RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 21/00602 - N° Portalis DBVH-V-B7F-H6EZ
LR/EB
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE NIMES
25 janvier 2021
RG :18/00666
[X]
C/
S.A.S. SOCIETE GARDOISE D'ETANCHEITE
Grosse délivrée le 10 MAI 2023 à :
- Me
- Me
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 10 MAI 2023
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de NIMES en date du 25 Janvier 2021, N°18/00666
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Leila REMILI, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
M. Michel SORIANO, Conseiller
Madame Leila REMILI, Conseillère
GREFFIER :
Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉBATS :
A l'audience publique du 09 Février 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 10 Mai 2023.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANT :
Monsieur [C] [X]
né le 28 Octobre 1983
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représenté par Me Eve SOULIER de la SELARL EVE SOULIER-JEROME PRIVAT-THOMAS AUTRIC, avocat au barreau D'AVIGNON
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/004478 du 19/05/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)
INTIMÉE :
S.A.S. SOCIETE GARDOISE D'ETANCHEITE
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Emmanuelle JONZO de la SCP LOBIER & ASSOCIES, avocat au barreau de NIMES
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 26 Janvier 2023
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 10 Mai 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
M. [C] [X] a été engagé par la Société gardoise d'étanchéité à compter du 7 avril 2015 suivant contrat de travail à durée indéterminée, en qualité d'étancheur, catégorie ouvrier professionnel, niveau II, coefficient 185 de la convention collective des ouvriers du bâtiment.
Le 23 juillet 2018, le salarié était mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement fixé au 1er août 2018.
Par lettre du 7 août 2018, il était licencié dans les termes suivants :
« (...) Vous avez fait le choix de ne pas vous présenter à l'entretien susvisé et nous sommes en conséquence au regret de vous notifier, par la présente lettre, votre licenciement pour faute grave à raison d'une série d'agissements qui sont inacceptables.
Le vendredi 29 juin 2018, vous avez contacté téléphoniquement M. [L] pour obtenir l'autorisation de prendre et d'utiliser pour le week-end, un véhicule appartenant à l'entreprise.
Un refus a été clairement opposé.
Vous n'en avez pas tenu compte et vous avez pénétré dans le bureau, pris les clés du véhicule et vous êtes parti avec.
Le week-end qui a suivi, vous avez renouvelé vos agissements fautifs en conservant cette fois l'utilitaire de la société, là encore, sans aucune autorisation.
L'insubordination est manifeste.
Le vendredi 6 juillet 2018, vous étiez absent de votre poste.
Cette absence n'a donné lieu à aucune information de votre part et c'est votre épouse nous a adressé un sms pour indiquer que vous étiez « mal »
Le lundi 9 juillet 2018, vous étiez toujours absent.
En amont, vous avez daigné adresser un sms, le lundi à 2 heures du matin, il était évidemment trop tard pour permettre à l'entreprise de pallier votre absence et ainsi de s'organiser « au mieux ».
Nous vous avons adressé un courrier de mise en demeure de justifier de votre absence : en vain.
Une telle attitude n'est pas acceptable; elle désorganise le bon fonctionnement de l'entreprise et M. [L] a été contraint d'annuler ses rendez-vous pour vous remplacer à votre poste.
Là encore ce n'est pas acceptable et ce d'autant que ce n'est pas la première fois.
Pis, nous apprenons que votre absence était programmée de longue date puisque vous vous êtes absenté plusieurs jours pour conduire votre famille au MAROC.
Votre attitude vis-à-vis de l'entreprise est éminemment déloyale et irrespectueuse.
Ce n'est pas tout, le vendredi 20 juillet 2018, M. [L] a voulu s'entretenir avec vous sur votre comportement et les nombreuses plaintes qu'il engendre de la part de vos collègues de travail.
Vous avez alors « menacé » de votre mettre en arrêt maladie.
Ce type de pratique est inacceptable.
Un entretien informel était fixé au lundi 23 juillet, matin.
Ne doutant de rien, vous ne vous êtes pas présenté à l'entretien, après avoir pourtant indiqué par sms que vous arriveriez avec 40 minutes de retard.
