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03/06/2013 | FRANCE | N°11/388

France | France, Cour d'appel de Nouméa, 03 juin 2013, 11/388


COUR D'APPEL DE NOUMÉA

110

Arrêt du 3 Juin 2013



Chambre Civile



Numéro R.G. :

11/388





Décision déférée à la cour :

rendue le : 02 Mai 2011

par le : Tribunal de première instance de NOUMEA



Saisine de la cour : 28 Juillet 2011







PARTIES DEVANT LA COUR



APPELANT



LA SOCIETE SICA NOUVELLE-CALEDONIE, dite SICA NC, prise en la personne de son représentant légal

Siège social BOULOUPARIS - BP. 55 - 98812 BOULOUPARIS

>
assistée de la SELARL JURISCAL







INTIMÉ



LA SOCIETE GOODMAN FIELDER NC, prise en la personne de son représentant légal

Siège social 16 rue Félix Russel - Digue de Nouville - BP. 3249 - 98846 NOUME...

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

110

Arrêt du 3 Juin 2013

Chambre Civile

Numéro R.G. :

11/388

Décision déférée à la cour :

rendue le : 02 Mai 2011

par le : Tribunal de première instance de NOUMEA

Saisine de la cour : 28 Juillet 2011

PARTIES DEVANT LA COUR

APPELANT

LA SOCIETE SICA NOUVELLE-CALEDONIE, dite SICA NC, prise en la personne de son représentant légal

Siège social BOULOUPARIS - BP. 55 - 98812 BOULOUPARIS

assistée de la SELARL JURISCAL

INTIMÉ

LA SOCIETE GOODMAN FIELDER NC, prise en la personne de son représentant légal

Siège social 16 rue Félix Russel - Digue de Nouville - BP. 3249 - 98846 NOUMEA CEDEX

assistée de la SELARL d'avocat Franck ROYANEZ

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 Mai 2013, en audience publique, devant la cour composée de :

Jean-Michel STOLTZ, Conseiller, président,

François BILLON, Conseiller,

Régis LAFARGUE, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Jean-Michel STOLTZ, Conseiller, ayant présenté son rapport.

Greffier lors des débats: Cécile KNOCKAERT

ARRÊT :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,

- signé par Jean-Michel STOLTZ, président, et par Cécile KNOCKAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

Suivant acte sous seing privé en date du 24 mars 1984, le Port autonome de Nouméa, établissement public territorial, a donné à bail à la société SICA Nouvelle-Calédonie (SICA NC), pour une durée de 30 ans à compter du 1er janvier 1984, moyennant un loyer de 220 F CFP le mètre carré, un terrain situé dans la zone portuaire de Nouville d'une superficie de 31 a 69 ca, cette zone dépendant du domaine public.

Le bail emportait obligation pour SICA NC de réaliser la construction de bâtiments pour l'installation d'une zone d'activité.

Par acte sous seing privé du 1er juillet 2002 modifié par un avenant du 29 décembre 2006, SICA NC a consenti à la société Goodman Fielder NC (Goodman Fielder) un bail dit professionnel portant sur un dock de 310 m2, pour un loyer mensuel de 486 000 F CFP. La durée du bail initialement de 3, 6 ou 9 années à compter du 1er juillet 2002 a été modifiée par avenant du 29 décembre 2006 pour passer à un renouvellement tacite par périodes de trois ans à compter du 1er juillet 2005.

Par LRAR du 29 juillet 2009, SICA NC a sollicité amiablement de Goodman Fielder la fixation d'un nouveau loyer mensuel à la somme de 886 000 F CFP au motif d'une variation de plus de 10% des facteurs de commercialité dans le secteur de Nouville.

Les négociations n'ayant abouti qu'à une augmentation à 586 000 F CFP à compter d'octobre 2009 et Goodman Fielder n'ayant pas répondu à une nouvelle demande de fixation, SICA NC a saisi le tribunal de première instance de Nouméa aux fins d'obtenir la révision du loyer à la somme mensuelle de 1 500 000 F CFP.

Par jugement du 6 septembre 2010, le tribunal a invité les parties à conclure sur l'application au bail du statut des baux commerciaux.

