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25/05/2023 | FRANCE | N°22/03525

France | France, Cour d'appel de Nîmes, Taxes et dépens, 25 mai 2023, 22/03525


ORDONNANCE N° N° RG 22/03525 - N° Portalis DBVH-V-B7G-ITP2

du 25/05/2023

[D]

C/ [M]









O R D O N N A N C E





Ce jour,



VINGT CINQ MAI DEUX MILLE VINGT TROIS





Nous, Michel ALLAIX, Premier Président à la Cour d'Appel de NÎMES, statuant sur les recours contre les ordonnances de taxe rendues par les juridictions de première instance du ressort,



Assisté de Mme Jocelyne PUNGIER, Adjointe Administrative faisant fonction de greffier, lors des débats et du prononc

é de la décision,





AVONS RENDU L'ORDONNANCE SUIVANTE :



dans la procédure introduite par :



Maître [N] [D]

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me ...

ORDONNANCE N° N° RG 22/03525 - N° Portalis DBVH-V-B7G-ITP2

du 25/05/2023

[D]

C/ [M]

O R D O N N A N C E

Ce jour,

VINGT CINQ MAI DEUX MILLE VINGT TROIS

Nous, Michel ALLAIX, Premier Président à la Cour d'Appel de NÎMES, statuant sur les recours contre les ordonnances de taxe rendues par les juridictions de première instance du ressort,

Assisté de Mme Jocelyne PUNGIER, Adjointe Administrative faisant fonction de greffier, lors des débats et du prononcé de la décision,

AVONS RENDU L'ORDONNANCE SUIVANTE :

dans la procédure introduite par :

Maître [N] [D]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Marine SANTIMARIA, avocat au barreau de NIMES

CONTRE :

Madame [T] [M] épouse [G]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Georges POMIES RICHAUD, avocat au barreau de NIMES

Toutes les parties convoquées pour le 27 Avril 2023 par lettre recommandée avec avis de réception en date du 2 janvier 2023.

Statuant publiquement, après avoir entendu en leurs explications les parties présentes ou leur représentant à l'audience du 27 Avril 2023 tenue publiquement et pris connaissance des pièces déposées au Greffe à l'appui du recours, l'affaire a été mise en délibéré au 25 Mai 2023 par mise à disposition au Greffe ;

Par ordonnance en date du 17 octobre 2022, le bâtonnier de l'Ordre des avocats au barreau de NIMES a fixé la somme de 3 000 euros HT, soit 3 600 TTC les honoraires de Maître [N] [D], constaté que Mme [T] [M] épouse [G] a d'ores et déjà versé ladite somme de 3 600 euros TTC et débouté Me [N] [D] du surplus de ses demandes.

L'ordonnance a été notifiée le 17 octobre 2022 à Me [N] [D].

Par lettre recommandée avec accusé de réception valant déclaration d'appel, expédiée le 27 octobre 2022 et parvenue au greffe le 31 octobre 2022, Me [N] [D] a formé recours contre cette ordonnance en demandant au premier président de la réformer totalement.

Au terme de ses dernières conclusions, au détail desquelles il sera renvoyé, Me [N] [D] expose que Mme [T] [M] lui a confié la défense de ses intérêts dans le cadre d'une procédure de divorce et liquidation de son régime matrimonial commun avec M. [G], que ces procédures ont été menées à terme, que Mme [M] a perçu une prestation compensatoire de 212.728 euros et la somme de 472.806 euros au titre de la liquidation de communauté, outre l'attribution d'un véhicule Mercédès Classe A, que la cliente a été parfaitement informée des conditions dans lesquelles intervenait son avocat, dès le 1er rendez-vous le 22 juillet 2022, que la convention d'honoraires lui a été ré adressée le 28 juillet 2022, sans critique de sa part, qu'elle a réglé des provisions sur cette base, que la liquidation de communauté a été régularisée le 30 septembre 2021, qu'elle a toutefois contesté la facture de 15.264 euros TTC en date du 17 janvier 2022, en proposant une transaction à 10.000 euros, que c'est dans ces conditions qu'a été rendue l'ordonnance de taxe contestée, dont elle estime qu'elle n'a pas pris en compte certains éléments de la situation ;

Elle rappelle que Mme [M] a eu une parfaite connaissance de la convention d'honoraires, qu'elle a réalisé des diligences dont elle justifie, que le temps passé sur le dossier s'élève à 50 heures, et elle fait état de la mauvaise foi de Mme [M].

