La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/06/2024 | FRANCE | N°22/02137

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ph, 25 juin 2024, 22/02137


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 22/02137 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IPI5







CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AVIGNON

31 mai 2022



RG :19/00179







[N]





C/



S.A. TAPIS SAINT MACLOU





















Grosse délivrée le 25 JUIN 2024 à :



- Me KOTZARIKIAN

- Me LANOY>












COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH



ARRÊT DU 25 JUIN 2024





Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AVIGNON en date du 31 Mai 2022, N°19/00179



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Madame Evelyn...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/02137 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IPI5

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AVIGNON

31 mai 2022

RG :19/00179

[N]

C/

S.A. TAPIS SAINT MACLOU

Grosse délivrée le 25 JUIN 2024 à :

- Me KOTZARIKIAN

- Me LANOY

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 25 JUIN 2024

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AVIGNON en date du 31 Mai 2022, N°19/00179

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Mme Delphine OLLMANN, Greffier, lors des débats et Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier lors du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 30 Avril 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 25 Juin 2024.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANT :

Monsieur [I] [N]

né le 09 Septembre 1966 à [Localité 8] VAUCLUSE

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Michèle KOTZARIKIAN, avocat au barreau de TARASCON

INTIMÉE :

S.A. TAPIS SAINT MACLOU

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Patrick LANOY de la SELARL CAPSTAN - PYTHEAS, avocat au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 08 Mars 2024

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 25 Juin 2024, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

M. [I] [N] a été engagé par la SA Tapis Saint Maclou à compter du 27 novembre 1993 suivant contrat à durée indéterminée à temps complet, initialement en qualité de vendeur, puis à compter du 1er octobre 2018 en qualité de responsable du magasin [Localité 7].

En septembre 2017, la SA Tapis Saint Maclou a informé les salariés du magasin de [Localité 7], dont M. [I] [N], du projet de fermeture du magasin.

Après plusieurs échanges sur les possibilités de reclassement, par courrier du 19 mars 2018, M. [I] [N] a été convoqué à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, fixé au 04 avril 2018.

Par lettre recommandée du 24 avril 2018, la SA Tapis Saint Maclou a licencié M. [I] [N] pour motif économique.

Par courrier du 16 mai 2018, M. [I] [N] a fait part à la SA Tapis Saint Maclou de sa volonté d'adhérer au congé de reclassement prévu dans la lettre de licenciement.

Par courrier du 30 mai 2018, la SA Tapis Saint Maclou a écrit à M. [I] [N] afin de l'informer qu'un poste de responsable de magasin allait être à pourvoir à Saint Mitre Les Remparts, et l'a invité à se positionner sur ce poste avant le 15 juin 2018. M. [I] [N] n'a pas donné suite à ce courrier et est sorti des effectifs de la SA Tapis Saint Maclou le 24 août 2018 à l'issu de son congé de reclassement.

Soutenant que la SA Tapis Saint Maclou ne justifie d'aucune difficulté économique, qu'elle a manqué à son obligation de reclassement et qu'elle n'a fait aucun effort de formation et d'adaptation, par requête reçue le 23 avril 2019, M. [I] [N] a saisi le conseil de prud'hommes d'Avignon afin de voir requalifier son licenciement économique en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et pour condamner la SA Tapis Saint Maclou à lui verser diverses sommes indemnitaires.

Par jugement contradictoire du 31 mai 2022, le conseil de prud'hommes d'Avignon a :

- dit que le licenciement de M. [N] est bien reconnu comme un licenciement économique,

- dit que la société Tapis Saint Maclou a respecté les conditions de licenciement suite à un «licenciement économique »

- dit que la société Tapis Saint Maclou a bien proposé des postes disponibles et équivalents à la catégorie d'emploi de M. [N],

- dit que la société Tapis Saint Maclou a bien respecté son obligation de reclassement,

- dit que la date effective de la rupture du contrat de travail est fixée au 24 avril 2018,

- dit que l'indemnité compensatrice de congés payés et les RTT afférents devront être calculés avec la date de fin de contrat au 24 avril 2018,

- dit que l'employeur n'a pas manqué à ses obligations en cours d'exécution du contrat de travail dans le paiement des heures supplémentaires,

- dit que les conditions du licenciement de M. [N] ne sont pas particulièrement vexatoires voire discriminatoires,

En conséquence,

- débouté M. [N] de l'ensemble de ses demandes et de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la société Saint Maclou de sa demande de voir condamner M. [N] à la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné aux entiers dépens M. [N].

Par acte du 24 juin 2022, M. [I] [N] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance en date du 19 janvier 2024, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 08 mars 2024. L'affaire a été fixée à l'audience du 30 avril 2024 à laquelle elle a été retenue.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 26 septembre 2022 auxquelles il convient de se référer pour connaître les moyens développés à l'appui de ses prétentions, M. [I] [N] demande à la cour de :

- réformer la décision déférée en ce qu'elle a :

* dit que son licenciement est bien reconnu comme un licenciement économique,

* dit que la société Tapis Saint Maclou a respecté les conditions de licenciement suite à un « licenciement économique »

* dit que la société Tapis Saint Maclou a bien proposé des postes disponibles et équivalents à sa catégorie d' emploi,

* dit que la société Tapis Saint Maclou a bien respecté son obligation de reclassement,

* dit que la date effective de la rupture du contrat de travail est fixée au 24 avril 2018,

* dit que l'indemnité compensatrice de congés payés et les RTT afférents devront être calculés avec la date de fin de contrat au 24 avril 2018,

* dit que l'employeur n'a pas manqué à ses obligations en cours d'exécution du contrat de travail dans le paiement des heures supplémentaires,

* dit que les conditions de son licenciement ne sont pas particulièrement vexatoires voire discriminatoires,

En conséquence,

* l'a débouté de l'ensemble de ses demandes,

Statuant à nouveau,

- juger que la société Tapis Saint Maclou ne justifie pas des difficultés économiques,

- juger que la société Tapis Saint Maclou n'a fait aucun effort de formation et d'adaptation,

