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04/07/2024 | FRANCE | N°21/00692

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5e chambre pole social, 04 juillet 2024, 21/00692


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 21/00692 - N° Portalis DBVH-V-B7F-H6MU







POLE SOCIAL DU TJ DE PRIVAS

21 janvier 2021



RG :19/00426





[W]





C/



S.A.S. [4]

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE



















Grosse délivrée le 04 JUILLET 2024 à :



- Me DARNOUX

- Me GABERT

- CPA

M









COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social



ARRÊT DU 04 JUILLET 2024





Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de PRIVAS en date du 21 Janvier 2021, N°19/00426



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Catherine REYTER LEVIS, Conse...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/00692 - N° Portalis DBVH-V-B7F-H6MU

POLE SOCIAL DU TJ DE PRIVAS

21 janvier 2021

RG :19/00426

[W]

C/

S.A.S. [4]

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE

Grosse délivrée le 04 JUILLET 2024 à :

- Me DARNOUX

- Me GABERT

- CPAM

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social

ARRÊT DU 04 JUILLET 2024

Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de PRIVAS en date du 21 Janvier 2021, N°19/00426

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

A l'audience publique du 07 Mai 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 04 Juillet 2024.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANT :

Monsieur [T] [W]

né le 28 Juillet 1960 à [Localité 6]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me Roland DARNOUX de la SELAFA AVOCAJURIS, avocat au barreau D'ARDECHE

INTIMÉES :

S.A.S. [4]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

Représentée par Me Céline GABERT de la SELARL FAYOL AVOCATS, avocat au barreau D'ARDECHE, dispensée de comparution

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par M. [E] en vertu d'un pouvoir spécial

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 04 Juillet 2024, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 13 juin 2017, M. [T] [W], salarié de la société [4], a été victime d'un accident pour lequel son employeur a établi une déclaration d'accident de travail le14 juin 2017 qui mentionnait : "il était en train d'effectuer le nettoyage d'une pièce de béton qui avait été chargée sur une remorque. La pièce de béton a basculé et lui a coincé 4 doigts de la main droite contre une autre pièce en béton".

La caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5] a pris en charge cet accident au titre de la législation professionnelle et a déclaré l'état de M. [T] [W], consolidé le 8 avril 2018, en retenant un taux d'incapacité permanente partielle de 63%.

Par courrier du 17 août 2018, M. [T] [W] a sollicité la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur et la mise en oeuvre, par la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5], de la procédure de conciliation.

Après échec de cette procédure, constaté par un procès-verbal de non conciliation établi le 14 novembre 2018, M. [T] [W] a saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Privas d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.

Par jugement du 21 janvier 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Privas a :

- débouté M. [T] [W] de sa demande en reconnaissance de la faute inexcusable de la société [4],

- dit qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [T] [W] au paiement des dépens,

- dit qu'appel pourra être interjeté sous peine de forclusion dans le mois suivant la notification du présent jugement. L'appel est à adresser à la cour d'appel de Nîmes.

Par acte du 18 février 2021, M. [T] [W] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par arrêt du 21 septembre 2023, la chambre sociale de la cour d'appel de Nîmes a :

- infirmé en toutes ses dispositions le jugement rendu le 21 janvier 2021 par le pôle social du tribunal judiciaire de Privas,

Statuant à nouveau,

- jugé que M. [T] [W] a été victime le 13 juin 2017 d'un accident du travail dû à la faute inexcusable de son employeur, la SAS [4],

- fixé au maximum la majoration de la rente forfaitaire allouée à M. [T] [W],

- jugé que M. [T] [W] peut prétendre à une indemnisation complémentaire dans les conditions prévues aux articles L.452-2 à L.452-5 du code de la sécurité sociale,

- ordonné, avant dire droit, une expertise médicale confiée au Dr [H] [F] (...),

- fixé à la somme de 5000,00 euros le montant de la provision à valoir sur la réparation des préjudices concernés par la mesure d'expertise,

- dit que la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5] avancera les sommes allouées au titre de la majoration de la rente, de l'indemnité provisionnelle et de l'indemnisation de ses préjudices ainsi que des frais d'expertise,

- renvoyé l'affaire à l'audience du 13 mars 2024 à 14 heures,

- dit que la notification du présent arrêt vaudra convocation des parties à cette audience,

- déclaré le présent arrêt commun et opposable à la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5],

- sursis à statuer sur les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens.

Par avis en date du 23 novembre 2023, l'examen de l'affaire a été déplacé à l'audience du 07 mai 2024.

Le Dr [H] [F], expert judiciaire désigné, a rendu son rapport le 22 décembre 2023.

Par conclusions écrites, déposées et développées oralement à l'audience, auxquelles il convient de se référer pour connaître les moyens développés au soutien de ses demandes, M. [T] [W] demande à la cour de :

- le déclarer recevable et bien fondé en ses conclusions.

- fixer ses préjudices comme suit :

* 20.000 euros au titre des souffrances endurées

* 3.500 euros au titre du préjudice esthétique temporaire

* 4.000 euros au titre du préjudice esthétique définitif

* 10.000 euros au titre du préjudice d'agrément

* 2.145 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire total et partiel

* 37.800 euros au titre du déficit fonctionnel permanent

* 2.150 euros au titre de l'aide par tierce personne

* 30.000 euros au titre du préjudice sexuel (15000 pour chacun des époux)

* 5.911,77 euros au titre de l'aménagement du véhicule

* 46.853 euros au titre des pertes professionnelles

- condamner solidairement la CPAM et la société [4] à lui payer les sommes susmentionnées déduction faite de la provision déjà versée

- dire et juger que l'ensemble des sommes dues portera intérêt au taux légal à compter de la demande en faute inexcusable présentée à l'organisme de sécurité sociale ;

- condamner la société [4] à lui payer la somme de 5000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société [4] aux entiers dépens.

Par conclusions écrites, déposées et développées oralement à l'audience, auxquelles il convient de se référer pour connaître les moyens développés au soutien de ses demandes, la SAS [4] demande à la cour de :

- débouter M. [T] [W] de sa demande d'indemnisation au titre de la perte de gains professionnels, des frais d'aménagement de véhicule ;

- réduire à de plus justes proportions tous autres chefs de préjudice, conformément à sa jurisprudence habituelle ;

- statuer ce que de droit sur les dépens.

Par conclusions écrites, déposées et développées oralement à l'audience, auxquelles il convient de se référer pour connaître les moyens développés au soutien de ses demandes, la CPAM de [Localité 5] demande à la cour, après avoir indiqué qu'elle n'avait pas d'observations à faire valoir, de :

- constater que M. [T] [W] n'a pas respecté le principe du contradictoire à son égard,

- constater qu'elle a procédé à la majoration de la rente, au paiement de la provision et à la consignation pour frais d'expertise,

- condamner l'employeur à la rembourser de toutes les sommes dont elle aura à faire l'avance,

- déclarer le jugement commun à la compagnie d'assurance de l'employeur garantissant le risque.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs écritures déposées et soutenues oralement lors de l'audience.

MOTIFS

Sur la liquidation des préjudices

Le salarié victime d'un accident du travail bénéficie d'un régime de réparation forfaitaire prévoyant, selon l'article L. 431-1 du code de la sécurité sociale, la prise en charge des frais médicaux, chirurgicaux, pharmaceutiques et accessoires, les frais de transport et d'une façon générale, les frais nécessités par le traitement, la réadaptation fonctionnelle, la rééducation professionnelle et le reclassement de la victime. Le salarié bénéficie également du versement d'indemnités journalières et d'une rente viagère destinée à compenser l'incapacité permanente de travail lorsque celle-ci est supérieure à 10 % (art. L. 434-2 du CSS).

En cas de faute inexcusable, la victime a droit à une indemnisation complémentaire (art. L. 452-1), laquelle prend la forme d'une majoration de la rente forfaitaire (art. L. 452-2), la majoration de la rente étant payée par la caisse qui en récupère le montant par l'imposition d'une cotisation complémentaire (art. L. 452-2 du CSS), ainsi qu'à la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales endurées, de ses préjudices esthétiques et d'agrément et du préjudice résultant de la perte ou de la diminution des possibilités de promotion professionnelle (art. L. 452-3).

Depuis la décision n° 2010-8 QPC du Conseil constitutionnel du 18 juin 2010, la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle résultant d'une faute inexcusable de l'employeur peut également demander réparation de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale.

Les différents postes de préjudices ont été évalués par une expertise judiciaire réalisée par le Dr [H]. Ce rapport d'expertise répond de manière précise, étayée, et dépourvue de toute ambiguïté à la mission confiée.

- Déficit fonctionnel temporaire

Ce préjudice correspond pour la période antérieure à la consolidation, à l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation, et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique.

La date de consolidation a été fixée par la Caisse Primaire d'assurance maladie au 8 avril 2018.

L'expert a défini les périodes de déficit fonctionnel ainsi :

- Déficit fonctionnel temporaire total (100%) : deux jour, du 13/06/2017 au 14/06/2017,

- Déficit fonctionnel temporaire partiel :

* à 75 % du 15/06/2017au 31/07/2017, soit 47 jours

* à 25% du 01/08/2017 au 15/12/2017, soit 137 jours,

M. [T] [W] sollicite une indemnisation sur l'ensemble de la période, sur une base journalière à taux plein 30 euros en raison de la gravité de ses blessures.

La SAS [4] offre d'indemniser ce chef de préjudice sur une base journalière à taux plein de 25 euros.

Par suite, M. [T] [W] sera justement indemnisé de ce chef de préjudice sur une base journalière à taux plein de 25 euros, soit la somme totale de :

100% x (25€ x 2 jours ) + 75% x ( (25€ x 47 jours ) + 25% x (25€ x 137 jours) = 1.787,50 euros

Il sera en conséquence alloué à M. [T] [W] la somme de 1.787,50 euros en indemnisation de son déficit fonctionnel temporaire.

- Déficit fonctionnel permanent

Le déficit fonctionnel permanent se définit ainsi : « Il s'agit ici de réparer les incidences du dommage qui touchent exclusivement à la sphère personnelle de la victime. Il convient d'indemniser, à ce titre, non seulement les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, mais aussi la douleur permanente qu'elle ressent, la perte de la qualité de vie et les troubles dans les conditions d'existence qu'elle rencontre au quotidien après sa consolidation.

Ce poste de préjudice cherche à indemniser un préjudice extra-patrimonial découlant d'une incapacité constatée médicalement qui établit que le dommage subi a une incidence sur les fonctions du corps humain de la victime [...]

Il s'agit ici de réparer les incidences du dommage qui touchent exclusivement à la sphère personnelle de la victime ».

En droit commun de l'indemnisation, le déficit fonctionnel permanent inclut l'ensemble des souffrances physiques et psychiques endurées ainsi que les troubles qui leur sont associées.

La Cour de cassation, par deux arrêts (Ass. plén., 20 janvier 2023, pourvoi n° 21-23.947 et n°21-23.673) a décidé que la rente versée à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle ne répare pas le déficit fonctionnel permanent en sorte que la victime d'une faute inexcusable de l'employeur peut obtenir une réparation distincte du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées.

Ceci étant, dès lors que la rente servie à la victime indemnise tous les préjudices de nature professionnelle le déficit fonctionnel permanent indemnisable en l'espèce ne concerne que les troubles subis par la victime dans sa sphère privée et personnelle.

L'expert, en précisant qu'il se fondait sur le barème du droit commun ( concours médical), a conclu à un taux de 20% pour les séquelles des atteintes digitales droites, en raison des raideurs et de la gêne fonctionnelle pour cette main dominante ( en ne prenant pas en compte la gêne liée à l'amputation de P2 du pouce droit, non imputable).

M. [T] [W] sollicite la somme de 37.800 euros sur la base d'une valeur du point de 1.890 euros pour un homme de 58 ans, âge qui était le sien à la date de consolidation.

La SAS [4] offre à ce titre, sur la base du référentiel d'indemnisation de septembre 2022, une somme de 30.800 euros avec une valeur du point de 1.540 euros pour un homme de 63 ans.

Ceci étant, la valeur du point de rente doit s'apprécier à la date de consolidation, soit le 8 avril 2018. M. [T] [W] était âgé à cette date de 57ans comme étant né le 28 juillet 1960. Il sera en conséquence justement compte tenu du taux retenu sur la base d'une valeur du point de 1.890 euros, conforme au référentiel indicatif des cours d'appel de 2020, soit la somme de 37.800 euros.

- Souffrances physiques et morales

Ce préjudice correspond aux souffrances tant physiques que morales endurées par la victime du fait des atteintes à son intégrité, sa dignité et son intimité, et des traitements, interventions, hospitalisations qu'elle a subis depuis l'accident jusqu'à la consolidation, les souffrances physiques et morales postérieures à la consolidation étant incluses dans le déficit fonctionnel permanent.

L'expert a évalué ce chef de préjudice à 4 /7 en raison ' des données de l'interrogatoire, de la description des lésions subies et des soins pendant de longs mois et des répercussions psychologiques des amputations et de la perte d'emploi'.

M. [T] [W] sollicite à ce titre une somme de 20.000 euros en raison également des souffrances 'qualifiées d'atroces' au moment de l'écrasement des doigts de la main.

La SAS [4] considère eu égard aux indemnisations habituellement allouées pour ce quantum de préjudice que la somme de 4.000 à 8.000 euros est allouée pour ce quantum de préjudice.

M. [T] [W] sera justement indemnisé de préjudice par une somme de 8.000 euros.

- Préjudice d'agrément :

Ce poste de préjudice répare l'impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer régulièrement une activité spécifique de sport ou de loisirs, la perte de qualité de vie étant exclue de ce poste de préjudice puisqu'indemnisée au titre du déficit fonctionnel permanent.

L'expertise judiciaire indique ' présent. M. [W] décrit parfaitement les difficultés pour ses loisirs habituels : pétanque, bricolage, jardinage, vélo '.

M. [T] [W] sollicite à ce titre une somme de 10.000 euros et précise au soutien de sa demande qu'il a toujours pratiqué ces activités de loisirs et qu'il n'y a plus goût depuis l'accident.

La SAS [4] conteste ce chef de préjudice au motif que M. [T] [W] ne justifie pas des pratiques qu'il invoque et de l'impact de son état séquellaire sur les dites activités.

De fait, M. [T] [W] ne produit aucun élément au soutien de ses affirmations, l'expert ne faisant que reprendre ses propres déclarations.

Par suite, la réalité du préjudice n'est pas démontrée, et M. [T] [W] sera débouté de cette demande.

- Préjudice sexuel :

Ce chef de préjudice répare :

- le préjudice morphologique lié à l'atteinte aux organes sexuels résultant du dommage subi,

- le préjudice lié à l'acte sexuel lui-même qui repose sur la perte du plaisir lié à l'accomplissement de l'acte sexuel tel que la perte de l'envie ou de la libido, la perte de la capacité physique à réaliser l'acte sexuel et la perte de la capacité à accéder au plaisir,

- le préjudice lié à une impossibilité ou une difficulté à procréer.

L'expert a précisé pour ce chef de préjudice ' absence de perte de libido mais une gêne physique pour les caresses charnelles avec sa main dominante droite. Donc préjudice sexuel présent'.

M. [T] [W] sollicite à ce titre la somme de 15.000 euros pour lui même et 15.000 euros pour son épouse en sa qualité de victime par ricochet, et fait valoir l'importance des caresses dans la relation avec son épouse 'après de nombreuses années de mariage'.

La SAS [4] s'oppose à cette demande et fait valoir d'une part que l'épouse de M. [T] [W] n'étant pas partie à la procédure elle ne peut prétendre à aucune indemnisation, et d'autre part que le préjudice décrit par l'expert est minime et offre de l'indemniser par une somme de 2.000 euros.

De fait, la demande présentée pour le compte de l'épouse de M. [T] [W] sera rejetée, et ce chef de préjudice sera justement indemnisé par la somme de 2.000 euros.

- Préjudice esthétique

Le préjudice esthétique correspond aux cicatrices, mutilations, boiterie, et autres conséquences de l'accident venant altérer l'apparence physique et l'expression.

L'expertise judiciaire a évalué le préjudice esthétique temporaire à 5/7 et définitif à 2,5/7.

