La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/06/2013 | FRANCE | N°13/00033

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Chambre coutumière, 12 juin 2013, 13/00033


COUR D'APPEL DE NOUMÉA
115
Arrêt du 12 Juin 2013

Chambre coutumière

Numéro R. G. :
13/ 33

Décision déférée à la Cour :
rendue le : 20 Septembre 2012
par le : Juge aux affaires familiales de NOUMEA

Saisine de la cour : 12 Février 2013

PARTIES DEVANT LA COUR

APPELANT

M. Augustin Tein Y...
né le 06 Avril 1959 à POINDIMIE (98822)
demeurant ...-98818 KOUAOUA
INTIMÉ

Mme Hélène Z...
née le 11 Octobre 1958 à CANALA (98813)
demeurant ...-98800 NOUMEA
(bénéficie d'une aide juridic

tionnelle Totale numéro 2012/ 449 du 01/ 06/ 2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de NOUMEA)

représentée par Me Annie DI MAIO

CO...

COUR D'APPEL DE NOUMÉA
115
Arrêt du 12 Juin 2013

Chambre coutumière

Numéro R. G. :
13/ 33

Décision déférée à la Cour :
rendue le : 20 Septembre 2012
par le : Juge aux affaires familiales de NOUMEA

Saisine de la cour : 12 Février 2013

PARTIES DEVANT LA COUR

APPELANT

M. Augustin Tein Y...
né le 06 Avril 1959 à POINDIMIE (98822)
demeurant ...-98818 KOUAOUA
INTIMÉ

Mme Hélène Z...
née le 11 Octobre 1958 à CANALA (98813)
demeurant ...-98800 NOUMEA
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/ 449 du 01/ 06/ 2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de NOUMEA)

représentée par Me Annie DI MAIO

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 27 Mai 2013, en chambre du conseil, devant la cour composée de :

Pierre GAUSSEN, Président de Chambre, président,
Anne AMAUDRIC DU CHAFFAUT, Conseiller,
Régis LAFARGUE, Conseiller,
qui en ont délibéré,

et des assesseurs coutumiers :

M. Remi DAWANO aire Drubea-Kapumë ;
M. Wapone CAWIDRONE aire Nengone ;
M. Elia PAWA aire Paicî-Cèmuhi ;
M. Louis THEVEDIN aire Xaracuu

Régis LAFARGUE, Conseiller, ayant présenté son rapport et la cour et les assesseurs coutumiers ayant délibéré en commun hors la présence du greffier,

Greffier lors des débats : Stephan GENTILIN

ARRÊT :
- réputé contradictoire,
- prononcé en chambre du conseil, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par Pierre GAUSSEN, président, et par Cécile KNOCKAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

Le 15 décembre 1989, ont comparu devant l'officier de l'état civil particulier Mme Hélène Z...et M. Augustin Y...lesquels ont déclaré s'être unis par les liens d'un mariage célébré selon les us et coutumes autochtones.
De leur union sont issus quatre enfants, aujourd'hui majeurs.

Par requête du 31 mai 2012, Mme Z...Hélène épouse Y...a saisi le Tribunal de Première Instance de Nouméa, aux fins de voir fixer à 150 000 F CFP par mois la " contribution de son mari, aux charges du mariage ".
Elle exposait devant les premiers juges qu'elle ne travaille pas et n'a aucun revenus ; qu'elle demeure avec ses deux enfants majeurs eux aussi sans revenus (à la recherche d'un emploi) ; que son mari dispose de revenus salariaux de 256 000 F CFP mensuels.
Le mari exposait devant les premiers juges qu'il avait été chassé du domicile conjugal par l'épouse ; qu'il réglait le loyer du domicile conjugal, outre les charges de son nouveau domicile et les charges induites par un véhicule. Il indiquait que les enfants étant majeurs, il convenait de " laisser les enfants se... seuls ", et proposait de verser 15 000 F CFP par mois pour les besoins de son épouse.

C'est dans ces conditions que le tribunal a fait droit à la demande de l'épouse, tout en ramenant à 100. 000 F CFP le montant mensuel de la contribution (aux " charges du mariage ") due par le mari.

PROCÉDURE D'APPEL

Par requête du 31 octobre 2012, M. Y...a relevé appel de ce jugement, signifié le 5 octobre 2012. Faute d'avoir déposé son mémoire ampliatif d'appel dans les délais, l'affaire a été radiée par ordonnance du 11 février 2013.
Le 12 février 2013, l'épouse s'est prévalue des dispositions de l'article 904, alinéa 4, du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie et a sollicité le jugement de l'affaire au vu des pièces de première instance.
Par ordonnances du 26 février 2013 la clôture a été prononcée et l'affaire fixée à l'audience du 6 mai 2013.

A l'audience du 6 mai 2013 l'affaire a été renvoyée afin de permettre la comparution de M. Y..., étant précisé que Mo Villaume, n'était plus constitué pour lui.
A l'audience de renvoi, du 27 mai 2013, M. Y...n'a pas comparu. Il sera donc statué par arrêt contradictoire à signifier.