In fine, cet entretien n'a pas eu lieu et vous avez mis votre « menace » d'arrêt maladie à exécution.
Sans remettre en cause la légitimité de ce dernier, il est manifeste que votre comportement est gravement fautif. Il est empreint d'insubordination, de déloyauté et de manque de respect.
Nous sommes donc contraints de vous licencier pour faute grave, de manière immédiate, sans indemnité, ni préavis. ».
Par requête déposée au greffe le 26 novembre 2018, M. [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Nîmes afin de contester son licenciement et d'obtenir, la condamnation de la Société gardoise d'étanchéité à lui verser diverses sommes d'argent à ce titre, outre le règlement de jours de congés payés non réglés ainsi que d'un rappel de maintien de salaire pour la période du 20 juillet 2018 au 7 août 2018, durant laquelle il se trouvait en arrêt maladie.
Par jugement de départage du 25 janvier 2021, le conseil de prud'hommes de Nîmes a :
- dit que le licenciement de M. [C] [X] n'est pas entaché de nullité,
- débouté M. [C] [X] de ses demandes tendant au prononcé de la nullité de son licenciement et de ses demandes financières subséquentes,
- dit que le licenciement de M. [C] [X] ne repose pas sur une faute grave,
- dit que le licenciement de M. [C] [X] repose sur une cause réelle et sérieuse,
- condamné la SARL Société Gardoise d'Étanchéité, prise en la personne de son représentant légal en exercice, à verser à M. [C] [X] la somme de 4 727,56 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
- débouté M. [C] [X] de sa demande d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,
- condamné la SARL Société Gardoise d'Étanchéité, prise en la personne de son représentant légal en exercice, à verser à M. [C] [X] la somme de 1 969,81 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,
- condamné la SARL Société Gardoise d'Étanchéité, prise en la personne de son représentant légal en exercice, à verser à M. [C] [X] la somme de 776,60 euros à titre de maintien de salaire pour la période de mise à pied conservatoire,
- débouté M. [C] [X] de sa demande d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- débouté M. [C] [X] de sa demande tendant au paiement d'un rappel de congés payés,
- condamné la SARL Société Gardoise d'Étanchéité, prise en la personne de son représentant légal en exercice, aux entiers dépens de l'instance,
- condamné la SARL Société Gardoise d'Étanchéité, prise en la personne de son représentant légal en exercice, à verser à M. [C] [X] la somme de 1200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
- débouté la SARL Société Gardoise d'Étanchéité, prise en la personne de son représentant légal en exercice, de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté toute demande plus ample ou contraire,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision.
Par acte du 11 février 2021, M. [C] [X] a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions du 26 janvier 2023, M. [C] [X] demande à la cour de :
- recevoir son appel
- le dire bien fondé en la forme et au fond
En conséquence,
- réformer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nîmes en date du 25 janvier 2021 en ce qu'il le déboute de ses demandes visant à faire reconnaître la nullité de son licenciement ou encore l'absence de cause réelle et sérieuse et en ce qu'il le déboute de sa demande de paiement des congés payés ;
- confirmer le jugement en ce qu'il ne reconnaît pas la faute grave du licenciement et fait droit aux demandes d'indemnités de rupture du salarié
En conséquence,
A titre principal
- juger que son licenciement est nul en raison du fait qu'il est intervenu en période de suspension du contrat de travail pour maladie professionnelle en l'absence de faute grave justifiée
En conséquence,
- condamner l'employeur au paiement des sommes suivantes :
* 4 727.56 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis
* 472.75 euros au titre des congés payés y afférents
* 1969.81 euros à titre d'indemnité légale de licenciement
* 801.67 euros à titre de maintien de salaire
* 20 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul intervenu pendant la suspension du contrat de travail pour maladie professionnelle
A titre subsidiaire
- juger que son licenciement est nul en raison du fait qu'il soit fondé sur l'état de santé du salarié
En conséquence,
- condamner l'employeur au paiement des sommes suivantes :
* 4 727.56 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis
* 472.75 euros au titre des congés payés y afférents
* 1969.81 euros à titre d'indemnité légale de licenciement
* 801.67 euros à titre de maintien de salaire
* 20 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul fondé sur l'état de santé du salarié
A titre infiniment subsidiaire
- dire et juger que son licenciement est dénué de toute cause réelle et sérieuse
En conséquence,
- condamner l'employeur au paiement des sommes suivantes :
* 4 727.56 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis
* 472.75 euros au titre des congés payés y afférents
* 1969.81 euros à titre d'indemnité légale de licenciement
* 801.67 euros à titre de maintien de salaire
* 20 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
En tout état de cause
- condamner l'employeur au paiement des sommes suivantes :
* 1 426.6 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis
* 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- condamner l'employeur aux entiers dépens.
