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23/05/2023 | FRANCE | N°20/02420

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5e chambre pole social, 23 mai 2023, 20/02420


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 20/02420 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HZ4N



EM/DO



POLE SOCIAL DU TJ DE NIMES

09 septembre 2020



RG :19/00677





[S]



C/



CAISSE NATIONALE MILITAIRE DE SECURITE SOCIALE



















Grosse délivrée le 23 MAI 2023 à :



- Me HILAIRE-LAFON

- Me QUOIREZ



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COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social



ARRÊT DU 23 MAI 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de NIMES en date du 09 Septembre 2020, N°19/00677



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 20/02420 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HZ4N

EM/DO

POLE SOCIAL DU TJ DE NIMES

09 septembre 2020

RG :19/00677

[S]

C/

CAISSE NATIONALE MILITAIRE DE SECURITE SOCIALE

Grosse délivrée le 23 MAI 2023 à :

- Me HILAIRE-LAFON

- Me QUOIREZ

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social

ARRÊT DU 23 MAI 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de NIMES en date du 09 Septembre 2020, N°19/00677

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

A l'audience publique du 07 Mars 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 23 Mai 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANT :

Monsieur [F] [S]

né le 20 Août 1962 à [Localité 5]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Philippe HILAIRE-LAFON, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉE :

CAISSE NATIONALE MILITAIRE DE SECURITE SOCIALE

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Céline QUOIREZ de la SELARL CELINE QUOIREZ, avocat au barreau de NIMES

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 23 Mai 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Par courrier recommandé du 09 juillet 2018 la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale a notifié à M. [F] [S], infirmier, une demande de répétition de l'indû pour la somme de 10 361 euros correspondant à des soins dispensés à Mme [V] [R], décédée le 20 juin 2017.

Par courrier recommandé du 04 septembre 2018, M. [F] [S] a saisi la commission de recours amiable de la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale en contestation de cet indu, laquelle, par décision du 09 mai 2019, a rejeté son recours.

En contestation de cette décision, M. [F] [S] a saisi le pôle social du tribunal grande instance de Nîmes par courrier du 05 juillet 2019.

Par jugement du 09 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Nîmes a :

- dit le recours de M. [F] [S] recevable mais l'a dit non fondé,

- dit la décision rendue par la Commission de recours amiable en sa séance du 9 mai 2019 régulière en la forme,

- confirmé la décision prise par la Commission de recours amiable le 9 mai 2019 en ce qu'elle a validé l'indu établi à l'encontre de M. [F] [S] de frais kilométriques,

- dit la répétition de l'indu réclamé à M. [S] à hauteur de 10 361 euros bien fondée et conforme,

- débouté les parties de leurs autres demandes plus amples et contraires,

- condamné M. [F] [S] aux entiers dépens.

Par acte du 30 septembre 2020, M. [F] [S] a régulièrement interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 15 septembre 2020.

Suivant acte du 29 novembre 2022, l'affaire a été fixée à l'audience du 07 mars 2023 à laquelle elle a été retenue.

Par conclusions écrites, déposées et développées oralement à l'audience, M. [F] [S] demande à la cour de :

- le recevoir en son appel à l'encontre du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nîmes, contentieux de la protection sociale, le 9 septembre 2020,

- le dire juste et bien fond,

- prononcer la nullité du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nîmes, contentieux de la protection sociale, le 09 septembre 2020 pour défaut de réponse à conclusions valant défaut de motif (article 455 du code de procédure civile),

Évoquer,

- le recevoir en son recours formé à l'encontre de la décision de rejet rendue par la Commission des Recours Amiables de la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale dans sa séance du 9 mai 2019,

- par voie de conséquence, annuler la décision de rejet rendue par la Commission des Recours Amiables de la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale dans sa séance du 9 mai 2019,

Si mieux n'aime la cour,

- réformer en toutes ses dispositions la décision de rejet rendue par la Commission des Recours Amiables de la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale dans sa séance du 9 mai 2019,

- débouter la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale de sa demande de répétition de l'indu ainsi que de sa demande au titre des frais irrépétibles du fait de sa succombance,

- condamner la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale à lui payer la somme de 5 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale aux entiers dépens.