Elle demande :

Que sa requête soit déclarée recevable, et bien fondée,

Que Mme [M] soit déboutée de ses demandes,

Que l'ordonnance du bâtonnier de l'ordre des avocats de NIMES soit infirmée en ce sens qu'elle a fixé les honoraires dus à 3000 euros HT soit 3600 euros TTC, constaté que ces sommes avaient été réglées et l'a déboutée de ses autres demandes,

Que Mme [M] soit condamnée à lui verser la somme de 12720 euros HT, soit 15264 euros TTC comprenant notamment l'honoraire de résultat ;

A titre subsidiaire : et si la cour devait écarter l'honoraire de résultat, que son honoraire soit fixé à la somme de 8500 euros HT, soit 10.200 euros TTC au titre des diligences du temps passé ;

En tout état de cause, la condamnation de Mme [M] à lui verser la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions n°2 transmises par RPVA le 23 février 2023, complétées par des conclusions n°3 remises à l'audience et au détail desquelles il sera renvoyé, Madame [T] [M] expose qu'une procédure de divorce contentieux a été engagée par son époux en 2019, que cette procédure a évolué vers un divorce par consentement mutuel en 2021, qu'elle a eu deux conseils précédemment à Me [D], qu'elle n'a contacté que le 22 juillet 2021, ce alors que le règlement de la liquidation de la communauté était déjà achevé, puisqu'il a été régularisé par la signature d'un acte notarié le 30 septembre 2021, sans que Me [D] ait travaillé sur ce règlement.

Elle relève qu'il est sans intérêt de verser aux débats la procédure de taxation concernant son précédent avocat, Me [X], devant le premier président de la cour d'appel de VERSAILLES, étrangère à la présente procédure et au demeurant couverte par le secret professionnel, et qui doit de ce fait être écartée des débats dans le cadre de la présente procédure.

Elle indique en second lieu avoir réglé trois factures à Me [D] (450 euros ' frais de postulation, 1680 euros- premier rendez-vous, 1920 euros) et avoir refusé de régler la facture de 15.000 euros en date du 17 janvier 2022, faisant référence à une convention d'honoraires, prévoyant des honoraires de résultat, qu'elle indique n'avoir jamais signée et qui n'est dès lors pas applicable.

Elle conteste en troisième lieu les diligences invoquées par Me [D] , tant au titre de la liquidation du régime matrimonial des époux, qui avait été réglée avant l'intervention de Me [D] au dossier, et dont Me [D] a pris connaissance tardivement, après le 28 septembre 2021, alors que l'acte a été signé le 30 septembre suivant, que du suivi de la procédure, pour lequel les diligences alléguées ne sont pas étayées par des preuves, et n'ont pour certaines pas été suivies du résultat escompté ( usage du nom d'épouse) ;

Elle fait enfin état de sa situation de fortune, moins favorable que ne le prétend Me [D] (pension d'invalidité 1300 euros jusqu'à fin 2022, prise en charge des remboursements de trois prêts, absence de fonds sur ses comptes, absence de prestation compensatoire).

Elle demande au premier président de :

- déclarer recevable mais mal fondé le recours de Me [D],

- In limine litis, d'écarter des débats au regard de l'atteinte au secret professionnel les éléments de la procédure de taxation d'honoraires du Batonnier de [Localité 4], concernant les honoraires de Me [X] et les éléments de correspondance entre elle-même et ce dernier,

- de confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de taxe en date du 17 octobre 2022, dire que Me [D] ne saurait bénéficier d'honoraires de résultat, la débouter de ses demandes et la condamner à lui verser la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 23 février 2023 par lettre recommandée avec accusé de réception régulièrement signée.