L'appelant soutient que :
- c'est à tort que le conseil a considéré qu'il n'était pas démontré que l'employeur avait eu connaissance de ses démarches tendant à la reconnaissance d'une maladie professionnelle, au regard des différents éléments produits et alors que le juge reconnaissait dans le même temps que le salarié semblait bien avoir réalisé cette démarche avant la notification du licenciement; la cour doit donc, en application de l'article L. 1226-9 du code du travail, analyser le licenciement comme un licenciement nul
- c'est également à tort que le conseil l'a débouté de sa demande de nullité du licenciement pour cause de discrimination fondée sur l'état de santé, alors qu'il apparaît très clairement que c'est bien son arrêt maladie à compter du 20 juillet 2018 qui a déclenché la mise à pied conservatoire puis le licenciement, les griefs concernant l'utilisation du véhicule ou les prétendues absences injustifiées n'étant utilisés que pour essayer de donner le change; en réalité, il a été licencié uniquement parce que l'employeur en avait assez de ses arrêts de travail liés à son état de santé fragile
- s'agissant de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement : l'utilisation non-autorisée du véhicule de la société n'est pas justifiée; il était en arrêt de travail le 6 juillet et de surcroît, il avait averti son employeur de son absence par sms; en outre, s'il ne détient pas la preuve matérielle de la remise de son arrêt de travail à l'employeur, on ne voit pas très bien pourquoi il ne l'aurait pas transmis; quant au 9 juillet, il ne nie pas avoir été absent mais il avait obtenu l'accord de son employeur car il devait se rendre au Maroc
- cependant, le conseil a, à bon droit, retenu que les griefs reprochés ne permettaient nullement de justifier une faute grave et a fait droit aux demandes de paiement des indemnités de rupture.
En l'état de ses dernières écritures en date du 26 janvier 2023, contenant appel incident, la SAS Groupe ETS Vinois-SGE venant aux droits de la Société Gardoise d'Etanchéité demande à la cour de :
A titre principal
- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a :
* dit que le licenciement de M. [X] reposait non pas sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse
* octroyé au salarié les sommes suivantes :
° 4 727.56 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis
° 1 969.81 euros à titre d'indemnité de licenciement
° 776.60 euros bruts à titre de rappel de salaire (mise à pied)
° 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- confirmer pour le surplus
Statuant à nouveau :
- débouter M. [X] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions
- condamner M. [X] au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens
A titre subsidiaire,
- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions
Y ajoutant
- condamner M. [X] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens.
L'intimée fait valoir que :
- le licenciement pour faute grave est fondé :
le salarié a passé outre les directives de son employeur et l'insubordination est manifeste, dans la mesure où il a détourné un matériel appartenant à l'entreprise à des fins personnelles, étant précisé qu'il avait déjà été averti pour avoir adopté pareil comportement fautif
il a également abandonné son poste de travail
il a agi de manière déloyale, a menti en feignant un état de santé dégradé alors que son absence était organisée
la poursuite de la collaboration n'était dès lors pas envisageable
- l'employeur n'était pas informé au moment du licenciement de la prétendue maladie professionnelle invoquée par le salarié
- le salarié est malhonnête et l'employeur n'a aucunement pris en compte son état de santé pour procéder à son licenciement et M. [C] [X] n'a cessé de se munir d'arrêts de travail pour tenter de couvrir à posteriori ses absences injustifiées et ses séjours au Maroc, lesquels se superposent.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.
Par ordonnance en date du 25 novembre 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 26 janvier 2023. L'affaire a été fixée à l'audience du 09 février 2023.
