juger que la responsabilité de M. X...ne peut donc être engagée qu'en cas de manquement caractérisé au contrat de maîtrise d'¿ uvre, et constater que sa mission prévue à l'article 2 du contrat a été réalisée jusqu'à son terme ;

CONSTATER que le rapport d'expertise de M. Z...occulte totalement le fait que la réception n'a pas eu lieu et que M. X...n'est intervenu qu'en qualité de maître d'¿ uvre, selon un contrat très précis ;

ORDONNER par voie de conséquence l'organisation d'une contre-expertise au contradictoire de la SMABTP, avec mission de déterminer, compte tenu de l'absence de réception, si M. X...a ou non manqué à son obligation de moyen en sa qualité de maître d'¿ uvre, selon les termes du contrat conclu et des exclusions de responsabilité y figurant ;

Subsidiairement :

DÉBOUTER M. Y..., faute de preuve d'une quelconque inexécution par M. X...de ses obligations stipulées au terme du contrat de maîtrise d'¿ uvre de toutes ses demandes présentées à son encontre ;

A titre infiniment subsidiaire :

DIRE et juger que M. X...sera garanti par la compagnie d'assurance SMABTP de toute condamnation au titre d'un manquement professionnel de sa part ;

En tout état de cause :

CONDAMNER M. Y...à verser à M. et Mme X...la somme de 200 000 F CFP au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile applicable en Nouvelle-Calédonie,

LE CONDAMNER aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de la SELARL AGUILA-MORESCO, Avocat sur ses offres de droit.

**************************

Par conclusions récapitulatives déposées le 30 avril 2013, M. Y...fait valoir, pour l'essentiel :

- que rien ne justifie la contre-expertise sollicitée par M. X...;

- que le problème d'altimétrie des réseaux d'évacuation, faute d'avoir été enterrés et d'avoir été placés en dessous du niveau du plancher de l'ouvrage, relève bien d'un problème de conception imputable au maître d'oeuvre et d'une malfaçon dans la mise en oeuvre, ainsi que l'expert l'a amplement démontré ; qu'ainsi, le remède préconisé par l'expert consistant, à défaut d'accord des parties sur la mise en place d'un deck, à la reprise des travaux pour un montant de 3 260 000 F CFP HT ou 3 423 000 F CFP TTC (taxe sur les salaires incluse) est justifié, outre la somme de 300 000 F CFP pour préjudice de jouissance lié à la durée des travaux ; que M. X...n'est en effet, aucunement fondé à soutenir que la mise en place d'un deck, de nature à réparer les désordres constatés, relèverait d'un aménagement extérieur à la charge du maître de l'ouvrage ;

- que l'étanchéité au pied des murs n'est aucunement de la responsabilité de M. Y...qui aurait refusé un enduit noir, ce qui est parfaitement inexact, et qui, en outre, aurait été une proposition totalement inadaptée, un tel produit ne s'appliquant aucunement sur des zones non enterrées ; qu'une somme de 552 000 F CFP HT ou 579 600 F CFP TSS est justifiée ;

- que le seuil de la porte d'entrée devait bien recevoir un habillage en briques, selon l'expert et qu'une somme de 12 000 F CFP HT ou 12 600 F CFP TTC doit être retenue ; qu'en outre une somme de 100 000 F CFP doit être versée, à titre de dommages et intérêts, en ce que l'absence de briques qui brise l'harmonie de la maison dont les fenêtres ont un parement en briques ;

- que les désordres affectant la toiture sont constitués et doivent être remis en état pour la somme de 90 000 F CFP HT ou 94 500 F CFP TTC ;

- que le contrat de garantie décennale doit être remis à M. Y..., sous astreinte ;

- que M. X...doit bien être tenu du retard contractuel qui a conduit l'expert à relever, dans son rapport du 27 novembre 2008, que M. Y...ne pouvait occuper la villa qui restait inachevée et dont l'achèvement des travaux étant pourtant prévu au 22 mai 2007 d'après le planning d'exécution signé par les entreprises ; qu'il est demandé à ce titre une somme de 4 600 000 F CFP pour 23 mois de retard sur la base mensuelle de 200 000 F CFP, à parfaire jusqu'à l'occupation de la villa impossible à ce jour, la réception n'ayant jamais eu lieu ;

- qu'au titre de l'exécution du contrat de maîtrise d'oeuvre, M. X...n'a pas craint de proposer sa propre entreprise, se gardant bien d'en informer M. Y...et qu'il a ainsi manqué à son devoir de conseil ; que dans ce contexte de mélange des genres, la réception des travaux ne pouvait être effectuée par le maître d'¿ uvre qui normalement assiste son client, ce qui a contraint M. Y...à solliciter l'intervention d'un tiers rémunéré ; que M. Y...a payé au titre de la maîtrise d'¿ uvre la somme totale de 2 700 837 F CFP et notamment la dernière facture d'un montant de 259 647 F CFP correspondant à la fin de chantier et à la mise en place de la décennale, alors même que la réception n'a jamais été effectuée ni l'assurance décennale mise en place ; qu'il demande le remboursement de ces sommes.

En conséquence, M. Y...demande à la Cour de statuer ainsi qu'il suit :

DÉCLARER M. Laurent Y...recevable et bien fondé en son appel incident du jugement du 27 février 2012 ;

En conséquence, y faisant droit, vu ce qui précède,

CONFIRMER ce jugement en ce qu'il a :

HOMOLOGUÉ le rapport d'expertise de M. Yves-Alain Z...en date du 24 février 2009 ;

DIT ET JUGÉ que M. Patrick X...avait commis des fautes au visa de l'article 1147 du Code Civil, et retenu sa responsabilité ;

L'INFIRMER POUR LE SURPLUS et statuant de nouveau,

CONDAMNER M. Patrick X...à payer à M. Laurent Y...les sommes suivantes :

* 4 015 200 F CFP à titre de dommages et intérêts pour les erreurs de conception, avec indexation sur l'indice BT 21 à compter du 24 février 2009, date du rapport d'expertise et jusqu'au parfait paiement,

* 400 000 F CFP à titre de dommages et intérêts pour les préjudices de jouissance liés à la reprise des réseaux et le non-respect des souhaits du maître de l'ouvrage,

* 4 600 000 F CFP en réparation du préjudice lié au retard dans l'exécution du chantier à parfaire,

* 2 700 837 F CFP à titre de dommages et intérêts au titre de l'inexécution du contrat de maîtrise d'¿ uvre ;

CONDAMNER M. X...à remettre sous astreinte de 20 000 F CFP par jour de retard le contrat d'assurance décennale, à compter de la signification du jugement à intervenir ;

CONDAMNER M. X...au paiement de la somme de 350 000 F CFP au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNER M. X...aux entiers dépens de l'instance qui comprendront ceux de l'instance en référé et le coût des deux expertises (amiable et judiciaire) dont distraction au profit de la Selarl PHILIPPE GANDELIN, aux offres de droit ;

DÉBOUTER M. X...et la SMABTP de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions.

**************************

Par conclusions récapitulatives déposées le 20 mars 2013, la SMABTP fait valoir, pour l'essentiel :

- qu'en intervenant volontairement aux débats de première instance la compagnie SMABTP n'a émis aucune prétention à l'encontre de M. X..., de sorte que ce dernier ne pouvait valablement former contre elle une demande reconventionnelle ; que c'est dans ce sens que la jurisprudence s'est fixée, tenant par ailleurs comme nouvelle et à ce titre irrecevable au visa de l'article 564 du code de procédure civile, une demande formée en appel ;

- qu'à titre subsidiaire, la SMABTP fait valoir que M. X...a souscrit deux polices d'assurances :

* une police ARTEC (assurance Risques Travaux des Entreprises de Construction) qui ne garantit pas les dettes de travaux, c'est-à-dire le montant des travaux qui auraient du être exécutés par l'entrepreneur en raison de ses obligations contractuelles ou pour la finition de l'ouvrage, pas plus que le préjudice causé par l'entreprise en raison de son retard dans l'exécution des travaux, ou la perte ou les troubles de jouissance éprouvés par le maître d'ouvrage en raison des retards,