Il soutient que :

- au visa de l'article 455 du code de procédure civile, la procédure devant la commission de recours amiable est irrégulière au motif que la commission a écarté des débats sa contestation de l'indu portant sur les majorations de coordination infirmier, les surfacturations de dimanches et jours fériés et sur les indemnités de déplacement, estimant qu'elles n'étaient pas contestées alors que le recours était général et portait sur l'intégralité de l'indu de quelque nature qu'il soit,

- l'article L1110-8 du code de la santé publique rappelle que le libre choix est un principe fondamental de la législation sanitaire et que les limitations apportées à ce principe ne peuvent être introduites qu'en considération des capacités techniques des établissements, de leur mode de tarification et des critères de l'autorisation à dispenser des soins remboursables aux assurés sociaux et en aucun cas pour des raisons pécuniaires ou d'économie ; tout en reconnaissant le principe de la liberté de choix de praticien par le malade, la commission puis le tribunal vont retenir un principe économique qui est contraire à la loi, dans la mesure où il a pour conséquence de réduire la liberté de choix en refusant le remboursement des frais kilométriques lesquels dès lors demeurent à la charge du patient,

- la commission de recours amiable a violé l'article 5 du code civil dans la mesure où le tribunal s'est fondé sur une décision rendue dans une autre instance qui ne le concernait pas ; la commission de recours amiable a méconnu le droit de la preuve dans la mesure où la preuve ne saurait résulter d'un document émanant du demandeur ; l'état récapitulatif annexé à la demande de répétition d'indu n'est corroboré par aucun élément qui permette de vérifier le caractère indu des actes contestés ; de même, rien ne permet de justifier la présence d'infirmiers domiciliés dans un ressort plus proche du domicile du patient et de leur capacité à intervenir ; les conclusions développées par la caisse n'apportent aucune explication de plus quant aux actes qui seraient indûment facturés et auraient été ensuite réglés ; le premier juge n'a pas répondu à cette argumentation, de sorte qu'il a entaché sa décision de nullité,

- l'indu n'est pas justifié ; la majoration de coordination infirmière (MCI) est appliquée lorsque l'infirmier réalise à domicile un pansement lourd et complexe ; cette prise en charge donne lieu à la MCI du fait du rôle spécifique de l'infirmière en matière de coordination, de continuité de soins et de gestion de risques liés à l'environnement; cette majoration peut être pratiquée une fois par intervention ; la caisse n'apporte aucun élément de contestation sur ces MCI qu'elle rejette en bloc et sans indiquer pour quelles raisons alors que des grands pansements avaient été prescrits à Mme [R].

Par conclusions déposées et développées oralement à l'audience, la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale demande à la cour de :

- débouter M. [F] [S] de ses demandes,

- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Nîmes du 09 septembre 2020,

- confirmer que l'appelant est redevable à son encontre de la somme totale de 10 361 euros,

- confirmer qu'il lui appartient de procéder au versement de ce dernier montant,

- condamner M. [F] [S] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que :

- contrairement à ce que soutient M. [F] [S], la procédure devant la commission de recours amiable est régulière ; à la lecture de la saisine de commission, il ressort que seuls les moyens tirés du droit au libre choix du praticien et des conditions de prise en charge des frais de déplacements fixées par l'article 13 de la Nomenclature Générale des Actes Professionnels ont été soulevés ; aucun autre moyen relatif aux facturations de majorations de MCI, des surfacturations de 'dimanche et jour férié' et des indemnités de déplacement n'a été développé par le requérant ; c'est ainsi que le tribunal a considéré que c'est à raison que la commission de recours amiable n'a répondu qu'à la contestation soulevée,

