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16/05/2023 | FRANCE | N°20/01761

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ta, 16 mai 2023, 20/01761


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 20/01761 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HYDM



CRL/DO



POLE SOCIAL DU TJ DE PRIVAS

02 juillet 2020



RG :19/469







Société [5]



C/



URSSAF RHONE ALPES



















Grosse délivrée le 18 AVRIL 2023 à :



- Me DENKIEWICZ

- Me NISOL







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COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale TA



ARRÊT DU 16 MAI 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de PRIVAS en date du 02 Juillet 2020, N°19/469



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoi...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 20/01761 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HYDM

CRL/DO

POLE SOCIAL DU TJ DE PRIVAS

02 juillet 2020

RG :19/469

Société [5]

C/

URSSAF RHONE ALPES

Grosse délivrée le 18 AVRIL 2023 à :

- Me DENKIEWICZ

- Me NISOL

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale TA

ARRÊT DU 16 MAI 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de PRIVAS en date du 02 Juillet 2020, N°19/469

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

A l'audience publique du 07 Février 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 18 Avril 2023 et prorogé ce jour ;

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

Société [5]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Bruno DENKIEWICZ de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE :

URSSAF RHONE ALPES

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Pierre-luc NISOL de la SELARL ACO, avocat au barreau de VIENNE

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 16 Mai 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SAS [5] a fait l'objet d'un contrôle de l'application des règles de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires, par les services de l'URSSAF Rhône Alpes pour la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016.

Par une lettre d'observations du 6 novembre 2018, l'URSSAF a fait part de son projet de procéder au redressement de la SAS [5], pour un montant global en principal de 161.812 euros portant sur les points suivants:

- point n°1 : chômage partiel - activité partielle - défaut ou erreur d'assiette : 148.410 euros,

- point n°2 : frais professionnels non justifiés - frais d'entreprise : 13.402 euros.

En réponse aux observations de la SAS [5] formulées par courrier du 27 novembre 2018, l'URSSAF par courrier du 5 février 2019, a maintenu l'ensemble des chefs de redressement.

Le 9 avril 2019, l'URSSAF Rhône Alpes a mis en demeure la SAS [5] de lui régler, ensuite de ce contrôle, la somme de 181.894 euros correspondant à 161.811 euros de cotisations et contributions et 20.083 euros de majorations de retard.

La SAS [5] a contesté cette mise en demeure en saisissant la Commission de Recours Amiable de l'URSSAF le 12 avril 2019, laquelle dans sa séance du 29 novembre 2019 a maintenu l'ensemble des chefs de redressement.

Le 9 mai 2019, l'URSSAF Rhône Alpes a mis en demeure la SAS [5] de lui régler, la somme de 332 euros de majorations de retard, correspondant au recalcul des majorations de retard ensuite du paiement du montant du redressement par la cotisante.

La SAS [5] a contesté cette mise en demeure en saisissant la Commission de Recours Amiable de l'URSSAF le 17 juin 2019.

Par requête en date du 3 juillet 2019, la SAS [5] a saisi le tribunal de grande instance de Privas d'un recours contre la décision implicite de rejet de la Commission de Recours Amiable, puis par requête en date du 13 janvier 2020, d'un recours contre la décision explicite de rejet, les deux instances faisant l'objet d'une décision de jonction.

Par jugement en date du 2 juillet 2020, le tribunal judiciaire de Privas, désormais compétent pour connaître de ce litige, a :

- débouté la SAS [5] de ses demandes,

- confirmé reconventionnellement les mises en demeure des 9 avril et 9 mai 2019 ainsi que la décision rendue par la Commission de Recours Amiable en date du 29 novembre 2019,

- condamné reconventionnellement la SAS [5] à payer à l'URSSAF Rhône Alpes la somme de 450 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SAS [5] aux entiers dépens.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée le 15 juillet 2020, la SAS [5] a régulièrement interjeté appel de cette décision. Enregistrée sous le numéro RG 20 01761, l'examen de cette affaire a été appelé à l'audience du 10 janvier 2023.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, la SAS [5] demande à la cour de :

