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20/06/2024 | FRANCE | N°24/00566

France | France, Cour d'appel de Nîmes, Rétention_recoursjld, 20 juin 2024, 24/00566


Ordonnance N°542







N° RG 24/00566 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JHPM











J.L.D. NIMES

19 juin 2024













[T]





C/



LE PREFET DES BOUCHES-DU-RHONE











COUR D'APPEL DE NÎMES



Cabinet du Premier Président



Ordonnance du 20 JUIN 2024





Nous, Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre à la Cour d'Appel de NÎMES, désignée par le Premier Prési

dent de la Cour d'Appel de NÎMES pour statuer sur les appels des ordonnances des Juges des Libertés et de la Détention du ressort, rendues en application des dispositions des articles L 742-1 et suivants du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit de l'Asile ...

Ordonnance N°542

N° RG 24/00566 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JHPM

J.L.D. NIMES

19 juin 2024

[T]

C/

LE PREFET DES BOUCHES-DU-RHONE

COUR D'APPEL DE NÎMES

Cabinet du Premier Président

Ordonnance du 20 JUIN 2024

Nous, Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre à la Cour d'Appel de NÎMES, désignée par le Premier Président de la Cour d'Appel de NÎMES pour statuer sur les appels des ordonnances des Juges des Libertés et de la Détention du ressort, rendues en application des dispositions des articles L 742-1 et suivants du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit de l'Asile (CESEDA), assistée de Mme Ellen DRÔNE, Greffière,

Vu l'arrêté préfectoral ordonnant une obligation de quitter le territoire français en date du 22 juin 2022 notifié le même jour, ayant donné lieu à une décision de placement en rétention en date du 16 juin 2024, notifiée le même jour à 19h33 concernant :

M. [I] [E] [T]

né le 25 Mai 1994 à [Localité 4]

de nationalité Libyenne

Vu la requête reçue au Greffe du Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de Nîmes le 18 juin 2024 à 14h21, enregistrée sous le N°RG 24/2854 présentée par M. le Préfet des BOUCHES-DU-RHONE ;

Vu l'ordonnance rendue le 19 Juin 2024 à 13h01 par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal de NÎMES, qui a :

* Déclaré la requête recevable ;

* Ordonné la jonction des requêtes

* Rejeté la requête en contestation de placement en rétention

* Ordonné pour une durée maximale de 28 jours commençant 48H après la notification de la décision de placement en rétention, le maintien dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, de M. [I] [E] [T] ;

* Dit que la mesure de rétention prendra fin à l'expiration d'un délai de 28 jours à compter du 18 juin 2024 à 19h33,

Vu l'appel de cette ordonnance interjeté par Monsieur [I] [E] [T] le 19 Juin 2024 à 16h10 ;

Vu l'absence du Ministère Public près la Cour d'appel de NIMES régulièrement avisé ;

Vu la présence de Monsieur [F] [U], représentant le Préfet des BOUCHES-DU-RHONE, agissant au nom de l'Etat, désigné pour le représenter devant la Cour d'Appel en matière de Rétention administrative des étrangers, entendu en ses observations ;

Vu l'assistance de Madame [B] [M], interprète en langue arabe, inscrite sur la liste des experts de la cour d'appel de Nîmes,

Vu la comparution de Monsieur [I] [E] [T], régulièrement convoqué ;

Vu la présence de Me Patricia PERRIEN, avocat de Monsieur [I] [E] [T] qui a été entendue en sa plaidoirie ;

MOTIFS

Monsieur [I] [E] [T] a fait l'objet le 2 février 2022 d'une interdiction du territoire français pour cinq ans prononcée par le tribunal correctionnel de Béziers.

Il s'est vu notifier le 22 juin 2022 une obligation de quitter le territoire français prise le 22 juin 2022.

Le 16 juin 2024, un arrêté de Monsieur le Préfet des Bouches du Rhône de mise en situation de rétention administrative pris le même jour a été notifié à Monsieur [I] [E] [T].

Il a interjeté appel de l'ordonnance accordant la prolongation de sa rétention administrative, rendue par le Juge des Libertés et de la Détention de NÎMES le 19 juin 2024.

Sur l'audience Monsieur [I] [E] [T] fait valoir qu'il réside habituellement en Espagne, qu'il n'est arrivé en France que le 13 juin 2024 pour voir sa famille, qu'il est d'accord pour quitter la France et repartir en Espagne auprès de sa compagne.

Son Avocat s'en rapporte sur le moyen tiré de la vérification de la délégation de compétence du signataire de la requête saisissant le juge des libertés et de la détention et maintient les moyens soulevés devant le juge des libertés et de la détention.

Monsieur le Représentant du Préfet demande la confirmation de l'ordonnance dont appel.

Sur la recevabilité de la requête en prolongation :

L'article R.743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose qu'à

peine d'irrecevabilité, la requête est motivée, datée, signée et accompagnée de toutes pièces justificatives utiles ;

-il résulte des pièces de la procédure que l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français du Préfet des Hauts de Seine du 22 janvier 2022 qui fonde la décision de placement en rétention a bien été transmis avec la requête en prolongation ;

Ce moyen n'est pas fondé et la requête sera donc déclarée recevable ;

Sur la régularité de l'arrêté de placement en rétention

Attendu que conformément à l'article L 743-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, " en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, le juge des libertés et dc la détention saisi d'une demande sur ce motif ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la main levée du placement ou du maintien en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter substantiellement atteinte aux droits de l'étranger dont 1'effectivite n'a pu être rétablie par une régularisation intervenue avant la clôture des débats ".

En application de l'article L 141-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lorsque les dispositions du présent code prévoient qu'une information ou qu'une décision doit être communiquée à un étranger dans une langue qu'i1 comprend, cette information peut se faire soit au moyen de formulaires écrits dans cette langue, soit par 1'intermédiaire d'un interprète.

L'assistance de l'interprète est obligatoire si l'étranger ne parle pas le français et qu'i1 ne sait pas lire.

En cas de nécessité, l'assistance de l'interprète peut se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunication. Dans une telle hypothèse, il ne peut être fait appel qu'à un interprète inscrit sur une liste établie par le procureur de la République ou à un organisme d'interprétariat et de traduction agrée par l'administration. Le nom et les coordonnées de l'interprète ainsi que la langue utilisée sont indiqués par écrit à l'étranger.

En l'espèce, 1'arrête du 16 juin 2024 portant placement en rétention noti'é le 16 juin 2024 à 19h33 indique sur la décision noti'ée que 1'etranger a béné'cié d'un interprète "par téléphone" sans autre précision ;

Il résulte cependant des autres mentions et pièces du dossier que l'agent notifiant est le gardien de la paix [A] [J] du commissariat de [Localité 2], laquelle a assisté à la réalisation du procès-verbal de 'n de garde à vue dans lequel le nom de l'interprète ayant assisté le gardé à vue au cours de cet acte est précisé, s'agissant de Mme [H] [C] ;

Au vu de la concomitance de réalisation des actes de procès-verbal de 'n de garde à vue et de noti'cation de placement en rétention, il se déduit que le même interprète a assisté Monsieur [I] [E] [T] pour la noti'cation du placement en rétention et que l'absence de mention du nom de l'interprète sur la noti'cation ne porte aucun grief à l'intéressé ;

En outre, Mme [H] [C] apparaît régulièrement inscrite sur une liste établie par le procureur de la république ou agrée par 1'administration ;

En conséquence, le moyen sera rejeté ;

SUR LES MOYENS NOUVEAUX ET ÉLÉMENTS NOUVEAUX INVOQUÉS EN CAUSE D'APPEL:

L'article 563 du Code de Procédure Civile dispose : «  Pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves. »

L'article 565 du même Code précise : «  Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent ».

Sauf s'ils constituent des exceptions de procédure, au sens de l'article 74 du Code de Procédure Civile les moyens nouveaux sont donc recevables en cause d'appel.

Il est de jurisprudence constante que constituent des exceptions de procédure, au sens de l'article 74, alinéa 1er, du Code de Procédure Civile, les exceptions prises de la violation des dispositions liées à la procédure préalable au placement en rétention.

L'article 73 du Code de Procédure Civile dispose : «  Constitue une exception de procédure tout moyen qui tend soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours »; il peut s'agir d'un moyen de nullité affectant la régularité de la procédure en cause en référence à un texte légal définissant les règles de forme.