**********************

Par jugement du 2 mai 2013 dont appel, auquel il est référé pour le rappel de la procédure ainsi que l'exposé des faits, moyens et demandes, le tribunal de première instance de Nouméa a :

- rejeté l'exception d'incompétence au profit du tribunal administratif soulevée par Goodman Fielder qui faisait valoir que les lieux loués dépendaient du domaine public,

- dit que le statut des baux commerciaux ne s'appliquait pas à la convention de bail conclue entre les parties le 1er juillet 2002,

- débouté SICA NC de toutes ses demandes,

- condamné SICA NC au paiement de la somme de 150 000 FCFP au titre de l'article 700 du Code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie ainsi qu'au paiement des dépens.

PROCÉDURE D'APPEL

Par requête déposée au greffe le 28 juillet 2011, SICA NC a interjeté appel de cette décision signifiée le 24 juin 2011.

Par mémoire ampliatif déposé le 28 octobre 2011 complété par des conclusions enregistrées au greffe de la cour les 8 juin et 1er octobre 2012, écritures auxquelles il est expressément référé pour le détail de l'argumentation et des moyens, elle sollicite de la cour :

- de dire son appel recevable,

- d'infirmer la décision rendue et d'ordonner la requalification du bail conclu entre la SICA NC et Goodman Fielder le 1er juillet 2002 en bail commercial,

- de prendre acte de l'absence de toute révision du loyer depuis 2002,

- de réviser et de fixer le montant mensuel du loyer à la somme de 1 500 000 F CFP à compter du 1er juillet 2009,

- de débouter la société Goodman Fielder NC de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- de condamner Goodman Fielder au paiement de la somme de 300 000 FCFP au titre de l'article 700 du Code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie ainsi qu'au paiement des dépens.

**********************

Par conclusions déposées le 12 janvier 2012 complétées par des conclusions enregistrées au greffe de la cour les 23 juillet et 21 novembre 2012, écritures auxquelles il est expressément référé pour le détail de l'argumentation et des moyens, Goodman Fielder sollicite de la cour :

- de se déclarer incompétente pour connaître des demandes présentées par SICA NC sur le fondement des baux commerciaux et la renvoyer à mieux se pourvoir devant le juge civil de droit commun du tribunal de première instance,

à titre subsidiaire,

- de déclarer les demandes irrecevables en raison du non respect des délais triennaux fixés par les textes,

à titre infiniment subsidiaire,

- de juger que l'accord passé entre les parties en 2002 et confirmé avec le nouvel actionnaire de SICA NC en 2007 est toujours en vigueur et n'a pas été remis en cause ; qu'en conséquence, le loyer est fixe,

- de juger que les facteurs de commercialité ne sauraient trouver application sur le domaine public de la Nouvelle-Calédonie,

- de juger que SICA NC ne démontre pas en quoi lesdits facteurs de commercialité applicables à la sous-location doivent différer de ceux applicables au bail principal,

en conséquence,

- de débouter SICA NC de toutes ses demandes,

- de condamner SICA NC à payer la somme de 300 000 FCFP au titre de l'article 700 du Code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie.

**********************

La clôture a été fixée au 10 avril 2013.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'application du statut des baux commerciaux :

Attendu que le tribunal a jugé qu'en raison de la précarité de l'occupation l'occupation du domaine public, le statut des baux commerciaux ne s'appliquait pas au bail en cause ;

Attendu que SICA NC soutient que le bail de 1984 emporte constitution de droits réels à son profit ;

Qu'aAprès avoir soutenu qu'il revêtait la qualification "d'autorisation d'occupation temporaire conférant expressément un droit réel au profit du bénéficiaire sur les ouvrages réalisés", notion découlant de la jurisprudence du Conseil d'Etat et consacrée par la loi de pays no2007-2 du 13 février 2007 applicable aux contrats en cours, elle considère, dans ses dernières écritures, qu'à considérer que les lois de pays no2001-17 du 11 janvier 2002 et no2007-2 du 13 février 2007 ne seraient pas applicables au bail en cours, il convient d'en revenir à la qualification de bail emphytéotique dont la convention conclue avec le Port autonome revêt toutes les caractéristiques et dont elle produit des illustrations récentes pour des locations du domaine public à Ducos et à Bourail par la province sud ;