L'affaire a été renvoyée contradictoirement à l'audience du 27 avril 2023.

A l'audience, les parties confirment leurs explications résultant de leurs dernières conclusions.

SUR CE,

Sur la forme et la recevabilité :

Au terme des dispositions de l'article 176 du décret du 27 novembre 1991, la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d'appel, qui est saisi par l'avocat ou par la partie par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Le délai de recours est d'un mois.

Lorsque le bâtonnier n'a pas pris de décision dans les délais prévus à l'article 175, le premier président doit être saisi dans le mois qui suit.

En l'espèce, par ordonnance en date du 17 août 2022, notifiée à Me [N] [D] le 17 octobre 2022, le bâtonnier de l'ordre des avocats de NIMES a fixé la somme de 3 000 euros HT, soit 3 600 TTC les honoraires de Maître [N] [D], constaté que Mme [T] [M] épouse [G] a d'ores et déjà versé ladite somme de 3 600 euros TTC et débouté Me [N] [D] du surplus de ses demandes.

Me [N] [D] a formé recours contre cette ordonnance par courrier recommandé avec avis de réception parvenu au greffe de la cour d'appel 30 octobre 2022.

Son recours formé dans le délai et formes légales est recevable.

Sur le fond :

Le texte applicable en matière de fixation des honoraires de l'avocat est l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31décembre 1971, étant précisé que le principe du recours obligatoire à la signature d'une convention d'honoraires avec le client résulte de la loi du 6 août 2015.

Article 10 de la loi 71-1130 du 31 décembre 1971

Modifié par la LOI n° 2015-990 du 6 août 2015 - art. 51 (V)

« Les honoraires de postulation, de consultation, d'assistance, de conseil, de rédaction d'actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client.

En matière de saisie immobilière, de partage, de licitation et de sûretés judiciaires, les droits et émoluments de l'avocat sont fixés sur la base d'un tarif déterminé selon des modalités prévues au titre IV bis du livre IV du code de commerce.

Sauf en cas d'urgence ou de force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat conclut par écrit avec son client une convention d'honoraires, qui précise, notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.

L'article 10 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 est désormais rédigé en ces termes :

« L'avocat informe son client, dès sa saisine, des modalités de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles et de l'ensemble des frais, débours et émoluments qu'il pourrait exposer. L'ensemble de ces informations figurent dans la convention d'honoraires conclue par l'avocat et son client en application de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 susvisée. Au cours de sa mission, l'avocat informe régulièrement son client de l'évolution du montant de ces honoraires, frais, débours et émoluments.

Des honoraires forfaitaires peuvent être convenus. L'avocat peut recevoir d'un client des honoraires de manière périodique, y compris sous forme forfaitaire.

Lorsque la mission de l'avocat est interrompue avant son terme, il a droit au paiement des honoraires dus dans la mesure du travail accompli et, le cas échéant, de sa contribution au résultat obtenu ou au service rendu au client.

La rémunération d'apports d'affaires est interdite. »

Aux termes des dispositions de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971, modifiée par la loi du 10 juillet 1991, critères rappelés par le décret du 12 juillet 2005, à défaut de convention entre l'avocat et son client, l'honoraire est fixé selon les usages, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci.

A titre liminaire, sera écartée la pièce n°17 du dossier de Me [D] correspondant à la procédure de contestation des honoraires d'un précédent avocat de Mme [M], soumise au bâtonnier de [Localité 4], cette procédure et ses annexes étant couvertes par le secret professionnel de l'avocat.

