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04/07/2024 | FRANCE | N°22/04060

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5e chambre pole social, 04 juillet 2024, 22/04060


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 22/04060 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IU5O







POLE SOCIAL DU TJ DE PRIVAS

17 novembre 2022



RG :22/00050





CPAM DE L'ARDECHE



C/



Société [5]



















Grosse délivrée le 04 JUILLET 2024 à :



- CPAM ARDECHE

- Me ROUANET









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COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social



ARRÊT DU 04 JUILLET 2024





Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de PRIVAS en date du 17 Novembre 2022, N°22/00050



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les pla...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/04060 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IU5O

POLE SOCIAL DU TJ DE PRIVAS

17 novembre 2022

RG :22/00050

CPAM DE L'ARDECHE

C/

Société [5]

Grosse délivrée le 04 JUILLET 2024 à :

- CPAM ARDECHE

- Me ROUANET

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social

ARRÊT DU 04 JUILLET 2024

Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de PRIVAS en date du 17 Novembre 2022, N°22/00050

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

A l'audience publique du 07 Mai 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 04 Juillet 2024.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

CPAM DE L'ARDECHE

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par M. [N] en vertu d'un pouvoir spécial

INTIMÉE :

Société [5]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Denis ROUANET de la SELARL BENOIT - LALLIARD - ROUANET, avocat au barreau de LYON

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 04 Juillet 2024, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 21 février 2018, Mme [H] [V], embauchée par la société [5], entreprise de travail intérimaire, en qualité d'ouvrière non qualifiée, a été victime d'un accident du travail ainsi décrit dans la déclaration établie par l'employeur le 23 février 2018 'Mme [V] était en train de porter un filet de boyau - lorsqu'elle a ressenti une douleur à l'épaule droite '.

Le certificat médical initial établi le 22 février 2018 par le Dr [G] [T] fait état d'une 'luxation épaule droite'.

Le 28 février 2018, la Caisse primaire d'assurance maladie a pris en charge cet accident au titre de la législation sur les risques professionnels.

L'état de santé de Mme [H] [V] a été déclaré consolidé au 26 juillet 2019 et la Caisse primaire d'assurance maladie lui a attribué un taux d'incapacité permanente partielle de 40%.

Par courrier du 8 février 2021, la société [5] a contesté l'attribution de ce taux d'incapacité permanente partielle ainsi que la durée des arrêts de travail prescrits à Mme [H] [V] devant la Commission médicale de recours amiable, laquelle a, lors de sa séance du 1er juillet 2021, rejeté le recours.

Par requête du 22 février 2022, la société [5] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Privas en contestation de la décision implicite de rejet de la Commission médicale de recours amiable.

Par jugement du 17 novembre 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Privas a :

- déclaré la décision d'attribution d'un taux d'incapacité permanente partielle de 40% à Mme [H] [V] inopposable à la société [5],

- débouté la société [5] de sa demande d'inopposabilité de l'ensemble des arrêts et soins prescrits à Mme [V] postérieurement à l'accident du travail du 21 février 2018,

- débouté la société [5] de sa demande aux fins de voir ordonner une mesure de consultation médicale,

- dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens.

Par lettre recommandée reçue à la cour le 19 décembre 2022, la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche a régulièrement interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 21 novembre 2022. Enregistrée sous le numéro RG 22 04060, l'examen de cette affaire a été appelé à l'audience du 11 octobre 2023, renvoyé à celle du 14 février 2024, puis à celle du 07 mai 2024.

Par conclusions écrites, déposées et développées oralement à l'audience, la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche demande à la cour de :

- la recevoir en son intervention,

- infirmer le jugement du 17 novembre 2022 en ce qu'il a déclaré inopposable à l'employeur le taux d'incapacité permanente partielle attribué à Mme [V] faute pour la Commission médicale de recours amiable de lui avoir communiqué les rapports médicaux,

- confirmer le surplus du jugement,

En conséquence,

- lui décerner acte de ce qu'elle a fait une exacte application des textes en vigueur,

- dire et juger que la décision de prise en charge du taux d'incapacité permanente partielle de 40% attribué à Mme [V] est opposable à la société [5].

