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16/05/2024 | FRANCE | N°23/01147

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5e chambre pole social, 16 mai 2024, 23/01147


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 23/01147 - N° Portalis DBVH-V-B7H-IYTI



CRL/DO



POLE SOCIAL DU TJ D'AVIGNON

30 juin 2022



RG :21/00103





CAF DU VAUCLUSE



C/



[E]



















Grosse délivrée le 16 MAI 2024 à :



- CAF VAUCLUSE

- M. [E]











COUR D'APPEL

DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social



ARRÊT DU 16 MAI 2024





Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ d'AVIGNON en date du 30 Juin 2022, N°21/00103



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application d...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 23/01147 - N° Portalis DBVH-V-B7H-IYTI

CRL/DO

POLE SOCIAL DU TJ D'AVIGNON

30 juin 2022

RG :21/00103

CAF DU VAUCLUSE

C/

[E]

Grosse délivrée le 16 MAI 2024 à :

- CAF VAUCLUSE

- M. [E]

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social

ARRÊT DU 16 MAI 2024

Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ d'AVIGNON en date du 30 Juin 2022, N°21/00103

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

A l'audience publique du 05 Mars 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 16 Mai 2024.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

CAF DU VAUCLUSE

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Mme [V] [W] en vertu d'un pouvoir spécial

INTIMÉ :

Monsieur [H] [E]

né le 04 Août 1952 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Comparant en personne

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 16 Mai 2024, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES

La Caisse d'allocations familiales de Vaucluse a procédé à une enquête concernant la situation de Mme [L] et a conclu le 27 septembre 2019 à l'existence d'une vie maritale de cette dernière avec M. [H] [E] à compter du 1er octobre 2011.

Elle a ensuite procédé au réexamen des prestations auxquelles le couple pouvait prétendre et a notifié plusieurs indus pour un montant global de 12.402,63 euros.

Sur saisine de l'allocataire, la Commission de Recours Amiable de la Caisse d'allocations familiales de Vaucluse, dans sa séance du 16 décembre 2019 confirmait le montant de l'indu.

Le 15 janvier 2020, la Caisse d'allocations familiales de Vaucluse notifiait à nouveau à Mme [L] et à M. [H] [E] le montant de l'indu, soit la somme de 12.402,63 euros.

Le 10 mars 2020, la Caisse d'allocations familiales de Vaucluse notifiait à Mme [L] et à M. [H] [E] une pénalité financière d'un montant de 1.100 euros.

Le 15 octobre 2020, la Caisse d'allocations familiales de Vaucluse mettait en demeure Mme [L] et M. [H] [E] de lui régler la somme de 12.402,63 euros au titre des différents indus et une somme de 1.000 euros correspondant au solde de la pénalité financière.

Faute de règlement du montant de l'indu, la Caisse d'allocations familiales de Vaucluse a émis le 25 janvier 2021 à l'encontre de M. [H] [E] et de Mme [L] deux contraintes signifiées le 8 février 2021, soit :

* une contrainte pour un montant de 12.402,63 euros correspondant à :

- 3.352,86 euros de prime d'activité versée pour la période du 01/01/2018 au 30/09/2019,

- 1.724,67 euros de prime d'activité versée pour la période du 01/10/2016 au 31/12/2017,

- 2.934 euros d'aide personnelle au logement pour la période du 01/10/2017 au 30/09/2019

- 1.755 euros d'aide personnelle au logement pour la période du 01/10/2016 au 30/09/2017

- 1.349,70 euros d'allocation de soutien familial pour la période du 01/10/2017 au 30/09/2018

- 1.286,40 euros d'allocation de soutien familial pour la période du 01/10/2016 au 30/09/2017,

* une contrainte pour un montant de 1.100 euros correspondant à 1000 euros de pénalités et 100 euros de majorations de retard.

M. [H] [E] a saisi par lettre recommandée avec avis de réception adressée le 10 février 2021, le tribunal judiciaire d'Avignon d'une opposition à ces deux contraintes.