- réformer le jugement du Pôle social du tribunal judiciaire de Privas du 2 juillet 2020 et par conséquent,

A titre principal,

- annuler le redressement au titre de l'irrégularité de la lettre d'observations à raison de l'insuffisance du détail des calculs opérés,

A titre subsidiaire,

- constater l'absence de bien fondé de la décision administrative de l'URSSAF du 29 novembre 2019, notifiée le 11 décembre 2019,

- réformer les décisions implicites et explicites de rejet de la Commission de Recours Amiable du 29 novembre 2019,

A titre infiniment subsidiaire,

- dire que la prescription aboutit à annuler tout redressement sur l'année 2015,

En tout état de cause,

- annuler les mises en demeure du 9 avril et du 9 mai 2019,

- juger que la majoration de l'indemnité d'activité partielle doit suivre le même sort social que l'indemnité dont le montant est défini par décret,

- condamner l'URSSAF Rhône Alpes aux dépens.

Au soutien de ses demandes, la SAS [5] fait valoir que :

- elle a été victime d'un incendie d'origine accidentelle dans la nuit du 28 octobre 2014 et la quasi totalité de ses bâtiments ont été détruits et le site a été reconstruit et reconfiguré en modernisant les méthodes de production, et entre 29 à 63 salariés ont été placés en chômage partiel entre novembre 2014 et mars 2016, solution validée par la DIRECCTE,

- la lettre d'observations ne répond pas aux exigences de l'article R 243-59 du code de la sécurité sociale dès lors qu'elle ne permet pas de savoir si l'organisme social a distingué la situation des salariés qui étaient en situation de chômage partiel pendant une partie du mois ou tout le mois, conformément aux articles L 5122-4 et L 5422-10 du code du travail,

- l'exigence d'un accord professionnel n'est plus posée par la nouvelle rédaction de l'article L 5122-4 du code du travail applicable depuis le 14 juin 2013, analyse confirmée par la circulaire de la DGEFP n°2013-12 du 12 juillet 2013,

- contrairement à la position de l'URSSAF, aucun texte ne subordonne l'alignement du sort de la majoration de l'indemnité d'activité partielle à une autorisation préalable,

- la mise en demeure du 9 avril 2019 ne tient pas compte de la prescription triennale, et aucun redressement ne peut être opéré sur 2015,

- la motivation en fait n'existe pas, et l'URSSAF procède à un redressement de manière forfaitaire, ce qui ne lui permet pas d'en comprendre l'ampleur.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, l'URSSAF Rhône Alpes demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris,

- déclarer régulière la procédure de contrôle,

- débouter la SAS [5] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- confirmer la décision de la Commission de Recours Amiable du 29 novembre 2019,

- valider les mises en demeure du 9 avril et 9 mai 2019,

- à titre reconventionnel, condamner la SAS [5] à verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses demandes, l'URSSAF Rhône Alpes fait valoir que :

- la lettre d'observations est régulière et la SAS [5] n'apporte pas la preuve que certains de ses salariés étaient concernés par les dispositions de l'article L 3232-1 du code du travail,

- la lettre d'observations respecte les prescriptions légales puisqu'elle mentionne l'assiette, le taux et le montant des cotisations,

- le redressement concerne la part de rémunération versée aux salariés sous forme de 'complément indemnité partielle' d'un montant de 30% du salaire brut habituel qui devait être soumise à cotisations sociales, soit en allant au delà des indemnités prévues par le code du travail qui elles sont exonérées de cotisations sociales, pour garantir un maintien de salaire à 100%,

- aucune prescription n'est acquise puisque conformément à l'article L 244-3 du code de la sécurité sociale la période contradictoire qui débute par la date de réception de la lettre d'observations suspend la prescription.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS

* sur la régularité de la lettre d'observations

Dans sa rédaction en vigueur à la date des opérations de contrôle, l'article R 243-59 du code de la sécurité sociale prévoit notamment :

'III.A l'issue du contrôle ou lorsqu'un constat d'infraction de travail dissimulé a été transmis en application des dispositions de l'article L. 8271-6-4 du code du travail afin qu'il soit procédé à un redressement des cotisations et contributions dues, les agents chargés du contrôle mentionnés à l'article L. 243-7 communiquent au représentant légal de la personne morale contrôlée ou au travailleur indépendant une lettre d'observations datée et signée par eux mentionnant l'objet du contrôle réalisé par eux ou par d'autres agents mentionnés à l'article L. 8271-1-2 du code du travail, le ou les documents consultés, la période vérifiée, le cas échéant, la date de la fin du contrôle et les observations faites au cours de celui-ci.

Lorsqu'une infraction mentionnée à l'article L. 8221-1 du code du travail a été constatée, la lettre d'observations mentionne en outre :

1° La référence au document prévu à l'article R. 133-1 ou les différents éléments listés au premier alinéa de cet article lorsque l'infraction a été constatée à l'occasion du contrôle réalisé par eux ;

2° La référence au document mentionné à l'article R. 133-1 ainsi que les faits constatés par les agents de contrôle mentionnés à l'article L. 8271-1-2 du code du travail lorsque le constat d'infraction de travail dissimulé a été transmis en application des dispositions de l'article L. 8271-6-4 du code du travail.

Les observations sont motivées par chef de redressement. A ce titre, elles comprennent les considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement et, le cas échéant, l'indication du montant des assiettes correspondant, ainsi que pour les cotisations et contributions sociales l'indication du mode de calcul et du montant des redressements et des éventuelles majorations et pénalités définies aux articles L. 243-7-2, L. 243-7-6 et L. 243-7-7 qui sont envisagés.

Le montant des redressements indiqué dans la lettre d'observations peut être différent du montant évalué le cas échéant dans le document mentionné à l'article R. 133-1. S'il est inférieur, il est procédé sans délai à la mainlevée des éventuelles mesures conservatoires prises en application de l'article R. 133-1-1 à hauteur de la différence entre ces deux montants. S'il est supérieur, l'organisme peut engager des mesures conservatoires complémentaires dans les conditions prévues au même article à hauteur de la différence entre ces deux montants.

En cas de réitération d'une pratique ayant déjà fait l'objet d'une observation ou d'un redressement lors d'un précédent contrôle, la lettre d'observations précise les éléments caractérisant le constat d'absence de mise en conformité défini à l'article L. 243-7-6. Le constat d'absence de mise en conformité est contresigné par le directeur de l'organisme effectuant le recouvrement.

La période contradictoire prévue à l'article L. 243-7-1 A est engagée à compter de la réception de la lettre d'observations par la personne contrôlée, qui dispose d'un délai de trente jours pour y répondre. La lettre mentionne la possibilité de se faire assister d'un conseil de son choix.

Dans sa réponse, la personne contrôlée peut indiquer toute précision ou tout complément qu'elle juge nécessaire notamment en proposant des ajouts à la liste des documents consultés.

Lorsque la personne contrôlée répond avant la fin du délai imparti, l'agent chargé du contrôle est tenu de répondre. Chaque observation exprimée de manière circonstanciée par la personne contrôlée fait l'objet d'une réponse motivée. Cette réponse détaille, par motif de redressement, les montants qui, le cas échéant, ne sont pas retenus et les redressements qui demeurent envisagés'.

Les formalités de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale (envoi d'une lettre d'observations, réponse de l'inspecteur du recouvrement aux éventuelles observations de la personne contrôlée, délai imparti à l'organisme avant la mise en recouvrement des cotisations, majorations et pénalités faisant l'objet du redressement), destinées à assurer le caractère contradictoire du contrôle et la sauvegarde des droits de la défense, sont qualifiées de 'substantielles' par la jurisprudence et leur omission entraîne la nullité tant des opérations de contrôle et de redressement que de la procédure subséquente.

