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25/04/2024 | FRANCE | N°22/02311

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5e chambre pole social, 25 avril 2024, 22/02311


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 22/02311 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IPZV



CRL/DO



POLE SOCIAL DU TJ DE NIMES

12 mai 2022



RG :21/00612





CPAM DU GARD



C/



[R]



















Grosse délivrée le 25 AVRIL 2024 à :



- CPAM GARD

- Me BRUN











COUR D'APPEL DE NÃ

ŽMES



CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social



ARRÊT DU 25 AVRIL 2024





Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de NIMES en date du 12 Mai 2022, N°21/00612



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'a...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/02311 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IPZV

CRL/DO

POLE SOCIAL DU TJ DE NIMES

12 mai 2022

RG :21/00612

CPAM DU GARD

C/

[R]

Grosse délivrée le 25 AVRIL 2024 à :

- CPAM GARD

- Me BRUN

COUR D'APPEL DE NÃŽMES

CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social

ARRÊT DU 25 AVRIL 2024

Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de NIMES en date du 12 Mai 2022, N°21/00612

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

A l'audience publique du 23 Janvier 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 04 Avril 2024 et prorogé ce jour.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

CPAM DU GARD

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Mme [K] en vertu d'un pouvoir spécial

INTIMÉ :

Monsieur [Z] [R]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représenté par Me Géraldine BRUN de la SELARL P.L.M.C AVOCATS, avocat au barreau de NIMES

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 25 Avril 2024, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 13 mars 2017, suite à une analyse médicale de son activité par l'échelon local du service médical de la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard, M. [Z] [R], masseur kinésithérapeute, s'est vu notifier un indu d'un montant de 42.387,82 euros pour non-respect de la Nomenclature générale des actes professionnels.

Le 15 mars 2019, la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard lui a adressé une mise en demeure du même montant.

Sur saisine de M. [Z] [R], la Commission de Recours Amiable de la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard, dans sa séance du 26 septembre 2019, a rejeté le recours.

M. [Z] [R] a saisi la juridiction de sécurité sociale d'un recours contre cette décision, et par jugement du 10 mars 2021, le tribunal judiciaire de Nîmes a ordonné la radiation de l'affaire.

Par lettre recommandée avec avis de réception adressée le 24 juin 2021, la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard a notifié a M. [Z] [R] une contrainte d'un montant de 46.626, 64 euros correspondant à 42.387,82 euros en principal et 4.238,78 euros en majorations de retard.

M. [Z] [R] a saisi par lettre recommandée avec avis de réception adressée le 30 juillet 2021, le tribunal judiciaire de Nîmes, contentieux de la protection sociale d'une opposition à cette contrainte.

Par jugement du 12 mai 2022, le tribunal judiciaire de Nîmes ( RG 21/612 - Minute 22/427), désormais compétent pour connaître de ce litige, a :

- déclaré recevable l'opposition formée par M. [Z] [R],

- reçu l'opposition de M. [Z] [R],

- annulé la contrainte délivrée le 24 juin 2021, par la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard à M. [Z] [R],

- rejeté la demande de dommages et intérêts de M. [Z] [R],

- rejeté les autres demandes plus amples ou contraires,

- rappelé que les décisions du tribunal judiciaire statuant sur opposition à contrainte sont exécutoire de droit à titre provisoire,

- condamné la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard aux entiers dépens,

- condamné la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard à verser 500 euros à M. [Z] [R] au titre des frais irrépétibles.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée le 5 juillet 2022, la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard a interjeté appel de cette décision. Enregistrée sous le numéro RG 22 02311 l'examen de cette affaire a été appelé à l'audience du 11 octobre 2023 et déplacé à l'audience du 23 janvier 2024.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard demande à la cour de :

- réformer purement et simplement le jugement du tribunal judiciaire notifié le 13 mai 2022,

- lui décerner acte de ce qu'elle a fait une exacte application des textes en vigueur,

- à titre principal, déclarer irrecevable l'opposition à contrainte formée par M. [Z] [R] au motif de défaut de motivation,

- à titre subsidiaire, rejeter purement et simplement l'opposition à contrainte formée par M. [Z] [R],

- valider la contrainte en date du 24 juin 2021 et condamner en conséquence M. [Z] [R] au paiement de la somme de 46.626, 64 euros,

- condamner M. [Z] [R] au paiement de la somme de 1.000 euros au titre l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeter toutes les demandes de M. [Z] [R].