Il résulte des éléments versés aux débats que Mme [T] [M] est engagée dans une procédure de divorce initiée à compter du 8 octobre 2019 par son mari M. [G], qu'elle a été successivement assistée par un premier avocat Me [X], à laquelle a succédé Me [U], que ce dernier a dû se décharger du dossier à la date du 19 juillet 2021, que Me [D], qui intervenait jusqu'à alors comme postulante dans la procédure et a reçu un règlement à ce titre, n'est intervenue à titre de conseil de Mme [T] [M] qu'en juillet 2021, ce alors que la procédure de divorce avait été convertie en procédure par consentement mutuel.

Me [D] indique qu'une convention d'honoraires a été signée et il lui appartenait de la produire aux débats, ce qui n'est pas le cas en l'espèce (pièce n°3 du dossier de Me [D], production d'une convention d'honoraires non signée). Il convient donc de considérer qu'il n'a pas été signé de convention d'honoraires entre l'avocat et son client, mais conformément à une jurisprudence constante, l'absence de signature d'une convention d'honoraires entre le client et son avocat ne prive pas ce dernier de la rémunération de son travail qui est alors fixée en fonction des diligences accomplies par l'avocat, de la technicité du dossier, des éventuelles spécialisations de l'avocat, et de la situation de fortune du client. En l'absence de convention d'honoraires, la question relative à l'attribution éventuelle d'honoraires de résultat ne se pose plus.

Il ressort des pièces versées par Me [D] (pièces n° 13, 23 et 24) qu'elle est effectivement intervenue au soutien des intérêts de Mme [M], à titre principal, pour la finalisation de la procédure de divorce par consentement mutuel qui a été menée jusqu'à son terme avec son assistance, mais également de manière plus ponctuelle pour la finalisation ultime de l'acte de liquidation des intérêts patrimoniaux communs des époux, cet acte ayant été préparé de manière anticipée par le notaire Me [V] et par le précédent conseil Me [U].

La pièce n° 13 du dossier versée aux débats par Me [D] fait état en effet de diligences et d'échanges de mail entre elle, sa cliente Mme [T] [M] et le notaire en vue de la finalisation de l'acte.

Me [D], avocate d'expérience, a apporté son concours à sa cliente pour une assistance dans le cadre d'une procédure de divorce par consentement mutuel mais également pour la finalisation d'une convention de liquidation de son régime matrimonial, opération relativement lourde et complexe au regard de la consistance du patrimoine des époux. Bien qu'elle ne soit intervenue qu'à la fin des opérations de liquidation, elle y a néanmoins apporté son concours et il doit en être tenu compte.

Il n'est pas fourni d'éléments justifiant d'une situation de précarité particulière de Mme [T] [M].

En l'état de ces éléments, les honoraires de Me [N] [D] seront fixés à la somme de 3500 € HT, soit 4 200 € TTC.

L'équité ne commande pas qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Statuant en matière de contestation d'honoraires d'avocats, publiquement et par décision contradictoire,

Disons recevable le recours de Me [N] [D] à l'encontre de l'ordonnance de taxe en date du 17 octobre 2022, par laquelle le bâtonnier de l'Ordre des avocats au barreau de NIMES a fixé à la somme de 3 000 euros HT, soit 3 600 TTC les honoraires de Me [N] [D], constaté que Mme [T] [M] épouse [G] a d'ores et déjà versé ladite somme de 3 600 euros TTC et débouté Me [N] [D] du surplus de ses demandes,

Ecartons des débats la pièce n° 17 versée par Me [N] [D],

Réformons ladite ordonnance et fixons les honoraires de Me [N] [D] à la somme de 3 500 euros HT, soit 4 200 TTC,

Constatons que Mme [T] [M] épouse [G] a d'ores et déjà versé la somme de 3 600 euros TTC et disons qu'elle devra verser à Me [N] [D] la somme complémentaire de 800 €,

Disons n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Laissons à chaque partie la charge de ses dépens.

Ordonnance signée par M. Michel ALLAIX, Premier Président et par Mme Jocelyne PUNGIER, Adjointe Administrative faisant fonction de greffier.

LE GREFFIER LE PREMIER PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : Taxes et dépens
Numéro d'arrêt : 22/03525
Date de la décision : 25/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-25;22.03525 ?
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