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11/07/2024 | FRANCE | N°24/00638

France | France, Cour d'appel de Nîmes, Rétention_recoursjld, 11 juillet 2024, 24/00638


Ordonnance N°608







N° RG 24/00638 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JILG











J.L.D. NIMES

10 juillet 2024













[M]





C/



LE PREFET DES BOUCHES-DU-RHONE











COUR D'APPEL DE NÎMES



Cabinet du Premier Président



Ordonnance du 11 JUILLET 2024





Nous, Mme Alexandra BERGER, Conseillère à la Cour d'Appel de NÎMES, désignée par le Premier Président

de la Cour d'Appel de NÎMES pour statuer sur les appels des ordonnances des Juges des Libertés et de la Détention du ressort, rendues en application des dispositions des articles L 742-1 et suivants du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit de l'Asile (CES...

Ordonnance N°608

N° RG 24/00638 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JILG

J.L.D. NIMES

10 juillet 2024

[M]

C/

LE PREFET DES BOUCHES-DU-RHONE

COUR D'APPEL DE NÎMES

Cabinet du Premier Président

Ordonnance du 11 JUILLET 2024

Nous, Mme Alexandra BERGER, Conseillère à la Cour d'Appel de NÎMES, désignée par le Premier Président de la Cour d'Appel de NÎMES pour statuer sur les appels des ordonnances des Juges des Libertés et de la Détention du ressort, rendues en application des dispositions des articles L 742-1 et suivants du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit de l'Asile (CESEDA), assistée de Mme Ellen DRÔNE, Greffière,

Vu l'arrêté préfectoral ordonnant une obligation de quitter le territoire français en date du 07 juillet 2024 notifié le même jour, ayant donné lieu à une décision de placement en rétention en date du 07 juillet 2024, notifiée le même jour à 18h10 concernant :

M. [W] [U] [M]

né le 26 Juin 2006 à [Localité 4]

de nationalité Algérienne

Vu la requête reçue au Greffe du Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de Nîmes le 09 juillet 2024 à 14h13, enregistrée sous le N°RG 24/3183 présentée par M. le Préfet des Bouches-du-Rhône ;

Vu l'ordonnance rendue le 10 Juillet 2024 à 12h50 par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal de NÎMES, qui a :

* Déclaré la requête recevable ;

* Ordonné pour une durée maximale de 28 jours commençant 48H après la notification de la décision de placement en rétention, le maintien dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, de M. [W] [U] [M] ;

* Dit que la mesure de rétention prendra fin à l'expiration d'un délai de 28 jours à compter du 09 juillet 2024 à 18h10,

Vu l'appel de cette ordonnance interjeté par Monsieur [W] [U] [M] le 10 Juillet 2024 à 16h15 ;

Vu l'absence du Ministère Public près la Cour d'appel de NIMES régulièrement avisé ;

Vu l'absence du Préfet des Bouches-du-Rhône, régulièrement convoqué,

Vu l'assistance de Monsieur [L] [T], interprète en langue arabe, inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel de Nîmes,

Vu la comparution de Monsieur [W] [U] [M], régulièrement convoqué ;

Vu la présence de Me Alexandre Rabih BARAKAT, avocat de Monsieur [W] [U] [M] qui a été entendu en sa plaidoirie ;

MOTIFS

Monsieur [W] [U] [M] a reçu notification le 7 juillet 2024 d'un arrêté du Préfet des Bouches-du-Rhône du même jour lui faisant obligation de quitter le territoire national sans délai avec interdiction de retour pendant deux ans.

Monsieur [W] [U] [M] a fait l'objet d'un contrôle d'identité le 6 juillet 2024, à 20h50 à [Localité 2].

Par arrêté de la même préfecture en date du 7 juillet 2024 et qui lui a été notifié le jour même à 18h10, il a été placé en rétention administrative aux fins d'exécution de la mesure d'éloignement.

Par requête du 9 juillet 2024, le Préfet des Bouches-du-Rhône a saisi le Juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Nîmes d'une demande en prolongation de la mesure.

Par ordonnance prononcée le 10 juillet 2024, à 12h50, le Juge des libertés et de la détention de Nîmes a rejeté les exceptions de nullité soulevées ainsi que les moyens présentés par Monsieur et ordonné la prolongation de sa rétention administrative pour vingt-huit jours.

Monsieur [W] [U] [M] a interjeté appel de cette ordonnance le 10 juillet à 16h15.

,

Sur l'audience, Monsieur [W] [U] [M] déclare que :

- il a fait les démarches avec le service des mineurs qui le suit depuis son arrivée en France depuis l'âge de 17 ans,

- il a fait des formations, des stages' il a le droit de finir sa formation et quand il la terminera, il demandera sa régularisation,

- il n'a pas fait de recours devant le TA car il ne connaît pas la loi,

- il n'est pas impliqué dans les faits pour lesquels il a été interpellé,

- il ne veut pas retourner en Algérie,

- il est stressé au centre, c'est lui le plus jeune et on l'embête,

- il a vu le médecin pour un problème d'audition, et on lui a prescrit des gouttes,

- il veut partir par ses propres moyens.

