Ordonnance n° 23/564
N° RG 23/00602 - N° Portalis DBVH-V-B7H-I265
J.L.D. NIMES
08 juin 2023
[X]
C/
LE PREFET DES [Localité 2]
COUR D'APPEL DE NÎMES
Cabinet du Premier Président
Ordonnance du 09 JUIN 2023
Nous, Madame Alexandra BERGER, Conseillère à la Cour d'Appel de NÎMES, conseiller désigné par le Premier Président de la Cour d'Appel de NÎMES pour statuer sur les appels des ordonnances des Juges des Libertés et de la Détention du ressort, rendues en application des dispositions des articles L 742-1 et suivants du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit de l'Asile (CESEDA), assisté de Mme Emmanuelle PRATX, Greffière,
Vu l'arrêté préfectoral portant obligation de quitter le territoire national en date du 21 septembre 2022 notifié le même jour, ayant donné lieu à une décision de placement en rétention en date du 9 mai 2023, notifiée le même jour à 09h40 concernant :
M. [J] [X] alias [G] [S]
né le 22 Janvier 1993 à [Localité 3] (MAROC)
de nationalité Marocaine
Vu l'ordonnance en date du 11 mai 2023 rendue par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de Nîmes portant prolongation du maintien en rétention administrative de la personne désignée ci-dessus ;
Vu la requête reçue au Greffe du Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de Nîmes le 7 juin 2023 à 15h40, enregistrée sous le N°RG 23/2872 présentée par M. le Préfet des [Localité 2] ;
Vu l'ordonnance rendue le 08 Juin 2023 à 11h31 par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal de NÎMES sur seconde prolongation, qui a :
* Fait droit à la requête préfectorale ;
* Ordonné pour une durée maximale de 30 jours commençant à l'expiration du précédent délai de 28 jours déjà accordé, le maintien dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, de M. [J] [X] alias [G] [S];
* Dit que la mesure de rétention prendra fin à l'expiration d'un délai de 30 jours à compter du 8 juin 2023 à 09h40,
Vu l'appel de cette ordonnance interjeté par Monsieur [J] [X] alias [G] [S] le 08 Juin 2023 à 14h57 ;
Vu l'absence du Ministère Public près la Cour d'appel de NIMES régulièrement avisé ;
Vu l'absence du Préfet des [Localité 2], régulièrement convoqué,
Vu la comparution de Monsieur [J] [X] alias [G] [S], régulièrement convoqué ;
Vu la présence de Me Romain FUGIER, avocat de Monsieur [J] [X] alias [G] [S] qui a été entendu en sa plaidoirie ;
MOTIFS
Monsieur [J] alias [G] [S] [X] a reçu notification le 21 septembre 2022 d'un arrêté du Préfet des [Localité 2] du même jour lui faisant obligation de quitter le territoire national sans délai avec interdiction de retour pendant deux ans.
A sa levée d'écrou le 9 mai 2023, à 9h46, lui a également été notifié son placement en rétention en vertu d'un arrêté pris par la même préfecture le même jour.
Par ordonnance prononcée le 11 mai 2023, à 15h23, le Juge des libertés et de la détention de Nîmes a rejeté les exceptions de nullité soulevées ainsi que les moyens présentés par Monsieur [J] alias [G] [S] [X] et ordonné la prolongation de sa rétention administrative pour vingt-huit jours.
Par requête en date du 7 juin 2023, le Préfet de [Localité 2] a sollicité que la mesure de rétention administrative de Monsieur [J] alias [G] [S] [X] soit de nouveau prolongée pour trente jours et le 8 juin 2023, à 11h31, le Juge des libertés et de la détention de Nîmes a fait droit à cette demande.
Monsieur [J] alias [G] [S] [X] a interjeté appel de cette ordonnance le 8 juin 2023, à 14h57.
Sur l'audience, Monsieur [J] alias [G] [S] [X] indique :
- tout se passe bien au centre de rétention, mais il est fatigué d'être enfermé,
- il comptait quitter la France directement après sa peine de prison,
- il a exécuté précédemment une emsure d'éloignement ; il avait eu une interdiction d'un an,
- il n'a pas de passeport mais il indique pouvoir partir dans un délai de 24h, ; il irait en Allemagne où il a obtenu un asile,
- il n'accepte pas de retourner au Maroc.
Son avocat soutient que :
- il y a une difficulté sur l'identification du retenu au Maroc, donc les diligences ne vont pas aboutir de manière certaine ; le traité de 2018 prévoit un délai de 15 jours pour répondre aux sollicitations,
- il n'est pas opposé à son départ de France.
Monsieur le Préfet des [Localité 2] n'est pas représenté.
SUR LA RECEVABILITE DE L'APPEL :
L'appel interjeté par Monsieur [J] alias [G] [S] [X] à l'encontre d'une ordonnance du Juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de Nîmes prononcée en sa présence a été relevé dans les délais légaux et conformément aux dispositions des articles L.743-21, R.743-10 et R.743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Il est donc recevable.