En conséquence,

- condamner la société Tapis Saint Maclou à lui verser la somme de 10 000 euros de ce chef,

- juger que la société Tapis Saint Maclou n'a pas proposé des postes disponibles et équivalents à sa catégorie d'emploi,

- juger que la société Tapis Saint Maclou a manqué à son obligation de reclassement,

En conséquence,

- juger que son licenciement pour motif économique est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamner la société Saint Maclou à lui verser la somme de 70 344 euros de ce chef,

- juger que la date effective de la rupture du contrat de travail est fixée au 11 septembre 2018,

- juger que le salaire de référence à prendre en compte dans les calculs des salaires et indemnités de fin de contrat s'élève à 3 908 euros,

En conséquence,

- fixer les indemnités restant dues comme suit :

* indemnité de licenciement : 1 705,78 euros

* indemnité compensatrice de préavis : 5 438,60 euros

* salaires pendant congé reclassement : 2 735,76 euros

* congés payés afférents : 273,58 euros

sommes à parfaire en fonction de la production des documents sociaux,

- juger que l'indemnité compensatrice de congés payés et les RTT afférents devront être calculés avec la date de fin de contrat au 11 septembre 2018,

- produire les documents sociaux rectifiés (bulletin de salaire, certificat de travail, attestation Pôle Emploi) sous astreinte de 100 euros par jour de retard,

- juger que l'employeur a manqué à ses obligations en cours d'exécution du contrat de travail dans le paiement des heures supplémentaires,

- réserver les demandes de ce chef,

- juger que cela constitue du travail dissimulé,

- condamner la société Tapis Saint Maclou à lui verser la somme de 23 448 euros de ce chef,

- juger que les conditions de son licenciement ont été particulièrement vexatoires voire discriminatoires,

En conséquence,

- condamner la société Tapis Saint Maclou à lui verser la somme de 15 000 euros de ce chef,

- condamner la société Tapis Saint Maclou à lui verser la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens.

En l'état de ses dernières écritures en date du 23 décembre 2022, contenant appel incident auxquelles il convient de se reporter pour connaître les moyens développés à l'appui de ses prétentions, la SA Tapis Saint Maclou demande à la cour de :

Sur les demandes relatives au licenciement

À titre principal :

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Avignon en ce qu'il a jugé que le licenciement de M. [I] [N] est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

- débouter en conséquence ce dernier de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Avignon en ce qu'il a jugé qu'elle n'avait pas manqué à son « effort de formation et d'adaptation » ;

- débouter en conséquence M. [I] [N] de sa demande de dommages et intérêts formulée sur ce fondement ;

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Avignon en ce qu'il a jugé que le licenciement n'était pas intervenu dans des conditions vexatoires et discriminatoires ;

- débouter en conséquence M. [I] [N] de sa demande de dommages et intérêts formulée sur ce fondement ;

À titre subsidiaire :

- débouter en toute hypothèse M. [I] [N] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en l'absence de démonstration de sa situation socio-professionnelle ;

- débouter M. [I] [N] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement intervenu dans des conditions discriminatoires et vexatoires, en l'absence de démonstration d'un préjudice ;

- débouter en toute hypothèse M. [I] [N] de sa demande de dommages et intérêts pour manquement de la société à son effort de formation et d'adaptation, en l'absence de démonstration d'un préjudice,

Sur la demande de rappels de salaire et de diverses indemnités,

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Avignon en ce qu'il a jugé qu'elle n'était pas redevable à l'égard de M. [I] [N] d'un rappel de salaire et de diverses indemnités

- débouter en conséquence M. [I] [N] de cette demande,

Sur les demandes relatives à aux prétendus manquements de la société pendant l'exécution du contrat de travail,

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Avignon en ce qu'il a jugé qu'elle n'avait pas commis de tels manquements ;

- débouter en conséquence M. [I] [N] de l'ensemble de ses demandes portant sur ce fondement ;

En toute hypothèse,

- débouter M. [I] [N] de sa demande de communication sous astreinte des documents de fin de contrat rectifiés ;

- condamner M. [I] [N] à la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

MOTIFS :

Sur le licenciement économique :

Selon l'article L1233-3 du code du travail dans sa version applicable, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.

Il revient à l'employeur, sur qui repose la charge de la preuve, de produire des documents ou autres éléments qui établissent des signes concrets et objectifs d'une menace sur l'avenir de l'entreprise, autrement dit de démontrer le caractère inéluctable des difficultés économiques si la situation reste en l'état.

La réorganisation de l'entreprise constitue un motif économique de licenciement si elle est effectuée pour en sauvegarder la compétitivité ou celle du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient, et répond à ce critère la réorganisation mise en oeuvre pour prévenir des difficultés économiques à venir liées à des évolutions technologiques et leurs conséquences sur l'emploi, sans être subordonnée à l'existence de difficultés économiques à la date du licenciement ; les modifications des contrats de travail résultant de cette réorganisation ont eux-mêmes une cause économique ce qui implique que la compétitivité soit déjà atteinte ou menacée de manière certaine.

La seule intention de l'employeur de faire des économies ou d'améliorer la rentabilité de l'entreprise ne peut constituer une cause de rupture du contrat de travail.

Bien que le juge n'ait pas à se substituer à l'employeur dans les choix économiques, lesquels relèvent de son pouvoir de gestion, il doit toutefois vérifier que l'opération était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise.

En vertu de l'article L1233-16 du code du travail, la lettre de licenciement comporte l'énoncé des motifs économiques invoqués par l'employeur ; cette obligation légale a pour objet de permettre au salarié de connaître les limites du litige quant aux motifs énoncés.

Si la lettre de licenciement doit énoncer la cause économique du licenciement telle que prévue par l'article L1233-1 du code du travail et l'incidence matérielle de cette cause économique sur l'emploi ou le contrat de travail du salarié, l'appréciation de l'existence du motif invoqué relève de la discussion devant le juge en cas de litige.

