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04/07/2024 | FRANCE | N°23/01821

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5e chambre pole social, 04 juillet 2024, 23/01821


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 23/01821 - N° Portalis DBVH-V-B7H-I2VW



EM/DO



POLE SOCIAL DU TJ DE PRIVAS

27 avril 2023



RG :22/00136





URSSAF [Localité 3]



C/



LE [6] DE [Localité 4] ET [Localité 5]



















Grosse délivrée le 04 JUILLET 2024 à :



- Me NISOL

- Me BUREL



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COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social



ARRÊT DU 04 JUILLET 2024





Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de PRIVAS en date du 27 Avril 2023, N°22/00136



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 23/01821 - N° Portalis DBVH-V-B7H-I2VW

EM/DO

POLE SOCIAL DU TJ DE PRIVAS

27 avril 2023

RG :22/00136

URSSAF [Localité 3]

C/

LE [6] DE [Localité 4] ET [Localité 5]

Grosse délivrée le 04 JUILLET 2024 à :

- Me NISOL

- Me BUREL

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social

ARRÊT DU 04 JUILLET 2024

Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de PRIVAS en date du 27 Avril 2023, N°22/00136

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

A l'audience publique du 14 Mai 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 04 Juillet 2024.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

URSSAF [Localité 3]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Pierre-luc NISOL de la SELARL ACO, avocat au barreau de VIENNE

INTIMÉE :

LE [6] DE [Localité 4] ET [Localité 5]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Franck BUREL de la SELARL ONELAW, avocat au barreau de LYON

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 04 Juillet 2024, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par courrier en date du 21 janvier 2022, le [6] de [Localité 4] et [Localité 5] ([6]) a sollicité auprès de l' Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et des allocations familiales (URSSAF) [Localité 3], le bénéfice de la réduction générale des cotisations dite réduction Fillon sur la période de janvier 2019 à décembre 2021.

Par courrier du 11 février 2022, l'URSSAF [Localité 3] a rejeté la demande du [6] en raison de sa catégorie juridique INSEE.

Contestant cette décision, par courrier du 20 mars 2022, le [6] a saisi la Commission de recours amiable (CRA) de l'URSSAF [Localité 3], laquelle, par décision du 20 mai 2022, a rejeté le recours.

Contestant la décision de la CRA, par lettre recommandée du 20 juin 2022, le [6] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Privas, lequel, par jugement du 27 avril 2023, a :

- condamné l'URSSAF [Localité 3] à payer au [6] de [Localité 4] et [Localité 5] la somme de :

* 26 929 euros avec intérêts au taux légal à compter de la décision,

* 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné l'URSSAF [Localité 3] au paiement des dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la décision.

Par acte du 31 mai 2023, l'URSSAF [Localité 3] a régulièrement interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 09 mai 2023.

L'affaire a été fixée à l'audience du 14 mai 2024 à laquelle elle a été retenue.

Par conclusions écrites, déposées et développées oralement à l'audience, l'URSSAF [Localité 3] demande à la cour de :

Statuant à nouveau,

- infirmer le jugement entrepris,

- débouter le [6] de [Localité 4] et de [Localité 5] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

A titre reconventionnel :

- condamner le [6] de [Localité 4] et de [Localité 5] la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'URSSAF [Localité 3] soutient que :

- en l'état actuel de la règlementation en vigueur, pour ouvrir droit à la réduction générale, l'établissement doit avoir le statut juridique d'EPIC ; il ne lui appartient pas de vérifier si les trois critères d'un EPIC sont réunis par le [6] ; en revanche, l'INSEE délivre un code APE désignant l'activité principale, en fonction des déclarations au sein des liasses CFE transmises par l'établissement ; si cette nomenclature n'a pas de valeur juridique, elle est néanmoins utilisée dans la gestion du registre du commerce et des sociétés et sert de référence aux CFE pour recueillir les déclarations des entreprises ; en l'espèce, le [6] est un syndicat intercommunal et est enregistré par l'INSEE dans la catégorie juridique 7345, le nombre 73 correspondant à un EPA ; d'une manière générale, le CGCT définit le syndicat de communes comme un établissement public de coopération intercommunal associant des communes en vue d'oeuvres ou d'intérêt intercommunal et il existe deux types de syndicats de commune, les SIVU et le syndicat intercommunal à vocation multiple, les SIVOM ;