- le cabinet de M. [F] [S] était situé à 25 kms du lieu de résidence de Mme [R] et dans une commune différente ; or, 11 cabinets d'infirmiers ont été recensés dans le ressort de la commune de [Localité 7] où résidait [V] [R] laquelle ne relevait ni du dispositif PRADO (programme d'accompagnement du retour à domicile) ni du programme de soins en pratique avancée ; en conséquence, selon l'article 13 de la NGAP, la prise en charge des indemnités kilométriques facturées par M. [F] [S] ne pouvait pas être calculée sur la base des kilomètres réellement parcourus ; sans contester la liberté de choix du praticien par le patient, la commission de recours amiable a maintenu l'indu, la réglementation imposant qu'à l'exclusion du dispositif PRADO les indemnités kilométriques sont calculées sur la base du professionnel de santé le plus proche ; le point C de cet article fixe les conditions de prise en charge des indemnités kilométriques lorsque la résidence du malade et le domicile du professionel de santé ne sont pas situés dans la même agglomération,

- l'indu est justifié ; son activité principale est la prise en charge des frais médicaux engagés par ses assurés ; les professionnels de santé lui transmettent leurs facturations directement ; elle les rembourse sur la base des informations reçues, avant de vérifier si les factures réglées sont justifiées médicalement et réglementairement ; si des anomalies sont constatées, un indu peut être notifié à l'encontre du professionnel de santé dans le cadre de l'article L133-4 du code de la sécurité sociale ; il appartient donc aux professionnels de santé de pouvoir prouver que celles-ci sont justifiées ; ainsi, la preuve n'étant pas exigée avant le paiement, c'est donc a posteriori que les professionnels de santé doivent apporter des justificatifs ; enfin , les motifs de l'indu étaient clairement identifiés et précis ; c'est donc à juste titre que le tribunal judiciaire de Nîmes a considéré que la répétition d'indu réclamée à M. [F] [S] était bien fondée et conforme,

- contrairement à ce que laisse entendre M. [F] [S], elle n'a pas méconnu la réglementation relative à la facturation des MCI ; dès lors que ces majorations ont été facturées à tort, elle est bien fondée à réclamer le reversement des prestations.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs écritures déposées et soutenues oralement lors de l'audience.

MOTIFS

La Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale a notifié à M. [F] [S] le 09 juillet 2018 un indu : 'à la suite d'un contrôle des prestations servies par la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale, des anomalies ont été constatées sur les facturations relatives aux soins dispensés à Mme [V] [R] du 16/04/2015 au 24/05/2017. L'analyse des facturations a identifié, au cours de la période de soins précitée une facturation d' indemnités kilométriques non justifiées. En effet :

- l'assurée ne fait pas partie d'un programme PRADO,

- il existe d'autres infirmiers et infirmières plus proches du domicile de l'assurée que vous,

- aucune dérogation pour vous occuper de ce patient n'est parvenue à mes services;

Par ailleurs, il a été observé :

- des facturations de MCI au cours de séances de soins d'hygiène, alors que les conditions d'attribution prévues à l'article 23.2 des dispositions générales de la Nomenclature Générale des Actes Professionnels ne sont pas remplies,

- une facturation de majorations 'dimanche et jours fériés' au-delà du nombre de déplacements réalisés,

- des indemnités de déplacement (IFA) associées aux démarches de soins infirmiers déjà facturées avec les soins d'hygiène.

Vous trouverez joint en annexe, le tableau récapitulatif reprenant pour chaque prestation concerée, la nature des actes, leur date respective d'exécution et de règlement ainsi que les montants versés à tort.

A ce titre vous êtes redevable de la somme de 10 361 euros...'.

Sur la régularité de la procédure devant la commission de recours amiable et du jugement déféré :

L'article R142-4 du code de la sécurité sociale dispose que la commission ( de recours amiable) donne, sur les affaires qui lui sont soumises, son avis au conseil, au conseil d'administration ou à l'instance régionale, qui statue et notifie sa décision à l'intéressé. Cette décision est motivée.(...)

