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06/07/2023 | FRANCE | N°21/00514

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5e chambre pole social, 06 juillet 2023, 21/00514


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 21/00514 - N° Portalis DBVH-V-B7F-H54F



CRL/DO



POLE SOCIAL DU TJ DE PRIVAS

21 janvier 2021



RG :19/00597





S.A.R.L. [3]



C/



URSSAF RHONES ALPES



















Grosse délivrée le 06 Juillet 2023 à :



- Me DEMOLY

- Me NISOL









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COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social



ARRÊT DU 06 JUILLET 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de PRIVAS en date du 21 Janvier 2021, N°19/00597



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les pl...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/00514 - N° Portalis DBVH-V-B7F-H54F

CRL/DO

POLE SOCIAL DU TJ DE PRIVAS

21 janvier 2021

RG :19/00597

S.A.R.L. [3]

C/

URSSAF RHONES ALPES

Grosse délivrée le 06 Juillet 2023 à :

- Me DEMOLY

- Me NISOL

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social

ARRÊT DU 06 JUILLET 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de PRIVAS en date du 21 Janvier 2021, N°19/00597

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

A l'audience publique du 28 Mars 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 08 Juin 2023 et prorogé ce jour.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

S.A.R.L. [3]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Frédéric DEMOLY, avocat au barreau D'ARDECHE

INTIMÉE :

URSSAF RHONES ALPES

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Pierre-luc NISOL de la SELARL ACO, avocat au barreau de VIENNE

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 06 Juillet 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 15 décembre 2017, la DIRECCTE Auvergne Rhône Alpes a établi un procès-verbal de travail dissimulé à l'encontre de la S.A.R.L. [3], et de M. [I] son responsable pénal pour avoir employé Mme [P] [N] du 9 au 10 août 2017 au moins sans déclaration préalable à l'embauche, lequel procès-verbal a été transmis aux services de l'URSSAF Rhône Alpes.

Par une lettre d'observations du 6 févier 2018, l'URSSAF a fait part de son projet de procéder au redressement de la S.A.R.L. [3], portant sur les points suivants:

- point n°1 : travail dissimulé avec verbalisation - dissimulation d'emploi salarié - absence DPAE et/ou BP (exploitation procédure d'un partenaire) : 4.646 euros,

- point n°2 : annulation des réductions générales de cotisation suite au constat de travail dissimulé : 1.821 euros,

- point n°3 : annulation de la réduction du taux de la cotisation AF sur les bas salaires suite au constat de travail dissimulé : 159 euros.

Le 14 août 2018, l'URSSAF Rhône Alpes a mis en demeure la S.A.R.L. [3] de lui régler, ensuite de ce contrôle, la somme de 8.223 euros.

La S.A.R.L. [3] a contesté cette mise en demeure en saisissant la Commission de Recours Amiable de l'URSSAF, laquelle dans sa séance du 27 septembre 2019 a maintenu l'ensemble des chefs de redressement.

Par requête en date du 14 novembre 2019, la S.A.R.L. [3] a saisi le tribunal de grande instance de Privas d'un recours contre la décision de la Commission de Recours Amiable.

Par jugement en date du 21 janvier 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Privas, désormais compétent pour connaître de ce litige, a :

- confirmé la décision de commission de recours amiable du 27 septembre 2019,

- débouté la S.A.R.L. [3] de sa demande en annulation du redressement,

- condamné la S.A.R.L. [3] à payer à l' URSSAF Rhône-Alpes la somme de 8.223 euros au titre du rappel de cotisation et majoration de retard suite au redressement opéré selon lettre d'observations du 6 février 2018,

- condamné la S.A.R.L. [3] à payer à l' URSSAF Rhône-Alpes la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la S.A.R.L. [3] au paiement des dépens.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée le 5 février 2021, la S.A.R.L. [3] a régulièrement interjeté appel de cette décision. Enregistrée sous le numéro RG 21 01514, l'examen de cette affaire a été appelé à l'audience du 28 mars 2023.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, la S.A.R.L. [3] demande à la cour de :

- déclarer recevable et bien fondé son appel à l'encontre du jugement rendu le 21 janvier 2021 par le Pôle Social du tribunal judiciaire de Privas,

- déclarer recevable et bien fondé son recours,

- annuler les redressements notifiés à elle,

- statuer ce que de droit sur les dépens.