Qu'il en découle :

- qu'elle bénéficie de la pleine propriété des constructions qu'elle a édifiées jusqu'en 2014,

- que rien ne pouvait lui interdire de conclure un bail commercial avec Goodman Fielder ;

Qu'elle soutient ensuite :

- qu'au vu de la qualité de société commerciale du locataire et de l'activité déployée d'entreposage et de vente de matières premières et de produits finis agro-alimentaires, la convention de 1984 doit être qualifiée de bail commercial,

- que le bail de 2002 ne contient aucune renonciation et n'est soumis à aucune contrainte justifiant que soit écartée l'application du statut des baux commerciaux ; qu'en particulier, le fait que le bail ne puisse se renouveler après le 1er mars 2014 n'est, selon la jurisprudence, pas incompatible avec ce statut si le locataire a renoncé de façon claire et non équivoque à ce droit ce qui est le cas en l'espèce, Goodman Fielder ayant une parfaite connaissance, par l'avenant du 29 décembre 2006, du terme de la convention conclue avec le Port autonome,

- que le caractère révocable de la convention conclue avec le Port autonome n'est en rien exclusif de l'existence d'un bail commercial, l'article L. 145-4 du code de commerce prévoyant la situation d'une révocation anticipée du bail commercial sur demande de l'administration ;

Attendu que Goodman Fielder réplique en premier lieu que le caractère précaire de la convention est incompatible avec la notion de bail commercial alors que les lieux loués font partie du domaine public de la Nouvelle-Calédonie et que les occupations du domaine public sont, par nature, précaire, laquelle précarité est, au surplus, mentionnée explicitement dans le contrat ; que, de plus, le bail principal ne constitue pas un bail emphytéotique, d'une part parce que les parties n'ont jamais évoqué cette qualification, d'autre part en raison de l'inapplicabilité en Nouvelle-Calédonie des dispositions du code rural métropolitain, enfin parce qu'un tel bail ne peut contenir de clause permettant un dénouement avant l'écoulement de la durée ;

Qu'elle fait valoir ensuite que le dispositif de révision des loyers s'inscrit dans le champ des baux commerciaux et qu'il s'impose de constater que SICA NC n'a pas respecté les dispositions des articles L. 145-32 et 33 du code de commerce en n'appelant pas le propriétaire à concourir à l'acte ;

Qu'elle sollicite donc que le juge des baux commerciaux saisi en appel se déclare incompétent au profit du juge de droit commun ;

Sur quoi,

Attendu que selon une jurisprudence constante le statut des baux commerciaux ne s'applique pas aux conventions - fussent-elles conclues entre des personnes de droit privé dans le cadre d'une sous-location - ayant pour objet des biens du domaine public (Civ. 3 20 décembre 2000, Civ. 3 10 mars 2010, Civ. 3 19 décembre 2012 pour un cas de sous-location topique) ;

Qu'il en résulte que le bail - qui constitue une sous-location - passé le 1er juillet 2002 entre SICA NC et Goodman Fielder et portant sur une occupation de la zone maritime, ne saurait être soumis au statut des baux commerciaux ;

Que SICA NC est donc mal fondée en sa demande de requalification et en sa demande de révision de loyer en découlant ;

Qu'en conséquence, le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions ;

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Attendu qu'il sera alloué à Goodman Fielder la somme de 300 000 F CFP au titre de l'article 700 du Code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie et que SICA NC sera condamnée aux dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire déposé au greffe ;

Dit l'appel recevable mais mal fondé ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Déboute la société SICA Nouvelle-Calédonie de toutes ses demandes d'appel ;

Condamne la société SICA Nouvelle-Calédonie, prise en la personne de son représentant légal, à payer à la société Goodman Fielder NC la somme de trois cent mille (300.000) FCFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie ;

La condamne, en outre, aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL d'avocats ROYANEZ, avocat, sur ses offres de droit.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Numéro d'arrêt : 11/388
Date de la décision : 03/06/2013

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-06-03;11.388 ?
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