En particulier, la lettre d'observation doit répondre à certaines exigences, et notamment préciser le mode de calcul des cotisations réclamées.

L'ensembles des diligences prévues par ce texte, et notamment l'information portant sur le mode de calcul du redressement envisagé, contenue dans la lettre d'observations, ont pour objet de permettre au cotisant de vérifier le bien-fondé des cotisations revendiquées et de formuler utilement ses observations en réponse.

Le respect de cette formalité, destinée à garantir le caractère contradictoire du contrôle et la sauvegarde des droits de la défense, est essentielle et de nature à conditionner la régularité du contrôle, et à cet égard, une lettre d'observations ne comportant pas le mode de calcul des redressements envisagés entraîne son annulation.

La jurisprudence a par contre jugé que la lettre d'observation, si elle doit comporter les mentions utiles pour permettre au cotisant de répondre, n'est pas tenue de comporter tous les détails du calcul du redressement envisagé.

Le cotisant peut faire valoir ses propres observations à la suite de la lettre d'observation, et l'inspecteur du recouvrement doit alors lui répondre, en mentionnant si les chefs de redressement contestés sont ou non maintenus . Cette lettre par laquelle l'inspecteur du recouvrement informe le redevable, à la suite des observations formulées par ce dernier à la réception de la lettre d'observations qui lui a été adressée au terme des opérations de contrôle, de l'abandon de certains chefs de redressement ou de la minoration de leur montant, ne revêt pas le caractère d'une nouvelle lettre d'observations, et n'est donc pas soumises aux dispositions de l'article R 243-59 .

La SAS [5] reproche à l'URSSAF de ne pas avoir développé dans la lettre d'observations les modalités de calcul du point de redressement n°1, seul point contesté, ce qui ne lui permet pas de savoir si le redressement a été calculé en opérant une distinction entre les cas où les salariés ont été placés en situation de chômage partiel pendant tout le mois ou sur une partie du mois.

La lecture de la partie 'constatations' et 'régularisations suivantes' de la lettre d'observations relativement au point de redressement n°1 expose la situation de l'entreprise, les dispositions législatives applicables, les mentions portées sur les bulletins de salaire et précise avant de chiffrer les différents cotisations ' les bases ont été fournies par l'entreprise et vérifiées' Base 2015: 292.149 €- Base 2016 : 32.729€'.

De fait, les éléments ainsi développés expliquent les modalités de calcul du point de redressement, les distinctions opérées par la SAS [5] non reprises dans la lettre d'observations concernent non pas la forme de la lettre d'observations mais un point d'application de la législation, donc une question de fond.

En conséquence, la lettre d'observations répond aux exigences de l'article R 243-59 du code de la sécurité sociale et la SAS [5] a justement été déboutée de sa demande d'annulation.

* sur la prescription des cotisations appelées

Par application des dispositions de l'article L 244-3 du code de la sécurité sociale, les cotisations et contributions sociales se prescrivent par trois ans à compter de la fin de l'année civile au titre de laquelle elles sont dues. Pour les cotisations et contributions sociales dont sont redevables les travailleurs indépendants, cette durée s'apprécie à compter du 30 juin de l'année qui suit l'année au titre de laquelle elles sont dues.

Dans le cas d'un contrôle effectué en application de l'article L. 243-7, le délai de prescription des cotisations, contributions, majorations et pénalités de retard est suspendu pendant la période contradictoire mentionnée à l'article L. 243-7-1 A.