Il en résulte que la lettre de licenciement qui mentionne que le licenciement a pour motifs économiques la suppression de l'emploi du salarié consécutive à la réorganisation de l'entreprise justifiée par des difficultés économiques et/ou la nécessité de la sauvegarde de sa compétitivité répond aux exigences légales, sans qu'il soit nécessaire qu'elle précise le niveau d'appréciation de la cause économique quand l'entreprise appartient à un groupe ; c'est seulement en cas de litige qu'il appartient à l'employeur de démontrer dans le périmètre pertinent, la réalité et le sérieux du motif invoqué.

Constituant un motif autonome, la sauvegarde de la compétitivité n'est pas un motif contradictoire avec des difficultés économiques déjà existantes.

La réorganisation implique l'existence d'une menace sur la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe nécessitant une anticipation des risques et, le cas échéant, des difficultés à venir. L'employeur peut ainsi anticiper des difficultés économiques prévisibles et mettre à profit une situation financière saine pour adapter ses structures à l'évolution de son marché dans les meilleures conditions.

Il appartient à l'employeur d'établir, dans le périmètre adéquat, la nécessité de la réorganisation à fins d'assurer la sauvegarde de sa compétitivité ou les difficultés économiques affrontées au sens de l'article L. 1233-3 précité.

En l'espèce, la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, énonce les griefs suivants :

' (...) Nous vous informons que nous sommes contraints de procéder à votre licenciement pour motif économique justifié par les éléments suivants.

Dans le but de sauvegarder et de restaurer la compétitivité de notre société, la direction a pris la décision de cesser l'exploitation du magasin de [Localité 7] ([Localité 5] Sud). Cette opération s'inscrit dans le cadre d'une cession d'immeuble.

En effet, tel que cela a été présenté lors de la procédure d'information / consultation du Comité

d'entreprise de septembre et octobre 2017, deux magasins Saint Maclou couvrent la périphérie

d'[Localité 5].

- Un au nord sur la zone du [Localité 9] sur 1.534 m2 de vente,

- L'autre au sud sur la zone de Mistral 7 sur 1.294 m2 de vente.

La zone de chalandise et le marché d'[Localité 5] ne permettent pas à deux magasins de perdurer

durablement.

Aussi a t'il été imaginé de ne garder que le magasin offrant le meilleur potentiel d'évolution, de le passer à court/moyen terme en pilote et de céder l'autre.

Après étude, il s'avère que c'est le magasin du [Localité 9], compte tenu de la qualité de sa zone commerciale et de son positionnement dans la zone qui offre les meilleures perspectives d'évolution.

Parallèlement, le magasin de Mistral 7, situé au Sud d'[Localité 5] voit son environnement commercial se paupériser et l'ensemble de la zone est concernée par une baisse de sa commercialité.

Nous avons eu l'opportunité d'opérer une cession immobilière de notre magasin de Mistral 7 à un repreneur ayant pour conséquence la fermeture définitive du magasin de [Localité 7].

La fermeture définitive du magasin de [Localité 7] nous conduit à supprimer le poste de Responsable de Magasin que vous occupez sur ce site.

Dans ces conditions, nous avons recherché les solutions de reclassement disponibles et adaptées.

Le résultat de nos recherches nous a permis de vous faire trois propositions de reclassement adaptées à vos qualifications.

Ainsi, par courrier recommandé avec AR en date du 12 février 2018, nous vous avons proposé un reclassement à compter du 1er avril 2018 au poste de :

- Responsable de Magasin sur les magasins de [Localité 13] et [Localité 12], pour lesquels vos conditions de rémunérations restaient inchangées.

- Responsable commercial B to B aux conditions de rémunération suivantes :

Rémunération mensuelle brute de 2 000 euros (base 12 mois)

Prime variable mensuelle de 3% sur chiffre d'affaires H.T plafonné a 3 000 € bruts par mois.

Si vous réalisez un chiffre d'affaires encaissé d'un montant égal ou supérieur à 1 million d'euros au cumul d'une année d'exercice, vous percevrez une prime de 5 000 euros bruts.

Votre salaire était garanti jusqu'au 30 septembre 2018 sur la base de votre salaire moyen des 12 derniers mois.Vous aviez un mois pour nous faire connaître votre décision concernant ces postes par retour de courrier. Passé ce délai et sans réponse de votre part, nous considérions que vous aviez refusé ces propositions de reclassement.

Par courrier du 17 mars 2018, vous nous avez fait part de votre décision de refuser les postes de reclassement qui vous ont été proposés.Dans ces conditions, nous sommes au regret de vous notifier par la présente votre licenciement pour motif économique. (...)'.

M. [I] [N] soutient que ce n'est qu'au regard du site de [Localité 7] que la SA Tapis Saint Maclou a décidé de sa fermeture entraînant de manière subséquente la suppression de son emploi, et non eu égard à tous les établissements qui s'y rattachent, au niveau national, de sorte que la société ne justifie pas de difficultés économiques ; il prétend par ailleurs que la cession du seul immeuble représentant le local où était implanté le magasin, est insuffisante à démontrer cette réorganisation, alors que l'activité aurait pu être maintenue, nonobstant le changement de propriétaire des murs commerciaux.

La SA Tapis Saint Maclou réplique que le motif économique du licenciement de M. [I] [N] repose sur la réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise qui est exposée depuis plusieurs années à de graves difficultés économiques et financières, pour partie liées aux difficultés conjoncturelles et propres au marché sur lequel elle intervient.