En l'espèce, M. [F] [S] soutient que la commission de recours amiable de la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale a écarté des débats l'indu concernant les MCI, les surfacturations des dimanches et jours fériés et les indemnités de déplacement au motif qu'elles n'étaient pas contestées, ce qui est faux.

La Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale produit la lettre de saisine de la commission de recours amiable par M. [F] [S], datée du 04 septembre 2018, et libellé ainsi :

'les raisons de ce recours sont les suivantes : ...vous indiquez que l'assuré ne fait pas partie d'un programme PRADO sans indiquer les conséquences que cela aurait sur la facturation contestée. Par suite, vous contestez les indemnités kilométriques aux motifs qu'il existerait d'autres infirmiers et infirmières plus proches du domicile de l'assuré que M. [F] [S]. Cette argumentation ne résiste pas à l'analyse...( Après avoir fait référence à l'article L1110-8 du code de la santé publique, la position du Conseil constitutionnel et la jurisprudence de la CJCE et de la Cour de cassation, l'article 13 de la NGAPP ) dans ces conditions, vous ne sauriez imposer à un patient de choisir le praticien le plus proche de son domicile sans violer la loi constitutionnelle de sorte que de ce premier chef la contestation doit êre reçue...

Il vous appartient en votre qualité de demandeur à la répétition de l'indu de rapporter le bien fondé de votre prétention ce qui n'est pas le cas en l'espèce. A ce propos, les documents que vous produisez ne sauraient établir cette démonstration dans la mesure où il résulte de l'article L1353 que 'nul ne peut se constituer une preuve à soit-même...cette preuve ne saurait résulter de ce listing de clients sans que soient versés aux débats les justificatifs des actes qui ont été remboursés à tort selon la caisse d'autant que ce listing qui constitue une preuve à soi-même, irrecevable en droit, ne saurait rapporter cette preuve...'.

Contrairement à ce que soutient l'appelant, force est de constater que la commission de recours amiable a répondu aux seuls arguments soulevé dans la lettre de saisine, développés à l'appui de sa contestation, M. [F] [S] n'ayant évoqué à aucun moment, comme l'ont justement rappelé les premiers juges, d'autres moyens de contestation portant sur les MCI, des dimanches et jours fériés et des indemnités de déplacement ; c'est donc à juste titre que la commission de recours amiable a pu considérer que ces points n'étaient pas contestés par M. [F] [S].

Par ailleurs, la décision de la commission de recours amiable de la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale est motivée tant en droit qu'en fait, et de façon précise ; elle a répondu aux contestations soulevées par l'appelant et aux argumentations qu'il avait développées dans la lettre de saisine concernant le principe de libre choix du praticien par le patient et les conditions de prise en charge des frais de déplacement.

De surcroît, M. [F] [S] mentionne dans ses conclusions soutenues oralement à l'audience un passage qu'il dit avoir extrait de sa lettre de saisine relatif à un 'doublon de facturation' et dans lequel il fait référence à l'article L133-4 du code de la sécurité sociale, il indique qu'il aurait régularisé l'erreur qu'il aurait commise concernant des doubles facturations et il n'est pas débiteur vis-à-vis de l'assurée, alors qu'il ne produit pas la lettre de saisine et que celle produite par la caisse ne contient manifestement cet extrait.

Enfin, le jugement entrepris est motivé et répond à chacun des moyens soulevés par M. [F] [S] de sorte qu'il ne peut encourir une quelconque annulation pour défaut de motivation.

M. [F] [S] n'établit donc pas que la procédure devant la commission de recours amiable soit irrégulière et que l'annulation du jugement déféré soit justifiée.

Il convient dès lors de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la décision rendue par la commission de recours amiable en sa séance du 09 mai 2019 est régulière en la forme.

Sur le principe du libre choix du praticien par le client :

L'article L1110-8 du code de la santé publique dispose dans sa version applicable que le droit du malade au libre choix de son praticien et de son établissement de santé est un principe fondamental de la législation sanitaire.