L'article L 243-7-1 A du code de la sécurité sociale précise qu'à l'issue d'un contrôle effectué en application de l'article L. 243-7, l'agent chargé du contrôle adresse à la personne contrôlée une lettre mentionnant, s'il y a lieu, les observations constatées au cours du contrôle et engageant la période contradictoire préalable à l'envoi de toute mise en demeure ou avertissement en application de l'article L. 244-2.

Il résulte de ces deux articles que le délai de prescription de trois ans visé au premier est interrompu par l'envoi de la lettre d'observations, et non pas comme le soutient la SAS [5] par l'envoi de la mise en demeure.

Par suite, la lettre d'observations étant daté du 6 novembre 2018, les redressements de cotisations peuvent porter sur les exercices 2015-2016 et 2017.

Les cotisations redressées concernant les années 2015 et 2016, aucune prescription n'est encourue.

* sur le bien-fondé du redressement

A titre liminaire, il sera rappelé que le point n° 2 de la lettre d'observations du 6 novembre 2018 ' frais professionnels non justifiés, frais d'entreprise' pour un montant de 13.402,00 euros n'est pas contesté par la SAS [5] , et que la contestation porte uniquement sur le point n°1 ' chômage partiel - activité partielle - défaut ou erreur d'assiette'.

L'article L 5122-1 du code du travail dans sa version applicable du 17 juin 2013 au 31 décembre 2018 dispose que :

I. - Les salariés sont placés en position d'activité partielle, après autorisation expresse ou implicite de l'autorité administrative, s'ils subissent une perte de rémunération imputable :

-soit à la fermeture temporaire de leur établissement ou partie d'établissement;

-soit à la réduction de l'horaire de travail pratiqué dans l'établissement ou partie d'établissement en deçà de la durée légale de travail.

En cas de réduction collective de l'horaire de travail, les salariés peuvent être placés en position d'activité partielle individuellement et alternativement.

II. - Les salariés reçoivent une indemnité horaire, versée par leur employeur, correspondant à une part de leur rémunération antérieure dont le pourcentage est fixé par décret en Conseil d'Etat. L'employeur perçoit une allocation financée conjointement par l'Etat et l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage. Une convention conclue entre l'Etat et cet organisme détermine les modalités de financement de cette allocation.

Le contrat de travail des salariés placés en activité partielle est suspendu pendant les périodes où ils ne sont pas en activité.

III. - L'autorité administrative peut définir des engagements spécifiquement souscrits par l'employeur en contrepartie de l'allocation qui lui est versée, en tenant compte des stipulations de l'accord collectif d'entreprise relatif à l'activité partielle, lorsqu'un tel accord existe. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités selon lesquelles sont souscrits ces engagements.

L'article R 5122-18 du code du travail, dans sa version applicable du 1er juillet 2013 au 1er janvier 2017 dispose que le salarié placé en activité partielle reçoit une indemnité horaire, versée par son employeur, correspondant à 70 % de sa rémunération brute servant d'assiette de l'indemnité de congés payés telle que prévue au II de l'article L. 3141-22 ramenée à un montant horaire sur la base de la durée légale du travail applicable dans l'entreprise ou, lorsqu'elle est inférieure, la durée collective du travail ou la durée stipulée au contrat de travail.

Pendant les actions de formation mentionnées à l'article L. 5122-2 mises en 'uvre pendant les heures chômées, cette indemnité horaire est portée à 100 % de la rémunération nette antérieure du salarié.

Pour les salariés en contrat d'apprentissage ou de professionnalisation, l'allocation mentionnée à l'article L. 5122-1 ne peut être supérieure au montant de l'indemnité horaire due par l'employeur.

L'article L 5122-4 du code du travail, dans sa version applicable du 17 juin 2013 au 16 décembre 2020, précise que le régime social et fiscal applicable aux contributions mentionnées à l'article L. 5422-10 est applicable à l'indemnité versée au salarié.

Cette indemnité est cessible et saisissable dans les mêmes conditions et limites que les salaires.