A l'appui de son argumentation, la SA Tapis Saint Maclou produit au débat les bilans de la société pour les exercices 2015, 2016, 2017 et 2018, qui font apparaître :

2015

2016

2017

2018

chiffre d'affaires net

235 897 185

239 890 738

223 508 274

228 785 332

Résultat d'exploitation

- 6 917 007

- 3 826 320

- 13 727 725

- 14 529 978

La SA Tapis Saint Maclou communique également une 'note explicative sur le projet de licenciement économique' du magasin [Localité 7] du 14 septembre 2017 qui :

- rappelle que deux magasins Saint Maclou couvrent la périphérie d'[Localité 5], un situé au nord sur la zone du [Localité 9], 1534m2 de vente, et l'autre situé au sud sur la zone de Mistral 7 sur 1294 m2 de vente,

- indique que la zone de chalandise et le marché d'[Localité 5] ne permettent pas à deux magasins de perdurer durablement,

- précise qu'après étude, il s'avère que le magasin de [Localité 9], compte tenu de la qualité de sa zone commerciale et son positionnement offre les meilleures perspectives d'évolution ; le magasin de Mistral 7 voit son environnement commercial se paupériser et l'ensemble de la zone est concernée par une baisse de sa commercialité,

- indique qu'il y a une opportunité de céder le magasin de Mistral 7 à un repreneur dans de bonnes conditions et un calendrier qui lui convient,

- expose les raisons économiques, financières ou techniques du projet de licenciement :

(Magasin de [Localité 7])

2014

2015

2016

chiffre d'affaires produits après remises

1 159 462

849 097

764 274

consommations

863 861

452 417

446 725

Marges sur produits

295 601

396 680

317 549

total chiffre d'affaires produits et services

1 436 483

983 484

892 728

Marge nette totale

322 844

436 940

363 196

- mentionne le classement du magasin [Localité 7] au sein du parc de magasins, 127ème rang et sa contribution : 142ème rang,

- indique le montant et la nature des investissements consentis sur le magasin de [Localité 7] au cours des 5 dernières années : agencement et installations : 5 838 euros en 2011, 3 386 euros en 2012, 10 400 euros en 2013, 15 437 euros en 2014, 67 794 euros en 2015.

Il résulte des éléments chiffrés communiqués par la SA Tapis Saint Maclou, non sérieusement contestés par M. [I] [N], que si le chiffre d'affaires de la société a connu une baisse peu significative de 3% entre 2015 et 2018, par contre le résultat d'exploitation s'est dégradé fortement sur la même période, de 110%, que cette évolution est également constatée au niveau de l'établissement de [Localité 7], de manière plus prononcée, puisque le chiffre d'affaires des produits et services sur cette période a diminué de 37% en lien avec une baisse des consommations qui ont chuté de plus de 48%, et ce, malgré la poursuite d'investissements en agencement et installations entre 2011 et 2015.

Le Document du 27/03/2018 émanant de la SA Tapis Saint Maclou 'valeur de part 2017 et perspectives' produit par M. [I] [N] et qui mentionne : 'c'est avec plaisir que je vous annonce ce jour une nouvelle progression de la valeur de l'action Tapis Saint Maclou de 0.93%. Elle s'élève à 146,56 euros.... Cette quatrième année consécutive de hausse vient confirmer la pertinence de la trajectoire de retournement de l'entreprise que nous avons engagée ensemble. Les experts évaluateurs ont ainsi voulu nous témoigner la confiance qu'ils ont dans le projet Saint Maclou, et ce, malgré une année compliquée dans le contexte du lot 3 de MAC2. Nous capitalisons une nouvelle fois sur le potentiel exprimé par nos magasins pilotes, et sur la pertinence de notre modèle de vente projet, associant le produit et la pose...', ne remet pas en cause l'évolution dégradée de la situation économique de la société entre 2015 et 2018.

M. [I] [N] soutient que la cession du seul immeuble ne permet pas à elle seule de démontrer une réorganisation et que l'activité aurait pu être maintenue, nonobstant le changement de propriétaire des murs commerciaux et que la rentrée financière résultant de cette opération aurait pu mettre un terme définitif aux difficultés économiques évoquées par la SA Tapis Saint Maclou ; il ajoute que le choix de privilégier le développement du magasin Le [Localité 9] est totalement discrétionnaire ; cependant, il convient de rappeler que le juge n'a pas le pouvoir de 'contrôler le choix effectué par l'employeur entre les solutions possibles', le juge ne pouvant pas se substituer à l'employeur dans ses options de gestion.

M. [I] [N] prétend par ailleurs que la SA Tapis Saint Maclou a volontairement favorisé 'l'assèchement du stock et de l'approvisionnement du magasin de [Localité 7]', que non seulement le magasin était approvisionné sur des gammes inférieures ne permettant pas la réalisation d'un chiffre d'affaires élevé, mais il lui était impossible d'avoir accès à des produits de gammes supérieures pour des catégories dans lesquelles les ventes étaient importantes ; cependant, le salarié n'apporte pas des éléments de démonstration.

En effet, les pièces qu'il produit au débat sur ce point : des échanges de courriels avec notamment M. [O] [M] en 2015, directeur régional PACA, portant sur le choix de gammes de moquettes ou de parquets, sur les difficultés d'effectifs rencontrées au magasin de [Localité 7] (cf courriels des 29/12/2015, 01/10/2016 et 02/09/2017 ), sur la suppression d'un monte-baisse donnant sur la rue principale (courriels entre janvier et mai 2017), sur l'absence d'outils pour travailler depuis le 12/04/2018 (courriel du 23/04/2018, soit à quelques mois de la cession du local), et le procès-verbal du comité d'entreprise du 12/12/2017 où ont été débattus plusieurs sujets ( marche générale de l'entreprise, rémunération des adjoints, fonctionnement de l'entreprise...) sont insuffisantes pour étayer ses affirmations.

Au vu des éléments qui précèdent, il apparaît que la décision de restructuration décidée par la SA Tapis Saint Maclou, destinée à améliorer ses marges et profits, est justifiée par une importante dégradation continue du résultat d'exploitation de l'entreprise et que cette réorganisation a été décidée dans le but d'assurer la sauvegarde de la compétitivité de son secteur d'activité qui était manifestement menacée.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont conclu que le licenciement économique de M. [I] [N] était justifié.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a dit que le licenciement de M. [I] [N] est bien reconnu comme un licenciement économique.

Sur la demande relative au manquement de l'employeur à son obligation de formation, d'adaptation et de reclassement :

Sur les efforts de formation et d'adaptation :

L'article L1233-4 du code du travail dispose que le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce.

Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure.

L'employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l'ensemble des salariés, dans des conditions précisées par décret.

Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.

Ainsi, aux termes de l'article L.1233-4 dans sa rédaction applicable à l'espèce, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie.

Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure.

En l'espèce, M. [I] [N] soutient que la SA Tapis Saint Maclou n'a pas mis en oeuvre tous les moyens pour l'adapter et le former malgré ses demandes multiples, que le préjudice qu'il subit est distinct de celui de l'obligation de reclassement et devra être indemnisé à hauteur de 10000 euros.

En réponse, la SA Tapis Saint Maclou fait observer que M. [I] [N] ne démontre pas qu'il aurait subi un préjudice alors que celui-ci ne se présume pas et doit nécessairement être matériellement démontré par le salarié requérant.

Force est de constater que M. [I] [N] ne démontre pas que l'employeur a failli à son obligation et n'appuie son argumentation sur aucune des pièces qu'il a produites au débat.

C'est à bon droit que les premiers juges ont débouté M. [I] [N] de sa demande de dommages et intérêts pour absence de formation et d'adaptation.

Le jugement entrepris sera donc confirmé.

Sur les propositions de reclassement :

M. [I] [N] soutient qu'aucune proposition de reclassement ne lui a été faite de manière écrite et précise, que les seuls courriers que la SA Tapis Saint Maclou lui a adressés correspondent en réalité à des réponses à ses demandes et qu'il ne saurait donc lui être reproché d'avoir refusé les prétendues propositions de reclassement situées en région Alsace, Rhône Alpes et Bretagne.

En réponse, la SA Tapis Saint Maclou indique que quatre postes ont été proposés à M. [I] [N] à titre de solution de reclassement et produit un courrier daté du 12/02/2018 dans lequel il a été proposé au salarié un poste de responsable commercial BtoB attaché à la région Rhône Alpes et qui mentionne qu'en l'absence de 'réticence particulière exprimée par M. [I] [N]', le 19/12/2017 le directeur de région lui a remis un contrat de travail inhérent à cette proposition, que consécutivement au refus postérieur de M. [I] [N], d'autres postes ont été examinés, notamment ceux dont celui-ci lui a fait part : Responsable régional Services, Responsable de magasin sur [Localité 6] ou [Localité 11], Responsable Méditerranée ; le courrier précise que suite à un entretien qui s'est tenu le 1er février 2018, il a été mis en évidence que les arguments que le salarié a exposés démontraient qu'il ne percevait pas la dimension réelle de ce dernier poste et que le 'reclasser sur ce poste ne relèverait pas que d'une simple adaptation de' ses 'compétences, mais nécessiterait un programme de formation lourd afin de combler les compétences nécessaires permettant d'occuper ce poste stratégique au niveau régional' ; trois autres postes ont été proposés à M. [I] [N] :

- responsable de magasin à [Localité 13],

- responsable de magasin à [Localité 12] étant précisé que pour ces deux postes les conditions de rémunération demeuraient inchangées,

- responsable commercial BtoB aux conditions suivantes : rémunération mensuelle brute de 2000 euros, une prime variable mensuelle de 3% sur chiffre d'affaires, garantie d'une rémunération à hauteur de la moyenne de la rémunération que M. [I] [N] a perçue les 12 mois derniers, pendant 6 mois.

Dans un courrier du 30/05/2018, la SA Tapis Saint Maclou a proposé à M. [I] [N], consécutivement à son licenciement, un poste de Responsable de magasin à ST Mitre les Remparts (13) sous réserve de l'homologation par la DIRECCTE de la rupture conventionnelle du contrat de M. [B] actuellement en poste, et précise que ce poste correspond à ses qualifications et lui demande de répondre avant le 15 juin 2018.

Il ressort des éléments produits au débat que M. [I] [N] a refusé les postes de responsable de magasin à [Localité 13] et à [Localité 12] au motif qu'il ne souhaitait pas s'éloigner de son domicile.

Outre le fait que M. [I] [N] ne démontre pas qu'il pouvait occuper les postes qu'il convoitait, il convient de rappeler que l'employeur n'est tenu de proposer que des postes de même catégorie qui soient compatibles avec les compétences du salarié et non pas d'une catégorie supérieure qui aurait nécessité, non pas une simple formation complémentaire mais une véritable formation, plus longue.

M. [I] [N] ne remet pas en cause sérieusement les éléments présentés par l'employeur dans son courrier du 12 février 2018, lorsqu'il relève que la 'gestion de 3 poseurs localement' n'est en rien comparable à la 'gestion des services au niveau régional et comprenant près de 67 poseurs' et représentant plus de '4 millions de chiffre d'affaires contre 150000 euros pour un responsable de magasin'. Le niveau de responsabilité ainsi exigé relève manifestement d'une catégorie d'emploi supérieure à celle à laquelle le salarié était rattaché.

Concernant les postes de responsable de [Localité 6] et [Localité 10], la SA Tapis Saint Maclou avait informé M. [I] [N], par un courrier du 25/01/2018, qu'ils avaient été pourvus, 'raison pour laquelle' ils ne lui ont pas été proposés.

S'agissant du poste de Responsable des ressources humaines, il ressort notamment de la fiche du poste que M. [I] [N] avait occupé, qu'il exerçait des activités dans ce domaine de façon résiduelle et sous le contrôle du Directeur régional ou de la Direction des Ressources humaines.

Là encore, occuper le poste de Responsable des ressources humaines aurait nécessité non pas une simple formation d'adaptation mais une formation complète, étant non discuté, par ailleurs, que M. [I] [N] n'était titulaire d'aucun diplôme en matière de gestion des ressources humaines.

Sans être sérieusement contredit, l'employeur rappelle dans un courrier du 25/01/2018 que ce poste nécessite des compétence spécifiques 'en droit social, relations sociales, hygiène et sécurité, gestion de contentieux prud'homaux et en développement des ressources humaines'.

