RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 19/03840 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HQG7
YRD/JL
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MENDE
11 septembre 2019
RG :R19/00012
S.A.R.L. MATOSES
C/
[C]
Grosse délivrée le 20 JUIN 2023 à :
- Me VAJOU
- Me DOMERGUE
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 20 JUIN 2023
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Mende en date du 11 Septembre 2019, N°R19/00012
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président,
Madame Leila REMILI, Conseillère,
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère.
GREFFIER :
Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier à la 5ème chambre sociale, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉBATS :
A l'audience publique du 24 Mai 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 20 Juin 2023.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTE :
SARL MATOSES
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Nicolas PEROUX de la SCP JUDICIA AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMÉ :
Monsieur [D] [C]
né le 03 Avril 1959 à [Localité 6]
[Adresse 5]
[Localité 1]
Représenté par Me Jacques DOMERGUE, avocat au barreau de LOZERE
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 20 Juin 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
M. [D] [C], salarié de la société Matoses depuis le mois de mai 1988, a fait l'objet d'arrêts de travail à compter du mois d'avril 2018 et, à l'issue de ces arrêts renouvelés, le médecin du travail a rendu un avis d'aptitude le 6 juin 2019 précisant dans ses préconisations « manutentions manuelles lourdes de façon habituelle et/ou fréquentes supérieures à 10 kgs de poids à limiter le plus possible, limiter le plus possible le travail avec posture contraignante pour le buste (pas de travail de façon prolongée sur toiture). Peut conduire des véhicules dans le cadre de son travail. Travail à temps partiel recommandé. Peut travailler au poste de chef d'équipes dans les conditions énoncées ci-dessus. A revoir dans 3 mois ».
M. [C] a contesté devant le conseil de prud'hommes de Mende cet avis.
Par ordonnance du 11 septembre 2019, le conseil de prud'hommes de Mende, en sa formation de référé, a constaté la recevabilité du recours et désigné Mme [G], Expert et lui a donné mission d'examiner M. [D] [C], et dit que l'expert donnera son avis qui se substituera de plein droit à celui du médecin du travail.
Cette ordonnance a été suivie d'une seconde décision modificative du 2 octobre 2019 désignant le Dr [J] en lieu et place du précédent expert.
Par déclarations au greffe de la cour en date des 4 et 7 octobre 2019, la société Matoses interjetait appel des ordonnances du conseil de prud'hommes de Mende.
Par arrêt du 30 juin 2020, la cour d'appel de Nîmes a :
- ordonné la jonction des procédures RG 19/3840 et 19/3846 et dit que la procédure se poursuivra sous le numéro RG 19/3840,
- infirmé les ordonnances des 11 septembre et 2 octobre 2019 déférées,
statuant de nouveau sur le tout,
- ordonné une mesure d'instruction,
- désigné pour y procéder Mme ou M. le médecin-inspecteur du travail territorialement compétent sur le département de Lozère domicilié à la Direccte Occitanie, [Adresse 4] avec mission de :
* se faire communiquer tous documents utiles, par l'employeur et par le médecin du travail,
* procéder à l'examen clinique de M. [D] [C], recueillir ses doléances
* indiquer si l'état de santé du salarié au jour de la visite de reprise justifiait l'avis d'aptitude avec réserve émis par le médecin du travail ;
* faire toutes observations utiles sur les conclusions et indications relatives au reclassement,
* procéder à tout autre examen ou audition qu'il estimera utile ;
- dit que le médecin inspecteur du travail pourra se faire communiquer toutes pièces utiles à la réalisation de sa mission ;
- dit que le médecin-inspecteur du travail devra déposer son rapport final au greffe de la chambre sociale de la cour dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine ;
- fixé à la somme de 200 euros le montant de la provision à la charge de M. [D] [C] à valoir sur les frais d'expertise, conformément au tarif fixé par arrêté commun du ministère du travail et du budget, qui devra être consignée à la Caisse des dépôts et consignations de Nîmes, au plus tard le 30 juin 2020 ;
- dit qu'une fois la consignation réalisée, la Caisse des dépôts et consignations en avisera le greffe conformément aux dispositions de l'article R. 4624-45-1 du code du travail ;
- dit que, faute de consignation complète de la provision, la désignation du médecin-inspecteur du travail sera caduque conformément aux dispositions de l'article 271 du code de procédure civile ;
- dit qu'après dépôt du rapport d'expertise les parties seront à nouveau convoquées à l'audience, à la diligence du greffe, par un avis comportant le calendrier d'échange des conclusions ;
- réservé les dépens.