Son avocat soutient que :

- il y a une difficulté relative au défaut de motivation de la requête en prolongation de la mesure, il a été ignoré le fait que le retenu avait été un mineur non accompagné suivi par un service en France ; la police a indiqué que le retenu était sans domicile fixe alors qu'il vit dans un hôtel payé par l'ASE,

- il y a un problème avec la garde à vue, car le retenu a été interpellé à 20h50 et on a différé la notification des droits à 21h30 puis, on lui a donné un formulaire de droits en langue arabe et à 22H30, il y a la notification des droits en langue arabe avec interprète, à [Localité 2], il y a donc une nullité d'ordre public,

- il y a une nullité avec la non effectivité des droits puisque le temps de trajet entre [Localité 2] et [Localité 3] a pris 4h30, or cette distance ne suppose pas un temps si long et le retenu est arrivé tard dans la nuit donc il n'a pas exercé son droit à saisir le tribunal administratif, ce trajet a porté grief au retenu,

- une carence de l'administration dans ses diligences.

Monsieur le Préfet des Bouches-du-Rhône n'est pas représenté.

SUR LA RECEVABILITE DE L'APPEL :

L'appel interjeté par Monsieur [W] [U] [M] à l'encontre d'une ordonnance du Juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de Nîmes a été relevé dans les délais légaux et conformément aux dispositions des articles L.743-21, R.743-10 et R.743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Il est donc recevable.

SUR LES MOYENS NOUVEAUX ET ÉLÉMENTS NOUVEAUX INVOQUÉS EN CAUSE D'APPEL:

L'article 563 du code de procédure civile dispose : «  Pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves. »

L'article 565 du même code précise : «  Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent ».

Sauf s'ils constituent des exceptions de procédure, au sens de l'article 74 du code de procédure civile, les moyens nouveaux sont donc recevables en cause d'appel.

A l'inverse, pour être recevables en appel, les exceptions de nullité relatives aux contrôles d'identité, conditions de la garde à vue ou de la retenue et d'une manière générale celles tenant à la procédure précédant immédiatement le placement en rétention doivent avoir été soulevées in « limine litis » en première instance.

Par ailleurs, le contentieux de la contestation de la régularité du placement en rétention (erreur manifeste d'appréciation de administration ou défaut de motivation) ne peut être porté devant la cour d'appel que s'il a fait l'objet d'une requête écrite au juge des libertés et de la détention dans les 48 heures du placement en rétention, sauf à vider de leur sens les dispositions légales de l'article R.741.3 du CESEDA imposant un délai strict de 48h et une requête écrite au Juge des libertés et de la détention.

En l'espèce, Monsieur [W] [U] [M] soutient des moyens de nullité évoqués en première instance, in limine litis ainsi qu'une carence de l'administration dans ses diligences.

SUR LES EXCEPTIONS DE NULLITÉ AU TITRE D'IRRÉGULARITÉS DE LA PROCÉDURE ANTÉRIEURE A L'ARRÊTÉ :

L'article L.743-12 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose: « En cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, le juge des libertés et de la détention saisi d'une demande sur ce motif ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée de la mesure de placement en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger »

Ainsi une irrégularité tirée de la violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation de formalités substantielles ne peut conduire à une mainlevée de la rétention que si elle a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger.

Sur la notification des droits :

En l'espèce, après présentation à l'OPJ à 21h30, qui a pris connaissance préalablement de la procédure, il a été décidé du placement ne garde à vue de Monsieur [M]. L'OPJ a alors constaté son incompréhension de la langue française et a décidé, dans l'intérêt de l'intéressé de différé la notification de ses droits et de faire appel aux services d'un interprète en langue arabe. Dans l'attente, il a été remis à l'intéressé un formulaire de droits. L'interprète a été requis à 21h45. Celui-ci a indiqué au service de police qu'il se déplacerait dans les meilleurs délais. Dans l'intervalle, le retenu a bénéficié d'un examen médical durant sa garde à vue, 21h40. Par la suite, l'interprète est arrivé dans les locaux de police à 23h11, et après avoir prêté serment, il a assisté Monsieur [M] pour la notification de ses droits à 23h30, après la notification des droits à son comparse dans un premier temps, à 23h20. Le délai mis par l'interprète pour se déplacer dans les locaux de la garde à vue n'est pas imputable au service de police et ne caractérise pas une irrégularité, le début de la garde à vue courant, rétroactivement, à compter de l'interpellation de Monsieur [M].

Par voie de conséquence, le moyen n'étant pas caractérisé, il sera rejeté.

Sur le temps de trajet :

Il résulte de la procédure que la notification de la rétention administrative est intervenue à 18h10 et l'arrivée au centre a été effective à 22h45.