MOTIFS
Sur la nullité du licenciement pour méconnaissance de l'article L. 1226-9 du code du travail
Aux termes de l'article L. 1226-9 du code du travail, au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie.
Conformément à l'article L. 1226-13 du même code, toute rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance des dispositions de l'article L. 1226-9 précité est nulle.
M. [C] [X] fait valoir que le licenciement pour faute grave du 7 août 2018 est intervenu pendant la période de suspension de son contrat de travail pour maladie professionnelle depuis le 20 juillet 2018.
Comme l'a justement relevé le juge départiteur, la protection prévue à l'article L. 1226-9 du code du travail suppose que l'employeur connaît au jour du licenciement l'origine professionnelle de la maladie.
M. [C] [X] fait valoir qu'il a adressé son arrêt de travail mentionnant une maladie professionnelle en juillet 2018 et que l'employeur l'a reçu le 30 juillet 2018, soit bien avant le licenciement.
Toutefois, comme l'a justement constaté le premier juge, les formulaires d'arrêt pour maladie professionnelle produits par M. [C] [X] sont peu lisibles et il n'est pas démontré qu'ils ont été communiqués à l'employeur qui nie les avoir reçus et produit lui-même des arrêts de travail pour maladie simple au nom de M. [C] [X], parfaitement lisibles, concernant les mêmes périodes que les arrêts pour maladie professionnelle produits par ce dernier.
M. [C] [X] produit un bordereau de recommandé avec avis de réception, sur lequel on peut lire un envoi le 27 juillet 2018 et une réception le « 30 », le reste étant illisible. Ceci étant, l'employeur indique avoir reçu l'arrêt daté du 20 juillet 2018 mais uniquement pour maladie « simple », de sorte qu'il n'est pas démontré que l'envoi recommandé concernait des arrêts de travail pour maladie professionnelle.
M. [C] [X] fait valoir encore qu'il a effectué sa demande de reconnaissance en maladie professionnelle auprès de la CPAM avant son licenciement, la caisse lui adressant un courrier daté du 10 août 2018 dans laquelle elle lui demandait de compléter son dossier.
Toutefois, comme l'a encore justement relevé le premier juge, il se déduit simplement de ce courrier, postérieur à la lettre de licenciement du 7 août 2018, que M. [C] [X] a entamé des démarches auprès de la CPAM avant le 10 août 2018, sans certitude qu'elles l'aient été avant la notification du licenciement et sans que cette lettre ne permette non plus de démontrer que l'employeur a été informé de cette démarche.
L'appelant indique encore que l'employeur a déclaré à la caisse de congés payés la maladie professionnelle de son salarié.
Le décompte produit en pièce n° 23 est illisible et ne permet pas de constater la mention de la période ayant débuté le 20 juillet 2018.
Par ailleurs, l'attestation de paiement des indemnités journalières pour la période du 1er janvier 2018 au 16 octobre 2018 mentionne seulement « maladie » et il en ressort également que l'arrêt de travail du 20 juillet 2018, prolongé ensuite, a donné lieu à trois jours de carence, ce qui démontre bien qu'il s'agissait alors d'un arrêt de travail classique.
Enfin, M. [C] [X] produit un jugement rendu le 19 janvier 2023 par le pôle social du tribunal judiciaire de Nîmes, infirmant la décision rendue par la CPAM du Gard le 12 avril 2019 et disant que la maladie déclarée par M. [C] [X] est d'origine professionnelle. Cette décision précise, comme cela ressort d'ailleurs du formulaire produit par l'intimée, que la déclaration de maladie professionnelle n'a été effectuée en réalité que le 5 septembre 2018, reçue par la CPAM le 6 septembre 2018.
Il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a considéré que le licenciement n'était pas nul.
Sur la nullité du licenciement pour cause de discrimination fondée sur l'état de santé
En application des dispositions de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié, ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, en raison de son état de santé.
Le licenciement prononcé en raison de l'état de santé d'un salarié est nul.
Il appartient au salarié qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une atteinte au principe de non discrimination. Il incombe à l'employeur, s'il conteste le caractère discriminatoire de cette mesure, d'établir que la mesure est justifiée par des critères objectifs, étrangers à toute discrimination.