Les limitations apportées à ce principe par les différents régimes de protection sociale ne peuvent être introduites qu'en considération des capacités techniques des établissements, de leur mode de tarification et des critères de l'autorisation à dispenser des soins remboursables aux assurés sociaux.

L'article L162-7-1 du code de la sécurité sociale dispose, dans sa version applicable que la prise en charge ou le remboursement par l'assurance maladie de tout acte ou prestation réalisé par un professionnel de santé, dans le cadre d'un exercice libéral ou d'un exercice salarié auprès d'un autre professionnel de santé libéral, ou en centre de santé ou dans un établissement ou un service médico-social, ainsi que, à compter du 1er janvier 2005, d'un exercice salarié dans un établissement de santé, à l'exception des prestations mentionnées à l'article L. 165-1, est subordonné à leur inscription sur une liste établie dans les conditions fixées au présent article.L'inscription sur la liste peut elle-même être subordonnée au respect d'indications thérapeutiques ou diagnostiques, à l'état du patient ainsi qu'à des conditions particulières de prescription, d'utilisation ou de réalisation de l'acte ou de la prestation. Lorsqu'il s'agit d'actes réalisés en série, ces conditions de prescription peuvent préciser le nombre d'actes au-delà duquel un accord préalable du service du contrôle médical est nécessaire en application de l'article L. 315-2 pour poursuivre à titre exceptionnel la prise en charge, sur le fondement d'un référentiel élaboré par la Haute Autorité de santé ou validé par celle-ci sur proposition de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie.(...)

L'article 13C des dispositions générales de la Nomenclature Générale des Actes Professionnels relatives aux indemnité horokilométrique (IK), prévoit que :

'lorsque la résidence du malade et le domicile professionnel du professionnel de santé ne sont pas situés dans la même agglomération, et lorsque la distance qui les sépare est supérieure à 2 km en plaine ou 1 km en montagne, les frais de déplacement sont remboursés sur la base d'une indemnité horokilométrique dont la valeur unitaire est déterminée dans les mêmes conditions que celles des lettres clés prévues à l'article 2.

L'indemnité horokilométrique s'ajoute à la valeur de l'acte ; s'il s'agit d'une visite, cette indemnité s'ajoute au prix de la visite et non à celui de la consultation. Pour les actes en K, Z, SP, SF, SFI, AMS, AMK, AMC, AMI, AIS, DI, AMX, BSA, BSB, BSC, TLL, TLD, TLS, AMP, POD, AMO et AMY de la NGAP ou les actes équivalents inscrits à la CCAM, l'indemnité horokilométrique se cumule avec les indemnités forfaitaires prévues aux paragraphes A et D.

L'indemnité horo-kilométrique est calculée et remboursée dans les conditions ci après :

1° L'indemnité due au professionnel de santé est calculée pour chaque déplacement à partir de son domicile professionnel et en fonction de la distance parcourue sous déduction d'un nombre de kilomètres fixé à 2 sur le trajet tant aller que retour. Cet abattement est réduit à 1 km en montagne et en haute montagne dont les zones sont définies par la Loi n°85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne.

2° Les indemnités horokilométriques pour les actes en AMI, AIS, DI, AMX, BSA, BSB, BSC, TLL, TLD et TLS et en cumul avec l'IFD ou l'IFI sont soumises à un dispositif de plafonnement journalier du montant facturé. Cet abattement est déterminé au regard de la distance journalière facturée par l'infirmier (la distance journalière étant définie comme le cumul des kilomètres facturables, après déduction des 1 et 2 km définis à l'article 13 des dispositions générales de la nomenclature précitée, du premier au dernier patient du début à la fin du jour civil de réalisation des soins). Les modalités de l'abattement sont les suivantes :

-jusqu'à 299 kilomètres cumulés inclus, aucun abattement n'est appliqué ;

-à partir de 300 kilomètres et jusqu'à 399 kilomètres cumulés, bornes incluses, un abattement de 50% du tarif du remboursement de ces indemnités kilométriques facturées est appliqué ;

-à partir de 400 kilomètres cumulés inclus, un abattement de 100% du tarif du remboursement de ces indemnités kilométriques facturés.

