La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/06/2023 | FRANCE | N°20/02706

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5e chambre pole social, 08 juin 2023, 20/02706


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 20/02706 - N° Portalis DBVH-V-B7E-H2SN



CRL/DO



POLE SOCIAL DU TJ DE NIMES

30 septembre 2020



RG :18/00837





CARSAT DU LANGUEDOC ROUSSILLON



C/



[W]



















Grosse délivrée le 08 JUIN 2023 à :



- Me AURAN-VISTE

- Me CHAMSKI







>


COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social



ARRÊT DU 08 JUIN 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de NIMES en date du 30 Septembre 2020, N°18/00837



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu l...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 20/02706 - N° Portalis DBVH-V-B7E-H2SN

CRL/DO

POLE SOCIAL DU TJ DE NIMES

30 septembre 2020

RG :18/00837

CARSAT DU LANGUEDOC ROUSSILLON

C/

[W]

Grosse délivrée le 08 JUIN 2023 à :

- Me AURAN-VISTE

- Me CHAMSKI

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social

ARRÊT DU 08 JUIN 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de NIMES en date du 30 Septembre 2020, N°18/00837

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

A l'audience publique du 28 Mars 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 08 Juin 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

CARSAT DU LANGUEDOC ROUSSILLON

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Françoise AURAN-VISTE de la SCP AURAN-VISTE & ASSOCIES, avocat au barreau de BEZIERS

INTIMÉ :

Monsieur [F] [W]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représenté par Me Stanislas CHAMSKI de la SCP COUDURIER & CHAMSKI, avocat au barreau de NIMES

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 08 Juin 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES

La CARSAT de Languedoc Roussillon a procédé à la suppression de l'allocation de solidarité aux personnes âgés (ASPA) de M. [W] [F], retraité depuis février 2015, du fait qu'il n'avait pas respecté son obligation de justifier de la condition de résidence régulière (6 mois) sur le territoire français en 2015 et 2016.

Par une lettre du 10 mai 2017, la CARSAT a demandé à M. [W] [F] la restitution de l'indu soit la somme de 8.903, 20 euros correspondant aux allocations versées du 1er mars 2015 au 28 février 2017.

Le 18 octobre 20107, la CARSAT a notifié à M. [W] [F] une pénalité financière de 654 euros.

Par requête en date du 17 septembre 2018, la CARSAT a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Gard, aux fins de voir condamner M. [W] [F] au paiement de 8903, 20 euros en remboursement d'indu, outre 654 euros de pénalités financières.

Par jugement en date du 30 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Nîmes, désormais compétent pour connaître de ce litige, a :

- déclaré le recours de la CARSAT Languedoc Roussillon non fondé,

- rejeté la demande en répétition d'indu au titre du versement de l'ASPA entre le 1er mars 2015 et le 28 février 2017,

- rejeté la demande de fixation de la pénalité,

- débouté la CARSAT Languedoc Roussillon de l'ensemble de ses demandes,

- débouté M. [W] [F] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné le requérant aux dépens de l'instance.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée le 26 octobre 2020, la CARSAT a régulièrement interjeté appel de cette décision. Enregistrée sous le numéro RG 20 02706, l'examen de cette affaire a été appelé à l'audience du 28 mars 2023.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, la CARSAT demande à la cour de :

- confirmer les révisions opérées de l'allocation de solidarité aux personnes âgées compte tenu de la véritable résidence en 2015 et 2016 de M. [W] [F],

- confirmer l'indu résultant d'un montant de 8903,20 euros, M. [W] [F] ayant bien perçu à tort cette somme,

- confirmer la pénalité prononcée à l'encontre de M. [W] [F],

- infirmer le jugement du tribunal judiciaire du 30 juillet 2020 en ce qu'il a lui même infirmé les décisions de la Carsat de modifier les droits de M. [W] [F] au regard de l'ASPA sur le vu de ses changements de résidence non contestés en 2015 et 2016,

- débouter M. [W] [F] de l'ensemble de ses demandes,

- le condamner aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, la CARSAT fait valoir que :

- l'attestation de l'agent comptable qu'elle verse aux débats fait foi et établit le montant des sommes versées à M. [W] [F],

- elle produit également au soutien de son recours une partie des bordereaux de paiement mais peut les fournir à la demande de la cour en intégralité,

- M. [W] [F] n'a jamais contesté le montant des sommes qui lui sont réclamées,

- la fraude n'est pas nécessaire pour prononcer une pénalité financière, la seule omission de déclarer son changement de résidence est suffisante.

