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10/05/2023 | FRANCE | N°21/00524

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ph, 10 mai 2023, 21/00524


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 21/00524 - N° Portalis DBVH-V-B7F-H54Z



MS/EB



CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AVIGNON

11 janvier 2021



RG :19/00144







[L]





C/



S.E.L.A.R.L. ETUDE BALINCOURT

Association CGEA D'[Localité 4]





















Grosse délivrée le 10 MAI 2023 à :





- Me

- Me













COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH



ARRÊT DU 10 MAI 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AVIGNON en date du 11 Janvier 2021, N°19/00144



COMPOSITION DE LA COUR L...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/00524 - N° Portalis DBVH-V-B7F-H54Z

MS/EB

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AVIGNON

11 janvier 2021

RG :19/00144

[L]

C/

S.E.L.A.R.L. ETUDE BALINCOURT

Association CGEA D'[Localité 4]

Grosse délivrée le 10 MAI 2023 à :

- Me

- Me

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 10 MAI 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AVIGNON en date du 11 Janvier 2021, N°19/00144

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

M. Michel SORIANO, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Leila REMILI, Conseillère

M. Michel SORIANO, Conseiller

GREFFIER :

Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

A l'audience publique du 02 Février 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 10 Mai 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANT :

Monsieur [H] [L]

né le 09 Novembre 1959 à [Localité 5] (Algérie)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Bénédicte ANAV-ARLAUD de la SELARL ANAV-ARLAUD BÉNÉDICTE, avocat au barreau d'AVIGNON substituée par Me Marine BOTREAU, avocate au barreau d'AVIGNON

INTIMÉES :

S.E.L.A.R.L. ETUDE BALINCOURT Liquidateur Judiciaire de la SAS SAUGET ELECTRICITE désignée par jugement du TC d'Avignon du 19/09/2018

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Denis ALLIAUME de la SCP BAGLIO-ROIG-ALLIAUME-BLANCO, avocat au barreau d'AVIGNON

Association CGEA D'[Localité 4]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Louis-alain LEMAIRE, avocat au barreau d'AVIGNON

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 19 Janvier 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 10 Mai 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

M. [H] [L] a été engagé par la SA Sauget Électricité à compter du 4 novembre 1991 suivant contrat de travail à durée indéterminée à temps complet, en qualité de conducteur de travaux adjoint.

Au mois de juillet 1999, la SA Sauget Électricité a été placée en redressement judiciaire.

Le 27 août 1999, conformément au plan de cession partielle adopté au profit de la SAS Sauget Électricité, le contrat de travail de M. [L] a été transféré au sein de cette nouvelle société.

Courant avril 2009, la SARL Lajec Développement est devenue l'associée unique de la SAS Sauget Électricité (en lieu et place de la SA Eurelec Entreprises).

A compter du 30 juin 2009, M. [L] a été nommé président de la SAS Sauget Électricité.

Le 1er juillet 2009, M. [L] a conclu un contrat de travail avec la société Sauget Électricité en qualité de directeur général.

M. [L] indique être devenu gérant de la SARL Lajec Développement le 15 juin 2016.

Par un jugement du 18 janvier 2017, la SAS Sauget Électricité a été placée en redressement judiciaire. La SELARL de Saint-Rapt & Bertholet a été nommée en qualité d'administrateur judiciaire et Me [M] en qualité de mandataire judiciaire.

Par jugement du 27 juin 2018, le tribunal de commerce d'Avignon a arrêté le plan de cession de la SAS Sauget Électricité en faveur de la SAS Oméga Energie et a autorisé l'administrateur à procéder au licenciement de 7 salariés.

Par courrier du 27 juin 2018, conformément au plan de cession, M. [L] a été convoqué à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, fixé au 5 juillet 2018.

Par courrier du 9 juillet 2018, M. [L] a été licencié pour motif économique.

Le 20 août 2018, l'UNEDIC AGS a refusé à M. [L] le bénéfice de la prise en charge de ses indemnités de licenciement au motif qu'il ne justifiait pas de sa qualité de salarié.

Par jugement en date du 19 septembre 2018, le tribunal de commerce d'Avignon a prononcé la liquidation judiciaire de la SAS Sauget Électricité et a désigné Me [Y] [M] en qualité de mandataire liquidateur.

