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04/07/2024 | FRANCE | N°21/02883

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ph, 04 juillet 2024, 21/02883


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 21/02883 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IEDC



LR/EB



CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AVIGNON

30 juin 2021



RG :19/00325







[X] EP [D]





C/



S.A.R.L. LITTORAL NET





















Grosse délivrée le 04 JUILLET 2024 à :



- Me

- Me
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COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH



ARRÊT DU 04 JUILLET 2024





Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AVIGNON en date du 30 Juin 2021, N°19/00325



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Madame Leila...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/02883 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IEDC

LR/EB

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AVIGNON

30 juin 2021

RG :19/00325

[X] EP [D]

C/

S.A.R.L. LITTORAL NET

Grosse délivrée le 04 JUILLET 2024 à :

- Me

- Me

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 04 JUILLET 2024

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AVIGNON en date du 30 Juin 2021, N°19/00325

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Leila REMILI, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

M. Michel SORIANO, Conseiller

Madame Leila REMILI, Conseillère

GREFFIER :

Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

A l'audience publique du 01 Février 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 14 Mai 2024 prorogé à ce jour

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

Madame [K] [X] EP [D]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Victoria ERIGOZZI de la SELARL ERIGOZZI - PALMAJURIS, avocat au barreau d'AVIGNON

INTIMÉE :

S.A.R.L. LITTORAL NET Anciennement INTER NET PROPRETE

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Roland MARMILLOT de la SELARL SOCIETE D'AVOCAT ROLAND MARMILLOT, avocat au barreau d'AVIGNON

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 07 Août 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 04 juillet 2024, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS :

Mme [K] [X] épouse [D] a été engagée par la société Inter Net Propreté nouvellement dénommée Littoral Net, suivant contrat à durée déterminée à temps partiel pour accroissement temporaire d'activité, du 19 juin 2006 au 31 août 2006, en qualité d'agent de service.

Par avenant du 31 août 2006, le contrat de travail s'est poursuivi à durée indéterminée.

Par avenant du 1er mars 2011, Mme [D] est passée à temps complet.

La société Inter Net Propreté ayant perdu son contrat de prestation de services, le contrat de travail de Mme [D] était transféré à un autre prestataire, la société Paca Net, et ce à compter du 1er janvier 2012.

Les relations contractuelles entre Mme [D] et la société Inter Net Propreté ont repris et les parties ont conclu plusieurs contrats à durée déterminée allant :

- du 27 mai au 15 septembre 2015, contrat à durée déterminée saisonnier à temps partiel,

- du 14 mars 2016 au 31 mars 2017, contrat à durée déterminée de remplacement à temps partiel,

- du 10 avril au 30 septembre 2017, contrat à durée déterminée à temps partiel saisonnier,

- du 19 mars au 31 octobre 2018, contrat à durée déterminée à temps partiel pour accroissement temporaire d'activité.

Considérant qu'elle occupe, depuis son retour dans la société Inter Net Propreté, un emploi durable et permanent de l'entreprise et au motif qu'elle n'a pas été payée de l'intégralité des heures accomplies, le 16 juillet 2019, Mme [D] a saisi le conseil de prud'hommes d'Avignon sollicitant la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée et formulant diverses demandes à caractère salarial et indemnitaire.

Par jugement contradictoire du 30 juin 2021, le conseil de prud'hommes d'Avignon a débouté Mme [K] [D] de l'intégralité de ses demandes, dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile et dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens.

Par acte du 27 juillet 2021, Mme [K] [D] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions du 21 octobre 2021, Mme [K] [D] demande à la cour de :

- recevoir son appel

- le déclarer bien fondé

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes

Statuant de nouveau,

- prononcer la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée

- juger que cette requalification entraîne les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse

En conséquence

- condamner la Sarl Inter Net Propreté au paiement des sommes suivantes :

' 1 534.90 euros au titre de l'indemnité de requalification

' 5 155.91 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement

' 3 069.80 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 306.98 euros au titre des congés payés afférents

' 9 200 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- prononcer la requalification des contrats à temps partiel en contrat de travail à temps plein pour la période du 19 juin au 31 août 2006 et du 1er septembre 2006 au 28 février 2011.