- le caractère administratif du [6] découle de ses statuts et son activité ne poursuit aucun but lucratif ; selon son statut, l'activité de vente de l'eau n'est pas la seule compétence du syndicat puisqu'il assure notamment l'assainissement collectif et non collectif ; l'assainissement des eaux usées poursuit une mission de service public en ce qu'il permet d'assurer la salubrité publique, la distribution d'une eau potable, et la protection de l'environnement; l'eau doit être considérée comme une ressource essentielle de contrôle et de prestations facultatives telles que l'entretien, la vidange ou les travaux ; la directive 2000/60/CE établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau prévoit également un régime spécial pour l'eau ; la fonction comptable du syndicat relève également de l'administration ; enfin, les deniers sont essentiellement publics, notamment par la contribution des communes, les subventions de l'Etat, de la région, du département ou tous autres organismes ; le financement n'est donc pas principalement tiré de l'activité ; en s'abstenant de s'immatriculer au RCS, la cour ne pourra que conclure que le [6] doit être considéré comme un EPA ;

- il n'est pas établi que le [6] aurait garanti ses salariés pendant la période litigieuse, contre le risque d'assurance chômage en cotisant auprès de Pôle emploi, condition nécessaire pour le bénéfice de la réduction générale des cotisations sociales ; le bénéfice de cette réduction étant subordonné à une telle affiliation ; aucune fiche de paie n'est produite aux débats, les personnes travaillant au service du [6] à durée indéterminée sont des agents soumis au droit de la fonction publique et non des salariés de droit privé ;

- en matière de répétition d'indu, il appartient au demandeur d'établir le paiement de la somme réclamée et l'absence de cause de ce paiement ; or, le [6] se contente de produire des tableaux qui sont invérifiables ; la vérification devant être opérée mois par mois et salarié par salarié ; à ce titre, le demandeur doit produire les contrats de travail, les fiches de paie et les différentes rubriques de paie ; en l'absence de ces documents, l'indu n'est pas démontré.

Par conclusions écrites, déposées et développées oralement à l'audience, le [6] de [Localité 4] et [Localité 5] demande à la cour de :

- confirmer la décision du 27 avril 2023 rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de Privas ;

- condamner l'URSSAF au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance ;

- débouter l'URSSAF de l'intégralité de ses demandes.

Le SI Assainissement Eau fait valoir que :

- l'immatriculation à l'INSEE n'a pas de valeur juridique, la classification qu'elle attribue n'a qu'une valeur indicative et il appartient à l'URSSAF, contrairement à ce qu'elle prétend, de rechercher quelle est l'activité qu'il exerce, indépendamment de ladite classification ; s'il sollicite une régularisation, c'est justement parce qu'il s'est aperçu qu'il n'appliquait pas la bonne législation compte tenu de la réalité de son activité et de son régime juridique,

- selon la loi, les services publics d'eau et d'assainissement sont financièrement gérés comme des services à caractère industriel et commercial, ce qu'ont rappelé le tribunal des conflits et le Conseil d'Etat ; par une décision du 04 mars 2021, le tribunal judiciaire de Privas avait déjà qualifié d'EPIC le syndicat ;

- il a une activité de distribution d'eau potable, d'assainissement collectif et non collectif outre le diagnostic du réseau d'eau et ces activités ne correspondent pas aux activités qui relèvent de l'exécution d'un service puclic, en sorte qu'il n'a pas une activité publique par nature et ces activités pourraient parfaitement relever du secteur privé ; les procédés de gestion du syndicat sont analogues à ceux du secteur privé dans leurs rapports avec les usagers et les tiers, les budgets sont équilibrés en recettes et en dépenses et la comptabilité relève de la nomenclature M49 applicables aux EPIC ; il est par ailleurs doté comme peut l'être une entreprise privée de différents services ; d'un service technique avec un responsable et des agents techniques et d'entretien, un service administratif avec une responsable administrative et financière outre des agents administratifs ; il a embauché du personnel relevant du droit privé sous forme de contrat de travail à durée déterminée et non pas que des agents titulaires ; il fonctionne donc comme une entreprise privée ; son financement repose principalement sur la vente d'eau et les redevances des usagers qui sont perçues proportionnelement à la consommation d'eau, et ce dans un cadre prenant en compte la valeur économique du service rendu ; ses ressources proviennent majoritairement de fonds privés pour 86% comme le démontrent les comptes et il n'a perçu aucune subvention pour 2020 ;