En parallèle, les infirmiers conservent la possibilité de pouvoir facturer les indemnités kilométriques à partir du cabinet professionnel et, ce même, dans le cadre des tournées journalières au domicile des patients pour lesquels les infirmiers ne reviennent pas systématiquement, entre chaque passage, à leur cabinet.

3° Le remboursement accordé par la caisse pour le déplacement d'un professionnel de santé ne peut excéder le montant de l'indemnité calculé par rapport au professionnel de santé de la même discipline, se trouvant dans la même situation à l'égard de la convention, dont le domicile professionnel est le plus proche de la résidence du malade.

A titre dérogatoire, la règle mentionnée au 3° ne s'applique pas :

lorsque les déplacements du professionnel de santé sont effectués dans le cadre des programmes de retour à domicile mis en place par les Caisses d'Assurance Maladie répondant aux objectifs des articles L. 1110-1 du Code de la santé publique, L. 162-1-11 alinéa 4 du Code de la sécurité sociale, et L. 111-2-1 et L. 111-1 du Code de la sécurité sociale' .

Depuis la décision de l'UNCAM du 11 mars 2005, toutes les modifications de la liste des actes et des prestations font l'objet de décisions de l'UNCAM publiées au Journal officiel ; les évolutions concernant la NGAP pour les actes cliniques, dentaires ou les actes des auxiliaires médicaux, sont signalées à l'article III-4 du Livre III de la Liste.

Comme le rappellent justement les premiers juges, l'UNCAM relative à la liste des actes et prestations pris en charge par l'assurance maladie prévoit à l'article 333-4 I 'l'arrêté du 27 mars 1972 relatif à la Nomenclature Générale des Actes Professionnels des médecins, des chirurgiens dentistes des sages femmes et auxiliaires médicaux' ; les premiers juges mentionnent par ailleurs l'article 13 C de la NGAPP tel qu'il a été modifié par décision UNCAM du 20/03/2012: 'indemnités horokilométriques', plus particulièrement au titre des dérogations: ' la règle ne s'applique pas lorsque les déplacements du professionnel de santé sont effectués dans le cadre des programmes de retour à domicile mis en place par les caisses d'assurance maladie répondant aux objectifs des articles ...'.

L'article L1110-8 susvisé rappelle le principe essentiel du libre choix du praticien par l'assuré mais prévoit la possibilité de limitations en fonction de certains critères ; les restrictions résultant de contraintes budgétaires auxquelles les organismes de sécurité sociale sont confrontés ne sont manifestement pas exclues par ces dispositions légales.

En l'espèce, Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale justifie par la production d'un extrait du site internet Via Michelin que les communes de [Localité 6], lieu où est situé le cabinet de M. [F] [S], et de [Localité 7], lieu de résidence de la patiente, [V] [R], sont distantes de 25,7 kms et, par la production d'un extrait des pages jaunes, qu'il existe 11 infirmiers exerçant dans cette dernière commune.

Il n'est pas contesté que [V] [R] ne bénéficiait pas du dispositif PRADO, de sorte que la dérogation prévue à l'article 13C de la NGAPP ne pouvait pas s'appliquer.

La contestation soulevée par M. [F] [S] sur ce point n'est pas justifiée et le jugement entrepris sera donc confirmé.

Sur le bien fondé de l'indu :

Depuis la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 (Journal officiel du 17 août), la prise en charge ou le remboursement par l'assurance maladie des actes médicaux et paramédicaux, est subordonnée à leur inscription sur la liste mentionnée à l'article L.162-1-7 du Code de la sécurité sociale.