- condamner la Sarl Inter Net Propreté au paiement de la somme de :

* 20 311.35 euros à titre de rappel de salaire sur requalification de la relation de travail à temps plein, outre la somme de 2.0311,3 euros au titre des congés payés afférents

*1883.99 euros à titre de rappel de salaire sur heures complémentaires et supplémentaires, outre la somme de 188.39 euros au titre des congés payés afférents pour la période du mois de mars 2016 au mois d'avril 2018.

* 9 204 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé.

* 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner la Sarl Inter Net Propreté aux entiers dépens de l'instance.

Elle soutient que :

Sur la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée :

- c'est à tort que les premiers juges ont retenu qu'elle n'apportait pas d'éléments probants lui permettant de justifier qu'elle occupait un emploi permanent dans l'entreprise.

- elle a bénéficié de 5 contrats à durée déterminée pour accroissement temporaire d'activité.

- tous ces contrats ont été conclus pour le même poste, agent de service, et dans le but d'effectuer les mêmes tâches, le ménage des chambres d'hôtels.

- les différents recours aux contrats à durée déterminée n'étaient nullement justifiés.

- elle a occupé un emploi permanent dans l'entreprise.

- elle est fondée à solliciter la requalification des contrats en contrat à durée indéterminée ainsi qu'une indemnité de licenciement, une indemnité compensatrice de préavis et des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la requalification du temps partiel en temps plein :

- elle a été engagée pour la 1ère fois le 19 juin 2006 selon contrat à durée déterminée à temps partiel.

- ce contrat prévoyait une durée mensuelle de travail de 100 heures mais ne mentionnait nullement la répartition des heures de travail sur les jours de la semaine, ou bien sur les semaines du mois.

- elle se tenait ainsi à la disposition permanente de son employeur, et se trouvait dans l'incapacité totale de prévoir à quel rythme elle devait travailler.

- la relation de travail allant du 19 juin 2006 au 1er mars 2011 (date à laquelle elle est passée à temps plein) était à temps plein et non à temps partiel.

Sur les heures supplémentaires :

- ses bulletins de salaire à compter du 14 mars 2016 démontrent qu'elle a accompli des heures supplémentaires, mais que ces dernières ne lui ont pas été payées.

Sur le travail dissimulé:

- elle a effectué des heures qui n'ont pas été rémunérées.

- les bulletins de salaire qui lui ont été remis ne mentionnent pas la réalité des heures effectuées et payées.

- il est démontré que la société Inter Net Propreté s'est soustraite volontairement et frauduleusement à ses obligations de contrôle du temps de travail.

En l'état de ses dernières écritures du 16 décembre 2021, la Sarl Littoral Net anciennement Inter Net Propreté demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris le 30 juin 2021 par le conseil des prud'hommes d'Avignon en toutes ses dispositions,

En tout état de cause,

Vu les articles L1244-1 et L1245-1 L3245-1 et L8221-5 du code du travail,

Vu la jurisprudence citée et existante,

- constater que les demandes formulées par Mme [K] [D] ne sont ni fondées ni justifiées,

- constater que les demandes formulées par Mme [K] [D] au titre de la requalification du temps partiel à temps plein et des heures supplémentaires sont prescrites.

En conséquence,

- débouter Mme [K] [D] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

- condamner Mme [K] [D] à payer la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme [K] [D] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Elle fait valoir que :

Sur la requalification de la relation de travail :

- Mme [D] n'apporte pas la preuve qu'elle a occupé un emploi permanent dans l'entreprise.