Par jugement du 30 juin 2022, le tribunal judiciaire d'Avignon a :

- annulé l'indu ASF (1349, 7 + 1286, 4 euros) et la pénalité financière (1100 euros) mentionnés sur les contraintes du 25 janvier 2021,

- débouté la Caisse d'Allocation Familiale de ses demandes sur ces deux points,

- laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée le 16 décembre 2020, la Caisse d'Allocation Familiale de Vaucluse a interjeté appel de cette décision. Enregistrée sous le numéro RG 22 03101, l'affaire a été radiée, suivant ordonnance du 9 février 2023. Après avoir été ré-enrôlée le 4 avril 2023 , sous le RG 23 01146, l'examen de cette affaire a été appelé à l'audience du 5 mars 2024.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, la Caisse d'Allocation Familiale de Vaucluse demande à la cour :

- d'infirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire d'Avignon le 30 juin 2022,

- de valider les contraintes pour un montant de 2.636,10 euros au titre de l'allocation de soutien familial et pour un montant de 1.100 euros au titre de la pénalité de fraude.

Au soutien de ses demandes l'organisme social fait valoir que :

- aucun recours n'a été formé devant le tribunal administratif concernant les indus de prime d'activité et d'aide personnelle au logement ,

- les constatations des agents enquêteurs ont valeur probante sauf à en rapporter la preuve contraire,

- la communauté de vie entre M. [H] [E] et Mme [L] est établie en raison de l'existence d'une communauté d'adresse, même si l'intimé déclare avoir une adresse distincte, une communauté de vie et d'intérêt, l'intimé s'occupant de l'ensemble des démarches administratives de Mme [L] et de son enfant, ils s'occupent mutuellement l'un de l'autre, et bénéficient d'un apport affectif réciproque,

- l'intérêt financier est caractérisé par le fait notamment que M. [H] [E] bénéficie d'une procuration sur les comptes bancaires de Mme [L], il assume ses frais de loyer ou de dépassement d'honoraires hospitaliers,

- la thèse de la solidarité et de l'entraide soutenue par M. [H] [E] est largement dépassée,

- l'indu est par suite caractérisé, de même que la fraude est caractérisée et justifie le montant de la pénalité financière.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, M. [H] [E] demande à la cour de confirmer le jugement déféré annulant les sommes mises à sa charge et explique qu'il est âgé et qu'il a rencontré Mme [L] alors qu'il était encore marié et que lui-même ancien alcoolique, il a décidé de l'aider alors qu'elle vivait recluse avec son fils, afin d'éviter le placement de ce dernier.

Il conteste toute communauté de vie et d'intérêts, expliquant vivre dans son propre appartement, sans vaisselle parce qu'il ne mange que des plats préparés, sans beaucoup consommer d'eau parce qu'il est économe et fait peu de ménage car vivant seul il ne salit pas.

Il précise que Mme [L] n'est pas en capacité de faire elle-même ses démarches administratives ou financières, et qu'il les effectue à sa place, y compris pour son enfant, mais avec son accord. Il précise enfin qu'il la considère comme une soeur et non comme une compagne.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS

A titre liminaire, il sera rappelé que la cour n'est compétente que pour connaître de l'indu au titre de l'allocation de soutien familial et pour la pénalité de fraude.

Selon l'article 515-8 du code civil, le concubinage est une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple.

Conformément à l'article L 262-9 alinéa 3 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction applicable au litige, est considérée comme personne isolée toute personne veuve, divorcée, séparée ou célibataire, qui ne vit pas en couple de manière notoire et permanente et qui notamment ne met pas en commun avec un conjoint, concubin ou partenaire de pacte civil de solidarité, ses ressources et ses charges. Lorsque l'un des membres du couple réside à l'étranger, n'est pas considéré comme isolé celui qui réside en France.

La vie maritale doit s'entendre comme la situation de fait consistant dans la vie commune de deux personnes ayant décidé de vivre comme des époux sans pour autant s'unir par le mariage. Dans la vie maritale doivent être retrouvées les caractéristiques de l'état de mariage, à savoir les droits et obligations des époux en fait, soit l'adresse commune en référence à l'article 2015 du code civil, la contribution de chaque partie aux charges du ménage et à l'entretien des enfants éventuels, l'assistance mutuelle en référence aux articles 212, 213 et 214 du code civil.