M. [C] [X] fait valoir dans ses conclusions d'appel que c'est son arrêt maladie à compter du 20 juillet 2018 qui a déclenché la mise à pied à titre conservatoire puis son licenciement le 7 août 2018, les griefs concernant l'utilisation du véhicule ou les prétendues absences injustifiées n'étant utilisés que pour essayer de donner le change. Il ajoute avoir été licencié uniquement car l'employeur en avait assez des arrêts de travail de son salarié eu égard à son état de santé fragile. Il indique également qu'il est manifeste que l'employeur a fondé le licenciement sur son état de santé, considérant qu'il l'avait menacé de se mettre en arrêt de travail alors que cet arrêt était totalement médicalement justifié et surtout l'employeur lui a reproché une absence alors qu'il se trouvait justement sous le couvert d'un arrêt maladie légitime.
Ces éléments pris dans leur ensemble sont insuffisants à laisser présumer l'existence d'une discrimination.
En effet, comme l'a relevé le premier juge, dans la lettre de licenciement, après les griefs relatifs à l'utilisation d'un véhicule de la société le week-end sans autorisation et des absences non justifiées, l'employeur, au titre du troisième grief, ne fait référence à l'état de santé de M. [C] [X] que pour reprocher à son salarié, « la menace de se mettre en arrêt maladie et l'absence à un entretien informel avec l'employeur le 23 juillet 2018 » mais il ne remet pas en cause la « légitimité » de l'arrêt maladie de la fin du mois de juillet.
De plus, il a été vu précédemment que, le 23 juillet 2018, lors de la mise à pied à titre conservatoire et la convocation à un entretien préalable au licenciement, l'employeur n'avait nullement reçu l'arrêt maladie du 20 juillet, qui n'a été adressé que le 28 juillet et reçu le 30 juillet.
En outre, M. [C] [X] ne justifie pas avoir adressé un arrêt de travail à l'employeur pour la période du 5 au 10 juillet 2018. Il ne produit d'ailleurs aucun arrêt de travail, simplement un extrait de compte Améli dont le bénéficiaire ne peut être identifié.
Il convient donc, par ces motifs ajoutés, de confirmer le jugement déféré.
Sur le bienfondé du licenciement
Selon l'article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, après avoir ordonné, au besoin toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. La charge de la preuve de la gravité de la faute privative des indemnités de préavis et de licenciement incombe à l'employeur débiteur qui prétend en être libéré.
La lettre de licenciement fixe les limites du litige et c'est au regard des motifs qui y sont énoncés que s'apprécie le bien-fondé du licenciement.
Mais, si la lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables, l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif.
Il est reproché au salarié trois griefs.
- Sur l'utilisation sans autorisation d'un véhicule de l'entreprise
Dans la lettre de licenciement, l'employeur reproche au salarié d'avoir, le 29 juin 2018, alors qu'un refus avait clairement été opposé à l'utilisation pour le week-end d'un véhicule appartenant à l'entreprise, pénétré dans le bureau, pris les clés du véhicule et être parti avec mais également d'avoir renouvelé ses agissements fautifs, le week-end suivant, en conservant cette fois l'utilitaire de la société, là encore, sans aucune autorisation.
M. [C] [X] réfute les faits, déclarant qu'il n'a jamais pris les véhicules de la société pour s'en servir les week-end et encore moins sans l'autorisation de son employeur. Il soutient que ce dernier ne rapporte pas la preuve des faits, que les deux attestations des salariés de l'entreprise sont imprécises et manifestement rédigées pour les besoins de la cause. Il ajoute que la mauvaise foi est patente puisque l'employeur lui reproche tout à la fois d'avoir pris l'utilitaire le 6 juillet 2018 et d'avoir été absent ce même jour puis se rendant compte de son erreur, il prétend que le salarié aurait emprunté le véhicule le 29 juin et l'aurait conservé toute la semaine, ce qui ne constitue plus les mêmes faits.
