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15/06/2023 | FRANCE | N°20/02207

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5e chambre pole social, 15 juin 2023, 20/02207


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 20/02207 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HZKB



EM/DO



POLE SOCIAL DU TJ DE NIMES

08 juillet 2020



RG :19/00766





CARSAT DU LANGUEDOC ROUSSILLON



C/



[T]



















Grosse délivrée le 15 Juin 2023 à :



- Me AURAN-VISTE

- Me CASSEVILLE







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COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social



ARRÊT DU 15 JUIN 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de NIMES en date du 08 Juillet 2020, N°19/00766



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu l...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 20/02207 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HZKB

EM/DO

POLE SOCIAL DU TJ DE NIMES

08 juillet 2020

RG :19/00766

CARSAT DU LANGUEDOC ROUSSILLON

C/

[T]

Grosse délivrée le 15 Juin 2023 à :

- Me AURAN-VISTE

- Me CASSEVILLE

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social

ARRÊT DU 15 JUIN 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de NIMES en date du 08 Juillet 2020, N°19/00766

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier lors des débats et Madame Delphine OLLMANN, Greffière lors du prononcé de la décision.

DÉBATS :

A l'audience publique du 14 Février 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 09 Mai 2023 et prorogé ce jour.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

CARSAT DU LANGUEDOC ROUSSILLON

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me VISTE Pierre Emmanuel, substituant Me Françoise AURAN-VISTE de la SCP AURAN-VISTE & ASSOCIES, avocat au barreau de BEZIERS

INTIMÉE :

Madame [K] [T]

née le 11 Avril 1957 à [Localité 4]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me PERICCHI Philippe, substituant Me Pascal CASSEVILLE, avocat au barreau de NIMES

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 15 Juin 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Suivant notification du 04 février 2019, Mme [K] [T] a obtenu le bénéfice d'une retraite personnelle liquidée au titre du droit commun, avec effet au 1er mai 2019, sur justification de 172 trimestres d'assurance au régime général de la sécurité sociale.

Par courrier du 21 février 2019, Mme [K] [T] a contesté le montant de la pension et a demandé à la caisse le bénéfice de la majoration pour avoir élevé plusieurs enfants.

Par décision du 1er juillet 2019, la commission de recours amiable de la Caisse d'assurance retraite et de santé au travail (CARSAT) Languedoc Roussillon a rejeté le recours de Mme [K][T].

En contestation de cette décision, Mme [K] [T] a saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Nîmes par requête du 28 août 2019, lequel, suivant jugement du 08 juillet 2020, a :

- infirmé la décision de la commission de recours amiable de la Carsat Languedoc Roussillon en date du 1er juillet 2019,

- dit que la pension de retraite servie à Mme [K] [T] doit être majorée en application des dispositions de l'article L351-12 du code de la sécurité sociale,

- renvoyé Mme [K] [T] auprès de la Carsat Languedoc Roussillon pour liquidation de ses droits,

- condamné la Carsat Languedoc Roussillon aux entiers dépens.

Par courrier remis au greffe le 02 septembre 2020, la CARSAT Languedoc Roussillon a régulièrement interjeté appel de cette décision dont la date de notification n'est pas justifiée dans le dossier de première instance transmis à la cour.

Par acte du 22 novembre 2022, les parties ont été convoquées à l'audience du 14 février 2023 à laquelle elle a été retenue.

Par conclusions déposées et développées oralement à l'audience, la CARSAT Languedoc Roussillon demande à la cour de :

- infirmer le jugement du tribunal judiciaire du 08 juillet 2020 en ce qu'il a lui-même infirmé la décision de la CRA du 01 juillet 2019,

- débouter Mme [T] de l'ensemble de ses demandes,

- la condamner aux entiers dépens.

Elle soutient que :

- au visa des articles L351-12 et L342-4 du code de la sécurité sociale, en matière de majoration pour enfants, il convient de distinguer la situation avant mariage où l'enfant doit être à la charge exclusive du bénéficiaire et la situation après mariage où l'enfant doit avoir été à la charge du bénéficiaire ou de son conjoint ; pour que les enfants élevés par le demandeur soient considérés comme étant 'à la charge du conjoint', il doit être marié avec le parent ; en l'espèce, sur la demande de retraite réglementaire, Mme [K] [T] déclare avoir eu ou élevé quatre enfants : ses deux filles biologiques, [Z], née le 1er février 1986 et [F], née le 28 février 1990 issues de son union avec M. [I] et les enfants de son ex-conjoint, M.[H] [I] et M. [V] [I] nés respectivement le 05 août 1971 et le 15 janvier 1973 ; la pension est augmentée d'une bonification d'un dixième pour tout assuré de l'un ou l'autre sexe, ayant eu au moins trois enfants ; ouvrent droit à cette bonification les enfants ayant été, au moins neuf ans avant leur seizième anniversaire, élevés par le titulaire de la pension et à sa charge ou à celle de son conjoint ; Mme [K] [T] a épousé leur père, M. [I] [B], le 16 juin 1984 et ce n'est qu'à compter de cette date que les enfants [H] et [V] alors âgés de 12 ans et 10 mois et 11 ans et 5 mois peuvent légalement être considérés à la charge des époux [T]-[I] ; la condition des 9 ans avant 16 ans à la charge du conjoint n'est remplie pour aucun des deux enfants de M. [I],

