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02/02/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006948144

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Ct0064, 02 février 2006, JURITEXT000006948144


COUR D'APPEL DE NOUMÉA ARRÊT du 02 février 2006 Décision attaquée rendue le : 04 Juillet 2001 Juridiction TRIBUNAL MIXTE DE COMMERCE Date de la saisine : 1er mars 2005

Ordonnance de clôture : 16 novembre 2005 RG : 05/105 Composition de la Cour Président : Gérard FEY, Premier Président Assesseurs: - Roland POTEE, Conseiller - Anne AMAUDRIC du CHAFFAUT, Conseiller magistrats qui ont participé aux débats et au délibéré Greffier lors des débats: Mickaela NIUMELE Y... EN CAUSE DEVANT LA COUR

APPELANTE SARL WATRUARA BONE représentée par son gérant en exercice TADINE

- 98828 MARE représentée par Me Laurent AGUILA, avocat

INTIMÉS LA SA ENTRE...

COUR D'APPEL DE NOUMÉA ARRÊT du 02 février 2006 Décision attaquée rendue le : 04 Juillet 2001 Juridiction TRIBUNAL MIXTE DE COMMERCE Date de la saisine : 1er mars 2005

Ordonnance de clôture : 16 novembre 2005 RG : 05/105 Composition de la Cour Président : Gérard FEY, Premier Président Assesseurs: - Roland POTEE, Conseiller - Anne AMAUDRIC du CHAFFAUT, Conseiller magistrats qui ont participé aux débats et au délibéré Greffier lors des débats: Mickaela NIUMELE Y... EN CAUSE DEVANT LA COUR

APPELANTE SARL WATRUARA BONE représentée par son gérant en exercice TADINE - 98828 MARE représentée par Me Laurent AGUILA, avocat

INTIMÉS LA SA ENTREPOSE-MONTALEV NC prise en la personne de son Président en exercice ... représentée par la SELARL JURISCAL, avocats LA SA SOCIETE DE CONSTRUCTION MINITTI agissant par son représentant légal en exercice ... représentée par la SELARL BERQUET, avocat

Débats : le 15 décembre 2005 en audience publique où Gérard FEY, Premier Président, a présenté son rapport, A l'issue des débats, le Président a déclaré que l'affaire était mise en délibéré et que le dossier avec l'arrêt serait remis au greffe le 02 février 2006 en application de l'article 451 du Code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie. Le dossier avec l'arrêt a été remis au greffe à la date susdite et signé par Gérard FEY, Président, et par Mickaela

X..., Greffier, présent lors de la remise au greffe. RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE Suivant requête introductive d'instance signifiée le 6 octobre 1998, la société WATRUARA BONE a fait citer la société ENTREPOSE-MONTALEV devant le tribunal de commerce pour entendre condamner la société défenderesse à lui payer la somme de 3.924.900 FCFP augmentée des intérêts de droit à compter du 31 mars 1998, date de la mise en demeure. A titre subsidiaire, la société requérante a sollicité du tribunal de dire que la société défenderesse devrait l'indemniser du préjudice qu'elle avait subi en lui réglant les 3/4 du coût du véhicule de transport dont elle avait fait l'acquisition pour les besoins du marché, déduction faite de la somme de 575.000 FCFP déjà payée, soit la somme de 2.510.000 FCFP augmentée des intérêts de droit à compter de la mise en demeure. A l'appui de sa requête elle a exposé : - que par contrat en date du 16 juin 1997, la société ENTREPOSE-MONTALEV lui avait passé commande de 3000 m3 de katcha à livrer au port de TADINE pour un coût estimé à 4.500.000 FCFP, - que si l'exécution du contrat avait bien démarré, puisqu'elle avait livré 383,4 m3, la société ENTREPOSE-MONTALEV avait interrompu sans raison l'exécution du contrat, - que la société ENTREPOSE-MONTALEV, devant ses demandes d'explications, avait avancé des motifs très vagues dont il ressortait qu'elle avait trouvé un moyen d'approvisionnement moins onéreux, - qu'elle avait dû notamment acquérir un camion pour la somme de 4.114.000 FCFP pour l'exécution du contrat. * * * La société ENTREPOSE-MONTALEV a, dans un premier temps, opposé une fin de non recevoir tiré de l'absence de qualité, le contrat ayant été passé avec un groupement d'entreprises constitué de la société ENTREPOSE-MONTALEV et de la SA Société de Construction MINITTI. Au fond, elle a exposé que le groupement avait passé avec la Province des Iles un marché de travaux publics pour l'achèvement du port de TADINE, marché qui devait être achevé le 31 décembre 1997. Un

marché d'approvisionnement avait été passé avec la société WATRUARA BONE le 16 juin 1997 pour la livraison de 3000 m3 environ de katcha. Les livraisons avaient alors commencé, la dernière datant du 27 novembre 1997, pour un total de 383,4 m3.