La SAS Groupe ETS Vinois-SGE venant aux droits de la SARL Société gardoise d'étanchéité explique que, le vendredi 29 juin 2018, M. [C] [X] l'a sollicitée, par téléphone en lui demandant de pouvoir conserver un véhicule de la société, pendant le week-end mais, passant outre la réponse négative apportée, le salarié a dérobé les clés d'un véhicule de la société, une Renault Clio qu'il « empruntera » pour le week-end et qu'il conservera toute la semaine (pour se rendre sur les chantiers et effectuer les trajets domicile/entrepôt ou domicile/chantier, alors que les véhicules doivent être déposés en fin de journée au dépôt selon le règlement intérieur). L'intimée ajoute qu'à la fin de la semaine, le salarié est parti avec l'utilitaire de la société qu'il utilisait le jeudi 5 juillet, le conservant tout le week-end jusqu'à son retour du Maroc où il a conduit sa famille, le lundi 9 et à son poste le mardi 10. Elle précise que le salarié avait été averti par le passé pour avoir déjà adopté le même comportement.
Par des motifs que la cour adoptera, le premier juge, a justement relevé que :
-il ressortait du contrat de travail et du règlement de l'entreprise que M. [C] [X] ne devait se servir des véhicules de l'entreprise que pour se rendre sur des chantiers, pendant ses heures de travail, les véhicules devant être rentrés au dépôt à chaque fin de journée
-s'agissant du week-end du 29 juin 2018, il ressortait de l'attestation de M. [I] [M], étancheur au sein de la SARL Société gardoise d'étanchéité, qu'à la fin du mois de juin, M. [L], le gérant, a reçu un appel de M. [C] [X] pour le prêt d'un véhicule d'entreprise à des fins personnelles, ce que M. [L] a refusé, M. [C] [X] est ensuite entré dans le bureau, a pris les clés d'un autre véhicule de l'entreprise et il est parti en week-end avec ce véhicule
-il ressortait des échanges de sms qu'au mois de mai 2018, M. [C] [X] a pris un véhicule de l'entreprise sans autorisation et que l'employeur l'a prévenu que si ce genre de fait venait à se reproduire, il n'hésiterait pas à appeler la police et a engager une procédure à son encontre
-un courrier du 16 janvier 2018, non contesté par M. [C] [X], ayant clôt une première procédure disciplinaire engagée à l'encontre de ce dernier, évoquait déjà l'utilisation du véhicule de la société à des fins personnelles comme l'une des raisons ayant contraint l'employeur à envisager de mettre fin à leur collaboration.
Le juge départiteur a cependant justement considéré, relevant certaines contradictions, que la SARL Société gardoise d'étanchéité ne produisait pas d'élément probant s'agissant du week-end du 6 juillet 2018.
Il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu que seule l'utilisation du véhicule de l'entreprise lors du week-end du 29 juin 2018 était établie, par l'attestation de M. [M] corroborée par les échanges de sms du mois de mai 2018 et par le courrier du 16 janvier 2018, évoquant un comportement similaire.
- Sur les absences injustifiées
Aux termes de l'article 8 du contrat de travail, le salarié est tenu de prévenir immédiatement l'employeur de toute absence, quelle qu'elle soit, et de lui adresser tout justificatif approprié.
En cas de maladie ou accident, le salarié devra fournir un certificat médical justifiant son absence dans un délai de 48 heures. En cas de prolongation d'arrêt de travail, le salarié devra transmettre dans les mêmes délais le certificat médical justifiant cette prolongation.
Pour toute absence prévisible, le salarié devra au préalable solliciter l'accord de la direction.
L'employeur reproche à son salarié, dans la lettre de licenciement, de ne pas être venu travailler le vendredi 6 juillet et le lundi 9 juillet 2018, que simplement, l'épouse de M. [C] [X] a adressé un sms pour indiquer qu'il était « mal », qu'il n'a pas répondu au courrier de mise en demeure de justifier de son absence et que la société a appris ensuite que le salarié était en réalité parti au Maroc pour y conduire sa famille.
S'agissant de ces absences, la cour relève que par des motifs très détaillés qu'elle adopte, reprenant tous les arguments développés par le salarié, le juge départiteur a justement considéré qu'elles n'étaient pas justifiées, en méconnaissance de l'article 8 du contrat de travail.