Au soutien de ses demandes la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard fait valoir que :

- l'opposition à contrainte formée par M. [Z] [R] est irrecevable faute d'être motivée,

- la décision des premiers juges d'annuler les opérations de contrôle faute pour l'organisme social d'avoir transmis à M. [Z] [R] la charte de contrôle ne repose sur aucun fondement légal et est contraire à la jurisprudence,

- les irrégularités qui sont apparues lors du contrôle médical sont de trois types : cumul de plusieurs cotations pour une même séance, cotations non conformes et cotations d'actes hors nomenclature,

- le conseil de l'ordre tant au plan régional que national a confirmé les irrégularités et a condamné M. [Z] [R] à une interdiction d'exercer temporaire.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, M. [Z] [R] demande à la cour de:

A titre principal

- juger l'appel diligenté par la CPAM du Gard infondé

- confirmer le jugement du 12 mai 2022, dont appel, en ce qu'il :

- Déclare recevable l'opposition formée par M. [Z] [R] ;

- Reçoit l'opposition formée par M. [Z] [R] ;

- Annule la contrainte délivrée le 24 juin 2021 par la caisse primaire d'assurance maladie du Gard à M. [Z] [R]

- Rejette la demande de dommages et intérêts de M. [Z] [R] ;

- Rejette les autres demandes plus amples ou contraires ;

- Rappelle que les décisions du tribunal judiciaire statuant sur opposition à contrainte sont exécutoires de droit à titre provisoire ;

- Condamne la caisse primaire d'assurance maladie du Gard aux entiers dépens ;

- Condamne la caisse primaire d'assurance maladie du Gard à verser 500 euros à M. [Z] [R] au titre des frais irrépétibles.

En conséquence :

- rejeter les demandes, fins et prétentions de la CPAM.

- condamner la CPAM du Gard au paiement de la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

A titre subsidiaire, si par extraordinaire, votre Juridiction estime la contrainte du 24 juin 2021 non nulle pour vice de forme.

- constater que le service du contrôle médical n'a pas fait une bonne application des textes en vigueur et de la nomenclature en particulier.

- juger qu'il a parfaitement respecté ses obligations et mentionné les bonnes nomenclatures.

- juger l'indu réclamé par la CPAM infondé et abusif.

En conséquence :

- annuler la contrainte du 24 juin 2021,

- rejeter l'intégralité des demandes, fins et prétentions de la CPAM,

- condamner la CPAM à lui régler la somme de 3.000 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'interdiction d'exercer prononcée à son encontre durant 6 semaines résultant d'une mauvaise interprétation des textes et des pathologies rencontrées,

- condamner la CPAM à lui régler la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses demandes, M. [Z] [R] fait valoir que :

- son opposition à contrainte était parfaitement motivée et par suite a été justement déclarée recevable par le premier juge,

- sur la forme du contrôle, il n'a non seulement pas été destinataire de la charte du cotisant, mais n'a pas non plus été informé que ses patients allaient être entendus, seulement que les dossiers les concernant allaient être consultés, ces irrégularités entachent de nullité la procédure de contrôle et donc l'indu subséquent qui doit être annulé,

- les griefs retenus ne sont pas caractérisés, il n'existe aucun cumul de cotations puisqu'il s'agit de patients pris en charge pour deux traitement distincts, avec des temps thérapeutiques différents, et concernant les actes hors nomenclature, il n'a fait qu'appliquer les prescriptions des médecins prescripteurs,

- le préjudice à l'origine de sa demande de dommages et intérêts résulte de l'interdiction d'exercer dont il a fait l'objet suite à ce contrôle.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS

* sur la recevabilité de l'opposition à contrainte

Par application des dispositions de l'article R 133-1 du code de la sécurité sociale l'opposition à contrainte doit, à peine d'irrecevabilité, être motivée.