A cette date plus aucune livraison n'avait été opérée alors même qu'aucune instruction en ce sens ne lui avait été donnée et que les livraisons ne dépendaient pas d'ordres de service. La société ENTREPOSE-MONTALEV a donc soutenu que la suspension du contrat incombait totalement à la société demanderesse. Elle a indiqué avoir utilisé en remplacement d'autres matériaux et a admis que la quantité prévue n'avait pas été nécessaire à l'accomplissement du marché. Elle a relevé, s'agissant du camion, que celui-ci, livré en août, n'avait été opérationnel qu'en novembre, ce qui démontrait qu'il n'était pas acheté pour le chantier puisque des livraisons avaient déjà été opérées auparavant. La société ENTREPOSE-MONTALEV a donc conclu, subsidiairement, à la constatation de l'inexécution du contrat par la demanderesse et à son débouté. Par conclusions du 22 août 2000, la société ENTREPOSE-MONTALEV a appelé la Société de Construction MINITTI en déclaration de jugement commun. * * * Par jugement du 04 juillet 2001, le tribunal mixte de commerce, relevant que la preuve de l'inexécution du contrat incombait à la société WATRUARA BONE et qu'elle ne la rapportait pas, l'a déboutée de ses demandes. * * * Par requête déposée le 22 octobre 2001, la SARL WATRUARA BONE a interjeté appel de ce jugement. A l'appui de son recours, elle faisait valoir qu'il ressortait de la lettre adressée par la société ENTREPOSE-MONTALEV le 3 juillet 1998 que celle-ci exposait ne pas avoir donné suite au contrat parce qu'elle n'en avait plus l'utilité ; que l'inexécution du contrat était donc bien de son fait. Que de plus, l'exécution du contrat ayant débuté, c'était aux sociétés

ENTREPOSE-MONTALEV et MINITTI d'établir que l'inexécution était de son fait. Elle ajoutait que le camion était arrivé à TADINE le 26 août 1997 et qu'elle avait participé aussitôt aux livraisons. Elle concluait à l'infirmation, à la condamnation des sociétés intimées à lui payer la somme de 3.925.500 FCFP à titre de dommages et intérêts avec intérêts de droit à compter de la mise en demeure, outre 300.000 FCFP au titre de l'article 129 du décret du 7 avril 1928 modifié.

La société ENTREPOSE-MONTALEV concluait à la confirmation du jugement et reprenait son argumentation sur l'imputabilité de l'inexécution à la société WATRUARA BONE en rappelant qu'à compter du 27 novembre 1997, sans qu'aucun ordre de suspension n'ait été donné, celle-ci n'avait plus livré aucun matériau. A titre subsidiaire, elle considérait que le montant demandé n'était pas sérieux et qu'il convenait que la société WATRUARA BONE produise des documents financiers pour les années 1997 - 1998 ; qu'en tout état de cause, le préjudice ne pouvait s'élever au-delà de la marge nette tirée du chantier.marge nette tirée du chantier. Elle sollicitait 200.000 FCFP au titre de l'article 129 du décret du 7 avril 1928 modifié. * * * Par un arrêt du 08 août 2002, la Cour d'Appel de NOUMÉA a réformé le jugement et dit que la rupture du marché d'approvisionnement était imputable aux sociétés MONTALEV et MINITTI et les a condamnées à payer à la société WATRUARA BONE la somme de 1.700.000 FCFP à titre de dommages et intérêts, outre celle de 120.000 FCFP pour frais irrépétibles. La Cour a retenu l'existence d'un contrat de fourniture de matériaux pour 3000 m3 de katcha et l'aveu implicite des sociétés MONTALEV et MINITTI de cesser de demander la livraison de ces matériaux dont ils n'avaient plus besoin. Sur le pourvoi formé par la société MONTALEV, la Cour de Cassation, par un arrêt du 16 juin 2004, a cassé l'arrêt de la Cour d'Appel au motif qu'en application de