Au soutien de ses demandes, la S.A.R.L. [3] fait valoir que:

- elle abandonne le premier moyen soutenu en première instance quant à l'absence d'accès aux procès-verbaux établis par la DIRECCTE,

- une seule personne sur les dix salariés en situation de travail était en situation exceptionnellement irrégulière,

- Mme [P] [N] a été embauchée en urgence en qualité d'extra et a été rémunérée pour le travail qu'elle a effectué, et qui est mentionné sur son bulletin de paie, ce qu'elle confirme dans l'attestation produite aux débats,

- le défaut de DPAE s'explique par le contexte difficile dans lequel elle a été embauchée, deux heures avant le début de la soirée,

- par suite, un redressement sur une évaluation forfaitaire est inadapté, puisque le redressement est de 8.223 euros pour un salaire de 257,93 euros, et les éléments produits permettent de connaître exactement le nombre d'heures effectuées par la salariée,

- la situation de Mme [N] a été régularisée et M. [I], son gérant, a été condamné à une amende de composition pénale de 300 euros,

- un redressement d'un tel montant la mettrait en péril, son activité ayant été fortement impactée par la crise sanitaire.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, l'URSSAF Rhône Alpes demande à la cour de :

-débouter la S.A.R.L. [3] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- y ajoutant, condamner la S.A.R.L. [3] à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses demandes, l'URSSAF Rhône Alpes fait valoir que :

- la situation de travail dissimulé a été constatée par procès-verbal de la DIRECCTE au moins pour la période du 9 au 10 août 2017, et le redressement de cotisations a été établi forfaitairement sur la base de ce procès-verbal,

- la régularisation a posteriori du contrôle n'empêche pas les poursuites et le redressement forfaitaire,

- même si la S.A.R.L. [3] produit un bulletin de salaire pour le mois d'août 2017 et un reçu pour solde de tout compte daté du 31/08/2017, cela ne permet pas de connaître la réalité de la relation de travail en amont du contrôle à l'occasion duquel aucun contrat de travail ou bulletin de salaire n'a pu être fourni,

- l'annulation des réductions générales de cotisations est la conséquence de la constatation des faits de travail dissimulé.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS

Chef de redressement n°1 : travail dissimulé avec verbalisation - dissimulation d'emploi salarié - absence DPAE et/ou BP (exploitation procédure d'un partenaire) : 4.646 euros,

L'autorité de la chose jugée au pénal s'impose au juge civil relativement aux faits constatés qui constituent le soutien nécessaire de la condamnation pénale, que ce principe oblige seulement le juge civil en cas de condamnation pénale, à retenir comme établis les faits, objets de la prévention.

Lorsque la décision du juge répressif se borne à constater l'absence d'intention frauduleuse, le juge civil n'est pas privé du pouvoir d'apprécier les faits qui lui sont soumis.

Une décision de relaxe ne s'impose aux juridictions civiles que dans la mesure de ce qui a été nécessairement jugé, ainsi une décision de relaxe qui relève que les faits reprochés ne sont pas établis s'impose au juge civil. Lorsque le juge pénal relaxe tout en retenant que les faits reprochés sont établis, les juges du fond apprécient souverainement si les faits reprochés dans le cadre de la demande portée devant eux sont identiques à ceux ayant fait l'objet des poursuites pénales.

En revanche, une décision de classement sans suite, qui relève du pouvoir d'opportunité des poursuites du Procureur de la République, ne revêt aucune autorité de la chose jugée, et ne peut pas être assimilé à une décision de relaxe.

Enfin, s'agissant des actions civiles relatives au travail dissimulé, l'action en recouvrement de cotisations contre le cotisant, auteur de l'infraction, introduite par l'URSSAF devant les juridictions sociales, n'a pas le même objet ni la même cause que la demande de dommages et intérêts que cet organisme porte devant le juge répressif.

En outre, il convient de rappeler que lorsque le redressement procède du constat d'infraction de travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié, il a pour objet exclusif le redressement des cotisations afférentes à cet emploi, sans qu'il soit nécessaire d'établir l'intention frauduleuse de l'employeur, le contrôle n'ayant pas pour finalité de poursuivre une sanction mais de recouvrer les cotisations dues, de sorte qu'en l'absence de décision de relaxe définitive sur le fondement des procès-verbaux de la DIRECCTE qui mentionnerait expressément que les faits reprochés ne sont pas établis, les constatations effectuées par leurs rédacteurs, qui sont des agents assermentés, ne sont pas remises en cause et la procédure de redressement de cotisations reste fondée.