Aux termes de l'article 74, alinéa 1er du Code de Procédure Civile : « Les exceptions doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir. Il en est ainsi alors même que les règles invoquées au soutien de l'exception seraient d'ordre public ».

Pour être recevable en appel, les exceptions de nullité relatives aux contrôles d'identité, conditions de la garde à vue ou de la retenue et d'une manière générale celles tenant à la procédure précédant immédiatement le placement en rétention doivent avoir été soulevées in « limine litis » en première instance.

A contrario les exceptions de procédure, si elles n'ont pas été soulevées avant toute défense au fond devant le Juge des Libertés et de la Détention en première instance, ne peuvent l'être pour la première fois devant la Cour d'Appel.

Sur l'irrégularité de la requête saisissant le juge des libertés et de la détention :

Il est produit par la préfecture l'arrêté du préfet des Bouches du Rhône en date du 10 octobre 2023 d'où il ressort que le signataire de la requête saisissant le juge des libertés et de la détention en vue de la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [I] [E] [T] avait bien délégation de signature.

Le moyen doit être rejeté

SUR LE FOND :

L'article L511-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose des cas dans lesquels un étranger peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, d'une interdiction de retour sur le territoire français et d'une interdiction de circulation sur le territoire français; l'article L511-4 dispose de manière limitative des cas ne pouvant faire l'objet d'une obligation contraignante de quitter le territoire français.

L'article L554-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose: « Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration doit exercer toute diligence à cet effet. »

Au motif de fond sur son appel Monsieur [I] [E] [T] soutient qu'il est de nationalité libyenne et non algérienne et que le renvoyer en Lybie pays en guerre constituerait un traitement inhumain et dégradant et qu'il souhaite retourner en Espagne où il vit depuis plusieurs années.

Il ressort toutefois des pièces de la procédure que Monsieur [I] [E] [T] ne peut justifier d'aucun domicile, d'aucune ressource sur le territoire français, qu'il ne dispose d'aucune garantie de représentation permettant d'assigner à résidence ou de s'assurer de ce qu'il va quitter le territoire français.

En effet Monsieur [I] [E] [T] ne présente pas de garanties suffisantes de représentation :

-les déclarations faites devant la cour sont différentes sur l'identité et le parcours de l'intéressé de celles faites durant toute la procédure de garde à vue ;

-il prétend que sa situation en Espagne pourra être régularisée mais il ne produit aucun justificatif

-Monsieur [I] [E] [T] ne justi'e pas d'une résidence effective et permanente ;

-il est sans ressources licites et ne peut justi'er être en capacite de 'nancer son retour dans son pays d'origine, précisant travailler de manière non déclarée ;

-il est entre de manière irrégulière sur le territoire français il y a quatre ans et n'a effectué aucune démarche de régularisation ;

Il s'en déduit que le risque que Monsieur [I] [E] [T] se soustraie à l'obligation de quitter le territoire prise à son encontre est constant.

Il convient par voie de conséquence de confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort,

Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,

Vu les articles L.741-1, L.742-1 à L.743-9 ; R.741-3 et R.743-1 à R.743-19, L.743.21 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

DÉCLARONS recevable l'appel interjeté par Monsieur [I] [E] [T] ;

CONFIRMONS l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;

RAPPELONS que, conformément à l'article R.743-20 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile, les intéressés peuvent former un pourvoi en cassation par lettre recommandée avec accusé de réception dans les deux mois de la notification de la présente décision à la Cour de cassation [Adresse 1].

Fait à la Cour d'Appel de NÎMES,

le 20 Juin 2024 à

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

' Notification de la présente ordonnance a été donnée ce jour au Centre de rétention administrative de [Localité 3] à M. [I] [E] [T], par l'intermédiaire d'un interprète en langue arabe.

Le à H

Signature du retenu

Copie de cette ordonnance remise, ce jour, par courriel, à :

- Monsieur [I] [E] [T], par le Directeur du CRA de [Localité 3],

- Me Patricia PERRIEN, avocat

,

- M. Le Préfet des BOUCHES-DU-RHONE

,

- M. Le Directeur du CRA de [Localité 3],

- Le Ministère Public près la Cour d'Appel de NIMES,

- Mme/M. Le Juge des libertés et de la détention.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : Rétention_recoursjld
Numéro d'arrêt : 24/00566
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 27/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;24.00566 ?
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