La CPAM de l'Ardèche soutient que :

- le juge de première instance a retenu, à tort, qu'elle n'avait pas respecté le principe du contradictoire dans le cadre de la procédure de recours préalable,

- Le 25 mai 2021, la Commission médicale de recours amiable a adressé les rapports d'évaluation des séquelles de Mme [V] au médecin conseil désigné par la société [5], le Dr [Y] [Z], mais le courrier est revenu à la Caisse avec la mention 'pli refusé par le destinataire',

- la société [5] ne peut solliciter l'inopposabilité de la décision pour défaut de transmission du rapport d'évaluation des séquelles,

- seul le rapport d'analyse de la Commission n'a pas été adressé à la société [5],

- la Commission médicale de recours amiable est une commission dépourvue de tout caractère juridictionnel et les exigences du procès équitable ne s'appliquent pas aux recours préalables obligatoires,

- l'absence de transmission du rapport dans le cadre d'un recours précontentieux ne caractérise pas un non-respect du principe du contradictoire,

- elle a notifié la décision de la Commission à la société [5] le 27 juillet 2021 et n'a reçu, en retour, aucune demande de copie de son rapport d'analyse concernant le dossier de Mme [V], et dès lors aucune inopposabilité ne peut être prononcée.

Par conclusions écrites, déposées et développées oralement à l'audience, la société [5] demande à la cour de :

A titre principal :

- confirmer le jugement rendu en 1ère instance par le pôle social du tribunal judiciaire de Privas le 17 novembre 2022 en ce qu'il a déclaré la décision d'attribution d'un taux d'incapacité permanente partielle de 40,00% à Mme [H] [D] [V] inopposable à l'employeur,

- infirmer le jugement rendu en 1ère instance par le pôle social du tribunal judiciaire de Privas le 17 novembre 2022 en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'inopposabilité de l'ensemble des arrêts et soins prescrits à Mme [H] [D] [V] au titre de l'accident du travail du 21 février 2018.

Statuant à nouveau du chef précité,

- prononcer l'inopposabilité des lésions, soins et arrêts de travail pris en charge au titre de l'accident du travail dont Mme [H] [D] [V] était victime le 21 février 2018.

En tout état de cause,

- condamner la CPAM de l'Ardèche aux dépens de l'instance.

A titre subsidiaire :

- dire que la Commission médicale de recours amiable a violé les dispositions des articles R142-8 et suivants du code de la sécurité sociale en omettant de notifier le rapport médical visé par l'article L142-6 du même code au médecin mandaté par l'employeur,

- juger qu'elle a été privée de l'effectivité de sa demande au stade amiable de sa contestation sans que la CPAM de l'Ardèche n'ait couvert ses manquements depuis l'introduction de la présente instance,

- ordonner au choix de la cour, l'une des mesures d'instruction légalement admissibles (consultation orale à l'audience, consultation sur pièces ou expertise médicale judiciaire sur pièces) aux frais avancés par la CPAM de l'Ardèche sur l'évaluation du taux d'IPP contesté et/ou l'imputabilité à l'accident litigieux de la durée d'incapacité temporaire de travail.

Dans ce cadre :

- choisir le technicien à commettre sur l'une des listes dressées en application de l'article 2 de la loi n°71-498 du 29 juin 1971 ou, à défaut, parmi les médecins spécialistes ou compétents pour l'affection considérée,

- si la mesure d'instruction ne peut être exécutée oralement à l'audience, impartir des délais aux parties et au consultant, le cas échéant, pour la communication de leurs pièces et le dépôt de son rapport écrit,

- demander au consultant ou à l'expert :

* de prendre connaissance des pièces qui lui auront été communiquées le tribunal et/ou par les parties,

* de tirer toutes les conséquences d'un défaut de transmission du rapport médical par l'organisme de sécurité sociale et/ou le service médical lui étant rattaché,

* de rechercher l'existence d'une cause étrangère au travail, d'un état pathologique préexistant ou d'une pathologie intercurrente à l'origine des lésions, soins et arrêts de travail pris en charge au titre de l'accident litigieux,

* d'éclairer le tribunal sur l'existence d'une cause étrangère au travail de nature médicale qui serait à l'origine exclusive des lésions, soins et arrêts de travail ultérieurement pris en charge,

* d'évaluer le taux d'IPP applicable au titre des séquelles résultant de l'accident susvisé sur la base des explications de fait présentées par les parties, du barème indicatif applicable et de la science médicale,

- ordonner au technicien de notifier son éventuel rapport écrit à l'employeur en application des dispositions de l'article R142-16-4 du code de la sécurité sociale,

- rappeler en cas d'expertise et par application du principe de la contradiction, que les parties devront être associées aux opérations d'expertise (dires, pré-rapport,etc...)