En l'espèce, suite à la transmission au Parquet du procès-verbal de la DIRECCTE, M. [I], responsable pénal de la S.A.R.L. [3], a fait l'objet d'une composition pénale et a été condamné à une amende de 300 euros.

* s'agissant du point n°1: travail dissimulé - dissimulation d'emploi salarié - exploitation de la procédure d'un partenaire: 3.789 euros,

En référence au procès-verbal établi par la DIRECCTE le 15 décembre 2017, les inspecteurs du recouvrement mentionnent que le 10 août 2017 ' les investigations ont mis en évidence l'emploi de Mme [N] [P] (...) En qualité d'extra ( plongeuse ) depuis le 09/08/2017 au moins (....) N'a pas fait l'objet d'une déclaration préalable à l'embauche auprès des services de l'URSSAF. Ce n'est que le lendemain que cette formalité pourtant obligatoire a été effectuée par son employeur. Ces faits caractérisent l'infraction de travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié.

(...) Les éléments recueillis lors des constats opérés le 10/08/2017 par les services de la DIRECCTE ne permettent pas de connaître de façon certaine le montant de la rémunération versée ou dues au(x) intéressé(s)' avant d'en déduire qu'il convient de procéder à une régularisation de cotisation sur une assiette forfaitaire.

Pour remettre en cause le redressement opéré sur une évaluation forfaitaire de la rémunération, et donc justifier de la durée réelle d'emploi et du montant exact de la rémunération versée à Mme [N], la S.A.R.L. [3] produit :

- un bulletin de salaire au nom de cette dernière pour la période du 1er au 31 août 2017, avec une ancienneté au 1er août 2017, pour 52 heures travaillées dont il est déduit 28 heures d'absence, soit 24 heures travaillées pour un salaire net de 184,42 euros, la rémunération ne comprenant pas de prime de précarité alors qu'il est soutenu un emploi en contrat de travail à durée déterminée,

- un reçu pour solde de tout compte comprenant une indemnité compensatrice de congés payés de 23,45 euros bruts,

- une attestation manuscrite de Mme [N] qu'elle a été recrutée pour effectuer la plonge dans le restaurant de M. [I], et qu'elle n'a pas travaillé au-delà des heures rémunérées et régularisées lors du contrôle.

Force est de constater que la régularisation partielle de la situation est intervenue postérieurement aux opérations de contrôles par les inspecteurs de la DIRECCTE, ce qui ne permet pas de connaître la réalité de la situation d'emploi de Mme [N] antérieurement au contrôle, étant observé qu'elle ne donne aucune précision de date dans son attestation et que le bulletin de salaire mentionne une embauche au 1er août 2017 .

En conséquence, c'est à juste titre que les premiers juges ont validé ce chef de redressement, et leur décision sera confirmée sur ce point.

* s'agissant du point n°2 : annulation des réductions générales de cotisation suite au constat de travail dissimulé : 1.821 euros, et du point n°3 : annulation de la réduction du taux de la cotisation AF sur les bas salaires suite au constat de travail dissimulé : 159 euros. .

Par application des dispositions de l'article L 133-4-2 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige issue de la loi n°2014-1554 du 22 décembre 2014, le bénéfice de toute mesure de réduction et d'exonération, totale ou partielle, de cotisations de sécurité sociale ou de contributions dues aux organismes de sécurité sociale, appliquée par un employeur ou un travailleur indépendant, est subordonné au respect par l'employeur ou le travailleur indépendant des dispositions des articles L. 8221-1 et L. 8221-2 du code du travail.

C'est donc à juste titre que les premiers juges ont confirmé ces deux chefs de redressement et leur décision sera confirmée sur ces points.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, en matière de sécurité sociale, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 21 janvier 2021 par le tribunal judiciaire de Privas,

Condamne la S.A.R.L. [3] à verser à l'URSSAF Rhône Alpes la somme de 1.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne la S.A.R.L. [3] aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5e chambre pole social
Numéro d'arrêt : 21/00514
Date de la décision : 06/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-06;21.00514 ?
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