- la réalité de l'absence du territoire national n'est pas contestée.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, M. [W] [F] demande à la cour de :

- débouter la CARSAT de l'intégralité de ses demandes,

- condamner la CARSAT à lui restituer l'intégralité des sommes indûment perçues,

- condamner la CARSAT à lui verser la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses demandes, M. [W] [F] fait valoir que :

- il a rencontré des problèmes de santé lors de son séjour au Maroc en 2015, ainsi qu'en attestent les certificats médicaux qu'il produit,

- il justifie de la réalité de sa résidence à [Localité 6],

- ses relevés bancaires ne permettent pas de reconstituer les sommes qui lui sont réclamées par la CARSAT.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS

L'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale énonce : 'Toute personne justifiant d'une résidence stable et régulière sur le territoire métropolitain ou dans une collectivité mentionnée à l'article L. 751-1 et ayant atteint un âge minimum bénéficie d'une allocation de solidarité aux personnes âgées dans les conditions prévues par le présent chapitre. Cet âge minimum est abaissé en cas d'inaptitude au travail ou lorsque l'assuré bénéficie des dispositions prévues à l'article 37 de la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites.

Un décret en Conseil d'Etat précise la condition de résidence mentionnée au présent article.'

L'article R. 115-6 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, précise : 'Pour bénéficier du service des prestations en application du troisième alinéa de l'article L. 111-1 et des articles L. 380-1, L. 512-1, L. 815-1, L. 815-24 et L. 861-1, ainsi que du maintien du droit aux prestations prévu par l'article L. 161-8, sont considérées comme résidant en France les personnes qui ont sur le territoire métropolitain ou dans un département d'outre-mer leur foyer ou le lieu de leur séjour principal. Cette disposition n'est pas applicable aux ayants droit mineurs pour le service des prestations en nature des assurances maladie et maternité.

Le foyer s'entend du lieu où les personnes habitent normalement, c'est-à-dire du lieu de leur résidence habituelle, à condition que cette résidence sur le territoire métropolitain ou dans un département d'outre-mer ait un caractère permanent.

La condition de séjour principal est satisfaite lorsque les bénéficiaires sont personnellement et effectivement présents à titre principal sur le territoire métropolitain ou dans un département d'outre-mer. Sous réserve de l'application des dispositions de l'article R. 115-7, sont réputées avoir en France le lieu de leur séjour principal les personnes qui y séjournent pendant plus de six mois au cours de l'année civile de versement des prestations.

La résidence en France peut être prouvée par tout moyen. Un arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale fixe la liste des données ou des pièces relatives à la condition de résidence.'

L'article L 815-11 du même code précise que l''allocation peut être révisée, suspendue ou supprimée à tout moment lorsqu'il est constaté que l'une des conditions exigées pour son service n'est pas remplie ou lorsque les ressources de l'allocataire ont varié. Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions dans lesquelles l'allocation peut être révisée, suspendue ou supprimée par les services ou organismes mentionnés à l'article L. 815-7.

Dans tous les cas, les arrérages versés sont acquis aux bénéficiaires sauf lorsqu'il y a fraude, absence de déclaration du transfert de leur résidence hors du territoire métropolitain ou des collectivités mentionnées à l'article L. 751-1, absence de déclaration des ressources ou omission de ressources dans les déclarations.

Toute demande de remboursement de trop-perçu se prescrit par deux ans à compter de la date du paiement de l'allocation entre les mains du bénéficiaire, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration.

L'article L 815-12 du code de la sécurité sociale précise que le service de l'allocation de solidarité aux personnes âgées est supprimé aux personnes qui établissent leur résidence en dehors du territoire métropolitain et des collectivités mentionnées à l'article L. 751-1.

L'appréciation de la condition de résidence posée par ces textes relève de l'appréciation souveraine des juges du fond. Le caractère stable et régulier de la résidence ne peut porter atteinte à la liberté d'aller et venir.

En l'espèce, il n'est pas contesté par M. [W] [F] qu'il a séjourné plus de 180 jours à l'étranger sur la période litigieuse sans en informer l'organisme social. Il explique cette situation par le fait qu'il a rencontré de graves problèmes de santé qui l'ont contraint à demeurer au Maroc.