Le Dr [X] [G] a rendu son rapport d'expertise le 28 juillet 2021 et a conclu que :
'- L'état de santé du salarié au jour de la visite de reprise ne justifiait pas l'avis d'aptitude avec réserve émis par le médecin du travail,
- M. [C] est définitivement inapte à son poste de travail ; l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.'
Par conclusions notifiées le 19 mai 2023, la SARL Matoses demande à la cour de :
A titre principal,
- juger sans objet la présente instance en l'état de la rupture des relations contractuelles intervenues à l'initiative de M. [C] par voie de départ à la retraite.
- juger irrecevable la demande de M. [C] visant à enjoindre la société Matoses à procéder à la reconstitution de la carrière du requis dès lors qu'il s'agit d'une demande nouvelle formulée pour la première fois en cause d'appel.
- juger irrecevable la demande de M. [C] visant à enjoindre la société Matoses à procéder à la reconstitution de la carrière du requis dès lors que la Cour n'est pas saisie par l'effet dévolutif de l'appel d'une telle prétention.
- juger irrecevable la demande de M. [C] visant à enjoindre la société Matoses à procéder à la reconstitution de la carrière du requis dès lors qu'il s'agit d'une prétention matériellement impossible à accomplir par la société Matoses.
A titre subsidiaire,
-Statuer ce que de droit à la lecture du rapport d'expertise déposé par le Docteur [G],
En tout état de cause,
- Dire n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
- juger que M. [C] conservera la charge des dépens et des frais d'expertise.
- débouter M. [C] de toutes demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires.
Elle soutient que :
- M. [C] ayant fait valoir ses droits à la retraite en date du 23 février 2021, les demandes n'ont plus d'objet,
- la demande de reconstitution de carrière de M. [C] afin de vérifier s'il a été rempli de l'intégralité de ses droits jusqu'à son départ en retraite est irrecevable en vertu des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile pour être nouvelle en cause d'appel, de plus étrangère au litige porté par dévolution devant la cour d'appel, enfin cette demande est en pratique impossible à satisfaire car elle dépend d'informations qui lui sont totalement étrangères et inaccessibles.
Par conclusions notifiées le 22 mai 2023, M. [D] [C] demande à la cour de :
- Homologuer le rapport d'expertise déposé le 28 juillet 2021.
En conséquence,
- constater que son état de santé ne permettait aucune reprise d'activité professionnelle et qu'aucun reclassement n'était possible.
- faire injonction à la Société Matoses de procéder à la reconstitution de sa carrière afin de vérifier s'il a été rempli de l'intégralité de ses droits jusqu'à son départ en retraite.
- condamner la société Matoses aux entiers dépens incluant les frais d'expertise et au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.
Par avis du 5 janvier 2023, l'affaire a été fixée à l'audience du 24 mai 2023.
MOTIFS
Les conclusions du médecin inspecteur régional du travail ne sont pas discutées en ce qu'elles établissent que :
L'état de santé du salarié au jour de la visite de reprise ne justifiait pas l'avis d'aptitude avec
réserve émis par le médecin du travail.
- Monsieur [C] est définitivement inapte à son poste de travail ; l'état de santé du salarié fait obstacle a tout reclassement dans un emploi.
Il sera rappelé que l'intérêt à agir s'apprécie au jour où une partie fait appel, étant observé en l'espèce que l'appelant est la société Matoses qui soulève cette difficulté, et que l'intérêt à agir de M. [C] s'apprécie quant à lui au jour où il a saisi la juridiction prud'homale.
Il convient donc de prendre en considération les conclusions du médecin inspecteur régional du travail même si à ce jour elles ne présentent plus d'utilité pratique en raison du départ à la retraite de M. [C].
La demande tendant à la reconstitution de carrière de Monsieur [C] afin de vérifier s'il a été rempli de l'intégralité de ses droits jusqu'à son départ en retraite nouvelle en appel est irrecevable au regard de l'article 564 du code de procédure civile et pour ne pas se rattacher au litige initial par un lien suffisant, elle ne peut en tout état de cause être mise en oeuvre pour excéder les compétences de l'employeur.
L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner la SARL Matoses à payer à M. [C] la somme de 1.500,00 euros à ce titre.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort
- Juge que l'état de santé de M. [C] ne permettait aucune reprise d'activité professionnelle et qu'aucun reclassement n'était possible,
- Dit irrecevable la demande de M. [C] tendant à la reconstitution de sa carrière afin de vérifier s'il a été rempli de l'intégralité de ses droits jusqu'à son départ en retraite,
- Condamne la SARL Matoses à payer à M. [C] à payer la somme de 1.500,00 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne la SARL Matoses aux dépens d'appel en ce compris les frais d'expertise.
Arrêt signé par le président et par le greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT