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16/05/2023 | FRANCE | N°20/01495

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5e chambre pole social, 16 mai 2023, 20/01495


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 20/01495 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HXMN



CRL/DO



POLE SOCIAL DU TJ DE NIMES

19 février 2020



RG :19/00522







[C]

[C]



C/



CARSAT [Localité 9]



















Grosse délivrée le 18 AVRIL 2023 à :



- Me SEBELLINI

- Me GARCIA BRENGOU




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COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social



ARRÊT DU 16 MAI 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de NIMES en date du 19 Février 2020, N°19/00522



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 20/01495 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HXMN

CRL/DO

POLE SOCIAL DU TJ DE NIMES

19 février 2020

RG :19/00522

[C]

[C]

C/

CARSAT [Localité 9]

Grosse délivrée le 18 AVRIL 2023 à :

- Me SEBELLINI

- Me GARCIA BRENGOU

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5e chambre Pole social

ARRÊT DU 16 MAI 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de NIMES en date du 19 Février 2020, N°19/00522

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

A l'audience publique du 07 Février 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 18 Avril 2023 et prorogé ce jour.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTES :

Madame [L] [C] épouse [D]

née le 04 Juin 1977 à [Localité 12]

[Adresse 10]

[Localité 2]

Représentée par Me Marie-ange SEBELLINI, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Stéphanie ANDRIVON, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/5363 du 29/07/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)

Madame [O] [C] épouse [D]

née le 17 Février 1964 à [Localité 12]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Marie-ange SEBELLINI, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Stéphanie ANDRIVON, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/5364 du 29/07/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)

INTIMÉE :

CARSAT [Localité 9]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Coralie GARCIA BRENGOU de la SCP TOURNIER & ASSOCIES, avocat au barreau de NIMES

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 16 Mai 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 24 avril 2015, la [14] a notifié à Mme [O] [C] d'avoir à lui verser un trop-perçu de 24.915,59 euros correspondant aux arrérages de pension personnelle versés à [F] [C], décédé le 5 janvier 2004, pour la période du 1er février 2004 au 31 juillet 2013.

Faute de règlement amiable, la [14] a mis en demeure Mme [O] [C] le 22 septembre 2015 de lui régler cette somme ou à défaut de lui fournir une renonciation à succession qui ne pourrait être prise en compte que si elle n'avait pas utilisé les fonds.

Par requête en date du 9 avril 2018, la [6], venant aux droits de la [14] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Gard d'un recours aux fins de voir condamner Mme [O] [C] à lui verser la somme de 12.457,79 euros et les frais exposés en remboursement du montant des arrérages de pension vieillesse indûment versés pour le compte de [F] [C]. ( recours 216/1098)

Par requête en date du 9 avril 2018, la [6], venant aux droits de la [14] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Gard d'un recours aux fins de voir condamner Mme [L] [C] à lui verser la somme de 12.457,79 euros et les frais exposés en remboursement du montant des arrérages de pension vieillesse indûment versés pour le comte de [F] [C]. ( recours 216/1099)

Ces deux affaires ont fait l'objet d'une décision de radiation en date du 10 avril 2019 et ont été réinscrites à la demande de l'organisme social en date du 29 mai 2019.

Par jugement du 19 février 2020, le tribunal judiciaire de Nîmes - Contentieux de la protection sociale, désormais compétent pour connaître de ce litige a :

- déclaré le recours de la sécurité sociale des indépendants recevable,

- dit que le délai l'action en recouvrement n'est pas prescrit,

- dit le recours bien fondé,

- constaté que la créance de la sécurité sociale des travailleurs indépendants est régulière au fond et en la forme,

- condamné mesdames [C] au paiement de la somme de 24.915,59 euros à leur charge partagée outre les frais de recouvrement de la créance,

- condamné les consorts [C] aux dépens de l'instance.