L'article L133-4 du code de la sécurité sociale dispose, dans sa version applicable au présent litige, qu'en cas d'inobservation des règles de tarification ou de facturation :

1° Des actes, prestations et produits figurant sur les listes mentionnées aux articles L. 162-1-7, L. 162-17, L. 165-1, L. 162-22-7, L. 162-22-7-3 et L. 162-23-6 ou relevant des dispositions des articles L. 162-22-1, L. 162-22-6 et L. 162-23-1 ;

2° Des frais de transports mentionnés à l'article L. 160-8,

l'organisme de prise en charge recouvre l'indu correspondant auprès du professionnel ou de l'établissement à l'origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l'assuré, à un autre professionnel de santé ou à un établissement.

Il en est de même en cas de facturation en vue du remboursement, par les organismes d'assurance maladie, d'un acte non effectué ou de prestations et produits non délivrés.

Lorsque le professionnel ou l'établissement faisant l'objet de la notification d'indu est également débiteur à l'égard de l'assuré ou de son organisme complémentaire, l'organisme de prise en charge peut récupérer la totalité de l'indu. Il restitue à l'assuré et, le cas échéant, à son organisme complémentaire les montants qu'ils ont versés à tort.

Lorsque l'action en recouvrement porte sur une activité d'hospitalisation à domicile facturée par un établissement de santé mentionné à l'article L. 6125-2 du code de la santé publique, l'indu notifié par l'organisme de prise en charge est minoré d'une somme égale à un pourcentage des prestations facturées par l'établissement. Ce pourcentage est fixé par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.

L'action en recouvrement, qui se prescrit par trois ans, sauf en cas de fraude, à compter de la date de paiement de la somme indue, s'ouvre par l'envoi au professionnel ou à l'établissement d'une notification de payer le montant réclamé ou de produire, le cas échéant, leurs observations.

Si le professionnel ou l'établissement n'a ni payé le montant réclamé, ni produit d'observations et sous réserve qu'il n'en conteste pas le caractère indu, l'organisme de prise en charge peut récupérer ce montant par retenue sur les versements de toute nature à venir.

En cas de rejet total ou partiel des observations de l'intéressé, le directeur de l'organisme d'assurance maladie adresse, par lettre recommandée, une mise en demeure à l'intéressé de payer dans le délai d'un mois. La mise en demeure ne peut concerner que des sommes portées sur la notification.

Lorsque la mise en demeure reste sans effet, le directeur de l'organisme peut délivrer une contrainte qui, à défaut d'opposition du débiteur devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, comporte tous les effets d'un jugement et confère notamment le bénéfice de l'hypothèque judiciaire. Une majoration de 10 % est applicable aux sommes réclamées qui n'ont pas été réglées aux dates d'exigibilité mentionnées dans la mise en demeure. Cette majoration peut faire l'objet d'une remise.

Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application des quatre alinéas qui précèdent.

Lorsque la demande d'un organisme de prise en charge porte exclusivement sur le remboursement de prestations indues en raison de l'inobservation des règles de tarification ou de facturation des actes imposées au professionnel de santé, que celles-ci résultent d'une simple erreur ou d'une faute délibérée, seule l'action engagée selon la procédure de recouvrement de l'article'L.133-4 du Code de la sécurité sociale est recevable.

Lorsque le versement d'une prestation en nature indue résulte de l'inobservation de la nomenclature générale des actes professionnels, de la nomenclature des actes de biologie médicale, ou de la facturation d'un acte non effectué, l'organisme de sécurité sociale recouvre auprès du professionnel de santé l'indu correspondant. Pour son recouvrement, l'indu est assimilé à une cotisation de sécurité sociale.

Le régime de la preuve propre au contentieux du recouvrement de l'indu engagé par les organismes d'assurance maladie à l'encontre des professionnels et établissements de santé obéit aux principes directeurs suivants':

- il incombe à l'organisme d'assurance maladie qui est à l'initiative de la demande d'indu de rapporter la preuve du bien fondé de sa demande, et plus précisément, du non-respect des règles de tarification et de facturation des actes, soins et prestations litigieux par le professionnel ou l'établissement de santé ,

- le professionnel ou l'établissement de santé peut discuter les éléments de preuve produits par l'organisme à l'appui de sa demande,

- il appartient enfin au juge du fond, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve soumis par les parties, de se prononcer sur le bien fondé, dans leur principe et dans leur montant, des sommes réclamées.