* une police RPI (assurance de la responsabilité professionnelle des missions de l'ingénierie)
qui ne garantit ni l'inobservation inexcusable des règles de l'art, ni les astreintes et les pénalités de retard ;

- que certains des désordres constatés et les dettes contractuelles de travaux, ne peuvent ainsi être pris en charge par la compagnie d'assurance, au titre de la garantie responsabilité civile ; qu'ainsi le problème d'altimétrie des réseaux d'évacuation qui n'est que purement esthétique, les travaux d'étanchéité des bas de façade, le seuil de la porte d'entrée, les désordres relatifs à la toiture et les murs extérieurs ou le retard pris par l'entreprise dans l'exécution des travaux ne sont pas couverts ;

- que le préjudice lié à l'exécution du contrat de maîtrise d'¿ uvre, consistant à demander le remboursement des honoraires, n'est pas un risque couvert par la police SMABTP ;

- qu'en tout état de cause, le problème de l'altimétrie des réseaux d'évacuation n'est pas un désordre et que le remède préconisé de recourir à la mise en place d'un deck n'est que purement esthétique et relève d'une dette contractuelle non prise en charge par l'assureur ;

- que s'agissant de la demande du maître d'ouvrage d'ordonner sous astreinte la production de la police d'assurance décennale de la construction, il convient de relever qu'aucune police de responsabilité décennale n'a été régularisée auprès de SMABTP.

En conséquence, la SMABTP demande à la Cour de statuer ainsi qu'il suit :

A titre principal :

Vu l'article 654 du code de procédure civile,
DIRE ET JUGER non recevable comme nouvelle la demande formée par M. X...et par ART CONCEPT tendant à la condamnation de la SMABTP à les garantir de toute condamnation ;

Subsidiairement :

DONNER ACTE à la compagnie SMABTP des exceptions qu'elle oppose à son assuré au titre des polices dont s'agit ;

CONSTATER que l'action du maître d'ouvrage est fondée sur les dispositions de l'article 1147 du code civil ;

CONSTATER qu'au titre des deux polices ARTEC et RPI sont exclues de la garantie les astreintes et les pénalités de retard, et les conséquences pécuniaires de toute nature résultant d'un retard dans l'exécution des travaux ;

DIRE en conséquence non acquise à l'assuré la garantie pour retard ou astreintes ;

CONSTATER, dire et juger que les dépenses engagées ou celle restant à faire pour la réalisation ou la finition de l'objet du marché ne sont pas garanties par la police ARTEC ; que les demandes relatives au réseau extérieur, aux murs extérieurs, charpentes, étanchéité de pied de mur, pour fondés qu'elles seraient, relèvent d'une insuffisance de travaux et donc d'une dette contractuelle de travaux non couverte par les polices d'assurance responsabilité civile ;

DIRE n'y avoir lieu à garantie de ces chefs ;

REJETER les demandes en restitutions des honoraires payés à la maîtrise d'¿ uvre et subsidiairement les déclarer non garanties par la police ;

DISPENSER la SMABTP de toute contribution aux frais irrépétibles et aux dépens ;

STATUER sur les dépens d'appel et dire qu'ils seront supportés par celui qu'il appartiendra.

**************************

Les ordonnances de clôture et de fixation de la date de l'audience ont été rendues le 18 avril 2013.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu que le magistrat chargé de la mise en état a, par application de l'article 910-19-1 du Code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie, enjoint aux parties de formuler, dans le dispositif de leurs ultimes conclusions, le dernier état de leurs demandes ; que la Cour statuera au vu de celles-ci ;

Attendu que M. Y...a sollicité de M. X..., en sa qualité de maître d'¿ uvre, de lui apporter son concours dans les conditions décrites au terme du contrat de louage d'ouvrage et de la mission de maîtrise d'oeuvre du 7 février 2006, pour l'édification d'une " villa de type F4 après démolition de l'existant avec garage, terrasse et assainissement sur droits acquis " ; que " la convention conclue entre les parties étant un contrat de louage d'ouvrage défini par l'article 1792 du Code Civil, à l'exclusion de tout autre contrat ou mandat " (article premier) ;

Attendu que M. FERRIOT se prévaut ainsi des dispositions de l'article 1147 du Code Civil relatives à l'inexécution par l'une des parties de son obligation contractuelle, pour solliciter la condamnation de M. X...; que ce dernier soutient, par son appel, qu'il convient de reprendre précisément la mission prévue à l'article 2 du contrat du 7 février 2006, ainsi que les droits et obligations du maître d'¿ uvre prévus à l'article 4, pour se convaincre de l'infirmation nécessaire de la décision du premier juge ;

De la responsabilité des désordres et de leur indemnisation

Attendu que l'expert Yves-Alain Z...a déposé, le 24 février 2009, un rapport détaillé et complet sur les erreurs et désordres ayant affecté le marché de construction de la maison d'habitation située au ...appartenant à M. Y..., ainsi que les remèdes à apporter et leur coût ; que la demande de contre-expertise présentée par M. X...et la S. A. R. L. ART CONCEPT, qui ne repose sur aucun fondement autre que le fait de lui être défavorable, doit par conséquent être rejetée ;

Attendu que les dispositions de l'article 1147 du Code Civil prévoient que :

" Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise fois de sa part " ;

Attendu que différents désordres sont contestés par M. X..., mais également par la SMABTP ; qu'il convient de les analyser, ainsi qu'il suit :

Du problème d'altimétrie des réseaux d'évacuation

Attendu que M. X...soutient qu'il n'a commis aucun manquement à ses obligations dans le cadre de sa mission relative à la question d'altimétrie liée aux travaux relatifs aux réseaux d'évacuation qui ont été déclarés conformes et qui avaient reçu l'aval de la division eau et assainissement ;

Attendu qu'il est cependant établi par l'expert judiciaire que :

" l'ensemble des réseaux (eaux usées, eaux vannes et eaux pluviales) se situait très au dessus du terrain ",

" M. X...est un homme de l'art et à ce titre a commis une erreur en laissant réaliser pour le compte du maître de l'ouvrage, M. Y..., un ensemble d'évacuation des eaux hors de toutes règles de l'art ",

et " qu'en sa qualité de maître d'oeuvre et de conduite du chantier, M. X...avait la responsabilité du suivi de la conception, des études et de la réalisation " ;

Attendu que la responsabilité du maître d'¿ uvre, M. X...est effectivement engagée puisqu'il avait en charge, au titre du contrat de maîtrise d'¿ uvre, le projet de conception générale (article 2/ 5) qui comprend les études (plans, dessins), mais également la conduite générale des travaux (article 2/ 6-3) ; que l'expert indique ainsi dans son rapport (page 19, premier paragraphe) :

" nous rappelons que la prestation d'un maître d'¿ uvre n'est certainement pas de bafouer les règles les plus élémentaires de construction sans parler des règles de l'art " ;
Attendu que M. Y...est fondé à soutenir que M. X...a commis une erreur grave de conception lorsqu'il a réalisé les plans de construction de la maison en prévoyant un réseau d'évacuation des eaux situé au dessus de la dalle constituant le plancher de la villa, qu'il a persisté dans son erreur en ne modifiant pas ses plans en constatant ce défaut et l'a cautionnée en demandant à M. Y...de régler ces travaux réalisés en violation des règles de l'art ; qu'il ne s'agit toutefois ni d'une faute inexcusable du maître d'oeuvre, ni de travaux purement esthétiques relevant d'une dette contractuelle de travaux, comme le soutient de manière inexacte l'assureur SMABTP pour échapper à sa responsabilité ;

Attendu que s'agissant du montant des réparations, l'expert avait proposé une solution de mise en place d'un deck, solution non prévue à l'origine mais avantageuse pour le maître d'¿ uvre ; que cependant, cette solution proposée au maître de l'ouvrage et qui avait obtenu l'accord du maître d'¿ uvre, a par la suite été remise en cause par M. X...notamment dans le cadre d'un dire à expert ; qu'en conséquence, M. Y...est fondé à solliciter la condamnation du maître d'oeuvre à lui verser la somme de 3 260 000 F CFP HT, soit 3 423 000 F CFP TTC comprenant non pas la mise en place d'un deck de nature à remédier aux désordres constatés mais les travaux de démantèlement et de reprise des réseaux, tels qu'évalués par l'expert, outre la somme de 300 000 FCFP, également prévue par l'expert au titre du préjudice de jouissance correspondant à la duré des travaux fixée à un mois et demi ;

De l'étanchéité au pied des murs

Attendu que M. X...soutient que les problèmes d'étanchéité survenus au pied des murs ne lui sont pas imputables, faute pour M. Y...d'avoir accepté la préconisation qu'il lui avait été faite de recourir à un enduit noir, ce qui est contesté par le maître de l'ouvrage qui soutient qu'un tel enduit ne s'applique que sur les zones enterrées et qui précise que le mur à protéger de l'humidité qui concernait une zone habitable nécessitait une étanchéité lourde ;

Attendu qu'en tout état de cause, l'expert a bien constaté " la mauvaise réalisation de l'étanchéité en pied de mur ", a relevé qu'il s'agissait d'un désordre qui pouvait " à terme, présenter un risque pour la pérennité de l'ouvrage dans des conditions optimales d'utilisation ", et a précisé que ce désordre se traduisait par " des remontées capillaires susceptibles d'oxyder les ferraillages de pieds de poteaux qui par effet de la rouille feraient éclater le béton, provoquant des désordres qui pourraient nuire à la solidité de l'ouvrage " ;

Attendu qu'en conséquence, M. X..., qui a souscrit dans le cadre de son contrat une obligation conduite générale des travaux (article 2/ 6-3 du contrat) qui lui impose de donner toutes directives nécessaires à la bonne exécution des travaux, a commis une faute qui engage sa responsabilité et dont il doit réparation ;

Attendu que le coût de la reprise de ce désordre a justement été évalué par l'expert à la somme de 552 000 F CFP HT ou 579 600 F CFP, somme qu'il convient de mettre à la charge de M. X...; qu'il s'agit bien d'une faute du maître d'oeuvre qui ne saurait être considérée cependant comme inexcusable, pas plus que comme étant une dette contractuelle de travaux, comme le soutient de manière inexacte la SMABTP pour échapper à sa responsabilité ;

Du seuil de la porte d'entrée

Attendu que M. X...soutient que M. Y...souhaitait un seuil en kohu qu'il devait poser lui-même et qu'il n'a pas à prendre en charge les frais d'un carrelage antidérapant ;

Attendu qu'il est cependant relevé par l'expert que " le seuil de la porte d'entrée devait recevoir un habillage en briques " et " qu'un loupé dans le niveau de ce seuil ne permet pas l'habillage souhaité. Nous proposons la pose d'un carrelage antidérapant " ;

Attendu qu'il est ainsi établi qu'il s'agit d'une erreur de conception de la part de M. X..., et d'une malfaçon dans la mise en ¿ uvre dont M. X...devait assurer le suivi d'exécution, dont il doit réparation ; qu'il s'agit bien d'une faute du maître d'oeuvre qui ne saurait être considérée cependant comme inexcusable, pas plus que comme étant une dette contractuelle de travaux et que la SMABTP ne saurait échapper à sa responsabilité ;

Attendu qu'il y a lieu de confirmer le coût des travaux évalué par l'expert à la somme de 12 000 F CFP ou 12 600 F CFP TTC, qui sera mis à la charge de M. X...; qu'il s'agit bien d'une faute du maître d'oeuvre qui ne saurait être considérée cependant comme inexcusable, pas plus que comme une dette contractuelle de travaux, comme le soutient de manière inexacte la SMABTP pour échapper à sa responsabilité ;

Attendu cependant que l'allocation, à titre de dommages et intérêts, d'une somme de 100 000 F CFP pour la non-conformité à l'habillage d'origine qui prévoyait un parement de briques, n'est pas justifiée et qu'il convient de la rejeter ;
Des désordres affectant la toiture