- concernant la période de concubinage, Mme [K] [T] produit une attestation de droits à prestations familiales établie en faveur des deux garçons à compter du 1er juillet 1979, sans justifier de la période de concubinage antérieure à la date de mariage ; ce document n'apporte pas la preuve de la charge exclusive des enfants [I] entre le 1er juillet 1979 et 16 juin 1984 (date du mariage) ; en effet, les enfants sans lien de filiation avec le demandeur doivent avoir été à sa charge mais également élevés par lui ; le demandeur doit avoir assumé la direction matérielle et morale des enfants,

- en outre, Mme [K] [T] ne rapporte nullement la preuve de la charge effective des enfants [H] et [V] ; le fait qu'elle ait vécu en concubinage avec le père des enfants à partir de 1979 et jusqu'au 16 juin 1984 ne constitue pas une preuve qu'ils aient été élevés et à sa seule charge ; au contraire, le père des enfants percevait, au cours de cette période, une rémunération démontrant qu'il était à même d'assumer la charge effective de ses enfants et que même s'il avait perçu un revenu moins élevé, il n'est pas justifié que Mme [K] [T] subvenait à titre principal au besoin des enfants [H] et [V] ; il se déduit que Mme [K] [T] n'a pas eu la charge pendant neuf ans révolus avant leur seizième anniversaire des enfants [H] ou [V] [I] et ne réunit donc pas les conditions nécessaires à l'obtention de la majoration pour enfants.

Mme [K] [T], représentée, demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et à titre reconventionnel, 'commandement et assignation selon l'application de l'article 699 du code de procédure civile' (sic).

Elle fait valoir que les écritures de la caisse primaire d'assurance maladie (sic) pour relever appel de la décision entreprise sont fondées sur des motifs erronés puisque [B] [I] était divorcé et qu'il vivait avec ses enfants dont ils avaient ensemble la garde ; son attestation et celle de [B] [I] démontrent qu'elle a élevé et éduqué les enfants et que la condition des 9 ans exigée par le code de la sécurité sociale est remplie ; la communauté de vie est ainsi établie entre le 1er juillet 1979 et le 06 mai 1988 soit pendant plus de 9 ans; c'est donc à bon droit que le tribunal a accepté de juger que sa pension de retraite devait être majorée de 10%.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs écritures déposées et soutenues oralement lors de l'audience.

MOTIFS

L'article L351-12 du code de la sécurité sociale dispose que la pension prévue aux articles L. 351-1 et L. 351-8 est assortie d'une majoration pour tout assuré de l'un ou l'autre sexe ayant eu un nombre minimum d'enfants.

Ouvrent également droit à cette majoration les enfants élevés dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 342-4.

Cette majoration est incluse dans les avantages personnels de vieillesse dont le cumul avec une pension de réversion est comparé aux limites prévues au dernier alinéa de l'article L. 353-1.

L'article L357-3 du même code énonce que les dispositions de l'article L. 351-12 et du premier alinéa de l'article L. 351-13 sont applicables aux pensions de vieillesse mentionnées au présent chapitre.

L'article L342-4 du même code dispose que la pension de veuve ou de veuf ne peut être inférieure à un montant fixé par décret.

Elle est majorée d'un pourcentage déterminé lorsque le bénéficiaire a eu plusieurs enfants. Ouvrent droit également à cette majoration les enfants élevés par le titulaire de la pension et à sa charge ou à celle de son conjoint.

Un décret en Conseil d'Etat fixe :

1°) le nombre d'enfants du bénéficiaire ouvrant droit à la majoration ;

2°) la durée pendant laquelle, et l'âge jusqu'auquel les enfants à la charge du titulaire de la pension ou de son conjoint doivent avoir été élevés pour ouvrir droit à la majoration.

La majoration est, le cas échéant, calculée sur le montant de la pension porté au minimum ci-dessus défini.

Cette majoration pour enfants est ainsi attribuée à toute personne qui a assumé la charge effective et permanente de l'enfant, laquelle inclut la direction tant matérielle que morale du mineur en cause.

Ces conditions sont cumulatives, et la charge d'un enfant doit être entendue comme la participation personnelle, effective et permanente à l'entretien des enfants (cass. civ. 2e 14 septembre 2006 - n° 05-10.912), incluant la direction tant matérielle que morale des mineurs, la charge exclusive des enfants n'étant pas exigée, et la situation matrimoniale du bénéficiaire de la pension de retraite et son lien de parenté ou d'alliance avec l'enfant étant sans emport.