Soutenant avoir cumulé ses fonctions salariales avec son mandat social, et estimant par conséquent pouvoir bénéficier de la prise en charge de ses indemnités de fin de contrat par les AGS, le 27 mars 2019, M. [L] a saisi le conseil de prudhommes d'Avignon aux fins que soient fixées au passif de la société Sauget Électricité les sommes suivantes :

- 79 982,96 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement

- 16 350 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 1 635 euros pour les congés payés y afférents

- 2 132,60 euros à titre de rappel de salaire outre la somme de 213,26 euros pour les congés payés y afférents

- 2 725 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés.

Par jugement contradictoire du 11 janvier 2021, le conseil de prud'hommes d'Avignon a :

- débouté M. [L] de l'intégralité de ses demandes,

- déclaré le jugement opposable au CGEA d'[Localité 4], dans les limites définies aux articles L3253-6 et L3253-8 du code du travail et des plafonds prévus aux articles L3253-17 et D3253-5 du même code,

- mis hors de cause le CGEA d'[Localité 4] pour les demandes au titre des frais irrépétibles, astreinte, ou résultant d'une action en responsabilité,

- mis les éventuels dépens de l'instance à la charge de M. [L].

Par acte du 05 février 2021, M. [H] [L] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 12 août 2021, M. [H] [L] demande à la cour de :

- infirmer le jugement prononcé le 11 janvier 2021 par le conseil de prud'hommes d'Avignon,

Statuant à nouveau,

A titre principal :

- constater que son salaire de référence s'élève à 5 450 euros,

En conséquence,

S'agissant de l'indemnité de licenciement

- juger que son contrat de travail conclu le 4 novembre 1991 a été suspendu du 15 juin 2016 au 18 janvier 2017,

- fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire aux sommes de :

* 76.736 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

* à défaut, 43.298 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

A défaut,

- juger que son contrat de travail conclu le 4 novembre 1991 a été suspendu du 30 juin 2009 au 18 janvier 2017,

- fixer ses créances au passif de la liquidation judiciaire aux sommes de :

* 51.557 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

* à défaut, 30.581 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

S'agissant des autres demandes pécuniaires

- fixer ses créances au passif de la liquidation judiciaire aux sommes de :

* 16.350 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 1 635 euros pour les congés payés y afférents,

* 2 132,60 euros à titre de rappel de salaire, outre la somme de 213,26 euros pour les congés payés y afférents,

* 2 725 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

A titre subsidiaire :

- constater que son salaire de référence s'élève à 3 950 euros,

En conséquence,

S'agissant de l'indemnité de licenciement

- juger que son contrat de travail conclu le 4 novembre 1991 a été suspendu du 15 juin 2016 au 18 janvier 2017,

- fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire aux sommes de :

* 43.884,50 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

* à défaut, 31.380,56 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

A défaut,

- juger que son contrat de travail conclu le 4 novembre 1991 a été suspendu du 30 juin 2009 au 18 janvier 2017,

- fixer ses créances au passif de la liquidation judiciaire aux sommes de :

* 25.635 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

* à défaut, 22.163,89 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

S'agissant des autres demandes pécuniaires

- fixer ses créances au passif de la liquidation judiciaire aux sommes de :

* 11.850 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 1 185 euros pour les congés payés y afférents,

* 1 545,65 euros à titre de rappel de salaire, outre la somme de 154,57 euros pour les congés payés y afférents,

* 1 975 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

En tout état de cause :

- ordonner la remise de ses documents de fin de contrat (solde de tout compte, certificat de travail et attestation Pôle emploi), sous astreinte de 50 euros par jour à compter de la notification du 'jugement' à intervenir,

- dire le jugement opposable à l'AGS-CGEA d'[Localité 4],

- assortir la condamnation des intérêts légaux courant à compter de la date de la saisine de la juridiction prud'homale, l'assortir de l'anatocisme,

Il soutient que :

- à compter du 30 juin 2009, il a été nommé Président de la société Sauget. Ce mandat intervient postérieurement à la signature de son contrat de travail initial,

- il n'existe aucune interdiction de cumul des fonctions de dirigeant d'une SAS avec un contrat de travail,

- lorsque les conditions du cumul d'un contrat de travail et d'un mandat social ne sont pas réunies, le contrat de travail est automatiquement suspendu le temps de l'exercice du mandat social,

- les AGS doivent prendre en charge le paiement des indemnités de rupture de son contrat de travail pour la période pendant laquelle il était salarié de la société, de novembre 1991 à juin 2009,

