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14/06/2024 | FRANCE | N°24/00541

France | France, Cour d'appel de Nîmes, Rétention_recoursjld, 14 juin 2024, 24/00541


Ordonnance N°519







N° RG 24/00541 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JHHG











J.L.D. NIMES

12 juin 2024













[O]





C/



LE PREFET DE L'HERAULT











COUR D'APPEL DE NÎMES



Cabinet du Premier Président



Ordonnance du 14 JUIN 2024





Nous, Mme Alexandra BERGER, Conseillère à la Cour d'Appel de NÎMES, désignée par le Premier Président de la Cour d'

Appel de NÎMES pour statuer sur les appels des ordonnances des Juges des Libertés et de la Détention du ressort, rendues en application des dispositions des articles L 742-1 et suivants du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit de l'Asile (CESEDA), assistée...

Ordonnance N°519

N° RG 24/00541 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JHHG

J.L.D. NIMES

12 juin 2024

[O]

C/

LE PREFET DE L'HERAULT

COUR D'APPEL DE NÎMES

Cabinet du Premier Président

Ordonnance du 14 JUIN 2024

Nous, Mme Alexandra BERGER, Conseillère à la Cour d'Appel de NÎMES, désignée par le Premier Président de la Cour d'Appel de NÎMES pour statuer sur les appels des ordonnances des Juges des Libertés et de la Détention du ressort, rendues en application des dispositions des articles L 742-1 et suivants du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit de l'Asile (CESEDA), assistée de Mme Ellen DRÔNE, Greffière,

Vu l'arrêté préfectoral ordonnant une obligation de quitter le territoire français en date du 28 février 2024 notifié le 29 février 2024, ayant donné lieu à une décision de placement en rétention en date du 07 juin 2024, notifiée le 10 juin 2024 à 09h10 concernant :

M. [N] [O]

né le 19 Avril 1989 à [Localité 2]

de nationalité Marocaine

Vu la requête reçue au Greffe du Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de Nîmes le 11 juin 2024 à 10h36, enregistrée sous le N°RG 24/2755 présentée par M. le Préfet de l'Hérault ;

Vu l'ordonnance rendue le 12 Juin 2024 à 12h56 par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal de NÎMES, qui a :

* Déclaré la requête recevable ;

* Rejeté les exceptions de nullité soulevées ;

* Ordonné pour une durée maximale de 28 jours commençant 48H après la notification de la décision de placement en rétention, le maintien dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, de M. [N] [O] ;

* Dit que la mesure de rétention prendra fin à l'expiration d'un délai de 28 jours à compter du 12 juin 2024 à 09h10,

Vu l'appel de cette ordonnance interjeté par Monsieur [N] [O] le 13 Juin 2024 à 11h48 ;

Vu l'absence du Ministère Public près la Cour d'appel de NIMES régulièrement avisé ;

Vu la présence de Monsieur [D] [S], représentant le Préfet de l'Hérault, agissant au nom de l'Etat, désigné pour le représenter devant la Cour d'Appel en matière de Rétention administrative des étrangers, entendu en ses observations ;

Vu l'assistance de Mme [C] [K], interprète en langue arabe, inscrite sur la liste des experts de la cour d'appel de Nîmes,

Vu la comparution de Monsieur [N] [O], régulièrement convoqué ;

Vu la présence de Me Saâdia ESSAKHI, avocat de Monsieur [N] [O] qui a été entendue en sa plaidoirie ;

MOTIFS

Monsieur [N] [O] a reçu notification le 29 février 2024 d'un arrêté du Préfet de l'Hérault du 28 février 2024 lui faisant obligation de quitter le territoire national sans délai avec interdiction de retour pendant cinq ans.

A sa levée d'écrou le 10 juin 2024, lui a également été notifié son placement en rétention en vertu d'un arrêté pris par la préfecture de l'Hérault le 7 juin 2024.

Par requête du 11 juin 2024, le Préfet de l'Hérault a saisi le Juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Nîmes d'une demande en prolongation de la mesure.