SUR LES MOYENS ET ÉLÉMENTS NOUVEAUX INVOQUÉS EN CAUSE D'APPEL:
L'article L.743-11 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose: « A peine d'irrecevabilité, prononcée d'office, aucune irrégularité antérieure à une audience à l'issue de laquelle le juge des libertés et de la détention a prolongé la mesure ne peut être soulevée lors d'une audience ultérieure »
L'article 563 du Code de Procédure Civile ajoute encore que « pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves. »
En l'espèce, ne restent recevables que le moyen d'irrecevabilité de la requête en prolongation sur laquelle l'ordonnance dont appel a statué et les moyens de fond, même nouveaux en appel. Monsieur [J] alias [G] [S] [X] soulève l'absence de diligence suffisantes de la part de la Préfecture. Ce moyen est recevable.
SUR LE FOND :
Au motif de fond sur son appel, Monsieur [J] alias [G] [S] [X] soutient que l'administration française ne démontre pas avoir engagé les démarches utiles et nécessaires à son départ, et que par voie de conséquence sa rétention ne se justifie plus / qu'il n'existe à son sujet aucune perspective d'éloignement parce que les frontières de son pays d'origine sont fermées / aucun vol ne dessert plus son pays d'origine / il n'a toujours pas été identifié, et que sa rétention ne se justifie donc plus.
Selon l'article L.742-4 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après la première période de prolongation de 28 jours depuis l'expiration du délai de quarante-huit heures mentionné à l'article L.742-1, le juge peut être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours dans les cas suivants:
« 1° en cas d'urgence absolue ou de menace d'une particulière gravité pour l'ordre public,
2° lorsque l'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement,
3° lorsque la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison :
a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l'exécution de la décision d'éloignement,
b) de l'absence de moyens de transport. »
La prolongation de la rétention court alors « à compter de l'expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d'une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas soixante jours ».
Ces dispositions doivent s'articuler avec celles de l'article L.741-3 du même code, selon lesquelles il appartient au juge judiciaire d'apprécier la nécessité du maintien en rétention et de mettre fin à la rétention administrative lorsque les circonstances de droit ou de fait le justifient, un étranger ne pouvant être placé ou maintenu en rétention « que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet ».
En l'espèce, l'administration a saisi les autorités consulaires du Maroc, et une audition consulaire a été organisée le 19 mai 2023. A la suite de cette audition, les autorités marocaines ont fait savoir qu'elles diligentaient une enquête approfondie dans leur pays.
La délivrance d'un laissez-passer ou tout autre document de voyage ne peut être délivré que dès lors que la nationalité et donc l'identité de l'intéressé a été formellement établie. En l'état d'une personne dépourvue de pièces d'identité et de droit au séjour, les recherches propres à identifier l'origine et la nationalité de celle-ci sont incontournables et retardent d'autant la délivrance du titre de voyage.
Force est donc de constater que malgré des diligences caractérisées et démontrées par l'administration, la mesure d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé. Il est prématuré, à ce stade de la procédure, de considérer ces démarches comme étant insuffisantes et insusceptible d'aboutir rapidement à la délivrance d'un laissez-passer.
Les circonstances et conditions exigées par l'article L742-4 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont donc satisfaites et la requête en prolongation de la rétention administrative de Monsieur [J] alias [G] [S] [X] fondée en droit. Il y a lieu de rejeter le moyen soulevé.
SUR LA SITUATION PERSONNELLE DE MONSIEUR [J] alias [G] [S] [X] :
Monsieur [J] alias [G] [S] [X], présent irrégulièrement en France est dépourvu de passeport et de pièces administratives pouvant justifier de son identité et de son origine de telle sorte qu'une assignation à résidence judiciaire est en tout état de cause exclue par les dispositions de l'article L743-13 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Il ne justifie de plus d'aucune adresse ni domicile stables en France, ne démontre aucune activité professionnelle et ne dispose d'aucun revenu ni possibilité de financement pour assurer son retour dans son pays.
Il est l'objet d'une mesure d'éloignement en vigueur, telle que précitée, et qui fait obstacle à sa présence sur le sol français.
Il s'en déduit que la prolongation de sa rétention administrative demeure justifiée et nécessaire aux fins qu'il puisse être procédé effectivement à son éloignement.
Il convient par voie de conséquence de confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort,
Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,
Vu les articles L.741-1, L.742-1 à L.743-9, R.741-3 et R.743-1 à R.743-19, L.743.21 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
DÉCLARONS recevable l'appel interjeté par Monsieur [J] [X] alias [G] [S] ;
CONFIRMONS l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;
RAPPELONS que, conformément à l'article R.743-20 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile, les intéressés peuvent former un pourvoi en cassation par lettre recommandée avec accusé de réception dans les deux mois de la notification de la présente décision à la Cour de cassation [Adresse 1].
Fait à la Cour d'Appel de NÎMES,
le 09 Juin 2023 à
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
' Notification de la présente ordonnance a été donnée ce jour au Centre de rétention administrative de [Localité 4] à M. [J] [X] alias [G] [S].
Le à H
Signature du retenu
Copie de cette ordonnance remise, ce jour, par courriel, à :
Monsieur [J] [X] Alias [G] [S], pour notification au CRA
Me Romain FUGIER, avocat
M. Le Préfet des [Localité 2]
M.Le Directeur du CRA de [Localité 4]
Le Ministère Public près la Cour d'Appel de NIMES
M. / Mme Le Juge des libertés et de la détention