- pour la période postérieure, l'obligation de prise en charge des AGS n'en reste pas moins indiscutable dans la mesure où il a valablement cumulé son contrat de travail avec son mandat social jusqu'au 14 juin 2016,

- le contrat de travail a été automatiquement suspendu du 15 juin 2016 au 18 janvier 2017 en l'état d'une disparition de fait de tout lien de subordination sur cette période,

- avec sa nomination d'administrateur de la société, il a de nouveau été placé sous un lien de subordination,

- de son embauche en novembre 1991 à son licenciement en juillet 2018, il a toujours exercé ses fonctions de conducteur de travaux, c'est-à-dire des fonctions techniques distinctes de son mandat social,

- en contrepartie de ses missions, il percevait une rémunération et se voyait remettre des bulletins de salaire,

- il ne percevait aucune rémunération au titre de son mandat social,

- lorsqu'il a été promu directeur salarié de la SAS Sauget Electricité, le 1er juillet 2009, son travail était nécessairement soumis au contrôle de la holding (la SARL LAJEC DEVELOPPEMENT),

- il n'était que porteur de parts minoritaires au sein de la société holding, de sorte qu'il n'avait aucun pouvoir de décision (ce n'est qu'à compter du 15 juin 2016 qu'il est devenu gérant de la holding),

- son action n'est aucunement prescrite dans la mesure où il a saisi le conseil de prud'hommes dans le délai d'un an après la rupture du contrat de travail.

En l'état de ses dernières écritures en date du 13 octobre 2021, la SELARL Etude Balincourt, représentée par Me [M] en sa qualité de mandataire liquidateur de la SAS Sauget Electricité demande à la cour de :

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Avignon du 11 janvier 2021.

En conséquence,

- dire et juger que M. [H] [L], mandataire social, ne peut bénéficier du statut de salarié,

- débouter M. [H] [L] de l'ensemble de ses demandes.

A titre subsidiaire,

- dire que les demandes correspondant à la période 1991 à 2009 sont prescrites.

A titre encore plus subsidiaire,

- relever le caractère erroné des demandes présentées.

- mettre les éventuels dépens de l'instance à la charge de M. [L].

Elle fait valoir que :

- les éléments produits aux débats par l'appelant ne démontrent en rien la réalisation de fonctions techniques distinctes mais confirment un rôle de dirigeant d'une petite entreprise contrôlant l'activité de ses subordonnés, et la gestion de l'entreprise qu'il dirige,

- en tout état de cause, M. [L] ne démontre aucun lien de subordination,

- depuis 10 ans, M. [L] est le Président et le seul mandataire social de la SAS Sauget Electricité,

- le contrat de travail signé le 1er juillet 2009 est bien un contrat de travail de Directeur Général et il comporte la signature de M. [L] représentant à la fois l'employeur et le prétendu salarié,

- depuis le 1er janvier 2013, l'appelant ne cotise pas au chômage, révélant que la rémunération qui lui était versée correspondait bien à la rémunération de son mandat social de Président de la SAS,

- les bulletins de paie produits font bien référence à des fonctions de Directeur et non de conducteur de travaux,

- M. [L] détenait une procuration bancaire totale, une délégation de signature permanente et s'était porté caution de la société,

- ces éléments démontrent l'absence totale de lien de subordination,

- la procédure de licenciement menée par l'administrateur judiciaire suite à la décision du tribunal de commerce ne constitue en rien une reconnaissance de l'existence d'un contrat de travail mais permet uniquement de garantir les délais pour permettre l'appréciation de la situation notamment au regard de l'éventuelle garantie de l'AGS,

- le mandat social de Président au sein de la SAS Sauget Electricité, au regard des pouvoirs définis dans le cadre des statuts, exclut toute notion de lien de subordination permettant le cumul avec un contrat de travail,

- la nomination d'un administrateur judiciaire dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire ne met nullement fin au mandat social du Président de la SAS, l'administrateur judiciaire n'ayant aucune mission d'assistance dans le cadre de recherche de mesures permettant la sauvegarde de l'entreprise,

- la demande d'indemnités de rupture correspondant à la période du mois de novembre 1991 à juin 2009 est prescrite.