Il est de jurisprudence constante que le demandeur à l'action en contestation de la décision de la caisse, tendant au recouvrement d'un indu, doit rapporter la preuve, qui lui incombe, du type d'actes concernés et de la tarification appliquée par ses soins et pour chacun d'entre eux.

En l'espèce, à l'appui de sa demande de répétition d'indu, la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale produit aux débats un tableau récapitulatif des prestations versées à M. [F] [S] pour la période du 16 avril 2015 au 24 mai 2017, dont il n'est pas contesté que l'appelant en a été destinataire, sur lequel sont mentionnés la date des soins, la date des versements effectués par la caisse, le numéro de facture correspondante, les actes faturés avec la cotation et le montant remboursé, et concernant les trop versés, les cotations qui auraient dû être visées et les montants dus.

Par la production de ce tableau, la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale a rapporté la preuve du bien fondé de sa demande, et plus précisément, du non-respect des règles de tarification et de facturation des actes, soins et prestations litigieux par M. [F] [S].

M. [F] [S] critique ce tableau au motif qu'aucun élément ne permet de vérifier le caractère indu des actes contestés et que rien ne permet de justifier la présence d'infirmiers domiciliés dans le ressort plus proche du domicile du patient et leur capacité à intervenir.

Or, en sa qualité d'auxiliaire de santé, M. [F] [S] n'était pas censé ignorer les dispositions de la Nomenclature Générale des Actes Professionnels qu'il se devait d'appliquer strictement, ni la présence de plusieurs confrères dans la commune de résidence de sa patiente.

Concernant les MCI, l'article 23.3 des dispositions générales de la Nomenclature Générale des Actes Professionnels prévoit que 'lorsque l'infirmière réalise à domicile un pansement lourd (cotation AMI4) et complexe décrit au titre XVI, chapitre I article 3 ou chapitre III article 5bis, ou des soins inscrits au titre XVI à un patient en soins palliatifs, ces prises en charge donnent lieu à la majoration de coordination infirmières du fait du rôle spécifique de l'infirmière en matière de coordination, de continuité des soins et de gestion des risques liés à l'environnement...' .

A l'examen du tableau récapitulatif dont s'agit, il apparaît que M. [F] [S] a cumulé des séances de soins infirmiers (cotés AIS3) avec des cotations AMI4 ; pour la période du 16 avril 2015 au 20 juillet 2016, M. [F] [S] a facturé 2MCI par jour alors qu'il ne justifie pas avoir réalisé des soins cotés AMI4 ; pour la période du 25 juillet 2016 au 25 septembre 2016, il a facturé 2MCI et 1AMI4 par jour alors qu'une seule MCI pouvait été prise en charge ; pour la période du 26 septembre 2016 au 24 mai 2017, il a facturé 2MCI et 2 AMI4 par jour, la caisse n'a effectué aucune modification des cotations.

M. [F] [S] soutient avoir réalisé des 'pansements lourds' sans pour autant en préciser la période et sans en justifier.

Il s'en déduit que M. [F] [S] n'a pas appliqué les textes de la Nomenclature Générale des Actes Professionnels susvisés.

De son côté, contrairement à ce que prétend l'appelant, la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale n'a pas méconnu la réglementation relative à la facturation des MCI.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

Au vu de l'ensemble de ces considérations, il convient de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière de sécurité sociale et en dernier ressort ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nîmes, contentieux de la protection sociale, le 09 septembre 2020,

Déboute M. [F] [S] de l'intégralité de ses prétentions,

Condamne M. [F] [S] à payer à la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale à la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne M. [F] [S] aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5e chambre pole social
Numéro d'arrêt : 20/02420
Date de la décision : 23/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-23;20.02420 ?
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