Enfin, M. [I] [N] soutient qu'il a fait l'objet d'une inégalité de traitement puisque deux des salariés qui travaillaient sous sa responsabilité, ont bénéficié d'une rupture conventionnelle début février 2018 et qu'un troisième salarié s'est vu proposer un avenant à son contrat de travail pour intégrer le magasin du [Localité 9].

Comme le relève justement la SA Tapis Saint Maclou, il n'est pas établi que M. [I] [N] aurait entrepris des démarches en vue d'une rupture conventionnelle de son contrat de travail ; par ailleurs, M. [I] [N] ne conteste pas que le salarié qui a obtenu sa mutation au magasin de [Localité 7] occupait un poste de vendeur, tandis que l'appelant occupait un poste de responsable, et que celui de responsable du magasin de [Localité 7] n'était pas disponible.

La demande présentée par M. [I] [N] à ce titre sera donc rejetée.

Sur la demande de rappel de salaires :

La rupture est acquise à la date de la notification, c'est-à-dire à la date à laquelle la lettre est présentée à son destinataire même si ce dernier ne retire le pli recommandé que plus tard.

L'article 668 du code de procédure civile dispose que sous réserve de l'article 647-1, la date de la notification par voie postale est, à l'égard de celui qui y procède, celle de l'expédition et, à l'égard de celui à qui elle est faite, la date de la réception de la lettre.

En l'espèce, M. [I] [N] soutient ne pas avoir reçu la notification de la rupture de son contrat de travail le 24 avril 2018 mais celle que l'employeur a envoyée par Chronopost le 07 mai 2018, réceptionnée le 11 mai 2018, que le contrat de reclassement expirait le 11 septembre 2018, tout comme la rupture du contrat de travail.

La SA Tapis Saint Maclou indique qu'elle démontre que la lettre de licenciement a bien été envoyée par courrier recommandé le 24 avril 2018 et produit un accusé de réception sur lequel sont mentionnés le nom du destinataire , M. [I] [N] avec comme adresse '[Adresse 4]', et le nom de l'expéditeur, la SA Tapis Saint Maclou, sur lequel est également apposé un tampon 'LA POSTE 24-4 2018 FRANCE' et où est coché le paragraphe 'Destinataire inconnu à l'adresse', alors qu'il n'est pas contesté que M. [I] [N] est bien domicilié à cette adresse.

Si la SA Tapis Saint Maclou a envoyé à M. [I] [N] un second courrier de notification de son licenciement le 07 mai 2018, il n'en demeure pas moins que c'est la date d'envoi de la lettre de licenciement, adressée en recommandé, que l'employeur a manifesté sa volonté de rompre le contrat de travail.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont conclu que la fin du contrat de travail liant M. [I] [N] à la SA Tapis Saint Maclou est intervenue le 24 avril 2018.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

Sur la fixation du salaire moyen de référence :

L'article R1234-4 du code du travail dispose que le salaire à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié :

1° Soit la moyenne mensuelle des douze derniers mois précédant le licenciement, ou lorsque la durée de service du salarié est inférieure à douze mois, la moyenne mensuelle de la rémunération de l'ensemble des mois précédant le licenciement ;

2° Soit le tiers des trois derniers mois. Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, n'est prise en compte que dans la limite d'un montant calculé à due proportion.

Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de M. [I] [N] tendant à calculer le salaire moyen sur la période de février 2017 à janvier 2018, soit 3 908 euros bruts selon les calculs du salarié, et non par sur la période de douze mois précédant le licenciement, quand bien même la fermeture du magasin est intervenue quelques jours avant l'envoi de la lettre de licenciement, soit le 19 avril 2018, alors que le montant de son salaire brut n'a pas été fixe depuis son embauche et que ses salaires de février, mars et avril 2018 sont supérieurs à ceux correspondant à certains mois de l'année 2017.

Au vu des bulletins de salaire produits, il apparaît que le salaire brut moyen perçu par M. [I] [N] calculé sur la période d'avril 2017 à mars 2018 s'élève à 3 890 euros.

M. [I] [N] sera donc débouté de ce chef de demande et le jugement entrepris confirmé sur ce point.

Sur l'indemnité de licenciement :

Selon l'article R1234-2 du code du travail, quel que soit le motif de licenciement, cette indemnité ne peut pas être inférieure à : 1/4 de mois de salaire par année d'ancienneté jusqu'à 10 ans d'ancienneté ; 1/3 de mois de salaire par année d'ancienneté à partir de 10 ans d'ancienneté.

En l'espèce, M. [I] [N] est en droit de solliciter une indemnité de licenciement d'un montant de 28 850 euros [( 1/4 3890 euros X 10 ans) + (1/3 3890 euros X 14 ans) + (1/3 X 3890 euros X 9/12)].

Ayant déjà perçu une somme de 27 387,10 euros à ce titre, M. [I] [N] est en droit de solliciter la différence, soit 1 463,73 euros.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce sens.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis :

L'article L1234-5 du code du travail prévoit que la dispense de préavis ouvre droit au profit du salarié à l'indemnité compensatrice de préavis. L'indemnité compensatrice de préavis correspond aux salaires et avantages, y compris l'indemnité de congés payés, qu'aurait perçus le salarié s'il avait travaillé pendant cette période

L'indemnité compensatrice de préavis se calcule sur la base du salaire brut soumis aux cotisations sociales.

Le congé de reclassement doit être effectué pendant le préavis que le salarié est dispensé d'exécuter. Lorsque la durée du congé excède la durée du préavis, le terme du préavis est reporté d'une durée égale à la durée du congé de reclassement restant à courir. Pendant cette période, le préavis est donc suspendu.

Le salarié qui accepte un congé de reclassement bénéficie d'un préavis qu'il est dispensé d'exécuter et perçoit pendant sa durée le montant de sa rémunération.