La lettre d'observations qui reprend les dispositions de l'article L 5122-4 du code du travail le cite dans sa version applicable jusqu'au 16 juin 2013, soit pour une période antérieure à la période contrôlée, laquelle mentionnait : 'Le régime social et fiscal applicable aux contributions mentionnées à l'article L. 5422-10 est applicable aux allocations et contributions de chômage partiel, lorsque cette indemnisation résulte d'accords professionnels ou interprofessionnels, nationaux ou régionaux'.

L'article L 5422-10 du code du travail indique que les contributions des employeurs ne sont passibles ni du versement forfaitaire sur les salaires ni des cotisations de sécurité sociale. Elles sont déductibles des bénéfices industriels et commerciaux, agricoles ou non commerciaux pour l'établissement de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés dû par ces employeurs.

Les contributions payées dans les mêmes conditions par les travailleurs sont déductibles pour l'établissement de l'impôt sur le revenu des personnes physiques dû par les intéressés.

L'inspecteur du recouvrement a procédé aux constatations suivantes :

' L'entreprise ayant subi un sinistre (incendie) le 28 octobre 2014, il a été décidé lors d'une réunion extraordinaire entre la direction et les représentants du comité d'entreprise en date du 3 novembre 2014 de mettre en place une activité partielle pour les salariés participants à la production'

Cette activité partielle va être autorisée par la DIRECCTE à trois reprises :

- le 6 novembre 2014 pour la période du 04/11/2014 au 03/05/2015 pour 84 salariés, pour un nombre total de 76.440 heures,

- le13/05/2015 pour la période du 01/07/2015 au 31/12/2015 pour 78 salariés, pour un nombre total de 7.020 heures,

- le 11 mars 2016 pour la période du 01/07/2015 au 31/03/2016 pour 78 salariés, pour un nombre total de 47.635 heures.

' Or, entre temps l'entreprise a décidé unilatéralement de procéder au versement d'une indemnité complémentaire à l'indemnité de base prévue par les textes (70% de la rémunération) afin de garantir le niveau de rémunération. Cette décision a été votée par la direction et les membres du CE le 26 novembre 2014.

Depuis le début de la mise en place de l'activité partielle les bulletins de salaires contiennent deux lignes liées à cette activité partielle : 'indemnité activité partielle' d'un montant de 70% du salaire habituel et 'complément indemnité partielle' d'un montant de 30% du salaire brut habituel. Ces éléments de rémunération ne sont pas soumis à cotisations sociales (....)

Si l'employeur décide de négocier un accord collectif d'entreprise relatif à l'activité partielle dans lequel il prendrait certains engagement, et notamment une meilleur indemnisation des salariés, soit en fixant le niveau d'indemnisation au-delà des 70% de la rémunération brute, soit en allégeant les conditions d'ouverture au droit à indemnisation, les sommes versées à ce titre devraient être soumises aux cotisations sociales et à l'impôt sur le revenu, ces complément ayant la nature d'un salaire. (...) Le montant correspondant à la majoration de l'indemnité d'activité partielle résultant de la décision unilatérale de l'employeur d'attribuer un complément indemnité partielle d'un montant de 30 % du salaire brut habituel doit être soumis à cotisations sociales et assurance chômage.

Il en résulte un redressement de cotisations sociales. Les bases ont été fournies par l'entreprise et vérifiées.

Base 2015 : 292.149 euros

base 2016 : 32.729 euros'

Pour remettre en cause cette analyse qui consiste à soumettre à cotisation le complément d'indemnité versé par l'employeur, en plus de l'indemnité réglementaire correspondant à 70% du salaire de base, la SAS [5] soutient que l'inspecteur du recouvrement:

- ne justifie pas avoir distingué entre les salariés qui ont été placés en activité partielle pendant tout le mois ou sur une partie du mois,

- se fonde sur l'article L 5122-4 du code du travail dans sa version antérieure à celle applicable, qui visait les accords professionnels ou interprofessionnels,