M. [T] [W] sollicite la somme de 3.500 euros en réparation de son préjudice temporaire et 4.000 euros en réparation de son préjudice définitif après avoir rappelé les polytraumatismes et amputations de ses doigts.

La SAS [4] offre d'indemniser le préjudice définitif par une somme comprise entre 2.000 et 4.000 euros.

Le préjudice temporaire sera indemnisé par une somme de 2.500 euros et le préjudice définitif qui est constitué par les cicatrices et amputations sera indemnisé par une somme de 3.000 euros.

- Besoin d'assistance par une tierce personne

Ce poste de préjudice correspond à l'aide nécessaire pour accomplir les gestes du quotidien, en raison du handicap. A compter de la date de consolidation, ce préjudice est indemnisé dans les conditions définies par l'article L 434-2 du code de la sécurité sociale et n'ouvre pas droit à indemnisation complémentaire. Ainsi seul le préjudice avant consolidation peut être indemnisé dans le cadre du présent litige.

L'expert a conclu sur ce point à une aide de 1 heure par jour pour la période du 15 juin au 31 juillet 2017, soit 47 heures, et de 2 heures par semaine pour la période du 1er août 2017 au 15 décembre 2017, soit 39 heures.

M. [T] [W] sollicite une indemnisation sur une base horaire de 25 euros, soit la somme de 2.150 euros.

La SAS [4] offre d'indemniser ce chef de préjudice sur une base horaire de 16 euros, soit la somme de 1.344 euros.

Ce chef de préjudice sera justement indemnisé sur une base horaire de 20 euros soit la somme de 20€ x ( 47 + 39 heures ) = 1.720 euros.

- perte de gains professionnels

Il est de jurisprudence constante que la perte des salaires et primes et des droits à la retraite, même consécutive à un licenciement du salarié pour inaptitude, est couverte, de manière forfaitaire, par la rente majorée qui présente un caractère viager et répare notamment les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité permanente partielle subsistant au jour de la consolidation.

Par suite, M. [T] [W] doit être débouté de sa demande de 46.583 euros correspondant selon lui à ses pertes professionnelles, et notamment la perte ' des avantages pour sa retraite en raison de l'absence de cotisations des deux dernières années'

- aide technique

L'expert a conclu à la nécessité en raison de l'état séquellaire de ' la prise en charge du surcoût d'une boîte de vitesse automatique tous les 5 ans'.

M. [T] [W] sollicite à ce titre la somme de 5.911,77 euros considérant que le surcoût représenté par le choix d'un véhicule avec boîte automatique est de l'ordre de 2.500 euros tous les 5 ans, et qu'il convient de capitaliser un montant annuel de ' 2500 : 5 = 208€'.

La SAS [4] objecte à juste titre que M. [T] [W] ne produit aucun élément permettant d'objectiver le surcoût ainsi invoqué.

M. [T] [W] sera en conséquence débouté de cette demande.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, en matière de sécurité sociale, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Vu l'arrêt de la présente cour en date du 21 septembre 2023,

Fixe les indemnisations dues à M. [T] [W] :

* au titre du déficit fonctionnel temporaire : 1.787,50 euros

* au titre du déficit fonctionnel permanent : 37.800 euros

* au titre des souffrances endurées : 8.000 euros

* au titre du préjudice esthétique temporaire : 2.500 euros

* au titre du préjudice esthétique définitif : 3.000 euros

* au titre du préjudice sexuel : 2.000 euros,

* au titre du besoin d'aide par tierce personne : 1.720 euros,

soit la somme totale de 56.807,50 euros,

Déboute M. [T] [W] de ses demandes d'indemnisation au titre du préjudice d'agrément, des pertes de gains professionnels et de l'aide technique,

Rappelle qu'il convient de déduire des sommes ainsi allouées à M. [T] [W] la provision de 5000,00 euros allouée par l'arrêt du 21 septembre 2023,

Rappelle que la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5] fera l'avance de ces sommes et qu'elle en récupérera les montants auprès de la SAS [4],

Condamne la SAS [4] à verser à M. [T] [W] la somme de 1.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne la SAS [4] aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5e chambre pole social
Numéro d'arrêt : 21/00692
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;21.00692 ?
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