Dans la lettre de licenciement, la SA Tapis Saint Maclou a indiqué 'votre préavis conventionnel de 3 mois, que nous vous dispensons d'effectuer mais qui vous sera rémunéré, débutera à date de 1ère présentation de cette lettre, préavis à l'issue duquel vous cesserez de faire partie de notre effectif'.

M. [I] [N] soutient qu'il a été dispensé par la SA Tapis Saint Maclou d'effectuer un préavis qui était d'une durée de trois mois compte tenu de son statut de cadre et des dispositions conventionnelles et que seule une somme de 1 734,04 euros lui a été versée à ce titre.

Il ressort du bulletin de paie de juillet 2018 que la SA Tapis Saint Maclou a versé à M. [I] [N] 979,22 euros et 754,82 euros à titre d'indemnité de préavis en juillet et août 2018, soit la somme totale de 1734,04 euros.

M. [I] [N] reconnaît enfin avoir perçu un salaire brut de 1 850 euros mensuel pendant trois mois, soit un total de 5 550 euros.

La SA Tapis Saint Maclou n'apporte pas d'explication convaincante sur le montant des sommes ainsi versées, alors que M. [I] [N] aurait dû percevoir une indemnité compensatrice de préavis de 11 670 euros outre 1 167 euros de congés payés y afférents, soit un total de 12 837 euros.

M. [I] [N] serait en droit de solliciter une somme de 5 552,96 euros à ce titre {[(3890 euros X 3)+ 10%] -1734,04 euros- 5550 euros}.

M. [I] [N] sollicite de ce chef une somme de 5 438,60 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés y afférents; il convient donc d'y faire droit et le jugement entrepris sera infirmé en ce sens.

Sur le salaire minimum pendant le congé de reclassement :

L'article L5123-2 du code du travail dispose que dans les cas prévus à l'article L. 5123-1, peuvent être attribuées par voie de conventions conclues entre l'Etat et les organismes professionnels ou interprofessionnels, les organisations syndicales ou avec les entreprises :

1° Des allocations temporaires dégressives en faveur des travailleurs qui ne peuvent bénéficier d'un stage de formation et ne peuvent être temporairement occupés que dans des emplois entraînant un déclassement professionnel ;

2° (Abrogé) ;

3° Des allocations de conversion en faveur des salariés auxquels est accordé un congé en vue de bénéficier d'actions destinées à favoriser leur reclassement et dont le contrat de travail est, à cet effet, temporairement suspendu ;

4° Des allocations en faveur des salariés dont l'emploi à temps plein est transformé, avec leur accord, en emploi à temps partiel dans le cadre d'une convention d'aide au passage à temps partiel conclue en vue d'éviter des licenciements économiques. Le montant des ressources nettes garanties des salariés adhérents à ces conventions ne pourra dépasser 90 % de leur rémunération nette antérieure.

Selon l'article R1233-32 du même code, pendant la période du congé de reclassement excédant la durée du préavis, le salarié bénéficie d'une rémunération mensuelle à la charge de l'employeur.

Le montant de cette rémunération est au moins égal à 65 % de sa rémunération mensuelle brute moyenne soumise aux contributions mentionnées à l'article L. 5422-9 au titre des douze derniers mois précédant la notification du licenciement. Lorsqu'au cours de ces douze mois le salarié a exercé son emploi à temps partiel dans le cadre d'un congé parental d'éducation, d'un congé de proche aidant, d'un congé de présence parentale ou d'un congé de solidarité familiale, il est tenu compte, pour le calcul de la rémunération brute moyenne, du salaire qui aurait été le sien s'il avait exercé son activité à temps plein sur l'ensemble de la période.

Le montant de cette rémunération ne peut être inférieur à un salaire mensuel égal à 85 % du produit du salaire minimum de croissance prévu à l'article L. 3231-2 par le nombre d'heures correspondant à la durée collective de travail fixée dans l'entreprise.

Il ne peut non plus être inférieur à 85 % du montant de la garantie de rémunération versée par l'employeur en application des dispositions de l'article 32 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail.

Chaque mois, l'employeur remet au salarié un bulletin précisant le montant et les modalités de calcul de cette rémunération.

Le montant minimum de cette allocation est égal à 65 % de la rémunération brute moyenne perçue par l'intéressé sur laquelle ont été assises les contributions au régime d'assurance chômage au titre des 12 mois précédant la notification du licenciement.

En l'espèce, M. [I] [N] soutient qu'en prenant en compte un salaire de référence moyen de 3 908 euros, la rémunération versée par la SA Tapis Saint Maclou au titre de l'allocation de congé de reclassement ne pouvait pas être inférieure à 2 540,20 euros.

La durée du congé de reclassement étant de quatre mois et celle du préavis de 3 mois, M. [I] [N] pouvait prétendre à une allocation de reclassement d'un mois, soit 2528,50 euros (65% X 3890 euros).

Or, à l'examen des bulletins de salaire produits au débat, plus particulièrement du mois d'août ( période visée du 01 au 24/08/2018 date qui correspond à la date de sortie des effectifs), la SA Tapis Saint Maclou n'a versé aucune somme à M. [I] [N] à ce titre.

Il s'en déduit que M. [I] [N] est en droit de solliciter la somme de 2 528,50 euros au titre de l'allocation de reclassement, à l'exception de l'indemnité de congés payés, l'allocation n'étant pas de nature salariale.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce sens.

Sur les manquements de l'employeur pendant l'exécution du contrat de travail : heures supplémentaires et travail dissimulé :

Aux termes de l'article L3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.

À défaut d'éléments probants fournis par l'employeur, les juges se détermineront au vu des seules pièces fournies par le salarié.

Après analyses des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

En l'espèce, M. [I] [N] soutient avoir réalisé en 2017 159 heures supplémentaires et en 2018 36 heures supplémentaires qui ne lui ont pas été rémunérées.

A l'appui de son argumentation, M. [I] [N] produit au débat un décompte du nombre d'heures supplémentaires qu'il prétend avoir effectuées et non rémunérées par l'employeur concernant 2017 et 2018 et produit à cet effet des décomptes pour cette période sur lesquels il a mentionné le nombre d'heures supplémentaires avec la date du jour de travail correspondant, sans indiquer cependant l'heure de début et de fin de la journée travaillée et le temps de pause.

Manifestement, ces décomptes sont insuffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre utilement.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont jugé que le document produit par M. [I] [N] n'est pas suffisant pour établir la véracité des heures supplémentaires qu'il revendique.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

La demande d'indemnité forfaitaire sollicitée par M. [I] [N] au titre du travail dissimulé est sans objet.

Sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement dans des conditions vesatoires et discriminatoires :

M. [I] [N] soutient avoir subi un licenciement éprouvant, qu'il a été informé verbalement de la fermeture du magasin, qu'il a subi l'attentisme et la mauvaise foi de son employeur, qu'il a dû lui écrire à plusieurs reprises pour proposer son reclassement sur des postes disponibles en région Provence Alpes Côte d'Azur, ses conditions de travail jusqu'à la fermeture du magasin fin mars 2018 ont été déplorables : magasin vide de marchandises, absence de toute livraison, impossibilité de passer commandes pour les clients, devoir d'information à la clientèle sans savoir exactement les conditions de la fermeture du magasin, obligation de se rendre sur son lieu de travail en l'absence de travail et de clients. Bien qu'ayant accepté le congé de reclassement, M. [I] [N] indique n'avoir bénéficié d'aucun accompagnement, qu'il a fait l'objet d'une discrimination dans son reclassement, que les conditions de son licenciement lui ont causé un préjudice distinct et il sollicite des dommages et intérêts à hauteur de 15 000 euros.

La SA Tapis Saint Maclou prétend que, entre l'annonce du projet de fermeture du magasin en septembre 2017 et l'engagement de la procédure de licenciement, de nombreux échanges sont intervenus, formels et informels, que le sort des autres salariés du magasin n'a pas été scellé dès décembre 2017, que jusqu'au 12 avril 2018, M. [I] [N] disposait des moyens nécessaires pour travailler au sein du magasin de [Localité 7], que son licenciement est intervenu dans un bref délai après l'entretien préalable qui a eu lieu le 04 avril 2018 ; elle considère qu'elle n'a fait preuve d'aucune discrimination le concernant.

La SA Tapis Saint Maclou :

- fait référence :

* au courrier qu'elle a adressé à M. [I] [N] le 25/01/2018 et le 12 février 2018, desquels il ressort que ce dernier était informé depuis au moins le début de l'année 2018 du projet de fermeture du magasin et qu'ils échangeaient sur son éventuel reclassement,

* à la lettre de convocation de M. [I] [N] à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement datée du 19/03/2018,

* à la pièce n°19 produite par le salarié : un courriel envoyé par M. [I] [N] le 23/04/2018 'depuis jeudi 12 avril 2018 nous n'avons plus d'outil pour travailler. Aucune ligne téléphonique, ou intranet pour pouvoir communiquer avec notre employeur. Aucun outil de manutention...Magasin vide et nettoyé...'

* au courrier qu'elle a adressé à M. [I] [N] le 30/05/2018 dans lequel le poste de responsable de magasin à St Mitre les Remparts dans le département des Bouches du Rhône, qui est resté sans réponse avant la date butoire du 15/06/2018,

- produit un avenant au contrat de travail de M. [F] [S], vendeur, signé le 15/02/2018 qui prévoit sa mutation au magasin du [Localité 9], à compter du 1er avril 2018.

Au vu des éléments qui précèdent, il n'est pas relevé d'élément caractérisant un comportement fautif de nature vexatoire ni l'existence d'un préjudice distinct que M. [I] [N] aurait subi, le salarié n'a pas été informé au dernier moment de la fermeture du magasin et de la vente du bien immobilier qui a nécessité que le magasin soit vidé.

La demande de dommages et intérêts présentée par M. [I] [N] à ce titre n'est donc pas justifiée et sera donc rejetée.

Sur la demande relative aux documents de fin de contrat :

Il convient de faire droit à la demande de M. [I] [N] et d'ordonner à la SA Tapis Saint Maclou de lui remettre les documents de fin de contrat - bulletin de salaire, certificat de travail, attestation France Travail - conformes au dispositif du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière prud'homale et en dernier ressort ;

Confirme le jugement rendu le 31 mai 2022 par le conseil de prud'hommes d'Avignon en ce qu'il a :

- dit que le licenciement de M. [N] est bien reconnu comme un licenciement économique,

- dit que la société Tapis Saint Maclou a respecté les conditions de licenciement suite à un « licenciement économique »,

- dit que la société Tapis Saint Maclou a bien proposé des postes disponibles et équivalents à la catégorie d'emploi de M. [N],

- dit que la société Tapis Saint Maclou a bien respecté son obligation de reclassement,

- dit que la date effective de la rupture du contrat de travail est fixée au 24 avril 2018,

- dit que l'indemnité compensatrice de congés payés et les RTT afférents devront être calculés avec la date de fin de contrat au 24 avril 2018,

- dit que l'employeur n'a pas manqué à ses obligations en cours d'exécution du contrat de travail dans le paiement des heures supplémentaires,

- dit que les conditions du licenciement de M. [N] ne sont pas particulièrement vexatoires voire discriminatoires,

L'infirme pour le surplus,

Statuant sur les dispositions réformées et y ajoutant,

Condamne la SA Tapis Saint Maclou à payer à M. [I] [N] les sommes suivantes :

- 1 463,73 euros à titre de complément d'indemnité légale de licenciement,

- 5438,60 euros euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 2 528,50 euros à titre de complément d'allocation de reclassement,

Ordonne à la SA Tapis Saint Maclou de remettre à M. [I] [N] les documents de fin de contrat conformes au dispositif du présent arrêt,

Y ajoutant,

Condamne la SA Tapis Saint Maclou à payer à M. [I] [N] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne la SA Tapis Saint Maclou aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5ème chambre sociale ph
Numéro d'arrêt : 22/02137
Date de la décision : 25/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-25;22.02137 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award