En l'espèce, M. [Z] [R] a saisi le tribunal judiciaire de Nîmes par requête adressée le 30 juillet 2021 ainsi formulée :

' par la présente je conteste formellement la contrainte n°1707429464 d'une part parce que le montant en principal sollicité au titre de cette dernière fait l'objet d'une opposition devant le tribunal ( RG n°19/01152 - dossier radié par jugement du 10/03/21 mais susceptible de remise au rôle ) et d'autre part parce que je suis en total désaccord avec les arguments et les conclusions du service médicale de la CPAM du Gard.

Je suis en désaccord sur la forme, avec certains points de procédure douteux, notamment sur l'information du professionnel de santé, sur les patients interrogés et sur l'interprétation souvent inexacte par le médecin conseil des attestations des patients interrogés.

Et sur le fond, je conteste l'argumentation avancée par le médecin conseil contrôleur dans ce dossier. Il n'est pas tenu compte des modalités de prise en charge des patients présentant des pathologies respiratoires lourdes impliquant une rééducation beaucoup plus longue, globale et technique.

Il n'est pas tenu compte non plus des prescriptions pourtant détaillées et distinctes des médecins prescripteurs, qu'ils soient pneumologues ou chirurgiens thoraciques pour la plupart.

Pour quelques patients enfin, le médecin conseil considère qu'il a été réalisé une rééducation cardiaque en cabinet alors que l'objectif était simplement le maintien de l'autonomie, le médecin prescripteur considérant en amont qu'une prise en charge en centre spécialisé n'était pas justifiée'.

Ainsi, contrairement à ce que soutient la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard, l'opposition à contrainte est motivée et par suite recevable.

La décision déférée ayant déclaré M. [Z] [R] recevable en son opposition à contrainte sera confirmée sur ce point.

* sur la régularité formelle du contrôle

Par application des dispositions de l'article R 315-1 III du code de la sécurité sociale, lorsque, à l'occasion de l'analyse de l'activité d'un professionnel de santé effectuée en application du IV de l'article L. 315-1, le service du contrôle médical constate le non-respect de dispositions législatives ou réglementaires régissant la prise en charge des frais médicaux au titre des risques maladie, maternité, invalidité, accidents du travail et maladies professionnelles, ou de règles de nature législative, réglementaire ou conventionnelle que les professionnels sont tenus d'appliquer dans leur exercice, les procédures prévues notamment aux articles L. 133-4 et L. 145-1, au 4° du deuxième alinéa de l'article L. 162-9, à l'article L. 162-12-6, au 6° du deuxième alinéa de l'article L. 162-12-9 et aux articles L. 162-12-16 et L. 315-3 sont mises en oeuvre.

Le service du contrôle médical exerce ses missions dans les conditions définies par le présent chapitre et par le chapitre 6 du titre VI du livre Ier.

L'article R315-1-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable à la date du contrôle, précise que lorsque le service du contrôle médical procède à l'analyse de l'activité d'un professionnel de santé en application du IV de l'article L. 315-1, il peut se faire communiquer, dans le cadre de cette mission, l'ensemble des documents, actes, prescriptions et éléments relatifs à cette activité.

Dans le respect des règles de la déontologie médicale, il peut consulter les dossiers médicaux des patients ayant fait l'objet de soins dispensés par le professionnel concerné au cours de la période couverte par l'analyse. Il peut, en tant que de besoin, entendre et examiner ces patients. Il en informe au préalable le professionnel, sauf lorsque l'analyse a pour but de démontrer l'existence d'une fraude telle que définie à l'article R. 147-11, d'une fraude en bande organisée telle que définie à l'article R. 147-12 ou de faits relatifs à un trafic de médicaments. Un bilan annuel des cas où le professionnel n'a pas été informé préalablement, incluant les suites données pour chaque cas, est adressé aux conseils nationaux des ordres concernés par chaque caisse nationale.

Et l'article R315-1-2 du même code mentionne qu'à l'issue de cette analyse, le service du contrôle médical informe le professionnel concerné de ses conclusions. Lorsque le service du contrôle médical constate le non-respect de règles législatives, réglementaires ou conventionnelles régissant la couverture des prestations à la charge des organismes de sécurité sociale, il en avise la caisse. La caisse notifie au professionnel les griefs retenus à son encontre, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Dans le délai d'un mois qui suit la notification des griefs, l'intéressé peut demander à être entendu par le service du contrôle médical.