Par déclaration effectuée par voie électronique en date du 25 juin 2020, Mme [L] [C] et Mme [O] [C] ont régulièrement interjeté appel de cette décision qui leur a été notifiée le 9 avril 2020, conformément aux dispositions de l'ordonnance 2020-306 relative à la prorogation des délais échus en raison de l'urgence sanitaire.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, Mme [L] [C] et Mme [O] [C] demandent à la cour de :

Sur la recevabilité de l'appel,

- débouter la [8] de sa demande tendant à constater l'irrecevabilité de l'appel en raison de sa tardiveté, l'appel interjeté le 25 juin 2020 devant la cour d'appel de céans ayant été régularisé dans les délais prescrits,

Sur le fond,

- infirmer le jugement rendu le 19 février 2020 par le Pôle social du tribunal judiciaire de Nîmes et statuant à nouveau,

A titre principal,

- débouter la [8] venant aux droits de la [6] de l'intégralité de ses demandes pour la période antérieure au 24 avril 2010 en raison de la prescription et de la tardiveté de l'envoi de la lettre recommandée le 25 avril 2015,

- débouter la [8] venant aux droits de la [6] de l'intégralité de ses demandes, celles-ci étant irrecevables en raison de la validité de la renonciation à succession de leurs père et mère, selon déclaration au greffe du tribunal de grande instance de Perpignan,

A titre subsidiaire,

- débouter la [8] de ses demandes en répétition de l'indu dirigées contre Mme [O] [C], non détentrice d'une procuration sur les comptes bancaires de sa mère, Mme [I] [C],

- en conséquence, condamner Mme [L] [C] à une somme maximale de 12.457,79 euros,

En tout état de cause,

- débouter la [8] de sa demande de répétition de l'indu en l'absence de démonstration du quantum de sa créance, et de la preuve d'une créance certaine et liquide,

A titre très subsidiaire,

- débouter la [8] de sa demande en répétition de l'indu pour la somme excédant 11.599,05 euros, non justifiée,

Tenant l'article 37-1 alinéa 2 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991,

- constater qu'elles sont bénéficiaires de l'aide juridictionnelle totale accordée le 29 juillet 2020 par le Bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes sous le numéro 2020/005363 et 2020/005364.

- condamner la [8] venant aux droit de la [6] au paiement d'une somme de 4 000 euros à l'AARPI [15], représentée par Maître Marie Ange Sebellini, avocat du bénéficiaire de l'aide, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Au soutien de leurs demandes, Mme [L] [C] et Mme [O] [C] font valoir que :

- l'article 2224 du code civil qui prévoit une prescription quinquennale s'applique en l'espèce,

- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges aucun élément ne permet de retenir comme point de départ de cette prescription une conversation téléphonique qu'elles auraient eu le 4 juillet 2013 avec l'URSSAF, qui aurait ensuite attendu près de deux ans avant de présenter sa demande en répétition de l'indu selon courrier du 24 avril 2015,

- elles ont renoncé à la succession de leur mère selon déclaration au greffe du tribunal de grande instance de Perpignan le 26 juin 2015 et à celle de leur père le 6 juin 2018,

- elles ne peuvent par suite être tenues responsables des dettes de la succession de leurs parents, et c'est bien en leur qualité d'héritières que la [8] leur présente ses demandes de répétition de l'indu,

- la [8] ne les a jamais sommées d'accepter ou de renoncer à la succession de leurs parents et ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 772 du code civil, l'ouverture de succession n'ayant pas été faite et le courrier du Régime Social des Indépendants d'avril 2015 ne valant pas sommation à prendre position, mais demandant uniquement le paiement des sommes versées, le courrier ne comprend même pas le terme de succession,

- aucun élément ne permet de caractériser une acceptation tacite de la succession, les dépenses effectuées par Mme [L] [C] titulaire d'une procuration sur le compte de ses parents étant des actes purement conservatoires et d'administration provisoire,

- la [8] ne démontre pas que les retraits intervenus postérieurement au décès de Mme [I] [C] aient été effectués par elles,

- subsidiairement, si une condamnation à rembourser l'indu devait intervenir, elle ne pourrait concerner que Mme [L] [C], titulaire de la procuration,

- s'agissant du quantum de l'indu, la [8] ne verse aucun décompte des sommes dont elle sollicite le paiement, se contentant de verser des relevés de compte bancaire, lesquels ne viennent en tout état de cause justifier que la somme de 11.599,05 euros et non pas les 24.915,59 euros demandés,

- de plus, la [8] ne démontre pas que ces sommes correspondent à la retraite de M. [F] [C] et non pas à la pension de réversion de Mme [I] [C], non sujette à répétition puisque légitimement due à cette dernière.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, la CARSAT [Localité 9] venant aux droits de la [14], demande à la cour, la recevant dans toutes ses demandes fins et conclusions et y faisant droit, de :

- rejeter l'appel formé par Mesdames [C] et [D] à l'encontre du jugement du tribunal judiciaire de Nîmes, Contentieux de la Protection Sociale, du 19 février 2020, comme mal fondé,