- statuer sur les demandes de confirmation et/ou infirmation formées par la société [5] ainsi que les dépens de l'instance à l'issue de la mesure d'instruction.

La société [5] fait valoir que :

- la commission médicale de recours amiable a violé les dispositions de l'article R 142-8 du code de la sécurité sociale en transmettant à son médecin conseil un rapport médical incomplet, puisqu'il n'a été destinataire que des arrêts de travail jusqu'au 27 juillet 2019, et n'a pas eu communication du certificat médical final,

- cette carence dans la transmission ne lui a pas permis d'émettre un avis pertinent sur la durée des arrêts de travail et le taux d'incapacité permanente partielle retenu,

- plusieurs cours d'appel ont en pareille hypothèse sanctionné cette carence par l'inopposabilité de la décision à l'employeur,

- cette carence dans la transmission du rapport médical aurait dû être appliquée de manière identique aux deux demandes qu'elle présentait, soit la durée des arrêts de travail et le taux d'incapacité permanente partielle,

- subsidiairement, s'agissant d'un litige d'ordre médical, il conviendra sur la base du rapport du Dr [Y] [Z] qui a émis un avis aussi utile que possible sur la base des pièces qui lui ont été transmises par la Caisse Primaire d'assurance maladie de l'Ardèche d'ordonner une mesure d'instruction aux frais avancés de la Caisse Primaire d'assurance maladie.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS

Sur la demande principale en inopposabilité des arrêts de travail et du taux d'incapacité permanente partielle

Aux termes des articles L 142-4 et R 142-8 du code de la sécurité sociale dans leur version en vigueur depuis le 1er janvier 2020, les recours contentieux formés notamment en matière d'application des législations et réglementations de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole sont précédés d'un recours préalable. Pour les contestations d'ordre médical formées par les employeurs, le recours préalable est soumis à une commission médicale de recours amiable.

Aux termes de l'article L 142-6 du même code dans sa version applicable à compter du 1er janvier 2020, pour les contestations de nature médicale, le praticien-conseil du contrôle médical du régime de sécurité sociale concerné transmet, sans que puisse lui être opposé l'article 226-13 du code pénal, à l'attention exclusive de l'autorité compétente pour examiner le recours préalable, lorsqu'il s'agit d'une autorité médicale, l'intégralité du rapport médical reprenant les constats résultant de l'examen clinique de l'assuré ainsi que ceux résultant des examens consultés par le praticien-conseil justifiant sa décision. A la demande de l'employeur, ce rapport est notifié au médecin qu'il mandate à cet effet. La victime de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle est informée de cette notification.

Aux termes de l'article R 142-8-2 du même code dans sa version applicable à compter du 1er janvier 2020, le secrétariat de la commission médicale de recours amiable transmet dès sa réception la copie du recours préalable au service du contrôle médical fonctionnant auprès de l'organisme dont la décision est contestée. Dans un délai de dix jours à compter de la date de réception de la copie du recours préalable, le praticien-conseil transmet à la commission, par tout moyen conférant date certaine, l'intégralité du rapport mentionné à l'article L 142-6 ainsi que l'avis transmis à l'organisme de sécurité sociale ou de mutualité sociale agricole.

Aux termes de l'article R 142-8-3 du même code dans sa version applicable à compter du 1er janvier 2020, lorsque le recours est formé par l'employeur, le secrétariat de la commission médicale de recours amiable notifie, dans un délai de 10 jours à compter de l'introduction du recours, par tout moyen conférant date certaine, le rapport mentionné à l'article L 142-6 accompagné de l'avis, au médecin mandaté par l'employeur à cet effet. Le secrétariat informe l'assuré ou le bénéficiaire de cette notification. Dans un délai de vingt jours à compter de la réception du rapport mentionné à l'article L 142-6 accompagné de l'avis, ou si ces documents ont été notifiés avant l'introduction du recours, l'assuré ou le médecin mandaté par l'employeur peut, par tout moyen conférant date certaine, faire valoir ses observations. Il en est informé par le secrétariat de la commission médicale de recours amiable par tout moyen conférant date certaine.