En l'espèce, Mme [K] [T] soutient qu'elle est en droit de bénéficier d'une majoration de 10% de sa pension de retraite pour avoir élevé les deux enfants de son concubin puis époux, [H] et [V] [I] ainsi que ses deux filles [Z] et [F] issues de son mariage avec [B] [I].

A l'appui de ses prétentions, Mme [K] [T] produit aux débats :

- une attestation de [B] [I] qui certifie que Mme [K] [T] l'a accompagné pour éduquer et subvenir aux besoins de ses deux fils, [H] [I] né le 05/08/1971 et [V] [I] né le 15/01/1973 dont il avait la garde par décision de justice, suite à son divorce prononcé par le juge aux affaires familiales d'Aix en Provence le 10/12/1976 qui lui a alloué la perception des allocations familiales de juillet 1979 jusqu'à leur majorité, qu'il a vécu en couple avec Mme [K] [T], en concubinage puis 'sous la communauté de mariage' qui a eu lieu le 16/06/1984, que de cette union sont nées deux filles, [Z] née le 01/02/1986 et [F] née le 28/02/1990 et que la dissolution du mariage a été prononcée suivant jugement du tribunal de grande instance de Charleville Mézières le 06/05/1998,

- une attestation qu'elle a elle-même rédigée dans laquelle elle certifie avoir élevé les deux enfants de son compagnon puis époux au quotidien dans les actes courants de la vie et les avoir éduqués dans les valeurs républicaines et humaines pendant la vie maritale et concubinale qui a démarré officiellement par la Caisse d'allocations familiales des Ardennes du 1er juillet 1979 , alors qu'[H] et [V] [I] étaient 'sous la responsabilité parentale entière' de leur père divorcé dont il a obtenu la garde ; elle ajoute qu'ils ont bénéficié tout au long de ces années des prestations familiales et des avantages pour les quatre enfants, qu'elle a bénéficié de congés maternité pour ses filles en tant que 3ème et 4ème enfants 'toujours avec justificatifs de l'époque auprès de la CPAM',

- un relevé de sa retraite de base du régime général de la sécurité sociale sur lequel sont mentionnées des périodes d'activité salariée entre 1979 et 1998,

- une copie d'un jugement rendu par un juge aux affaires familiales près le tribunal de grande instance d'Aix en Provence le 10 décembre 1976 qui a confié à [B] [I] les deux enfants issus de son mariage avec sa première épouse, Mme [O] [S].

La notion de conjoint en droit fait référence à l'union de deux personnes liées par le mariage.

Il résulte des éléments versés aux débats que Mme [K] [T] et [B] [I] se sont mariés le 16 juin 1984 ; à cette date, M. [H] [I] était âgé de 12 ans et M. [V] [I] était âgé de 11 ans.

Or, force est de constater que la condition du délai de 9 ans concernant la prise en charge des enfants avant leur 16ème année n'est pas remplie lorsque Mme [K] [T] et [B] [I] étaient mariés.

Les éléments versés aux débats par Mme [K] [T] établissent suffisamment une communauté de vie entre le 1er juillet 1979 et le 06 mai 1998, date de son divorce avec [B] [I] ; la condition relative au délai de 9 ans concernant M. [H] [I] et M. [V] [I] est remplie, le premier enfant ayant eu 16 ans le 05 août 1987 et le second, le 15 janvier 1989, soit pendant la période de concubinage.

Par ailleurs, [B] [I] précise que Mme [K] [T] a participé à l'éducation et à la prise en charge matérielle des deux enfants pendant leur vie commune, ce qui est conforté par une attestation de la Caisse d'allocations familiales des Ardennes du 11 mars 2018 selon laquelle Mme [K] [T] a perçu les prestations familiales à compter du 1er juillet 1979 en faveur de [H] et [V] [I] ; si cette attestation n'est pas produite aux débats en appel, elle a cependant été évoquée par les premiers juges dans les motifs du jugement déféré et la Caisse d'assurance retraite et de la santé au travail en fait référence dans ses conclusions .

S'agissant des deux filles issues de l'union entre Mme [K] [T] et [B] [I], elles étaient âgées au moment du divorce de 12 ans pour [Z] et de 8 ans pour [F].

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont retenu que la condition d'avoir élevé au moins trois enfants pendant neuf années avant leur seizième anniversaire est remplie.

Le jugement entrepris sera donc confirmé.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière de sécurité sociale et en dernier ressort ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nîmes, contentieux de la protection sociale le 08 juillet 2020,

Condamne la Caisse d'assurance retraite et de la santé au travail Languedoc Roussillon aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par le Président, et par la Greffière.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5e chambre pole social
Numéro d'arrêt : 20/02207
Date de la décision : 15/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-15;20.02207 ?
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