A titre principal,

- débouter Mmes [C] et [D] de leur appel,

A titre subsidiaire,

- dire et juger régulière et bien-fondée la demande de trop-perçu,

- confirmer ainsi le jugement du 19 février 2020 en toutes ses dispositions,

- condamner alors Mme [O] [C] au paiement de la somme de 12 457,79 euros et les frais exposés en remboursement du montant des arrérages de pension vieillesse indûment versés pour le compte de [F] [C],

- condamner également Mme [L] [C] épouse [D] au paiement de la somme de 12 457,79 euros et les frais exposés en remboursement du montant des arrérages de pension vieillesse indûment versés pour le compte de [F] [C],

En tout état de cause,

- condamner Mmes [C] et [D] au paiement de la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, la CARSAT [Localité 9] venant aux droits de la [14] fait valoir que :

- elle n'a jamais été informée du décès de [F] [C] survenu le 5 janvier 2004, et que ce n'est qu'en procédant à la régularisation du dossier six mois après le décès de son épouse survenu le 20 janvier 2013 qu'elle s'est aperçue du trop-versé,

- l'épouse et les filles de [F] [C] se sont abstenues volontairement de l'informer du décès de celui-ci, et ont continué à percevoir pendant 9 ans sa pension de retraite, étant observé que les pompes funèbres remettent lors du décès les documents pré-imprimés à renvoyer aux organismes sociaux pour les en informer,

- le point de départ du délai de prescription doit être fixé à la date à laquelle elle a eu connaissance du décès de [F] [C], soit le 4 juillet 2013, et elle est par suite recevable à solliciter le remboursement de la somme de 24.915,59 euros, correspondant à l'ensemble des versements effectués postérieurement au décès,

- la renonciation à succession des appelantes est sans incidence dès lors qu'elle est intervenue s'agissant de la succession de leur mère deux mois après la demande de remboursement, et s'agissant de celle de leur père, après les premières conclusions du [14] devant le tribunal des affaires de sécurité sociale,

- les courriers du 24 avril 2015 doivent être considérés comme étant des sommations de prendre position sur la succession de leurs parents, ce qu'elles n'ont pas fait dans le délai de deux mois de l'article 772 du code civil concernant celle de leur père,

- au surplus, elles ont profité des arrérages de pension ainsi versés, ce qui vaut acceptation tacite de la succession,

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS

A titre liminaire, il sera rappelé que la [8] ne soutient plus l'irrecevabilité de l'appel pour forclusion.

- sur la prescription de l'action en recouvrement

L'article L. 355-3 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction résultant de la loi 2011-1906 du 21 décembre 2011 dispose que toute demande de remboursement de trop-perçu en matière de prestations de vieillesse et d'invalidité est prescrite par un délai de deux ans à compter du paiement des dites prestations dans les mains du bénéficiaire, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration.

La jurisprudence retient de manière constante que l'action en répétition de l'indu contre une autre personne que le titulaire de la pension de retraite qui relève du régime de prescription des quasi-contrats, est soumise à la prescription de droit commun, définie par l'article 2224 du code civil qui dispose que « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ».

Il ressort des pièces versées au débats que :

- [F] [C] est décédé le 5 janvier 2004,

- la [8] a poursuivi le versement de la retraite de base et de la retraite complémentaire sur le compte commun du couple [C] au-delà de janvier 2004,

- [I] [C], son épouse, est décédée le 20 janvier 2013,

- la [8] a poursuivi le versement de la retraite de base et de la retraite complémentaire sur le compte commun du couple [C] jusqu'au 31 juillet 2013,

- en novembre 2013, la [8] dans le cadre de son droit de communication a interrogé la banque du couple [C], qui a précisé que Mme [L] [C] était mandataire par procuration sur le compte joint de ses parents et habilitée comme eux à procéder à des retraits express sur le compte ; les relevés bancaires établissent les mouvements bancaires suivants, outre les versements en provenance de la [8] ( de l'ordre de 818,14 euros mensuels ) et du Régime Social des Indépendants (de l'ordre de 234,48 euros mensuels ), des retraits express pour 2.000 euros en février 2013, des retraits par carte bancaire tous les mois pour un montant global de l'ordre de 5.000 euros, des paiements par chèque pour un montant global de l'ordre de 1.900 euros, des paiements par cartes bancaires au profit de [11], des [5], de [7], de [4], de [13], le compte présentant un solde au 31 octobre 2013 de 221,20 euros,

- par courrier en date du 31 janvier 2014, réceptionné par la [8] le 4 février 2014, Mme [O] [C] a indiqué : ' je vous sollicite afin de m'aider à trouver une solution à mon problème qui est le suivant. Après le décès de ma mère, j'ai remis sa carte vitale à la sécurité sociale en réponse à leur courrier du 29 janvier 2013.

Bien que j'aie déclaré le décès de ma mère, la [8] continue à verser la retraite complémentaire sur son compte. J'ai appelé en mars 2013, pour signaler cette situation, mais rien n'a été fait. Et j'ai suivi après par un courrier.

Je vous avoue que je me suis servie de cet argent pour régler des problèmes quotidiens ( le loyer et les charges, les dette de ma mère et le repas du défunt).

Aujourd'hui la [8] me réclame le remboursement de 7.000 euros. Je reconnais, moi [O] [C] être la seule responsable de ces actes, mes frères et soeurs n'y sont pour rien, ils n'étaient même pas au courant, car j'habitais avec elle et m'occupait d'elle durant les dernières années avant son décès. (...)'

- le 24 avril 2015, la [14] a notifié à Mme [O] [C] et Mme [L] [C] d'avoir à lui verser un trop-perçu de 24.915,59 euros correspondant aux arrérages de pension personnelle versés à [F] [C],

- le 26 juin 2015 Mme [O] [C] et Mme [L] [C] ont renoncé à la succession de leur mère,

- le 22 septembre 2015 la [14] a mise en demeure Mme [O] [C] et Mme [L] [C] d'avoir à lui régler cette somme ou à défaut de lui fournir une renonciation à succession qui ne pourrait être prise en compte que si elle n'avait pas utilisé les fonds,

- par ordonnance du 26 septembre 2016, le juge d'instance de Nîmes n'a pas inclus dans la procédure de surendettement de Mme [O] [C] la créance de la [14],

- le 9 avril 2018, la [6], venant aux droits de la [14] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Gard d'un recours aux fins de voir condamner Mme [O] [C] à lui verser la somme de 12.457,79 euros et Mme [L] [C] à lui verser la somme de 12.457,79 euros,

- le 6 juin 2018, Mme [O] [C] et Mme [L] [C] ont renoncé à la succession de leur père.

Il ressort par ailleurs des demandes formulées par la [8] venant aux droits de la [14] que l'action en recouvrement d'indu ne concerne que les fonds versés par la [14] et qui apparaissent sur les comptes bancaires sous forme d'un versement mensuel de l'ordre de 234,48 euros ( cumul entre la retraite de base et la retraite complémentaire ).

En l'espèce, l'action en recouvrement est dirigée contre Mme [L] [C] et Mme [O] [C], qui n'étaient pas les titulaires du droit à retraite objet de la demande de répétition de l'indu. La prescription quinquennale doit par suite être appliquée.

Il ressort du courrier en date du 31 janvier 2014, réceptionné par la [8] le 4 février 2014, que Mme [O] [C] a informé l'organisme social en mars 2013 du décès de sa mère survenu en janvier 2013.

La [8], venant aux droits de la [14] soutient qu'elle n'a été informée du décès du couple [C] qu'en juillet 2013 lorsqu'elle a fait le point sur le dossier, sans pour autant justifier de cette information.

Le point de départ de la prescription de l'action en recouvrement a donc débuté au plus tôt en mars 2013 et a été interrompu par l'envoi du courrier du 24 avril 2015 notifiant l'indu de prestations retraite.

Ce courrier ayant été adressé moins de 5 ans après le point de départ du délai de prescription, l'action en recouvrement d'indu n'est pas prescrite.

- sur l'incidence de la renonciation à succession

Par application des dispositions de l'article 771 du code civil, l'héritier ne peut être contraint à opter avant l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de l'ouverture de la succession.

A l'expiration de ce délai, il peut être sommé, par acte extrajudiciaire, de prendre parti à l'initiative d'un créancier de la succession, d'un cohéritier, d'un héritier de rang subséquent ou de l'Etat.

L'article 772 du code civil précise que dans les deux mois qui suivent la sommation, l'héritier doit prendre parti ou solliciter un délai supplémentaire auprès du juge lorsqu'il n'a pas été en mesure de clôturer l'inventaire commencé ou lorsqu'il justifie d'autres motifs sérieux et légitimes. Ce délai est suspendu à compter de la demande de prorogation jusqu'à la décision du juge saisi.

A défaut d'avoir pris parti à l'expiration du délai de deux mois ou du délai supplémentaire accordé, l'héritier est réputé acceptant pur et simple.

Par application des dispositions de l'article 806 du code civil, le renonçant n'est pas tenu au paiement des dettes et charges de la succession. Toutefois, il est tenu à proportion de ses moyens au paiement des frais funéraires de l'ascendant ou du descendant à la succession duquel il renonce.

La renonciation à succession a été effectuée par Mme [L] [C] et Mme [O] [C] le 16 juin 2015, soit dans les deux mois de la sommation de payer datée du 24 avril 2015 et réceptionnée par les appelantes le 25 avril 2015.

Pour autant, il ressort des relevés bancaires versés aux débats par la [8] que Mme [L] [C] et Mme [O] [C] ont utilisé le compte bancaire parental à des fins personnelles et ont disposé des biens qui y figuraient, puisque le solde du compte au décès de [I] [C] était 4.343,10 euros au 1er février 2013, et de 221,20 euros le 31 octobre 2013. La nature des dépenses effectuées depuis le compte bancaire, retraits en espèce ou dépenses de vie courante, ne correspond pas aux dépenses consécutives au décès. Au surplus, dans son courrier du 31 janvier 2014, Mme [O] [C] a indiqué qu'elle avait utilisé les fonds à des fins personnelles.

Il s'en déduit que Mme [L] [C] et Mme [O] [C] en disposant des fonds appartenant à la succession de leur mère ont accepté par cet usage, et donc antérieurement à la renonciation à succession, la succession de leur mère.

- sur le montant de l'indu

L'article 2232 du code civil dispose que le report du point de départ, la suspension ou l'interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance de son droit.

En l'espèce, aucun des arrérages de pension de retraite n'ayant été versé au delà du délai butoir de 20 ans ainsi prévu, la [8] en droit d'obtenir la répétition des sommes versées postérieurement au décès du bénéficiaire depuis le 1er février 2004 jusqu'au 31 juillet 2013.

Il convient cependant de distinguer deux périodes pour la détermination du montant de l'indu :

- entre le décès de [F] [C] le 4 janvier 2004 et le décès de [I] [C] le 21 janvier 2013 :

Sur cette période, les prestations ont été servies sur le compte commun du couple, et [I] [C] a perçu l'intégralité des droits à pension de son conjoint décédé alors qu'elle aurait dû percevoir uniquement le cas échéant la pension de réversion consécutive à sa situation de veuvage. L'indu ainsi constitué est par suite entré au passif de sa succession lors du son décès.

La renonciation à succession étant sans effet, Mme [L] [C] et Mme [O] [C] sont redevables en leur qualité d'héritière de leur mère, [I] [C], de cette partie de l'indu, dont il convient de déduire la valeur de la pension de réversion à laquelle [I] [C] pouvait prétendre.

- à compter du décès de [I] [C] :

Les prestations ont été servies sur le compte commun de leurs parents décédés sans que Mme [L] [C], titulaire d'une procuration sur le compte ne procède à sa fermeture, et ont été utilisées eu égard aux pièces produites par Mme [L] [C] et Mme [O] [C].

Le montant ainsi versé représente la somme de 1.416,37 euros ainsi que cela résulte des relevés bancaires versés aux débats, et du décompte produit par la [8].

Par suite, Mme [L] [C] et Mme [O] [C] sont redevables de cette somme à titre personnel.

La décision déférée sera infirmée en ce sens.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, en matière de sécurité sociale, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Confirme le jugement rendu le 19 février 2020 par le tribunal judiciaire de Nîmes - Contentieux de la protection sociale sauf en ce qu'il a condamné Mme [L] [C] et Mme [O] [C] au paiement de la somme de 24.915,59 euros à leur charge partagée outre les frais de recouvrement de la créance,

Et statuant à nouveau sur ce point,

Condamne Mme [L] [C] et Mme [O] [C] à verser à la [8] venant aux droits de la [14] :

- le montant des arrérages de pension retraite versés au nom de [F] [C], par la [14], pour la période du 1er février 2004 au 1er février 2013, déduction faite des arrérages de pension de réversion auxquels sa veuve pouvait prétendre sur la même période et qu'il appartiendra à l'organisme social de calculer,

- le montant des arrérages de pension retraite versés au nom de [F] [C] par la [14], pour la période du 1er février 2013 au 31 juillet 2013, soit la somme de 1.416,37 euros,

Juge n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [L] [C] et Mme [O] [C] aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5e chambre pole social
Numéro d'arrêt : 20/01495
Date de la décision : 16/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-16;20.01495 ?
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