Par ordonnance prononcée le 12 juin 2024, à 12h56, le Juge des libertés et de la détention de Nîmes a rejeté les exceptions de nullité soulevées ainsi que les moyens présentés par Monsieur [N] [O] et ordonné la prolongation de sa rétention administrative pour vingt-huit jours.

Monsieur [N] [O] a interjeté appel de cette ordonnance le 13 juin 2024, à 11h48.

Sur l'audience, Monsieur [N] [O] déclare que :

- cela fait 25 ans qu'il est en France, sa famille est en France, il ne connaît plus le Maroc, raison pour laquelle il a refusé l'embarquement, puis il a été ramené en détention à [Localité 3],

- son fils est scolarisé à [Localité 3], au collège,

- il propose de rester en France.

Son avocat soutient que :

- sur le fond, la situation du retenu est difficile car il est arrivé mineur en France, il a des pièces qui sont des garanties de représentation avec une attestation d'hébergement, ses frères et s'urs résident en France, il a un enfant de 12 ans scolarisé à [Localité 3].

Monsieur le Préfet pris en la personne de son représentant demande la confirmation de l'ordonnance dont appel :

- le retenu n'est plus régulier, il y a un passé consulaire, le retenu a refusé le vol, l'OQTF a été contestée devant le TA qui a confirmé l'OQTF,

- le retenu n'a pas de passeport en cours de validité, et le retenu ne doit aps refusé de vol.

SUR LA RECEVABILITE DE L'APPEL :

L'appel interjeté par Monsieur [N] [O] à l'encontre d'une ordonnance du Juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de Nîmes a été relevé dans les délais légaux et conformément aux dispositions des articles L.743-21, R.743-10 et R.743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Il est donc recevable.

SUR LES MOYENS NOUVEAUX ET ÉLÉMENTS NOUVEAUX INVOQUÉS EN CAUSE D'APPEL :

L'article 563 du code de procédure civile dispose : «  Pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves. »

L'article 565 du même code précise : «  Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent ».

Sauf s'ils constituent des exceptions de procédure, au sens de l'article 74 du code de procédure civile, les moyens nouveaux sont donc recevables en cause d'appel.

A l'inverse, pour être recevables en appel, les exceptions de nullité relatives aux contrôles d'identité, conditions de la garde à vue ou de la retenue et d'une manière générale celles tenant à la procédure précédant immédiatement le placement en rétention doivent avoir été soulevées in « limine litis » en première instance.

Par ailleurs, le contentieux de la contestation de la régularité du placement en rétention (erreur manifeste d'appréciation de administration ou défaut de motivation) ne peut être porté devant la cour d'appel que s'il a fait l'objet d'une requête écrite au juge des libertés et de la détention dans les 48 heures du placement en rétention, sauf à vider de leur sens les dispositions légales de l'article R.741.3 du CESEDA imposant un délai strict de 48h et une requête écrite au Juge des libertés et de la détention.

En l'espèce, Monsieur [N] [O] soutient des moyens de nullité soulevés en première instance, in limine litis, ainsi qu'une irrecevabilité de la requête en prolongation de la mesure pour défaut de qualité de son signataire. Ces moyens sont recevables.

SUR LES EXCEPTIONS DE NULLITÉ AU TITRE D'IRRÉGULARITÉS DE LA PROCÉDURE ANTÉRIEURE A L'ARRÊTÉ :

L'article L.743-12 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose: « En cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, le juge des libertés et de la détention saisi d'une demande sur ce motif ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée de la mesure de placement en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger. »

Ainsi une irrégularité tirée de la violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation de formalités substantielles ne peut conduire à une mainlevée de la rétention que si elle a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger.

Sur la notification des droits de la rétention administrative et le transport au centre de rétention :

C'est par des motifs pertinents qu'il convient d'adopter que le juge de première instance rejette les moyens repris dans la déclaration d'appel en ce que la procédure de notification des droits a été régulièrement observée, que c'est en raison d'un refus d'embarquer du retenu sur un vol prévu à sa levée d'écrou que celui-ci a été transporté, pendant un délai temps dont il n'est pas démontré le caractère excessif, au centre de rétention de [Localité 3] ; les droits notifiés n'ayant vocation à être exercés qu'à compter de l'arrivée en rétention. Le moyen n'étant pas fondé, il sera rejeté.