Il produit en ce sens plusieurs certificats médicaux :

- un daté du 01/10/2015 établi par le Dr [M] [R], médecin à [Localité 4], qui mentionne que M. [W] [F] souffre de coliques néphrétiques qui nécessitent un repos,

- un daté du 01/11/2015 établi par le Dr [H], médecin à [Localité 5], qui mentionne que l'état de santé cardio vasculaire et infectieux de M. [W] [F] nécessite un repos de deux mois, du 1er/11/2015 au 31/12/2015,

- un daté du 07/10/2016 établi par le Dr [H], qui mentionne la nécessité d'un repos avec traitement jusqu'au 21 novembre 2017 sans pouvoir se déplacer,

- un daté du 24/11/2016 établi par le Dr [H], qui mentionne la nécessité d'un repos avec traitement jusqu'au 31 novembre 2017 sans pouvoir se déplacer ou voyager jusqu'au rétablissement,

- un daté du 02/01/2017 établi par le Dr [H], qui mentionne la nécessité d'un repos avec traitement pendant 30 jours sans pouvoir se déplacer en raison d'un état de santé précaire.

Si les certificats médicaux produits attestent des problèmes de santé rencontrés par M. [W] [F], ils n'établissent l'impossibilité de ce déplacer qu'à compter d'octobre 2016, et ce jusqu'au 2 février 20107, soit pour une période inférieure à 180 jours qui n'aurait pas remis en cause le droit à L'ASPA.

En conséquence, M. [W] [F] ne justifie pas d'un cas de force majeure qui expliquerait son absence du territoire national pendant plus de 180 jours, sans que cela remette en cause son droit à l'ASPA.

S'agissant du montant de l'indu, la CARSAT sollicite le remboursement de la somme de 8.903,20 euros, identique à celle mentionnée dans le courrier du 10 mai 2017, suivant décompte établi par son agent comptable en date du 14 décembre 2020.

M. [W] [F] conteste ce montant au motif que la CARSAT ne produit aucun justificatif et que les sommes qu'elle invoque ne correspondent pas à ses relevés bancaires.

Outre la valeur probante attachée à l'attestation établie par le directeur comptable et financier d'un organisme public, l'examen des relevés bancaires produits par M. [W] [F] établit que celui-ci a effectivement perçu en janvier, février, mars, juillet et octobre 2016( seuls mois de 2016 pour lesquels des relevés bancaires sont produits ) les sommes mentionnées sur le relevé de la CARSAT, soit trois fois 488,23 euros puis deux fois 489,47 euros.

Concernant les mois de mars, avril et mai 2015, seuls mois pour lesquels des relevés sont produits sur 2015, si les sommes portées au débit de la CARSAT sont de 75,95 euros en avril et mai en lieu et place des 84,64 euros et 336,96 euros mentionnés sur le relevé de l'organisme social, l'absence de production des relevés bancaires pour l'intégralité de la période concernée ne permet pas de constater l'éventuelle régularisation qui aurait pu intervenir dans les versements, étant observé que la CARSAT justifie de la mise en paiement le 9 juillet 2015 d'une somme de 1.025,43 euros alors que le montant de l'allocation due en juillet 2015 était de 488,98 euros.

En conséquence, l'indu de 8.903,20 euros réclamé à M. [W] [F] est justifié et la décision déférée sera infirmée en ce sens.

La CARSAT ne justifie pas dans ses pièces de la notification de la pénalité financière de 654 euros pour laquelle elle demande la condamnation au paiement de M. [W] [F]. Elle sera en conséquence déboutée de cette demande.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, en matière de sécurité sociale, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Infirme le jugement rendu le 30 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de Nîmes - Contentieux de la protection sociale,

Et statuant à nouveau,

Condamne M. [W] [F] à verser à la CARSAT Languedoc Roussillon, en derniers ou quittances, la somme de 8.903,20 euros au titre de l'indu résultant du versement de l'allocation de solidarité aux personnes âgées avec effet à compter du 1er mars 2015 alors que la condition de résidence en France n'est pas remplie pour les années 2015 et 2016,

Déboute la CARSAT Languedoc Roussillon de sa demande de confirmation de la pénalité financière de 654 euros,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne M. [W] [F] aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5e chambre pole social
Numéro d'arrêt : 20/02706
Date de la décision : 08/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-08;20.02706 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award