Attendu que M. X...conteste enfin les désordres liés à la toiture sans cependant combattre les arguments relevés par l'expert qui a décrit très précisément la réalité de ces désordres, à savoir les solins mal posés, les débordement de descentes d'eau, la mauvaise finition d'un arêtier et une ventilation insuffisante des combles ;

Attendu que ces désordres engagent la responsabilité de la SARL ART CONCEPT, qui avait la charge du lot charpente-couverture, ainsi que la responsabilité du maître d'oeuvre qui a failli à ses obligations en ne contrôlant pas la réalisation des travaux ;

Attendu que le coût de la remise en état s'élève selon le rapport d'expertise à la somme totale de 90 000 F CFP ou 94 500 F CFP TTC qui sera mise à la charge de M. X...; qu'il s'agit bien d'une faute du maître d'oeuvre qui ne saurait être considérée comme inexcusable, pas plus que comme une dette contractuelle de travaux, comme le soutient de manière inexacte la SMABTP pour échapper à sa responsabilité ;

Des désordres affectant les murs extérieurs

Attendu que la SMABTP conteste également devoir couvrir les désordres liés à l'éclatement ponctuel de l'enduit des façades des murs extérieurs dont la reprise est évaluée par l'expert à la somme de 881 000 F CFP soit 925 050 F CFP TTC ; qu'elle fait valoir qu'aucune faute du maître d'oeuvre n'est démontrée ;

Attendu cependant que l'expert a bien relevé qu'il s'agissait bien d'une faute du maître d'oeuvre dans le suivi du chantier ; que la garantie de la SMABTP doit trouver à s'appliquer, de tels désordres ne relevant ni d'une faute inexcusable du maître d'oeuvre, ni d'une dette de travaux ;

Du préjudice de jouissance lié au retard dans l'achèvement des travaux

Attendu que M. Y...soutient que le délai contractuel prévu pour l'achèvement des travaux avait été fixé au 22 mai 2007, qu'au jour de l'expertise, soit le 27 novembre 2008, ces travaux n'étaient toujours achevés et qu'il ne pouvait de ce fait occuper sa villa qui était inachevée ; qu'il demande ainsi, à défaut de clause pénale insérée dans les actes, une somme de 4 600 000 F CFP pour 23 mois de retard sur la base mensuelle de 200 000 F CFP ;

Attendu que M. X...combat cette demande en faisant valoir que M. Y...occupe de longue date la villa dont il avait les clés, qu'aucune clause du contrat signé entre les parties ne prévoyait un délai ou des indemnités de retard et que M. Y...ne peut se prévaloir d'aucune faute, d'autant plus que le refus de réception n'est du qu'à son propre fait ;

Attendu que M. Y...entend démontrer que l'achèvement des travaux avait été fixé au 22 mai 2007, en s'appuyant sur le planning d'exécution prévu sur 11 mois qui a été signé par les entreprises, prévoyait une tolérance de 15 jours et mentionnait que la date de début du chantier correspondait à la date du permis de construire lequel a été délivré le 6 juin 2006 ;
Attendu que pour autant M. X...est fondé à faire valoir que son contrat de maîtrise d'oeuvre signé avec M. Y...le 7 février 2006 ne prévoyait aucun délai pour achever sa mission et qu'en conséquence aucune indemnité de retard n'avait été prévue par les parties ;

Attendu que M. X...est également fondé, au vu des pièces versées au dossier, à relever qu'il avait proposé à M. Y..., à plusieurs reprises, des dates de nature à permettre de réceptionner définitivement l'immeuble ; que le maître de l'ouvrage avait pour sa part proposé la date du 22 avril 2008, par courriel du 10 avril 2008, qu'il n'a cependant pas honorée ; que dans ces conditions, M. X...a été conduit à adresser à M. Y...une lettre recommandée du 5 mai 2008 dans laquelle il l'avisait que : " tant que le procès-verbal de réception ne sera pas signé par vous, la décennale de votre chantier, prise par l'intermédiaire du Cabinet X..., ne pourra être effective. Cette décennale devra être reprise au plus tard le 30 juin " ;

Attendu qu'il est ainsi amplement démontré que le retard dans la dernière phase d'achèvement des travaux relative à leur réception n'est pas imputable à M. X...mais à M. Y..., qui ne saurait en conséquence se prévaloir d'un préjudice qui résulte directement de son comportement ; qu'ainsi, il convient de débouter M. Y...de sa demande formée au titre d'un préjudice de jouissance, au demeurant non établi ;

De l'exécution générale du contrat de maîtrise d'oeuvre et de la déloyauté de M. X...