Aux termes de l'article R 142-8-5 alinéa 4 du même code dans sa version applicable à compter du 1er janvier 2020, l'absence de décision de l'organisme dans un délai de quatre mois à compter de l'introduction du recours préalable vaut rejet de la demande.

Selon avis de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation n°15009 B du 17 juin 2021, il résulte de la combinaison des textes susvisés dans leur version résultant du décret n°2018-928 du 29 octobre 2018 que les délais impartis par ces articles ne sont assortis d'aucune sanction, sont indicatifs de la célérité de la procédure et que leur inobservation n'entraine pas l'inopposabilité à l'égard de l'employeur d'une décision attributive de taux d'incapacité, puisque l'employeur peut porter son recours devant la juridiction de sécurité sociale et obtenir copie du rapport de l'article L 142-6 à l'occasion de ce recours en application des articles L 142-10 et R142-16-3 du même code.

Les articles susvisés n'ayant été modifiés par le décret n°2019-1506 du 30 décembre 2019, dont les dispositions sont applicables à compter du 1er janvier 2020, qu'en ce que les délais impartis ont été précisés, l'avis de la Cour de cassation conserve sa pertinence pour les recours introduits à compter du 1er janvier 2020.

Par ailleurs, aux termes de l'article L 142-10 du même code, pour les contestations mentionnées aux 1°, 4°, 5° et 6° de l'article L 142-1, le praticien-conseil ou l'autorité compétente pour examiner le recours préalable, lorsqu'il s'agit d'une autorité médicale, transmet à l'expert ou au médecin consultant désigné par la juridiction, sans que puisse lui être opposé l'article 226-13 du code pénal, l'intégralité du rapport ayant fondé sa décision. A la demande de l'employeur, partie à l'instance, ce rapport est notifié au médecin qu'il mandate à cet effet. La victime de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle est informée de cette notification.

Aux termes de l'article R 142-6 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable à compter du 1er janvier 2020, la juridiction peut ordonner toute mesure d'instruction, qui peut prendre la forme d'une consultation clinique ou sur pièces exécutée à l'audience, par un consultant avisé de sa mission par tous moyens, dans des conditions assurant la confidentialité, en cas d'examen de la personne intéressée.

Aux termes de l'article R 142-16-3 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable à compter du 1er janvier 2020, le greffe demande par tous moyens, selon le cas, à l'organisme de sécurité sociale, au président du conseil départemental ou à la maison départementale des personnes handicapées, de transmettre à l'expert ou au consultant désigné l'intégralité du rapport mentionné à l'article L 142-6 et du rapport mentionné au premier alinéa de l'article L 142-10 ou l'ensemble des éléments et informations à caractère secret au sens du deuxième alinéa de l'article L 142-10 ayant fondé sa décision. Dans le délai de dix jours à compter de la notification, à l'employeur de la victime de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle, lorsque ce dernier est partie à l'instance, de la décision désignant l'expert, celui-ci peut demander par tous moyens conférant date certaine, à l'organisme de sécurité sociale, de notifier au médecin qu'il mandate à cet effet, l'intégralité des rapports précités. S'il n'a pas déjà notifié ces rapport au médecin ainsi mandaté, l'organisme de sécurité sociale procède à cette notification, dans le délai de vingt jours à compter de la réception de la demande de l'employeur. Dans le même délai, l'organisme de sécurité sociale informe la victime de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle de la notification de l'intégralité de ces rapports au médecin mandaté par l'employeur.

Il résulte de ces éléments que l'absence de communication à l'employeur du rapport prévu à l'article L 142-6 du code de la sécurité sociale à l'occasion d'un recours médical préalable est sans incidence sur la décision prise par la caisse et son opposabilité à l'employeur lequel reste fondé à saisir le juge d'un recours en inopposabilité afin qu'il soit statué sur le bien-fondé de cette contestation, peu important les éventuelles irrégularités affectant les décisions prises par la commission médicale de recours amiable et la commission de recours amiable de l'organisme de sécurité sociale ( voir en ce sens 2ème Civ. 4 mai 2017 pourvoi 16-15.948 ).