- l'existence de plusieurs contrats à durée déterminée ne suffit pas à emporter la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée.

Sur la requalification du temps partiel en temps plein :

- Mme [D] sollicite pour la 1ère fois en cause d'appel la requalification des contrats des 19 juin et 31 août 2006 à temps plein.

- en application de l'article L. 3245-1 du code du travail, cette demande est prescrite.

Sur le paiement des heures supplémentaires et le travail dissimulé :

- la salariée n'a jamais réalisé d'heures supplémentaires qui ne lui auraient pas été payées.

- le tableau communiqué est totalement faux.

- aucune heure supplémentaire n'étant due, Mme [D] ne peut solliciter une quelconque indemnité pour travail dissimulé et elle ne démontre aucunement l'intention de dissimuler l'activité.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

Par ordonnance en date du 31 mars 2023, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 07 août 2023. L'affaire a été fixée à l'audience du 07 septembre 2023 puis déplacée à celle du 1er février 2024.

MOTIFS

Sur la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée

Mme [K] [D] sollicite la requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée et ce, à compter du 27 mai 2015.

Aux termes de l'article L. 1242-1 du code du travail « Un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise.

L'article L. 1242-2 du même code précise qu'un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement dans certains cas, dont :

« 1° Remplacement d'un salarié en cas :

a) D'absence ;

b) De passage provisoire à temps partiel, conclu par avenant à son contrat de travail ou par échange écrit entre ce salarié et son employeur ;

c) De suspension de son contrat de travail ;

d) De départ définitif précédant la suppression de son poste de travail après consultation du comité social et économique, s'il existe ;

e) D'attente de l'entrée en service effective du salarié recruté par contrat à durée indéterminée appelé à le remplacer ;

2° Accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise ;

3° Emplois à caractère saisonnier, dont les tâches sont appelées à se répéter chaque année selon une périodicité à peu près fixe, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs ou emplois pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois. Lorsque la durée du contrat de travail est inférieure à un mois, un seul bulletin de paie est émis par l'employeur ; (...) »

L'article L. 1245-1 du code du travail dispose qu' est réputé à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance des dispositions des articles L. 1242-1 à L. 1242-4.

En cas de litige sur le motif du recours à un contrat à durée déterminée, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve de la réalité du motif énoncé dans le contrat.

Il est produit aux débats les contrats à durée déterminée suivants :

- un contrat intitulé « saisonnier » du 27.05.2015 au 15.09.2015 mentionnant que Mme [K] [D] est « engagée afin d'aider la société à faire face à un accroissement temporaire d'activité saisonnier », en qualité « d'agent de service » niveau AS1 avec pour tâche l'entretien de chambres hôtelières/travaux ménagers (chambres, recouches, chambres à blanc) ainsi que d'autres tâches de même nature définies chaque jour

- un contrat de « remplacement » du 14.03.2016 au 31.03.2017 mentionnant que Mme [K] [D] est « engagée afin d'assurer le remplacement temporaire de Mme [P] [R] employée comme agent de service AS1 pendant son absence pour congé parental » avec les mêmes tâches que précédemment

- un contrat intitulé « saisonnier » du 10.04.2017 au 30.09.2017 mentionnant que Mme [K] [D] est « engagée afin d'aider la société à faire face à un accroissement temporaire d'activité saisonnier », en qualité « d'agent de service » niveau AS1 avec les mêmes tâches

-un contrat du 19.03.2018 au 31.10.2018 mentionnant que Mme [K] [D] est « engagée afin d'aider la société à faire face à un accroissement temporaire d'activité », en qualité « d'agent de service » niveau AS1 avec les mêmes tâches

Mme [K] [D] fait état également du contrat à durée déterminée conclu du 19 juin 2006 au 31 août 2006 pour accroissement temporaire d'activité ainsi que du contrat à durée indéterminée du 31 août 2006 au 31 décembre 2011, précisant que l'ensemble de ces contrats a été conclu pour le même poste, agent de service, dans le but d'effectuer les mêmes tâches, le ménage des chambres d'hôtels, de sorte qu'il ne fait aucun doute qu'elle était amenée à occuper un emploi permanent dans l'entreprise.