- il communique les états récapitulatifs des caisses pour les années 2019, 2020 et 2021 et les bulletins de paie des agents ; ainsi, il a toujours eu la qualité d'EPIC et considère qu'il doit donc bénéficier de la réduction générale des cotisations et du taux réduit d'allocations familiales.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs écritures déposées et soutenues oralement lors de l'audience.

MOTIFS

Selon l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, dans ses versions applicables au présent litige :

I.-Les cotisations à la charge de l'employeur dues au titre des assurances sociales et des allocations familiales, les cotisations dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, les contributions mentionnées à l'article L. 813-4 du code de la construction et de l'habitation, les cotisations à la charge de l'employeur dues au titre des régimes de retraite complémentaire légalement obligatoires mentionnés à l'article L. 921-4 du présent code, la contribution mentionnée au 1° de l'article L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles et les contributions à la charge de l'employeur dues au titre de l'assurance chômage prévues au 1° de l'article L. 5422-9 du code du travail qui sont assises sur les rémunérations ou gains inférieurs au salaire minimum de croissance majoré de 60 % font l'objet d'une réduction dégressive.

II.-Cette réduction est appliquée aux revenus d'activité tels qu'ils sont pris en compte pour la détermination de l'assiette des cotisations définie à l'article L. 242-1 versés aux salariés au titre desquels l'employeur est soumis à l'obligation édictée par l'article L. 5422-13 du code du travail et aux salariés mentionnés au 3° de l'article L. 5424-1 du même code, à l'exception des revenus d'activité versés par les particuliers employeurs. Elle s'applique également aux gains et rémunérations des apprentis pour lesquels l'employeur n'est pas éligible à l'exonération prévue à l'article L. 6227-8-1 dudit code.

Cette réduction n'est pas applicable aux revenus d'activité tels qu'ils sont pris en compte pour la détermination de l'assiette des cotisations définie à l'article L. 242-1 versés par les employeurs relevant des dispositions du titre Ier du livre VII du présent code, à l'exception des employeurs relevant des régimes spéciaux de sécurité sociale des marins, des mines et des clercs et employés de notaires.

III.-Le montant de la réduction est calculé chaque année civile, pour chaque salarié et pour chaque contrat de travail, selon des modalités fixées par décret. Il est égal au produit des revenus d'activité de l'année tels qu'ils sont pris en compte pour la détermination de l'assiette des cotisations définie à l'article L. 242-1 et d'un coefficient.

Ce coefficient est déterminé par application d'une formule fixée par décret. Il est fonction du rapport entre les revenus d'activité de l'année tels qu'ils sont pris en comptepour la détermination de l'assiette des cotisations définie au quatrième alinéa du présent III et le salaire minimum de croissance calculé pour un an sur la base de la durée légale du travail augmentée, le cas échéant, du nombre d'heures complémentaires ou supplémentaires, sans prise en compte des majorations auxquelles elles donnent lieu. Pour les salariés qui ne sont pas employés à temps plein ou qui ne sont pas employés sur toute l'année, le salaire minimum de croissance pris en compte est celui qui correspond à la durée de travail prévue au contrat au titre de la période pendant laquelle ils sont présents dans l'entreprise.

La valeur maximale du coefficient est fixée par décret dans la limite de la somme des taux des cotisations et des contributions mentionnées au I du présent article, sous réserve de la dernière phrase du troisième alinéa de l'article L. 241-5. La valeur du coefficient décroît en fonction du rapport mentionné au deuxième alinéa du présent III et devient nulle lorsque ce rapport est égal à 1,6.