MOTIFS

Attendu que dans la coutume, le principe de solidarité qui vaut entre membres d'un même clan, vaut aussi entre les époux qui se doivent aide et assistance mutuelles et réciproques ; que s'ils vivent séparés, et s'il existe une différence de ressources entre les époux, il incombe à celui qui bénéficie de ressources supérieures de contribuer aux besoins de la famille, comme aux besoins de l'autre époux et de leurs enfants ;
Attendu que les enfants sont à la charge des parents, jusqu'à ce qu'ils puissent vivre de façon autonome ;
Qu'en outre, lorsque les parents sont mariés, les enfants appartiennent au clan du père, ce qui implique que les " paternels ", et en particulier le père, doivent les prendre en charge, et assurer leur entretien, leur éducation, et préparer leur place coutumière pour l'avenir ;
Que si la demande de contribution du mari aux charges de la famille laquelle recouvre les besoins liés à l'entretien de l'épouse et des enfants peut s'apparenter (de par sa fonction) à la notion de " contribution aux charges du mariage " que connaît le droit civil, elle doit s'apprécier en considération des obligations coutumières, incluant les solidarités familiales, et en fonction des ressources respectives des parties (en ce sens : CA Nouméa, 25 mars 2013, RG no2012/ 60) ;

* * *

Attendu qu'en l'espèce les époux ont été mariés selon les us et coutumes kanak (union déclarée le 15 décembre 1989 à l'état civil coutumier) ; que de cette union sont issus quatre enfants dont deux sont encore à charge ;

Attendu que l'union coutumière implique des obligations du clan du mari et singulièrement du mari lui-même, en tant qu'époux et en tant que père ;

Qu'ainsi le mari a des obligations à l'égard de l'épouse, du fait que celle-ci, dans la coutume, a été " donnée " par son clan au clan du mari dans le cadre d'une promesse de " don de vie " ; que se trouvant ainsi confiée au clan du mari, cette femme est en droit d'attendre du mari qu'il la respecte, la protège et l'assiste, en contrepartie de l'interdiction qui pèse sur elle de retourner vivre dans son clan d'origine, ce qu'elle sera fondée à faire en cas de manquements graves du mari et du clan de celui-ci au regard des obligation ci-dessus rappelées ;
Qu'ainsi la place de la femme étant dans le clan du mari, il en résulte pour lui l'obligation de l'entretenir ;
Qu'il en va de même à l'égard des enfants, étant précisé que la coutume a été faite pour les enfants, pour donner des enfants au clan paternel à charge pour celui-ci de leur donner un statut social, un enracinement foncier, et un nom ; qu'il en résulte pour le père l'obligation de les protéger et les nourrir ; qu'ainsi le mari en tant que membre du clan paternel a la même obligation, qu'à l'égard de leur mère, d'entretien et de protection des enfants donnés par le clan utérin au titre du " don de vie " ;
Que cette obligation ne cesse qu'avec le mariage des enfants, le mariage marquant dans la coutume leur passage à l'âge adulte et leur accession aux responsabilités ;

Qu'ainsi, le principe de l'obligation d'entretien incombant au mari (et au-delà, aux membres du clan paternel) n'est pas contestable au regard des règles coutumières ;

Attendu, eu égard à l'absence de ressources de l'épouse qui vit avec deux enfants à charge, et aux ressources du mari qui perçoit un salaire de 265 000 F CFP par mois, que c'est à bon droit que le premier juge a fixé à 100 000 F CFP par mois la contribution aux charges de la famille, due par le mari, cette contribution incluant les charges et dépenses courantes de l'entretien de la maisonnée (notamment le paiement du loyer), et les subsides pour les enfants à charge ;

Que la décision déférée sera donc confirmée en toutes ses dispositions ;

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Attendu que M. Augustin Y...supportera les dépens ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant en chambre du conseil et en formation coutumière, par arrêt réputé contradictoire, déposé au greffe ;

Dit que, dans la coutume, le principe de solidarité qui lie les époux se manifeste dans le devoir d'aide et assistance mutuelles et réciproques, et que lorsque les parents sont mariés, les enfants appartenant au clan du père, celui-ci a l'obligation de les nourrir et les prendre en charge ; qu'il en résulte l'obligation pour le père, lorsque les époux vivent séparés, de contribuer aux charges de la famille, cette contribution s'appréciant en considération des obligations coutumières, incluant les solidarités familiales, et en considération des ressources respectives des parties ;

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Condamne M. Augustin Y...aux dépens ;

Fixe à quatre (4) le nombre d'unités de valeur pour le calcul de la rémunération de Mo DI Maïo désignée au titre de l'aide judiciaire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Chambre coutumière
Numéro d'arrêt : 13/00033
Date de la décision : 12/06/2013
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.noumea;arret;2013-06-12;13.00033 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award