Si, effectivement comme l'indique l'intimée, le nombre même important de contrats temporaires n'est pas en soi révélateur d'un emploi pérenne et durable, en revanche, dès lors que le salarié conteste l'exactitude des motifs de recours figurant sur le contrat à durée déterminée, il appartient à l'employeur d'en rapporter la preuve.

L'intimée se contente cependant de pointer les périodes au cours desquelles, entre le 27 mai 2015 et le 31 octobre 2018, Mme [K] [D] n'a pas travaillé pour elle mais n'apporte aucun élément justifiant la réalité des motifs figurant aux contrats litigieux.

Elle n'explique pas ainsi à quoi correspondent les deux contrats « saisonniers » de la fin du mois de mai 2015 à mi-septembre 2015 puis du 10 avril 2017 à la fin du mois de septembre 2017, ni non plus ce qui justifie un « accroissement temporaire d'activité » du 19 mars 2018 au 31 octobre 2018, Mme [K] [D] occupant toujours le même emploi et effectuant toujours les mêmes tâches.

Par ailleurs, l'intimée ne fournit aucun justificatif concernant le remplacement temporaire de Mme [P] qui aurait été en congé parental du 14 mars 2016 au 31 mars 2017.

Faute donc de justifier la réalité des motifs des recours aux contrats à durée déterminée, il sera fait droit à la demande de requalification en contrat à durée indéterminée à compter du 27 mai 2015, par infirmation du jugement déféré, le conseil de prud'hommes ayant inversé la charge de la preuve en la faisant peser sur la salariée.

Sur les conséquences de la requalification

Compte tenu de la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, Mme [K] [D] a droit aux indemnités consécutives à un licenciement sans cause réelle et sérieuse intervenu à la date de rupture du 31 octobre 2018.

L'appelante effectue ses calculs en tenant compte d'une reprise d'ancienneté au 1er contrat à durée déterminée, le 19 juin 2006.

Outre qu'elle n'a sollicité de requalification qu'à compter du 27 mai 2015, il convient de rappeler que son contrat a été transféré à la société Paca Net, que la salariée est sortie des effectifs de la société intimée à compter du 1er janvier 2012 et qu'elle a ensuite été salariée ailleurs pendant plus de trois ans.

Ainsi, par l'effet de la requalification, Mme [K] [D] est réputée avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le 27 mai 2015, de sorte qu'elle peut se prévaloir d'une ancienneté de 3 ans et 5 mois.

Il n'y a pas lieu non plus de calculer les indemnités dues sur la base d'un salaire de référence à temps plein puisque la salariée était à temps partiel.

- Sur l'indemnité de requalification

Mme [K] [D] a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire, en application des articles L. 1245-1 et L. 1245-2 du code du travail.

Le montant minimum de l'indemnité de requalification est calculé selon la moyenne de salaire mensuel dû au titre du contrat dans le dernier état de la relation de travail avant la saisine de la juridiction prud'homale. Cette moyenne de salaire mensuel doit être déterminée au regard de l'ensemble des éléments de salaire, y compris lorsqu'ils ont une périodicité supérieure au mois.

Au vu des bulletins de salaire produits pour la période de mars à octobre 2018, il sera retenu une moyenne de 728,26 euros (salaire de base et prime), cette somme étant accordée au titre de l'indemnité de requalification.

-Sur l' indemnité légale de licenciement

Elle sera établie comme suit :

[(728,26/4) X 3] + [728,26/4) X 5/12] = 622,05 euros

-Sur l'indemnité compensatrice de préavis

Mme [K] [D] ayant droit à un préavis de deux mois, conformément à la convention collective, il lui sera octroyé la somme de 1456,52 euros, outre les congés payés afférents.

- Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

La rupture du contrat de travail intervenue au 31 octobre 2018 doit être considérée comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En application des dispositions de l'article L.1235-3 telles qu'issues de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 tenant compte du montant de la rémunération de Mme [D] ( 728,26 euros en moyenne) et de son ancienneté en années complètes (3 années), dans une entreprise comptant au moins onze salariés, la cour retient que l'indemnité à même de réparer intégralement le préjudice de l'intéressée doit être évaluée à la somme de 2913,04 euros correspondant à l'équivalent de quatre mois de salaire brut.

Sur la requalification du temps partiel en temps complet

Mme [K] [D] sollicite pour la première fois en appel (le 21 octobre 2021), la requalification du temps partiel en temps complet pour la période allant du 19 juin 2006 au 1er mars 2011.

La SARL Littoral Net soulève la prescription de la demande sur le fondement de l'article L. 3245-1 du code du travail.

En effet, la prescription triennale prévue à cet article s'applique bien à l'action en requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet.

Par ailleurs, il résulte de la combinaison des articles L. 3245-1 et L. 3242-1 du code du travail que le délai de prescription des salaires court à compter de la date à laquelle la créance salariale est devenue exigible. Pour les salariés payés au mois, la date d'exigibilité du salaire correspond à la date habituelle du paiement des salaires en vigueur dans l'entreprise.

Il n'est pas contestable, en l'espèce, que la demande est prescrite s'agissant de salaires payés entre juin 2006 et fin décembre 2011.

Sur le rappel de salaire au titre des « heures supplémentaires »

L'article L. 3245-1 du code du travail (article 21 de la loi n 2013-504 du 14 juin 2013) dispose que : « l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture. »

En application de ces dispositions, la rupture du contrat de travail étant intervenue le 31 octobre 2018 et la salariée ayant saisi la juridiction prud'homale, dans le délai de trois ans, le 16 juillet 2019, elle est recevable à revendiquer le paiement de sommes dues au titre des trois années ayant précédé la rupture du contrat de travail, soit à compter du 31 octobre 2015.

Il n'y a donc pas de prescription en l'espèce puisque Mme [K] [D] réclame des rappels de salaire à partir du mois de mai 2016.

Aux termes de l'article L. 3171-4 du code du travail, « en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable. »

En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Mme [K] [D] prétend avoir accompli des « heures supplémentaires » qui ne lui ont pas été payées. Il convient de relever au préalable que si elle réclamait en première instance la somme de 8198,81 euros, elle ne réclame plus en appel que celle de 1883,99 euros, sans ne fournir aucune explication sur cette réduction de demande.

Elle se fonde sur les bulletins de salaire établis et sur sa pièce n° 25 dont elle indique qu'il s'agit d'un récapitulatif des heures effectuées.

Or, il n'y a aucune corrélation entre la pièce 25 et les bulletins de salaire sur lesquels en définitive l'appelante se fonde essentiellement pour réclamer le paiement « d'heures non payées ».

Ainsi, elle prétend relever de l'analyse des bulletins de paie les éléments suivants :

Période Heures totales effectuées Heures totales payées Heures non payées

Mai 2016 92 heures 83 heures 9 heures

Juin 2016 110.17 heures 97.17 heures 13 heures

Juillet 2016 142.67 heures 118.17 heures 24.5 heures

Août 2016 117.67 heures 101.67 heures 16 heures

Octobre 2016 66.67 heures 63.42 heures 3.25 heures

Mai 2017 65.5 heures 60.5 heures 5 heures

Juin 2017 78.5 heures 68.5 heures 5 heures

Juillet 2017 98 heures 80 heures 18 heures

Août 2017 63.25 heures 57.75 heures 5.5 heures

Sept 2017 68.75 heures 65.5 heures 3.25 heures

Mai 2018 52.83 heures 47.33 heures 5.5 heures

Juin 2018 42 heures 36 heures 6 heures

Juillet 2018 78.83 heures 68.83 heures 10 heures

Août 2018 78.58 heures 65.33 heures 13.25 heures

Sept 2018 74.83 heures 65.33 heures 9.5 heures

Oct 2018 55.83 heures 49.08 heures 6.75 heures

Or, force est de constater que l'appelante se livre à une lecture erronée des bulletins de paie.