l'article 1146 du code civil, les dommages et intérêts ne sont dus que lorsque le débiteur a été mis en demeure de remplir son obligation et qu'en l'espèce, la Cour n'avait pas constaté que la société WATRUARA avait mis les sociétés MONTALEV et MINITTI en demeure d'exécuter leur obligation de prendre livraison du matériau qu'elle leur proposait. L'affaire a été renvoyée devant notre Cour autrement composée et le 1er mars 2005, la société WATRUARA BONE a déposé une requête d'appel à l'encontre du jugement rendu le 04 juillet 2001 par le tribunal mixte de commerce de NOUMÉA, "étant précisé que cet appel est formé après l'arrêt de la Cour de Cassation du 16 juin 2004 signifié le 16 février 2005 ayant cassé l'arrêt de la Cour d'Appel de NOUMÉA rendu le 08 août 2002". * * * Dans son mémoire du 23 juin 2005, la société WATRUARA BONE estime que la Cour de Cassation s'est trompée car la Cour d'Appel a souverainement apprécié l'aveu du groupement qui avait cessé de demander des livraisons parce qu'il n'en avait plus besoin. La société WATRUARA BONE demande à la Cour de retenir cet aveu qui est également l'aveu du fait que le groupement avait refusé des livraisons qui lui étaient proposées après le 27 novembre 1997. A titre subsidiaire, la société WATRUARA BONE fonde sa demande sur le terrain délictuel et invoque la violation manifeste du devoir de loyauté et de bonne foi du groupement. Elle réclame la somme de 3.925.500 FCFP à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter du 31 mars 1998, date de la mise en demeure et avec anatocisme, outre la somme de 500.000 FCFP pour frais irrépétibles. * * * La S.A DUMEZ, par écritures du 26 août 2005, expose que la société MINITTI a fait l'objet d'une opération de fusion absorption. Elle soulève l'irrecevabilité de la requête du 1er mars 2005 car il est irrégulier et nul, l'article 1032 du code de procédure civile prévoyant que la juridiction est saisie par déclaration au secrétariat de cette

juridiction, condition sine qua non de validité de la saisine étant ajouté que cette déclaration ne peut être confondue avec l'acte introductif d'instance. Faute de déclaration régulière dans le délai de 4 mois à compter de la notification de l'arrêt de cassation (article 1034), le jugement rendu en premier ressort est revêtu de la force de chose jugée. La S.A DUMEZ sollicite la somme de 250.000 FCFP au titre des frais irrépétibles. * * * La S.A ENDEL ENTREPOSE MONTALEV NOUVELLE-CALEDONIE demande à la Cour de constater que la société WATRUARA BONE ne l'a, à aucun moment, mise en demeure de poursuivre l'exécution du contrat de fourniture de matériaux et qu'elle ne démontre pas qu'il y a eu un refus de livraison, ajoutant que le bon de commande du 16 juin 1997 déterminait un prix au m3 pour une quantité approximative de matériaux. Sur le débat relatif à l'obligation de loyauté, elle considère qu'aucune preuve n'est rapportée d'un manque de loyauté dans l'exécution du contrat. Elle conclut à la confirmation du jugement, subsidiairement, à l'absence de tout préjudice et sollicite la somme de 250.000 FCFP pour frais irrépétibles. * * * La société WATRUARA BONE a répliqué à la société DUMEZ en considérant que sa requête avait parfaitement saisi la Cour. La société DUMEZ, par conclusions du 21 octobre 2005, a maintenu son argument d'irrecevabilité. Subsidiairement, sur le fond, elle a relevé aussi que la société WATRUARA BONE n'avait procédé à aucune mise en demeure et n'avait même jamais proposé de poursuivre l'exécution du contrat, sa lettre du 31 mars 1998 n'ayant d'autre objet que de solliciter une aide pour l'achat d'un camion. * * * La société DUMEZ a demandé la condamnation de la société WATRUARA BONE à lui payer les sommes versées en exécution de l'arrêt censuré par la Cour de Cassation, soit 910.000 FCFP, outre 29.682 FCFP au titre de l'état de frais de Maître AGUILA. * * * La société ENDEL ENTREPOSE MONTALEV NOUVELLE-CALEDONIE observe dans ses écritures du 18 octobre