Par ailleurs, l'article R 147-11 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige indique que sont qualifiés de fraude, pour l'application de l'article L. 114-17-1, les faits commis dans le but d'obtenir ou de faire obtenir un avantage ou le bénéfice d'une prestation injustifiée au préjudice d'un organisme d'assurance maladie, d'une caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles ou, s'agissant de la protection complémentaire en matière de santé, de l'aide au paiement d'une assurance complémentaire de santé ou de l'aide médicale de l'Etat, d'un organisme mentionné à l'article L. 861-4 ou de l'Etat, y compris dans l'un des cas prévus aux sections précédentes(.... ) la facturation répétée d'actes ou prestations non réalisés, de produits ou matériels non délivrés.

M. [Z] [R] invoque les dispositions de la charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé pour soutenir que les opérations de contrôle sont entachées d'irrégularité et par suite de nullité faute de respecter deux dispositions de cette charte :

- le préambule qui prévoit l'envoi de celle-ci au moment des premières demandes de renseignement,

- le point 3.2.5 qui concerne les ' spécificités de l'analyse d'activité d'un professionnel de santé' qui mentionne la nécessité en référence à l'article L 315-1V du code de la sécurité sociale d'informer le professionnel avant l'audition et l'examen des patients.

La Caisse Primaire d'assurance maladie conclut au respect de cette charte, non génératrice de droit, dès lors que dans le courrier d'information adressé à M. [Z] [R] étaient mentionnés les références de la charte, le lien pour la consulter sur le site Ameli.fr et la possibilité d'en solliciter un exemplaire papier, ce qu'il n'a pas sollicité, ainsi que les noms des patients dont les dossiers allaient être examinés.

Force est de constater qu'il n'existe aucune disposition légale qui prévoit la nullité des opérations de contrôle d'un professionnel de santé en cas de non respect de la charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé, laquelle a été jugée par la Cour de cassation comme étant dépourvue de toute portée normative ( 2ème Civ. 16/03/2023 Pourvoi n°21-11.471).

Par suite, les éventuels manquements de l'organisme social ne peuvent dès lors se résoudre qu'en dommages et intérêts qui ne sont pas en l'état sollicités.

En conséquence, aucune nullité n'entache le contrôle ainsi effectué, et la procédure de recouvrement d'indu subséquente. La décision déférée ayant annulé la contrainte litigieuse pour ce motif sera infirmée en ce sens.

* sur le fond

L'article L133-4 du Code de la sécurité sociale, dans sa version applicable, dispose qu'en cas d'inobservation des règles de tarification ou de facturation :

1° Des actes, prestations et produits figurant sur les listes mentionnées aux articles L162-1-7, L162-17, L165-1, L162-22-7 ou relevant des dispositions des articles L162-22-1et L162-22-6;

2° Des frais de transports mentionnés à l'article L321-1,

l'organisme de prise en charge recouvre l'indu correspondant auprès du professionnel ou de l'établissement à l'origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l'assuré, à un autre professionnel de santé ou à un établissement.

Il en est de même en cas de facturation en vue du remboursement, par les organismes d'assurance maladie, d'un acte non effectué ou de prestations et produits non délivrés.

Lorsque le professionnel ou l'établissement faisant l'objet de la notification d'indu est également débiteur à l'égard de l'assuré ou de son organisme complémentaire, l'organisme de prise en charge peut récupérer la totalité de l'indu. Il restitue à l'assuré et, le cas échéant, à son organisme complémentaire les montants qu'ils ont versés à tort.

L'action en recouvrement, qui se prescrit par trois ans, sauf en cas de fraude, à compter de la date de paiement de la somme indue, s'ouvre par l'envoi au professionnel ou à l'établissement d'une notification de payer le montant réclamé ou de produire, le cas échéant, leurs observations.

En cas de rejet total ou partiel des observations de l'intéressé, le directeur de l'organisme d'assurance maladie adresse, par lettre recommandée, une mise en demeure à l'intéressé de payer dans le délai d'un mois. La mise en demeure ne peut concerner que des sommes portées sur la notification.