La rémunération prise en compte pour la détermination du coefficient est celle définie à l'article L. 242-1. Toutefois, elle ne tient compte des déductions au titre de frais professionnels calculées forfaitairement en pourcentage de cette rémunération que dans des limites et conditions fixées par arrêté.

Un décret précise les modalités de calcul de la réduction dans le cas des salariés dont le contrat de travail est suspendu avec maintien de tout ou partie de la rémunération.

IV.-Le rapport ou le coefficient mentionné au deuxième alinéa du III est corrigé, dans des conditions fixées par décret, d'un facteur déterminé en fonction des stipulations légales ou conventionnelles applicables :

1° Aux salariés soumis à un régime d'heures d'équivalences payées à un taux majoré en application d'une convention ou d'un accord collectif étendu en vigueur au 1er janvier 2010 ;

2° Aux salariés auxquels l'employeur est tenu de verser une indemnité compensatrice de congé payé en application de l'article L. 1251-19 du code du travail ;

3° Aux salariés des professions dans lesquelles le paiement des congés et des charges sur les indemnités de congés est mutualisé entre les employeurs affiliés aux caisses de congés mentionnées à l'article L. 3141-32 du même code. La réduction prévue au présent article n'est pas applicable aux cotisations dues par ces caisses au titre de ces indemnités.

V.-Les modalités selon lesquelles les cotisations dues au titre des rémunérations versées au cours d'un mois civil tiennent compte de cette réduction ainsi que les modalités de régularisation du différentiel éventuel entre la somme des montants de la réduction appliquée au cours de l'année et le montant calculé pour l'année sont précisées par décret.

VI.-Le bénéfice des dispositions du présent article est cumulable avec les déductions forfaitaires prévues à l'article L. 241-18.

Le bénéfice des dispositions du présent article ne peut être cumulé, à l'exception du cas prévus à l'alinéa précédent, avec celui d'une autre exonération totale ou partielle de cotisations patronales ou l'application de taux spécifiques, d'assiettes ou de montants forfaitaires de cotisations.

VII.-Le montant de la réduction est imputé, lors de leur paiement, sur les cotisations et contributions mentionnées au I déclarées, d'une part, aux organismes de recouvrement mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-4 et, d'autre part, aux institutions mentionnées à l'article L. 922-4 en fonction de la part que représente le taux de ces cotisations et contributions, tel que retenu pour l'établissement de la réduction, dans la valeur maximale fixée par le décret mentionné au troisième alinéa du III du présent article. (...)

Pour les salariés mentionnés à l'article L. 133-9 du présent code, le montant de la réduction s'impute en outre, selon les mêmes règles, sur les cotisations recouvrées par l'organisme de recouvrement habilité par l'Etat en application du même article L. 133-9.

Lorsque le montant de la réduction est supérieur au montant des cotisations et de la contribution mentionnées au premier alinéa du présent VIII, la réduction est également imputée sur les cotisations dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles à hauteur du taux fixé par l'arrêté mentionné à la dernière phrase du troisième alinéa de l'article L. 241-5.

La réduction des cotisations et contributions que cet article prévoit est appliquée aux gains et rémunérations versés aux salariés au titre desquels l'employeur est soumis à l'obligation édictée par l'article L. 5422-13 du code du travail et aux salariés mentionnés au 3° de l'article L. 5424-1 ( 2e Civ., 15 décembre 2016, pourvoi n° 15-28.586, Bull. 2016, II, n° 273).

L'article L. 5422-13 du code du travail énonce que, sauf dans les cas prévus à l'article L. 5424-1, dans lesquels l'employeur assure lui-même la charge et la gestion de l'allocation d'assurance, tout employeur assure contre le risque de privation d'emploi tout salarié, y compris les travailleurs salariés détachés à l'étranger ainsi que les travailleurs salariés français expatriés. L'adhésion au régime d'assurance ne peut être refusée.

Il résulte de l'article L. 5424-1, 3° du même code qu'ont droit à une allocation d'assurance dans les conditions prévues aux articles L. 5422-2 et L. 5422-3, les salariés des entreprises inscrites au répertoire national des entreprises contrôlées majoritairement par l'Etat, les salariés relevant soit des établissements publics à caractère industriel et commercial des collectivités territoriales, soit des sociétés d'économie mixte dans lesquelles ces collectivités ont une participation majoritaire.