L'UNEDIC délégation AGS CGEA d'[Localité 4], reprenant ses conclusions transmises le 09 juin 2021, demande à la cour de :

- déclarer l'appel de M. [H] [L] mal fondé

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prudhommes d'Avignon en date du 11.01.2021

- dire et juger que M. [H] [L] ne peut bénéficier du statut de salarié en sa qualité de mandataire social

Au principal,

- débouter M. [L] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

- dire et juger que les demandes formulées par M. [L] liées à la rupture de son contrat de travail en juin 2009, sont prescrites

En tout état de cause

- déclarer le jugement opposable au CGEA d'[Localité 4], dans les limites définies aux articles

L 3253-6 et L 3253-8 du code du travail et des plafonds prévus aux articles L 3253-17 et D3253-5 du même code

- dire et juger qu'elle ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L3253-6 et L 3253-8 du code du travail que dans les termes et les conditions résultant des

dispositions des articles L 3253-17, L 3253-19, L 3253-20, L 3253-21 et L 3253-15 du code du travail

- dire et juger que son obligation de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties compte tenu du plafond applicable ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement

- la mettre hors de cause pour les demandes au titre des frais irrépétibles, astreinte, ou résultant d'une action en responsabilité

- arrêter le cours des intérêts au jour du jugement d'ouverture de la procédure collective.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

Par ordonnance en date du 25 novembre 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 19 janvier 2023. L'affaire a été fixée à l'audience du 02 février 2023.

MOTIFS

Sur la qualification de la relation de travail

Un mandat social n'est pas incompatible avec un contrat de travail. Toutefois, pour que le cumul soit possible, il faut que le contrat de travail corresponde à un emploi effectif s'entendant de fonctions techniques distinctes de celles de direction, donnant lieu en principe à rémunération distincte, exercées dans le cadre d'un lien de subordination vis à vis de la société et dans des conditions exclusives de toute fraude à la loi. Ces règles sont applicables aux fonctions de dirigeant.

Quelle que soit la forme de la structure, le cumul d'un contrat de travail avec un mandat social suppose que le contrat de travail corresponde à un emploi réel exercé en son sein et que cet emploi réponde aux conditions du salariat, c'est-à-dire qu'il existe un lien de subordination juridique entre l'intéressé et l'entreprise.

Le lien de subordination juridique ' critère essentiel du contrat de travail ' se caractérise par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des directives et d'en contrôler l'exécution.

Il est constant que M. [L] est mandataire social de la SAS Sauget Electricité depuis le 1er juillet 2009 et qu'il bénéficiait d'un contrat de travail avec la SA Sauget Électricité à compter du 4 novembre 1991 en qualité de conducteur de travaux adjoint ; ledit contrat ayant été transféré à la SAS Sauget Électricité à compter du 27 août 1999.

Le salarié soutient ainsi avoir conservé ses fonctions de conducteur de travaux parallèlement à ses fonctions de président de la SAS Sauget Électricité jusqu'au 14 juin 2016, et ce sans aucune rémunération ainsi qu'il résulte de l'acte de désignation du 19 juin 2009.

Le 1er juillet 2009, M. [L] en qualité de président de la SAS signe un contrat de travail au profit de M. [L] pour exercer les fonctions de directeur général de cette même SAS, avec un salaire de 3600 euros par mois, outre la mise à disposition d'un véhicule et de la prise en charge de la mutuelle.

Le dossier de l'appelant comporte les éléments suivants :

- des bons de commande sur lesquels figure sa signature pour la direction.

La cour relève que les documents en question sont datés pour le plus ancien du 5 octobre 2015, aucun élément permettant de justifier d'une activité en lien avec ses fonctions de conducteur de travaux n'étant produit antérieurement.

- des réunions de chantier sur lesquelles l'appelant apparaît, souvent en binôme, dans l'intérêt de la société Sauget Électricité, dont les plus anciennes datent de février 2014.

- des emails d'entreprises envoyés à plusieurs personnes de la société Sauget Électricité, dont M. [L], le plus ancien étant du mois de juin 2014.

Le site cidj.com définit le conducteur de travaux de la manière suivante :

'Le conducteur de travaux ou la conductrice de travaux est une personne de terrain et ses activités varient beaucoup selon la taille du chantier et la structure de l'entreprise. Il dépend directement du chef d'entreprise ou du directeur des travaux.

Il est responsable de la qualité des travaux effectués, de la tenue des délais et du respect du budget. Il contrôle toutes les étapes du chantier, depuis l'étude du dossier jusqu'à la réception des travaux.

Toujours en déplacement (parfois à l'étranger), il fait le lien entre tous les intervenants, décideurs ou exécutants. Il étudie le dossier concernant le projet de construction, les plans d'architecte, les différents cahiers des charges, les devis.

