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25/03/2013 | FRANCE | N°11/00254

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Chambre coutumière, 25 mars 2013, 11/00254


COUR D'APPEL DE NOUMÉA
46
Arrêt du 25 Mars 2013

Chambre coutumière

Numéro R. G. :
11/ 254

Décision déférée à la cour :
rendue le : 20 Avril 2011
par le : Tribunal de première instance de NOUMEA

Saisine de la cour : 20 Mai 2011

PARTIES DEVANT LA COUR

APPELANT

LE MINISTERE PUBLIC

INTIMÉS

M. Louis X...
né le 30 Décembre 1957 à TADINE (MARE) (98828)
demeurant ...

Mme Adéline Y... épouse X...
née le 12 Octobre 1967 à HNWAYETCHE (MARE) (98828)
demeurant ...

COMP

OSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 04 Mars 2013, en audience publique, devant la cour composée de :

Anne AMAUDRIC DU CHAFFAUT, Conseiller, p...

COUR D'APPEL DE NOUMÉA
46
Arrêt du 25 Mars 2013

Chambre coutumière

Numéro R. G. :
11/ 254

Décision déférée à la cour :
rendue le : 20 Avril 2011
par le : Tribunal de première instance de NOUMEA

Saisine de la cour : 20 Mai 2011

PARTIES DEVANT LA COUR

APPELANT

LE MINISTERE PUBLIC

INTIMÉS

M. Louis X...
né le 30 Décembre 1957 à TADINE (MARE) (98828)
demeurant ...

Mme Adéline Y... épouse X...
née le 12 Octobre 1967 à HNWAYETCHE (MARE) (98828)
demeurant ...

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 04 Mars 2013, en audience publique, devant la cour composée de :

Anne AMAUDRIC DU CHAFFAUT, Conseiller, président,
Régis LAFARGUE, Conseiller,
Thierry LEFEVRE, vice-président placé désigné par ordonnance du Premier Président en date du 13 février 2013 pour composer l'audience civile de la cour d'appel du 4 mars 2013
qui en ont délibéré,
Régis LAFARGUE, ayant présenté son rapport.

Greffier lors des débats : Stephan GENTILIN

ARRÊT :
- réputé contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par Anne AMAUDRIC DU CHAFFAUT, président, et par Stéphan GENTILIN, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

Par requête adressée au Procureur de la République le 26 avril 2010, M. Louis X..., né le 30 décembre 1957 à Tadine (MARE), et son épouse Mme Adeline Y..., née le 12 octobre 1967 à HNAENEDRE (MARE) mariés depuis plus de deux ans (soit le 30 août 1990) ont sollicité l'adoption de leur petit-fils Dylan Louis Congené X..., de sexe masculin, né le 23 avril 2010 à Nouméa, de leur fille Augustine Audrey Xewo X....

Par écritures du 16 mars 2011, le ministère public a conclu au rejet de cette demande au motif que " si les conditions légales sont remplies, cette adoption conduirait à une remise en cause profonde des liens de filiation : ainsi Dylan X... serait à la fois le fils et le frère de sa mère Mme Augustine X.... Ce résultat, peu souhaitable, n'aurait en outre aucun intérêt sur le plan successoral ". Le ministère public, se situait donc exclusivement sur le plan de l'intérêt de l'enfant, et ajoutait que la solution d'une délégation de l'autorité parentale serait plus appropriée, puisqu'il s'agissait de permettre aux grands-parents qui élèvent leur petit-fils de disposer de prérogatives propres à assurer l'entretien et l'éducation de l'enfant.
C'est dans ces conditions que le premier jugée, statuant par jugement du 20 avril 2011, a accueilli favorablement la requête et prononcé l'adoption simple de l'enfant par ses grands-parents.
Pour statuer ainsi, le tribunal a relevé que " si M. X... est de droit commun, son épouse est de droit coutumier. Augustine est étudiante en psychologie à Strasbourg. Les demandeurs ont présenté Dylan au chef de clan Ponye. "
Les époux X... ont obtenu un procès-verbal de palabre le 06 août 2009 qui démontre que leur intégration clanique est réalisée via Mme X... née Z.... Un lien à la terre leur est donc reconnu.
Il s'en déduit que l'enfant a intégré le milieu clanique via sa grand-mère qui bénéficie d'une reconnaissance foncière. Ce lien à la terre qui s'exprime par ce procès-verbal de palabre démontre l'établissement du lien clanique nonobstant la position de droit commun du grand-père.
Dylan a été présenté au chef du clan maternel et bénéficie donc d'un lien clanique.
Le grand-père a participé au palabre coutumier ce qui démontre son intégration dans le clan maternel et son adhésion aux règles de celui-ci.
Le grand-père, bien que de statut de droit commun, adhère totalement à ce rattachement clanique. Ce rattachement est prépondant sur le plan familial mais aussi social pour Dylan qui bénéficiera donc d'un lien à la terre dont découle le lien clanique.
Le projet d'adoption s'articule donc à travers ce lien clanique qui assure à l'avenir des droits successoraux à l'enfant tant au décès de ses grands-parents que de sa mère.
Le rattachement de l'enfant via l'adoption par les grands-parents se dédouble donc d'une réalité familiale et d'une réalité clanique qui lui assurera une intégration complète au sein de la tribu.