Ainsi, pour exemple, s'agissant du mois de juillet 2016, le bulletin de salaire mentionne :

« Heures payées 118,170 (...)

RUBRIQUE BASE TAUX

Salaire de base 99,67 9,940

Heures complémentaires 11% 10,00 11,033

Heures complémentaires 25 % 8,50 12,425

Majorations heures 20% 19,50 1,988

Majorations heures 50% 5,00 4,970

(...) »

Mme [K] [D] ne peut pas prétendre lire ici un total d'heures effectuées de 142,67 heures puisqu'elle additionne non pas seulement des heures mais aussi les majorations applicables à certaines des heures précédentes. En réalité, elle a bien effectué 118,17 heures (99,67 heures contractuelles + 10 heures complémentaires + 8,5 heures complémentaires)

La lecture de sa pièce 25 confirme que les majorations correspondent notamment aux heures effectuées le dimanche.

Pour le mois d'octobre 2016, le bulletin de salaire mentionne :

« Heures payées 63,40 (...)

RUBRIQUE BASE TAUX

Salaire de base 99,67 9,940

Majorations heures 20% 3,25 1,988

Hres absences non rémunérées 36,25 9,940

Mme [K] [D] ne peut prétendre non plus lire ici un total d'heures effectuées de 66,67 heures puisqu'elle additionne encore les majorations heures 20% (3,25) pour aboutir à ce total, alors qu'en réalité elle a bien effectué 63,40 heures. Elle mentionne d'ailleurs dans son décompte en pièce 25 « 3h14 » bénéficiant de majorations à 20%.

L'ensemble des calculs effectués correspond à une même lecture erronée des bulletins de salaire, ce que confirme l'examen du décompte en pièce 25 s'agissant des majorations.

L'appelante ne présente donc aucun élément suffisamment précis permettant à l'employeur de répondre, de sorte que sa demande ne peut qu'être rejetée.

Il convient, par ces motifs substitués, de confirmer le jugement déféré.

En l'absence d'heures effectuées qui n'auraient pas été rémunérées, il n'y a aucun travail dissimulé. Le jugement sera encore confirmé.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Les dépens de première instance et d'appel seront mis à la charge de la société intimée et l'équité justifie de faire droit à la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort

-Confirme le jugement rendu le 30 juin 2021 par le conseil de prud'hommes d'Avignon en ce qu'il a débouté Mme [K] [D] de sa demande de paiement des heures supplémentaires et d'indemnité de travail dissimulé,

-L'infirme pour le surplus,

-Statuant à nouveau et y ajoutant,

-Dit prescrite la demande de requalification du temps partiel en temps complet,

-Requalifie les contrats à durée déterminée à compter du 27 mai 2015 en contrat à durée indéterminée,

-Condamne la SARL Littoral Net à payer à Mme [K] [X] épouse [D] :

-728,26 euros d'indemnité de requalification

-622,05 euros d'indemnité légale de licenciement

-1456,52 euros d'indemnité de préavis

-145,65 euros de congés payés afférents

-2913,04 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

-Rejette le surplus des demandes,

-Condamne la SARL Littoral Net à payer à Mme [K] [X] épouse [D] la somme de 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-Condamne la SARL Littoral Net aux dépens de première instance et d'appel.

Arrêt signé par le président et par le greffier.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5ème chambre sociale ph
Numéro d'arrêt : 21/02883
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;21.02883 ?
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