Attendu que M. Y...entend que le maître d'oeuvre soit condamné à lui rembourser les sommes qu'il lui a versées s'élevant à un montant total de 2 700 837 F CFP, en se prévalant de la déloyauté contractuelle de M. X...au motif qu'il aurait fait appel, sans consultation d'autres entreprises, à la Société ART CONCEPT dans laquelle il était associé et gérant ;

Attendu cependant que si le code de déontologie des architectes fait interdiction à tout architecte de prendre des intérêts dans une entreprise qu'il propose au maître d'ouvrage, il n'est nullement établi que M. X...ait été architecte ou qu'il soit soumis à une profession règlementée ;

Attendu qu'il n'est au demeurant pas contraire aux usages et aux pratiques du bâtiment de laisser au concepteur de plans types, maître d'¿ uvre, le choix de l'entreprise la plus habile et la plus expérimentée pour l'ouvrage selon ces plans ; que cette pratique est habituelle dans les marchés de construction livrables clés en main ;

Attendu qu'en outre, les honoraires du maître d'¿ uvre sont la contrepartie contractuelle et donc la cause juridique du contrat de la maîtrise d'¿ uvre, et non point la conséquence d'un dommage pouvant être lié à la faute du maître d'¿ uvre dans l'exécution de ce contrat ;

Attendu, par ailleurs, qu'il était effectivement prévu par les parties, dans l'article 4-7 relatif aux " Relation avec les entreprises ", que le maître d'ouvrage décidait s'il ferait ou non appel à la concurrence et qu'il " fixe (rait) librement son choix sur le ou les entrepreneurs qui seront chargés par lui de l'exécution des travaux " ; que M. X..., qui n'est pas un architecte, profession soumise à une déontologie particulière, pouvait ainsi, à la demande du maître de l'ouvrage, lui indiquer des entreprises, sans qu'une telle indication ne soit de nature à faire obstacle à la liberté de choix du maître d'ouvrage ;

Attendu que M. Y..., dont le dommage est par ailleurs réparé dans les conditions prévues par l'expert comme il l'a été précédemment rappelé, n'établit pas que le comportement de M. X...puisse constituer une faute contractuelle de nature à priver le maître d'oeuvre du paiement de ses honoraires qui sont la juste contrepartie du travail qui a été exécuté ;

Attendu en conséquence qu'il y a lieu de débouter M. Y...de sa demande ;

Des conséquences financières des manquements du maître d'oeuvre

Attendu que M. Y...demande la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a homologué le rapport d'expertise de M. Z...en date du 24 février 2009 ; que ce rapport a chiffré le coût de la reprise des désordres à la somme totale de 5 393 550 F CFP TTC ;

Attendu que par des dispositions que la Cour adopte, le premier juge a ainsi condamné :

- M. Patrick X...à payer à M. Laurent Y...la somme de 5 393 550 F CFP à titre de dommages et intérêts, majorée des intérêts au taux légal à compter du 24 février 2009 ;

- la S. A. R. L. ART CONCEPT, représentée par son liquidateur Réjane X..., à payer à M. Laurent Y...la somme de 157 500 F CFP à titre de remboursement d'un trop perçu ;

Attendu que ces dispositions doivent être ainsi reprises ;

De la transmission sous astreinte de l'assurance décennale

Attendu que M. Y...expose que M. X...devait lui remettre un contrat d'assurance décennale concernant la construction litigieuse ; que pour échapper à cette obligation M. X...indique que cette garantie ne serait pas due faute pour le maître de l'ouvrage d'avoir réceptionné l'immeuble conformément au contrat ;