A travers les grands-parents, c'est en fait le clan qui adopte l'enfant dont le statut mixte lui interdisait une intégration juridique directe et via un lien clanique paternel qui n'existait pas ".

PROCÉDURE D'APPEL

Par requête du 19 mai 2011 le ministère public a interjeté appel de cette décision, rendue le 20 avril 2011, et notifiée au parquet le 10 mai 2011.

Dans son mémoire ampliatif d'appel du 14 juin 2011, le ministère public a conclu à la réformation du jugement déféré au motifs suivants :

" Sur le fond, il sera avant toute chose rappelé que M. Louis X..., le grand père, Augustine X..., la mère, et Dylan X..., l'enfant dont l'adoption est sollicitée, sont tous les trois de statut de droit commun.
Dès lors l'adoption envisagée doit être examinée au regard des dispositions du code civil dont relèvent les parties.
Aussi, l'argument tiré de la confusion des générations contraire à l'esprit de l'institution de l'adoption fait obstacle à la demande qui ne saurait être admise sur des considérations d'ordre coutumier, inapplicables en l'espèce.
Les arguments relatifs à l'intégration clanique de l'enfant qui constituent selon le jugement le critère de l'intérêt du mineur doivent être écartés dans la mesure ou par ce biais, la coutume se substitue au droit commun dont relèvent les parties ;
Il sera rappelé que pour pouvoir se prévaloir de la coutume, les parties doivent toutes relever du statut coutumier.
En l'occurrence, la grand-mère qui exerce dans les faits l'autorité parentale sur l'enfant pourrait solliciter le changement de statut de Dylan, avec l'accord de sa mère et ainsi pourrait se prévaloir de son statut coutumier et du statut coutumier de l'enfant pour demander une adoption coutumière ;
Ainsi le statut des parties permettrait d'aborder l'adoption demandée sous l'angle et dans le cadre coutumier ".

Les pièces de la procédure ayant été communiquées aux époux X... le 10 octobre 2012, par l'intermédiaire du greffier de la section détachée de Lifou, eu égard à la carence avérée et persistante de l'officier public coutumier compétent, et les intimés n'ayant pas conclu en réponse, il sera statué par arrêt réputé contradictoire.

Par ordonnance du 11 décembre 2012, la procédure de mise en état a été clôturée à cette date et l'affaire fixée à l'audience du 4 mars 2013.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu qu'il est constant que le grand-père maternel de l'enfant Dylan étant de droit commun, la mère de l'enfant comme l'enfant lui-même sont aussi de droit commun ;

Attendu qu'en revanche la grand-mère maternelle de l'enfant est de statut coutumier, et que les époux X... comme leur petit-fils, qu'ils élèvent, vivent sur des terres coutumières du clan de cette grand-mère de statut coutumier ; qu'il en découle une réalité sociale et familiale parfaitement mise en exergue par le premier juge qui s'imposerait dans l'appréciation de l'intérêt supérieur de l'enfant, si les conditions légales à l'adoption simple étaient réunies ;

Attendu, en effet, que tant que la grand-mère maternelle de statut coutumier kanak, laquelle élève l'enfant, n'a pas demandé et obtenu (dans les conditions définies à l'article 11 aliéna 1er de la loi organique du 19 mars 1999) le statut coutumier au bénéfice de Dylan, les règles du Code civil s'imposent dans la définition des conditions d'adoption de celui-ci ;

Qu'en l'espèce, pour être adoptable l'enfant doit pouvoir être considéré comme abandonné ; que tel n'est pas le cas dans la mesure où il a été recueilli de l'aveu même de ses grands parents dès sa naissance par sa proche famille ; qu'en outre, les conditions dans lesquelles l'enfant a été confié à ses grands-parents sont floues ;

Qu'en toute hypothèse, ce recueil ne peut fonder une procédure d'adoption fondée sur le constat de l'abandon de l'enfant au sens de l'article 350 du code civil ;

Attendu enfin, que la mère biologique de l'enfant n'a pas consenti à l'adoption dans les conditions définies à l'article 348-3 du code civil ;

Qu'ainsi, et quels que soient les mérites du projet d'adoption au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant, la demande ne peut qu'être rejetée faute de répondre aux conditions légales posées par le Code civil, en ses articles 360 et suivants, lesquelles s'imposeront tant que l'enfant sera de statut de droit commun ;

Que le jugement déféré sera donc infirmé et la demande rejetée, et les dépens laissés à la charge de M. Louis X... et de Mme Adeline Y... ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant en chambre du conseil, par arrêt réputé contradictoire, déposé au greffe ;

Vu le statut de droit commun de l'enfant Dylan ;

Constate que les conditions légales à l'adoption simple posées par les articles 360 et suivants du Code civil ne sont pas réunies ;

En conséquence, infirme le jugement déféré,

Et statuant à nouveau :

Rejette, comme non fondée la demande d'adoption présentée par M. Louis X... et Mme Adeline Y..., grands parents de l'enfant Dylan ;

Laisse les dépends à la chage de M. Louis X... et de Mme Adeline Y...

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Chambre coutumière
Numéro d'arrêt : 11/00254
Date de la décision : 25/03/2013
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.noumea;arret;2013-03-25;11.00254 ?
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