- n'a pas tenu compte de la circulaire de la DGEFP du 12 juillet 2013 relative à la mise en oeuvre de l'activité partielle et qui indique précisément que 'l'indemnité d'activité partielle constitue un revenu de remplacement versé sans contrepartie d'un travail. Il ne s'agit donc pas d'une rémunération ou d'un gain au sens de l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale. A ce titre, les indemnités versées au titre des heures chômées ne sont assujetties ni au forfait social sur les salaires, ni aux cotisations de sécurité sociale. Dans le cas d'une majoration de l'indemnité d'activité partielle dans le cadre d'un accord de branche, d'entreprise ou d'une décision unilatérale d'entreprise et selon les dispositions de l'article L 5122-4, ce régime social reste applicable à l'indemnité versée au salarié.'

L'URSSAF s'oppose à cette interprétation en rappelant que les mesure dérogatoires sont d'interprétation stricte et qu'une circulaire n'a pas valeur normative et qu'au surplus elle concerne l'indemnité de base.

Ceci étant, outre le fait que la lettre d'observations fonde le redressement sur une dispositions législative qui n'est plus en vigueur dans les termes où elle l'applique à la date du contrôle, force est de constater que l'article L 5122-4 du code du travail dans sa version applicable vise pour l'exonération de cotisations sociales 'l'indemnité versée au salarié' et non pas 'l'indemnité de base' comme le soutient l'URSSAF.

Si la circulaire consécutive à l'évolution législative sur l'activité partielle n'a pas de valeur normative, elle permet en revanche d'interpréter le texte législatif, soit en l'espèce l'article L 5122-4 du code du travail en venant préciser que 'Dans le cas d'une majoration de l'indemnité d'activité partielle dans le cadre d'un accord de branche',ce qui est le cas en l'espèce, 'et selon les dispositions de l'article L 5122-4, ce régime social' c'est à dire l'exonération de cotisations sociales, reste applicable à l'indemnité versée au salarié, la majoration d'indemnité étant une partie de l'indemnité versée au salarié puisqu'elle ne répond pas plus que l'indemnité de base à la définition du salaire, c'est à dire un revenu versé en contre-partie d'un salaire.

En conséquence, il convient d'annuler ce chef de redressement.

La décision déférée sera infirmée en ce sens et le redressement confirmé uniquement en ce qui concerne le point n°2 de la lettre d'observations du 6 novembre 2018 ' frais professionnels non justifiés, frais d'entreprise' pour un montant de 13.402,00 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, en matière de sécurité sociale, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Infirme le jugement rendu le 2 juillet 2020 par le tribunal judiciaire de Privas,

Et statuant à nouveau,

Déboute la SAS [5] de sa demande d'annulation de la lettre d'observations du 6 novembre 2018,

Confirme le redressement notifié à la SAS [5] selon lettre d'observations du 6 novembre 2018 délivrée par l'URSSAF Rhône Alpes uniquement en ce qui concerne le point de redressement n°2 : frais professionnels non justifiés - frais d'entreprise : 13.402 euros,

Valide la mise en demeure du 9 avril 2019 notifiée par l'URSSAF Rhône Alpes à la SAS [5] pour la somme de 13.402 euros de cotisations et contributions outre les majorations de retard,

Condamne la SAS [5] à verser, en deniers ou quittances, à l'URSSAF Rhône Alpes la somme de 13.402 euros de cotisations et contributions outre les majorations de retard,

Déboute l'URSSAF Rhône Alpes de sa demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Rappelle en tant que de besoin que le présent arrêt infirmatif tient lieu de titre afin d'obtenir le remboursement des sommes versées en vertu de la décision de première instance assortie de l'exécution provisoire,

Condamne l'URSSAF Rhône Alpes aux dépens de première instance et d'appel.

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5ème chambre sociale ta
Numéro d'arrêt : 20/01761
Date de la décision : 16/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-16;20.01761 ?
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