Attendu cependant que M. Y...est fondé à relever que toute construction doit être couverte par un contrat d'assurance décennale nécessairement souscrite, avant tout début des travaux, et que chaque partie doit en détenir un exemplaire ; qu'ainsi, en dépit de l'absence de réception de l'ouvrage qui peut effectivement rendre inopérante la garantie décennale, M. X...doit être condamné à remettre à M. Y..., sous astreinte de 20 000 F CFP, dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt, le contrat d'assurance décennale ;

De la garantie de la SMABTP

Attendu que la SMABTP soutient, à titre principal, que dès lors qu'elle est intervenue volontairement devant le premier juge et que M. X...n'a soutenu aucun moyen de droit envers elle hormis une demande en garantie, aucune prétention ne pourrait être sollicitée à son encontre, à titre reconventionnel, en raison de la prohibition des demandes nouvelles ;

Attendu que si la SMABTP est intervenue volontairement à la procédure, M. X...avait toute faculté, comme il l'a fait devant le premier juge, de solliciter, à titre subsidiaire, sa garantie en cas de condamnation ;

Attendu que la jurisprudence est ainsi venue rappeler que si l'assuré, qui avait seulement appelé son assureur en déclaration de jugement commun, étend par la suite le débat à la garantie de l'assureur, il ne peut pas reprocher ensuite au juge de statuer sur cette garantie (Cass 1ère Civ 21 avril 1971) ;

Attendu que M. X...dans ses conclusions de première instance, en date du 3 mai 2012, a sollicité, à titre infiniment subsidiaire, d'être garanti par la compagnie d'assurance SMABTP de toute condamnation prononcée à son égard ; que par son comportement, l'assuré a ainsi transformé une intervention aux fins de déclaration de jugement commun, en un appel en garantie ;

Attendu qu'il résulte ainsi que dès la première instance, la SMABTP est intervenue aux débats et que le lien d'instance a été créé par les conclusions prises à son encontre par M. X..., qui sollicitait sa garantie ;

Attendu qu'en raison des manquements de M. X...qui ont été précédemment constatés et des garanties souscrites par le Cabinet X..., au titre de la maîtrise d'oeuvre auprès de la SMABTP, tant au regard des risques d'exploitation qu'au regard de l'ingénierie du bâtiment, il y a lieu de dire que la présente décision est opposable à la compagnie d'assurances SMABTP, en dépit des réserves faites dans ses écritures qui ont été précédemment écartées ;
Des autres demandes

Attendu que l'équité commande l'allocation d'une somme de 200 000 F CFP au profit de M. Y..., pour la procédure d'appel, au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que M. X...qui succombe à cette instance en supportera les dépens ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR statuant publiquement, par arrêt contradictoire déposé au greffe ;

DÉCLARE recevables, en la forme, l'appel de M. Patrick X...et de la S. A. R. L. ART CONCEPT et l'appel incident de M. Laurent Y...;

Au fond,

CONFIRME le jugement rendu le 27 février 2012 par le tribunal de première instance de Nouméa en toutes ses dispositions, hormis celle relative au rejet de la prétention de M. Y...tendant à la condamnation de M. X...à lui remettre, sous astreinte de 20 000 F CFP par jour de retard, le contrat d'assurance décennale, à compter de la signification du jugement à intervenir ;

Y ajoutant :

CONDAMNE M. X...à remettre le contrat d'assurance décennale, dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt, sous astreinte de VINGT MILLE (20 000) F CFP par jour de retard ;

DÉCLARE le présent arrêt opposable à la compagnie d'assurances SMABTP ;

CONDAMNE M. X...au paiement, pour la procédure d'appel, de la somme de DEUX CENT MILLE (200 000) F CFP au titre des frais irrépétibles ;

REJETTE toutes prétentions plus amples ou contraires ;

CONDAMNE M. X...aux entiers dépens de l'entière instance qui comprendront le coût du rapport d'expertise judiciaire dont distraction au profit de la Selarl PHILIPPE GANDELIN, aux offres de droit.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Numéro d'arrêt : 12/106
Date de la décision : 29/08/2013

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-08-29;12.106 ?
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