2005 qu'aucune preuve de mise en demeure n'est rapportée. MOTIFS DE LA DECISION Sur la procédure En dépit des arguments développés par la société DUMEZ-GTM CALEDONIE tendant à déclarer irrecevable comme nulle la saisine de la Cour d'Appel, il sera relevé que l'acte de saisine sur renvoi de la Cour de Cassation remis au greffe par la société WATRUARA BONE n'est pas formellement une déclaration au secrétariat de la juridiction mais qu'il en a eu les mêmes effets puisqu'il est clairement précisé dans cet acte improprement qualifié de requête d'appel qu'il a pour objet de saisir à nouveau la Cour après l'arrêt de la Cour de Cassation du 16 juin 2004 signifié le 16 février 2005. Sur le fond En application des dispositions de l'article 1146 du code civil, il revient à la société WATRUARA BONE d'établir la carence du groupement "ENTREPOSE MONTALEV SCM" dans l'exécution de son obligation de prendre livraison des matériaux à raison de 3000 m3 environ et les dommages et intérêts ne peuvent être dus qu'après que le groupement précité ait été mis en demeure de remplir son obligation. En l'espèce, aucune mise en demeure n'a été adressée par la société WATRUARA BONE aux sociétés membres du groupement pour leur enjoindre de poursuivre l'exécution du contrat de founiture de matériaux. Il n'est en outre pas démontré que ces société aient refusé la moindre livraison et la lettre simple de la société WATRUARA BONE du 31 mars 1998 n'avait pas d'autre objet que de solliciter une participation au coût d'achat d'un camion. Il ne peut par ailleurs être considéré que l'indication par la société ENTREPOSE MONTALEV dans un courrier du 03 juillet 1998 d'une diminution de ses besoins de matériaux suffit à démontrer une rupture du contrat imputable à cette société. En cet état, la Cour, adoptant les motifs du tribunal mixte de commerce, confirme le jugement en ce qu'il a débouté la société WATRUARA BONE de ses demandes principales. La demande subsidiaire présentée par la société WATRUARA BONE pour

violation manifeste du devoir de loyauté et de bonne foi sera également rejetée comme non fondée car il n'est en rien établi que les sociétés membres du groupement aient manqué de loyauté et de bonne foi dans l'exécution de leurs obligations contractuelles. En conséquence du débouté de la société WATRUARA BONE et de la confirmation du jugement entrepris, il sera fait droit à la demande de la société DUMEZ tendant à obtenir le remboursement par la société WATRUARA BONE à la société DUMEZ des sommes versées en exécution de l'arrêt de la Cour d'Appel censuré par la Cour de Cassation, soit 910.000 FCFP et 29.682 FCFP représentant l'état de frais de Maître AGUILA. La société WATRUARA BONE qui succombe supportera les entiers dépens. PAR CES MOTIFS LA COUR, statuant par arrêt contradictoire déposé au greffe ; CONFIRME le jugement du tribunal mixte de commerce de NOUMÉA en date du 04 juillet 2001 ; DEBOUTE la société WATRUARA BONE de ses entières demandes ; CONDAMNE la société WATRUARA BONE à payer à la société DUMEZ GTM CALEDONIE la somme de NEUF CENT DIX MILLE (910.000) FCFP ainsi que celle de VINGT NEUF MILLE SIX CENT QUATRE VINGT DEUX (29.682) FCFP versées en exécution de l'arrêt de la Cour d'Appel de NOUMÉA du 08 août 2002 ; CONDAMNE la société WATRUARA BONE à payer à la société DUMEZ GTM CALEDONIE, d'une part, et la société ENDEL ENTREPOSE MONTALEV NOUVELLE-CALEDONIE, d'autre part, la somme de CENT CINQUANTE MILLE (150.000) FCFP au titre des frais irrépétibles en application de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie ; CONDAMNE la société WATRUARA BONE aux entiers dépens avec distraction au profit des avocats de la cause. ET signé par Gérard FEY, Président, et par Mickaela NIUMELE, Greffier présent lors de la remise du dossier avec l'arrêt au greffe.

LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Ct0064
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006948144
Date de la décision : 02/02/2006

Analyses

CONTRATS ET OBLIGATIONS CONVENTIONNELLES

En application des dispositions de l'article 1146 du code civil, il revient à la société demanderesse, partie à un contrat de livraison de matériau, d'établir la carence de son cocontractant dans l'exécution de son obligation. Les dommages et intérêts ne peuvent être dus sans mise en demeure préalable du cocontractant de remplir son obligation.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.noumea;arret;2006-02-02;juritext000006948144 ?
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