Par ailleurs, au titre des employeurs relevant des dispositions du titre Ier du livre 7 du code de la sécurité sociale (article R.711-1), figurent notamment 'les établissements publics de l'État,(...), les établissements publics départementaux et communaux n'ayant pas le caractère industriel ou commercial'.

Il en résulte que la réduction des cotisations et contributions prévue à l'article L. 241-13 du code de sécurité sociale s'applique aux gains et rémunérations versées aux salariés des établissements publics à caractère industriel et commercial des collectivités territoriales.

Contrairement à ce qui est soutenu par l'URSSAF [Localité 3], le dispositif INSEE, et l'inscription au répertoire SIRENE, à usage statistique, ne produisent aucun effet sur le plan juridique, ainsi qu'il résulte des dispositions de l'article R.123-231 du code de commerce, selon lequel aucun effet juridique ne s'attache à l'identification ou à la non identification d'une personne inscrite au répertoire. Celle-ci demeure soumise à toute obligation législative, réglementaire ou contractuelle afférente à l'exercice de son activité.

L'URSSAF [Localité 3] soutient que la catégorie juridique d'un établissement résulte de la nomenclature SIRENE qui détermine le statut juridique de la personne morale et que le [6] de [Localité 4] et [Localité 5] est déclaré en tant qu'établissement public administratif et qu'il est également déclaré sous ce statut - le syndicat a été enregistré par l'INSEE dans la catégorie juridique 7345, soit EPA -.

L'organisme prétend en outre que si la déclaration INSEE n'est pas un élément de nature à déterminer à lui seul la qualifiation juridique de l'établissement, il incombe au syndicat de démontrer qu'il revêt le caractère industriel et commercial qu'il revendique, sur le fondement des trois critères dégagés par la jurisprudence : l'objet du service, le mode de financement et le mode de fonctionnement.

De son côté, le [6] de [Localité 4] et [Localité 5] fait valoir la nature de l'établissement public, l'absence de valeur attachée à l'immatriculation INSEE et le fait qu'il remplit l'existence cumulative des trois critères susvisés.

Il résulte des textes précités que l'application de la réduction dégressive des cotisations à la charge de l'employeur procède des seules conditions posées par ceux-ci.

Il appartient ainsi au juge du contentieux de la sécurité sociale, saisi d'un litige relatif à l'application de cette réduction, de rechercher si ces conditions sont effectivement remplies ; dans l'hypothèse d'un établissement public d'une collectivité territoriale il y a lieu de vérifier s'il présente un caractère industriel et commercial et cette vérification doit se faire au regard de la qualification légale ou à défaut de son objet, de l'origine de ses ressources et de ses modalités de fonctionnement.

En l'espèce, il y a lieu de constater que selon les statuts de cet établissement public, le [6] de [Localité 4] et [Localité 5] a pour objet la production et la distribution d'eau potable nécessaire à l'alimentation des populations des communes membres ainsi que de l'organisation du service et de sa gestion.

Or, le service de distribution d'eau est traditionnellement considéré comme un service public industriel et commercial ( Tribunal des conflits 28 juin 1976, n° 2030: Lebon 701) en raison de son objet (Tribunal des conflits 21 mars 2005, n° 3413: Lebon 651).

La nature juridique du [6] n'est définie ni par un texte, ni par ses statuts ; la nature juridique d'un établissement public s'apprécie au regard de son objet, de son mode de financement, et de son mode de fonctionnement, et, pour démontrer sa nature juridique d'établissement public industriel et commercial, il lui appartient de démontrer au titre de ces trois critères cumulatifs, que :

- son objet correspond à une activité de production et d'échange de biens et de services, susceptible d'être exercée et concurrencée par des entreprises privées (par opposition à un objet visant des opérations d'intérêt général),

- son mode de financement provient principalement des redevances versées par les usagers en contrepartie du service rendu (au contraire d'un mode de financement abondé majoritairement, par des fonds publics),

- son mode de fonctionnement est comparable à celui d'une entreprise privée (au contraire de modalités de fonctionnement présentant un caractère purement administratif).