SUR LA RECEVABILITE DE LA REQUETE EN PROLONGATION :

- en ce que son signataire n'aurait pas compétence pour ce faire :

Monsieur [N] [O] soutient qu'il appartient au juge judiciaire de vérifier la compétence du signataire de la requête en prolongation et la mention des empêchements éventuels des délégataires de signature. En l'espèce, le signataire de la requête ne serait pas compétent.

C'est à tort qu'il est argué de l'incompétence du signataire de la requête en prolongation signée pour le Préfet de l'Hérault le 11 juin 2024 par Madame [G] [I], cheffe de la section éloignement, alors qu'est précisément joint à cette requête un arrêté préfectoral en date du 5 décembre 2023 lui portant délégation de signature.

L'apposition de sa signature sur ladite requête présuppose l'empêchement des autres personnes ayant délégation par préférence, le retenu ne démontrant pas le contraire alors qu'en application de l'article 9 du code de procédure civile c'est bien à lui qu'il incombe d'apporter la preuve du bienfondé de ses prétentions.

Le moyen d'irrecevabilité doit donc être écarté.

SUR LE FOND :

L'article L.611-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose des cas dans lesquels un étranger peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et/ou l'article L.612-6 du même code d'une interdiction de retour sur le territoire français tandis que l'article L611-3 du même code liste de manière limitative les situations dans lesquelles de telles mesures sont exclues.

L'article L.741-3 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise qu'en tout état de cause «un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet.»

En l'espèce, l'administration a fait les diligences nécessaires pour obtenir un vol le 10 juin dernier sur lequel le retenu a refusé d'embarquer. Le laissez-passer obtenu des autorités marocaines est valable jusqu'au mois d'août 2024.

Il s'en déduit qu'il y a lieu de dire et juger que l'administration n' a pas failli à ses obligations.

SUR LA SITUATION PERSONNELLE DE MONSIEUR [N] [O] :

Monsieur [N] [O] refuse de quitter le territoire national pour regagner le seul pays où il a des droits. Au surplus, il y a lieu de relever un parcours pénal particulièrement lourd puisque le retenu a été condamné à de très nombreuses reprises pour des faits commis en France. Manifestement, le retenu ne présente aucune conditions pour bénéficier d'une mesure d'assignation à résidence. Le moyen tiré de ce que la mesure porte atteinte à son droit à une vie privée et familiale est inopérant puisqu'il vise en réalité à contester la mesure d'éloignement, mesure qui ne peut faire l'objet d'un recours que devant le tribunal administratif.

Il s'en déduit que la prolongation de sa rétention administrative demeure justifiée et nécessaire aux fins qu'il puisse être procédé effectivement à son éloignement.

Il convient par voie de conséquence de confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort,

Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,

Vu les articles L.741-1, L.742-1 à L.743-9 ; R.741-3 et R.743-1 à R.743-19, L.743.21 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

DÉCLARONS recevable l'appel interjeté par Monsieur [N] [O] ;

CONFIRMONS l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;

RAPPELONS que, conformément à l'article R.743-20 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile, les intéressés peuvent former un pourvoi en cassation par lettre recommandée avec accusé de réception dans les deux mois de la notification de la présente décision à la Cour de cassation [Adresse 1].

Fait à la Cour d'Appel de NÎMES,

le 14 Juin 2024 à

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

' Notification de la présente ordonnance a été donnée ce jour au Centre de rétention administrative de [Localité 3] à M. [N] [O], par l'intermédiaire d'un interprète en langue arabe.

Le à H

Signature du retenu

Copie de cette ordonnance remise, ce jour, par courriel, à :

- Monsieur [N] [O], par le Directeur du CRA de [Localité 3],

- Me Saâdia ESSAKHI, avocat

,

- M. Le Préfet de l'Hérault

,

- M. Le Directeur du CRA de [Localité 3],

- Le Ministère Public près la Cour d'Appel de NIMES,

- Mme/M. Le Juge des libertés et de la détention.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : Rétention_recoursjld
Numéro d'arrêt : 24/00541
Date de la décision : 14/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-14;24.00541 ?
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