En l'espèce, la SASU [5] conclut à l'inopposabilité à son égard des décisions relatives au taux d'incapacité permanente partielle et au taux d'incapacité temporaire et de travail prises par la Caisse Primaire d'assurance maladie de l'Ardèche au motif que le principe du contradictoire n'a pas été respecté devant la commission médicale de recours amiable puisque le médecin qu'elle a mandaté a été destinataire d'un rapport médical incomplet lequel ne comprenait pas tous les arrêts de travail et le certificat médical final.

La Caisse Primaire d'assurance maladie de l'Ardèche fait valoir à juste titre que la commission médicale de recours amiable est dépourvue de tout caractère juridictionnel de telle sorte que les exigences relatives à l'équité du procès ne s'y appliquent pas et qu'aucune sanction n'est prévue par les textes. Elle ajoute que l'employeur dispose d'un recours effectif devant la juridiction de sécurité sociale.

En conséquence, la SASU [5] sera déboutée de ses demandes d'inopposabilité à son égard des décisions relatives au taux d'incapacité permanente partielle et au taux d'incapacité temporaire et de travail prises par la Caisse Primaire d'assurance maladie de l'Ardèche, et la décision déférée infirmée en ce sens.

Sur la demande subsidiaire en organisation d'une mesure d'instruction

Il résulte des dispositions de l'article L 411-1 du code de la sécurité sociale que la présomption d'imputabilité au travail des lésions survenues à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, dès lors que l'arrêt de travail a été initialement prescrit ou que le certificat médical initial d'accident du travail est assorti d'un arrêt de travail, s'étend à toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime, et il appartient à l'employeur d'apporter la preuve contraire.

S'il appartient au juge du fond de rechercher si la présomption d'imputabilité est ou non utilement combattue par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve produits devant lui et s'il peut à cet égard ordonner une mesure d'instruction, il n'en demeure pas moins que la faculté d'ordonner une telle mesure relève de son pouvoir souverain d'appréciation.

A titre liminaire, il sera rappelé que l'employeur ne conteste pas le caractère professionnel de l'accident dont Mme [V] a été victime le 21 février 2018.

Pour combattre la présomption des soins et symptômes résultant de cet accident de travail, la SASU [5] soutient que son médecin conseil qui n'a eu qu'une communication incomplète du dossier médical de la salariée, conclut que la lésion résultant de l'accident du travail aurait dû donner lieu à une prise en charge maximale de trois semaines et que la prise en charge au-delà cette période serait la conséquence d'un état antérieur.

Ceci étant, le raisonnement du médecin de l'employeur est théorique et statistique, il est également parcellaire quant aux circonstances de fait, ainsi que cela résulte de ses propres écritures. Il s'en déduit que les seuls éléments médicaux contenus dans le rapport du Dr [J] ne sont pas de nature à combattre utilement la présomption d'imputabilité des soins et arrêts et de travail dont Mme [V] a bénéficié des suites de son accident de travail du 21 février 2018, ainsi que le taux d'incapacité permanente partielle qui lui a été alloué ensuite de celui-ci.

Ainsi, à défaut de rapporter un commencement de preuve de nature à combattre sérieusement la présomption d'imputabilité, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande d'expertise médicale présentée par la société appelante.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, en matière de sécurité sociale, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Confirme le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Privas - Contentieux de la protection sociale sauf en ce qu'il a déclaré la décision d'attribution d'un taux d'incapacité permanente partielle de 40% à Mme [H] [V] inopposable à la société [5],

et statuant à nouveau sur l'élément infirmé et y ajoutant,

Déboute la SASU [5] de sa demande d'inopposabilité à son égard de la décision d'attribution d'un taux d'incapacité permanente partielle de 40% à Mme [H] [V],

Déboute la SASU [5] de sa demande d'expertise,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne la SASU [5] aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5e chambre pole social
Numéro d'arrêt : 22/04060
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;22.04060 ?
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