Le [6] de [Localité 4] et [Localité 5] a pour objet, selon l'article 2 de ses statuts datés du 15 avril 2014, l'étude, la création, l'exploitation et la gestion par tous moyens des services publics de distribution d'eau potable, d'assainissement collectif et d'assainissement non collectif, et plus généralement toutes opérations administratives, commerciales, mobilières et immobilières pouvant se rattacher directement ou indirectement a l'objet syndical et susceptibles d'en faciliter le développement ; il a donc pour compétence la production et la distribution d'eau potable ; il intervient également en matière d'assainissement, activités qui peuvent relever du secteur privé.

Le syndicat démontre notamment par la production du Grand livre édité le 23 juillet 2021 que ses ressources proviennent majoritairement de la vente d'eau de redevances payées par les usagers, et non de subventions, qui ne représentent qu'un faible pourcentage de ses ressources ; pour 2019, les subventions et participations des collectivités territoriales représentaient 0,31% des ressources.

Pour justifier que son mode de fonctionnement est semblable à celui d'une entreprise privée, le [6] de [Localité 4] et [Localité 5] justifie que son organisation est identique à celle d'une entreprise privée, avec un directeur des services, un service administratif, un service eau potable et un service assainissement et qu'il n'utilise pas que du personnel titulaire, même si ce dernier est majoritaire.

Enfin, il résulte des dispositions combinées des articles L.2224-7-1, L. 2224-8 et L. 2224-11 du code général des collectivités locales que les communes sont compétentes en matière de distribution d'eau potable et d'assainissement des eaux usées, ces services étant financièrement gérés comme des services à caractère industriel et commercial.

Il s'ensuit que, nonobstant la nature de son inscription au répertoire SIRENE, cet établissement public présente un caractère industriel et commercial.

La circonstance invoquée par l'URSSAF [Localité 3] d'un défaut d'inscription de cet établissement public au registre de commerce et des sociétés est inopérant dans la mesure où, d'une part, la sanction prévue par ce texte est l'inopposabilité non pas d'une qualité mais d'actes et de faits qui est sans incidence au cas d'espèce puisque la qualité de cotisant de l'établissement public est constante, d'autre part, l'assujettissement au paiement des cotisations sociales n'est pas subordonné à une inscription à un registre mais procède de l'application des conditions énumérées par les dispositions du titre quatrième du livre II du code de sécurité sociale.

Il s'ensuit que le [6] de [Localité 4] et [Localité 5] est bien fondé à voir appliquer la réduction des cotisations instituée à l'article L. 241-13 du code de sécurité sociale.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont conclu que le [6] de [Localité 4] et [Localité 5], même s'il exerce une activité non lucrative d'intérêt général et de nature administrative, relève néanmoins de la catégorie des EPIC.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

A l'appui de sa demande, le [6] de [Localité 4] et [Localité 5] produit les états récapitulatifs des caisses pour les années 2019, 2020 et 2021 et les bulletins de salaire des agents ; l'URSSAF [Localité 3] ne conteste pas sérieusement les données chiffrées ainsi communiquées par le syndicat.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont conclu que le [6] rapporte la preuve du bien fondé de la somme dont il demande le paiement, soit au total 26 929 euros, et que l'URSSAF [Localité 3] en 'se bornant à indique que le [6] se contente de produire des tableaux invérifiables, elle ne soulève aucun moyen de nature à contredire le calcul étayé produit par le syndicat'.

Le jugement entrepris sera donc confirmé.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière de sécurité sociale et en dernier ressort;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Pôle social du tribunal judiciaire de Privas le 27 avril 2023,

Y ajoutant:

Condamne l'URSSAF [Localité 3] à payer au Syndicat Intercommunal d'Assainissement et Eau de [Localité 4] et [Localité 5] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne l'URSSAF [Localité 3] aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par le président et par la greffière.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5e chambre pole social
Numéro d'arrêt : 23/01821
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;23.01821 ?
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