Comme rappelé par le juge des libertés et de la détention, il existe des contraintes organisationnelles qui pèsent sur l'administration pour la notification de ses décisions et la planification du trajet entre le lieu de la garde à vue et le lieu de la rétention, en l'espèce entre [Localité 2] et [Localité 3]. Ce temps de trajet peut être impacté par diverses péripéties routières. Les droits s'exerçant à l'arrivée au centre, le retenu disposait de la journée du lendemain pour réaliser un recours contre la décision d'éloignement. Il n'y a pas lieu de relever de grief consécutif à cette circonstance. Le moyen n'étant pas fondé, il sera rejeté.

Il y a lieu de constater qu'aucune irrégularité portant atteinte aux droits de la personne retenue n'est relevée et il convient dès lors de déclarer la procédure régulière.

SUR LA RECEVABILITE DE LA REQUÊTE FAUTE DE MOTIVATION SUFFISANTE :

Il est fait le reproche à l'administration de ne pas avoir fait état dans sa requête en prolongation de la mesure de ce que le mineur était logé, et suivi par un service éducatif en France, avec production à l'appui d'un justificatif en ce sens, du mois d'avril 2024.

En l'espèce, la requête en prolongation de la mesure mentionne :

- que le retenu n'a pas fait de démarche de régularisation depuis son arrivée en France,

- qu'il ne dispose pas d'un lieu de résidence effectif,

- qu'il est connu pénalement.

Ces éléments concordent avec la réalité de la situation du retenu en ce qu'il a été interpellé pour des faits d'atteinte aux biens, qu'il ne justifie pas de démarches de régularisation et qu'en effet il ne dispose pas d'un logement stable puisqu'il est actuellement hébergé dans un établissement hôtelier financé par les services départementaux. L'administration n'est pas tenue de reprendre de manière exhaustive tous les éléments de personnalité concernant un étranger faisant l'objet de sa requête mais les éléments les plus déterminants. En cela, elle a respecté ses obligations dans le cas d'espèce. Le moyen n'étant pas fondé, il sera rejeté.

SUR LE FOND :

L'article L.611-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose des cas dans lesquels un étranger peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et/ou l'article L.612-6 du même code d'une interdiction de retour sur le territoire français tandis que l'article L611-3 du même code liste de manière limitative les situations dans lesquelles de telles mesures sont exclues.

L'article L.741-3 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise qu'en tout état de cause «un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet.»

Au motif de fond sur son appel, Monsieur [W] [U] [M] soutient que l'administration française ne démontre pas avoir engagé les démarches utiles et nécessaires à son départ.

Il en conclut que la mesure de rétention dont il fait l'objet ne se justifie plus et doit donc être levée.

En l'espèce, l'administration a saisi les autorités consulaires d'Algérie le 8 juillet 2024.

Aucun élément du dossier ou du débat à l'audience ne permet d'affirmer que les réponses du Consulat ne puissent intervenir à bref délai en l'état des diligences dont il est ainsi justifié.

Il s'en déduit qu'il y a lieu de dire et juger que l'administration n'a pas failli à ses obligations.

SUR LA SITUATION PERSONNELLE DE MONSIEUR [W] [U] [M]:

Monsieur [W] [U] [M], présent irrégulièrement en France est dépourvu de passeport et de pièces administratives pouvant justifier de son identité et de son origine de telle sorte qu'une assignation à résidence judiciaire est en tout état de cause exclue par les dispositions de l'article L743-13 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Il s'en déduit que la prolongation de sa rétention administrative demeure justifiée et nécessaire aux fins qu'il puisse être procédé effectivement à son éloignement.

Il convient par voie de conséquence de confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort,

Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,

Vu les articles L.741-1, L.742-1 à L.743-9 ; R.741-3 et R.743-1 à R.743-19, L.743.21 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

DÉCLARONS recevable l'appel interjeté par Monsieur [W] [U] [M] ;

CONFIRMONS l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;

RAPPELONS que, conformément à l'article R.743-20 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile, les intéressés peuvent former un pourvoi en cassation par lettre recommandée avec accusé de réception dans les deux mois de la notification de la présente décision à la Cour de cassation [Adresse 1].

Fait à la Cour d'Appel de NÎMES,

le 11 Juillet 2024 à

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

' Notification de la présente ordonnance a été donnée ce jour au Centre de rétention administrative de [Localité 3] à M. [W] [U] [M], par l'intermédiaire d'un interprète en langue arabe.

Le à H

Signature du retenu

Copie de cette ordonnance remise, ce jour, par courriel, à :

- Monsieur [W] [U] [M], par le Directeur du CRA de [Localité 3],

- Me Alexandre Rabih BARAKAT, avocat

,

- M. Le Préfet des Bouches-du-Rhône

,

- M. Le Directeur du CRA de [Localité 3],

- Le Ministère Public près la Cour d'Appel de NIMES,

- Mme/M. Le Juge des libertés et de la détention.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : Rétention_recoursjld
Numéro d'arrêt : 24/00638
Date de la décision : 11/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-11;24.00638 ?
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