La Caisse d'allocations familiales qui apporte la preuve qu'un allocataire a vécu maritalement pendant une période peut prétendre au remboursement des prestations calculées en fonction de son état de personne isolée.

En l'espèce, il résulte des éléments recueillis dans le cadre du contrôle domiciliaire effectué par l'agent assermenté de la Caisse d'allocations familiales le 27 septembre 2019 que:

- lors de la visite de contrôle au domicile de Mme [L], celle-ci a ' immédiatement contacté son ami [H]' car elle affirme ne pas savoir gérer ses démarches administratives', lequel s'est présenté et a mené exclusivement l'entretien,

- M. [H] [E] lui a expliqué qu'il assurait les démarches concernant l'enfant de Mme [L], accompagnement pour l'ouverture de son compte bancaire, démarches MDPH, devis et démanches pour le contrat de mutuelle de l'enfant, inscription de l'enfant à l'IME, est désigné comme personne référente pour l'enfant depuis 2015,

- M. [H] [E] effectue les travaux de rénovation de la cuisine pour que Mme [L] se sente bien chez elle,

- M. [H] [E] assume la gestion financière et administrative de Mme [L] : il dispose d'une procuration bancaire sur ses comptes, est caution du paiement des loyers, assume le paiement des loyers depuis janvier 2018, assume les frais médicaux de Mme [L], la gestion administrative de Mme [L] auprès de la Caisse Primaire d'assurance maladie, la Caisse d'allocations familiales, la MPDH, l'établissement bancaire,

- l'examen des comptes bancaires ne montre pas de remboursement des sommes versées par M. [H] [E],

- M. [H] [E] récupère dans l'appartement les différents documents demandés lors du contrôle,

- la présence d'effets personnels de M. [H] [E] est constatée malgré le fait que lui-même dispose d'un logement.

Pour remettre en cause ces constatations, M. [H] [E] qui n'en conteste pas la matérialité explique soutenir Mme [L] qui avait sombré dans l'alcoolisme et vivait recluse, et la considérer comme une soeur. Il précise qu'il l'aide parce qu'elle n'est pas en capacité de se gérer seule et de s'occuper de son fils, et qu'il agit ainsi par solidarité et pour éviter que l'enfant ne soit placé.

Ceci étant, force est de constater que M. [H] [E] procède par affirmation pour remettre en cause les constatations précises et détaillées effectuées par l'agent assermenté de la Caisse d'allocations familiales et qu'il n'apporte aucun élément permettant d'objectiver ses allégations. Il ne fournit notamment aucune explication quant au fait que ses effets personnels sont présents chez Mme [L], ou que disposant de ressources modestes il finance toutefois son loyer et de multiples dépenses.

Au surplus, force est de constater que M. [H] [E] n'a pas contesté le montant de l'indu de la compétence du tribunal administratif, relatif à la prime d'activité et à l'aide personnelle au logement.

Par suite, c'est à juste titre que la Caisse d'allocations familiales a retenu l'existence d'une vie maritale entre M. [H] [E] et Mme [L], laquelle justifie le montant de l'indu au titre de l'allocation de soutien familial et l'existence d'une fraude dans les déclarations établies à destination de l'organisme social justifiant le prononcé de la pénalité financière.

La décision déférée sera infirmée en ce sens.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, en matière de sécurité sociale, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Infirme le jugement rendu le 30 juin 2022 par le tribunal judiciaire d'Avignon - Contentieux de la protection sociale,

et statuant à nouveau, dans la limite de sa compétence,

Valide les contraintes en date du 25 janvier 2021 émises par la Caisse d'allocations familiales de Vaucluse à l'encontre de M. [H] [E] et signifiées le 8 février 2021, correspondant aux sommes de :

- 1.349,70 euros d'allocation de soutien familial pour la période du 01/10/2017 au 30/09/2018

- 1.286,40 euros d'allocation de soutien familial pour la période du 01/10/2016 au 30/09/2017,

- 1000 euros de pénalités financières et 100 euros de majorations de retard,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne M. [H] [E] aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5e chambre pole social
Numéro d'arrêt : 23/01147
Date de la décision : 16/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-16;23.01147 ?
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