Lorsque la mise en demeure reste sans effet, le directeur de l'organisme peut délivrer une contrainte qui, à défaut d'opposition du débiteur devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, comporte tous les effets d'un jugement et confère notamment le bénéfice de l'hypothèque judiciaire. Une majoration de 10 % est applicable aux sommes réclamées qui n'ont pas été réglées aux dates d'exigibilité mentionnées dans la mise en demeure. Cette majoration peut faire l'objet d'une remise.

Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application des trois alinéas qui précèdent.

Le régime de la preuve propre au contentieux du recouvrement de l'indu engagé par les organismes d'assurance maladie à l'encontre des professionnels et établissements de santé obéit aux principes directeurs suivants :

- il incombe à l'organisme d'assurance maladie qui est à l'initiative de la demande d'indu, de rapporter la preuve du bien fondé de sa demande, et plus précisément, du non-respect des règles de tarification et de facturation des actes, soins et prestations litigieux par le professionnel ou l'établissement de santé,

- le professionnel ou l'établissement de santé peut discuter les éléments de preuve produits par l'organisme à l'appui de sa demande,

- il appartient, enfin, au juge du fond, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve soumis par les parties, de se prononcer sur le bien fondé, dans leur principe et dans leur montant, des sommes réclamées.

Il résulte de l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale que la prise en charge ou le remboursement par l'assurance maladie de tout acte ou prestation réalisé par un professionnel de santé est subordonnée à leur inscription sur une liste des actes et des prestations. Les actes professionnels auxiliaires médicaux susceptibles de donner lieu à prise en charge par l'assurance maladie sont définis par la Nomenclature générale des actes professionnels (NGAP) annexée à l'arrêté ministériel du 27 mars 1972 modifié.

Il est de jurisprudence constante que la NGAP est d'interprétation stricte.

Depuis la modification de la NGPA par l'arrêté du 4 octobre 2000, la facturation de deux actes de kinésithérapie exécutés lors d'une même séance n'est plus possible ainsi que cela résulte du dernier alinéa des dispositions liminaires du titre XIV de la NGPA : 'A chaque séance s'applique donc une seule cotation, correspondant au traitement de la pathologie ou du territoire anatomique en cause. Il découle de ces dispositions liminaires spécifiques que, sauf exception prévue par les textes, il n'est pas possible d'appliquer une seconde cotation pour une même séance'.

Il résulte de la NGAP, dans sa version applicable à la date du contrôle, pour les actes de kinésithérapie les spécificités suivantes :

- Modalités de rémunération du bilan-diagnostic kinésithérapique : La cotation en AMS, AMK ou AMC du bilan est forfaitaire. Elle ne peut être appliquée que pour un nombre de séances égal ou supérieur à 10, soit :

* 8,1 AMS, AMK ou AMC pour un Bilan-diagnostic kinésithérapique pour un nombre de séances compris entre 10 et 20, puis de nouveau toutes les 20 séances pour traitement de rééducation et de réadaptation fonctionnelle figurant au chapitre II ou III, sauf exception ci-dessous.

* 10,1 AMK ou AMC pour un Bilan-diagnostic kinésithérapique pour un nombre de séances compris entre 10 et 50, puis de nouveau toutes les 50 séances pour traitement de rééducation des conséquences des affections neurologiques et musculaires, en dehors des atteintes périphériques radiculaires ou tronculaires.

- Rééducation des conséquences des affections respiratoires

* 8 AMK ou AMC pour la rééducation des maladies respiratoires avec désencombrement urgent (bronchiolite du nourrisson, poussée aiguë au cours d'une pathologie respiratoire chronique) ; Les séances peuvent être réalisées au rythme de deux par jour et la durée est adaptée en fonction de la situation clinique. Par dérogation aux dispositions liminaires du titre XIV, dans les cas où l'état du patient nécessite la conjonction d'un acte de rééducation respiratoire (pour un épisode aigu) et d'un acte de rééducation d'une autre nature, les dispositions de l'article 11 B des Dispositions générales sont applicables à ces deux actes

* 8 AMK ou AMC pour la rééducation des maladies respiratoires, obstructives, restrictives ou mixtes (en dehors des situations d'urgence)

* 8 AMK ou AMC pour la rééducation respiratoire pré-opératoire ou post-opératoire 8 AMK ou AMC

* 10 AMK ou AMC pour la prise en charge kinésithérapique respiratoire du patient atteint de mucoviscidose, comprenant : - la kinésithérapie respiratoire de ventilation et de désencombrement, - la réadaptation à l'effort, - l'apprentissage de l'aérosolthérapie, des méthodes d'autodrainage bronchique, des signes d'alertes respiratoires. La fréquence des séances de kinésithérapie dépend de l'âge et de l'état clinique du patient pouvant aller jusqu'à 2 séances par jour en cas d'encombrement important ou d'exacerbation. Lorsque 2 séances non consécutives sont réalisées dans la même journée, chaque séance est cotée AMK 10.

- Rééducation des conséquences des affections orthopédiques et rhumatologiques (actes affectés de la lettre clé AMS)

* 7,5 AMS ou 7 K pour la rééducation d'un membre et de sa racine, quelles que soient la nature et la localisation de la pathologie traitée (la cotation est la même, que la rééducation porte sur l'ensemble du membre ou sur un segment de membre)

* 9,5 AMS ou 9 K pour la rééducation de tout ou partie de plusieurs membres, ou du tronc et d'un ou plusieurs membres.

Le régime de ces exceptions est régi par l'article 11 B des Dispositions Générales de la NGAP qui mentionne notamment : ' Lorsqu'au cours d'une même séance, plusieurs actes inscrits à la nomenclature sont effectués sur un même malade par le même praticien, l'acte du coefficient le plus important est seul inscrit avec son coefficient propre.

Le deuxième acte est ensuite noté à 50% de son coefficient. Toutefois, le second acte est noté à 75% de son coefficient en cas d'intervention de chirurgie soit pour lésions traumatiques multiples et récentes, soit portant sur des membres différents, ou sur le tronc ou la tête et un membre.

Les actes suivant le second ne donnent pas lieu à honoraires et n'ont pas à être notés sur la feuille de maladie. Toutefois, en cas de lésions traumatiques multiples et récentes, le troisième acte opératoire éventuel est exceptionnellement noté à 50% de son coefficient...

En cas d'actes multiples au cours de la même séance, le praticien ne doit pas noter le coefficient global, mais les coefficients correspondant à chacun des actes effectués.

Exemple : Soit un acte coté K 20 et un acte coté K 10 effectué dans la même séance, la feuille de maladie doit être annotée K 20 + K 10/2 et non K 25

afin de permettre le contrôle médical et, le cas échéant, l'application de la règle prévue au paragraphe B de l'article 8..'.

Par ailleurs, le manquement éventuel de la caisse à son obligation de conseil n'est susceptible que d'engager sa responsabilité civile, non de faire échec à l'application des règles tarifaires.

En l'espèce, la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard reproche à M. [Z] [R] :

- des cotations non conformes et des cumuls de cotations pour une même séance concernant 58 dossiers,

- des cotations d'actes hors nomenclature dans 11 dossiers

* s'agissant des cotations non conformes et des cumuls de cotations pour une même séance

La Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard reproche à M. [Z] [R] dans 58 dossiers d'avoir appliqué deux cotations pour la même séance, dont une cotation 9,5AMS réservée à la rééducation des conséquences des affections orthopédiques et rhumatismales, alors que les patients concernés ne présentaient pas de telles pathologies.

Elle lui reproche également d'avoir coté des bilans de kinésithérapie en 10,1AMK alors que les conditions n'étaient pas remplies et qu'ils devaient être cotés en 8,1 AMK.

M. [Z] [R] soutient qu'il pratiquait pour les patients concernés par cette double cotation deux séances distinctes, une consacrée à la rééducation respiratoire cotée 8/2 AMK et une consacrée à la rééducation des membres inférieurs cotée 9,5AMS et fait observer que la durée effective de prise en charge pouvant aller jusqu'à deux heures, dans deux salles différentes et l'intervention sur des zones distinctes du corps des patients et avec des objectifs thérapeutiques différents justifient à la fois la double cotation appliquée et les types de cotations retenues.