M. [C] [X] n'apporte en appel aucun élément permettant de remettre en cause cette décision.
Le fait qu'ultérieurement, le 19 janvier 2023, le pôle social du tribunal judiciaire de Nîmes infirme la décision de la CPAM du Gard du 12 avril 2019 et reconnaisse le caractère professionnel de la maladie déclarée le 5 septembre 2018 est sans incidence.
Il convient donc, ici encore, de confirmer le jugement.
- Sur la menace de se mettre en arrêt maladie et la non présentation à un entretien informel le 23 juillet 2018
Le premier juge a justement considéré que l'employeur n'apportait pas la preuve de cette « menace » et que s'agissant de l'entretien informel du 23 juillet 2018, il ressortait des sms échangés que M. [C] [X] avait tenté de venir puis avait indiqué qu'il ne pouvait pas conduire, que finalement M. [C] [X] avait prouvé, même si l'employeur n'en était pas alors informé par son salarié, qu'il se trouvait en arrêt de travail depuis le 20 juillet.
Il convient dès lors de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que la menace de se mettre en arrêt maladie et la non présentation à un entretien informel du 23 juillet 2018 ne sauraient être reprochés à M. [C] [X] et participer à la caractérisation de la faute grave reprochée.
Seuls donc sont suffisamment établies l'utilisation sans autorisation d'un véhicule de l'entreprise du 29 juin 2018 et les absences non justifiées les 6 et 9 juillet 2018.
Le premier juge a relevé ensuite, à juste titre, que la mise à pied conservatoire du 23 juillet 2018 était intervenue plusieurs semaines après ces faits, rappelant que M. [C] [X] a repris son poste le 10 juillet 2018 et a continué à travailler jusqu'au 20 juillet 2018, date du début de son arrêt maladie, de sorte qu'ils n'étaient pas constitutifs d'une faute grave rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise mais qu'ils constituaient néanmoins une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Sur les conséquences financières du licenciement pour cause réelle et sérieuse
Aucune indemnité n'est due au titre d'un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse.
- L'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents
Il n'est pas contesté, à titre subsidiaire, que M. [C] [X], présentant une ancienneté de 3 ans et 4 mois, soit au moins deux ans, a droit à une indemnité compensatrice de préavis de deux mois, soit 4727,56 euros.
Le juge départiteur a ensuite justement retenu que la SARL Société gardoise d'étanchéité étant affiliée à la caisse de congés payés du bâtiment, l'employeur n'était pas redevable du paiement des indemnités de congés payés, déboutant M. [C] [X] de sa demande de paiement de l'indemnité de congés payés sur préavis.
L'appelant ne formule d'ailleurs aucune critique de cette motivation.
Il convient donc de confirmer le jugement déféré.
- L'indemnité légale de licenciement
Le calcul de l'indemnité légale de licenciement n'est pas contesté subsidiairement.
Il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a accordé la somme de 1969,81 euros.
- Le rappel de maintien de salaire pour la période de mise à pied conservatoire
En l'absence de faute grave, M. [C] [X] est en droit de prétendre au rappel de salaire sur la période ayant couru du 23 juillet 2018 (et non du 20 juillet) au 7 août 2018.
Le premier juge a déduit ensuite les indemnités journalières perçues pour accorder à juste titre la somme de 776,60 euros.
Le jugement sera encore confirmé.
Sur le rappel de congés payés
M. [C] [X] réclame ici la somme de 1426,60 euros pour 14 jours de congés payés, qu'il qualifie improprement d'indemnité compensatrice de préavis, comme l'a relevé le premier juge.
Ceci étant, la SARL Société gardoise d'étanchéité étant affiliée à la caisse de congés intempéries BTP caisse de la région méditerranée, comme cela ressort de l'attestation de paiement congés 2018 produite par M. [C] [X], le premier juge a justement retenu que sa demande était mal dirigée.
Il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté ici le salarié.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Les dépens d'appel seront mis à la charge de l'appelant mais l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort
-Confirme le jugement rendu le 25 janvier 2021 par le conseil de prud'hommes de Nîmes en toutes ses dispositions,
-Dit n'y avoir lieu à appliquer l'article 700 du code de procédure civile,
-Condamne M. [C] [X] aux dépens d'appel.
Arrêt signé par le président et par la greffière.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,