Il se réfère en ce sens à des publications scientifiques valorisant une telle pratique ou à des certificats médicaux soulignant la qualité de sa prise en charge, sans que cela ne permette toutefois de remettre en cause les critères de la NGAP, étant rappelé d'une part que ce n'est pas la qualité de la prise en charge qui est contestée mais les modalités d'application de la NGAP, et d'autre part que l'existence de deux lignes de prescription distinctes sur une même ordonnance est sans incidence sur les cotations à appliquer.

Il invoque par ailleurs l'évolution de la nomenclature spécifique à ce type de prise en charge globale chez des patients nécessitant une rééducation tant respiratoire que musculaire, ce qui est sans incidence sur le présent litige, les droits à prise en charge étant fonction de la NGAP applicable à la date des actes concernés.

Enfin, contrairement à ce que soutient M. [Z] [R], les exceptions permettant la double cotation ne concernent pas ces types de prise en charge.

* s'agissant des cotations d'actes hors nomenclature

La Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard reproche à M. [Z] [R] dans le cadre de 11 dossiers de prise en charge d'avoir appliqué cette même cotation 9,5 AMS et 8/2 pour des prises en charge de rééducation cardio-respiratoire alors que le cumul est impossible et que la cotation appliquée ne correspond pas à ce type de prise en charge, au profit de patient présentant une maladie cardio-vasculaire, laquelle ne peut intervenir qu'en milieu spécialisé, soit dans les centres de réadaptation cardiaque.

Outre les arguments invoqués supra sur lesquels il a déjà été débattu, M. [Z] [R] indique qu'il n'a fait qu'appliquer les prescriptions dont bénéficiaient ces patients.

Toutefois, ce dernier argument ne remet pas en cause le fait que la NGAP ne lui permettait de procéder à une telle cotation.

Enfin, il convient de constater que les Chambres disciplinaires du conseil régional puis du conseil national de l'Ordre des masseurs kinésithérapeutes ont également retenu les mêmes griefs reprochés à M. [Z] [R] par la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard, confortant la position de l'organisme social sur la réalité des anomalies qu'il a retenues.

Au vu de l'ensemble de ces considérations, il se déduit que M. [Z] [R] ne remet pas en cause utilement l'ensemble des anomalies relevées par le service médical et retenues par la Caisse primaire d'assurance maladie du Gard à son encontre.

Le montant de l'indu n'est pas contesté à titre subsidiaire par M. [Z] [R].

Il convient, en conséquence, de valider la contrainte délivrée le 24 juin 2021 par la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard à l'encontre de M. [Z] [R] pour un montant de 46.626, 64 euros correspondant à 42.387,82 euros en principal et 4.238,78 euros en majorations de retard, et par suite, de condamner M. [Z] [R] au paiement de cette somme.

L'indu notifié à M. [Z] [R] par la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard étant confirmé, celui-ci sera également débouté de sa demande de dommages et intérêts en raison du préjudice résultant de l'interdiction professionnelle qui a été prononcée à son encontre à titre ordinal sur la base des investigations de l'organisme social.

La décision déférée sera confirmée sur ce point.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, en matière de sécurité sociale, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Infirme le jugement rendu le 12 mai 2022 par le tribunal judiciaire de Nîmes - Contentieux de la protection sociale sauf en ce qu'il a

- déclaré recevable l'opposition formée par M. [Z] [R],

- rejeté la demande de dommages et intérêts de M. [Z] [R],

et statuant à nouveau sur les éléments infirmés,

Valide la contrainte en date du 24 juin 2021 émise par la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard à l'encontre de M. [Z] [R] pour un montant de 46.626, 64 euros correspondant à 42.387,82 euros en principal et 4.238,78 euros en majorations de retard,

Condamne M. [Z] [R] à verser à la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard la somme de 46.626, 64 euros,

Condamne M. [Z] [R] à verser à la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard la somme de 800 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne M. [Z] [R] aux dépens de première instance et d'appel

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5e chambre pole social
Numéro d'arrêt : 22/02311
Date de la décision : 25/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-25;22.02311 ?
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