Il effectue les démarches administratives et techniques d'ouverture du chantier. Il assure la gestion financière, organise les approvisionnements.

Il intervient dans le choix des matériaux et des équipements utilisés ainsi que dans les négociations avec les sous-traitants. Il surveille l'avancement des travaux, étudie avec les ingénieurs les problèmes rencontrés et veille aussi au respect des dispositifs de sécurité.

Il décide de la composition des équipes et gère les plannings de travail. Il peut participer au recrutement des personnels.

Le conducteur de travaux rédige les rapports de chantier et rencontre les clients.'

Les quelques pièces produites par l'appelant ne permettent aucunement de conclure à l'exercice par celui-ci des fonctions de conducteur de travaux telles que définies ci-dessus.

Bien plus, les bulletins de salaire produits parcellairement par M. [L], à savoir les mois de décembre 2012 et janvier 2013, puis du mois de juillet 2017 au mois de juin 2018, ne font aucunement état de la fonction de conducteur de travaux mais de celle de directeur, avec un salaire en conséquence.

L'AGS justifiait le refus de prise en charge de l'appelant en tant que salarié de la société liquidée par, notamment, l'absence de cotisation à l'assurance chômage sur les bulletins de salaire de l'appelant, ce qui est contesté par ce dernier.

Or, la communication d'une partie des fiches de paie ne permet pas à la cour de vérifier le bien fondé des allégations de l'une ou l'autre des parties, étant précisé que le salarié détient l'ensemble de ces documents et qu'il lui était loisible de les produire dans leur intégralité pour emporter la conviction de la cour.

Il convient encore de rappeler que M. [L] s'est lui-même recruté pour exercer la fonction de directeur général de la SAS Sauget Électricité, avec pour principales fonctions de :

- exercer les fonctions et responsabilités normalement rattachées à ce poste

- planifier, superviser, diriger, gérer et contrôler toutes les opérations pour le compte de l'employeur

- signer tout contrat ou document financier, gestion et signature des comptes bancaires au nom de l'employeur.

Il en résulte que les interventions de M. [L] détaillées ci-dessus relèvent de sa fonction de directeur général et non de conducteur de travaux.

La cour ne peut que relever les pouvoirs attribués au président d'une SAS par la loi, qui correspondent à la mission que M. [L] s'est attribuée dans le contrat signé avec la SAS Sauget Électricité représentée par M. [L], à savoir :

- engager la société en signant les actes en son nom et pour son compte

- assurer la gestion et l'organisation de la société au quotidien

- la conduite des affaires sociales (activité, organisation de la société)

- la détermination des orientations de l'entreprise (investissements, politiques de la société)

- la disposition des biens sociaux (actes engageant le patrimoine de la société)

Il apparaît ainsi que l'exercice de fonctions techniques distinctes de celles résultant du mandat social n'est pas justifié, alors que la direction de la société relevait, par sa généralité, non pas d'un contrat de travail mais du mandat social dont M. [L] était investi.

Par ailleurs, l'appelant ne démontre aucunement avoir rendu compte de son activité, régulièrement, à l'associé unique de la société Sauget Électricité, la SARL Lajec Développement, M.[L] étant en outre devenu gérant de la SARL Lajec Développement le 15 juin 2016.

Il ne démontre pas plus avoir reçu des instructions de son 'employeur', ni qu'il se trouvait assujetti à des directives particulières dans le cadre de ses fonctions de directeur général et/ou de conducteur de travaux.

Il en résulte que l'appelant ne rendait de comptes à personne de son activité et n'était soumis à aucun pouvoir disciplinaire.

Enfin, l'accomplissement de la procédure de licenciement ne suffit pas à caractériser l'existence d'un contrat de travail.

M. [L] ne peut dès lors revendiquer le statut de salarié à compter du 1er juillet 2009 jusqu'à la clôture de la procédure de liquidation judiciaire, soit le 27 juin 2018.

En effet, depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives, c'est la clôture de la procédure de liquidation judiciaire qui emporte dissolution de la société.

Ainsi, seule la clôture de la procédure de liquidation peut mettre fin aux mandats sociaux, de sorte que l'argumentation de M. [L] sur ce point doit être écartée.

Sur la demande d'indemnité de rupture sur la période du 4 novembre 1991 au 30 juin 2009

La qualité de salarié de M. [L] sur ladite période n'est pas contestable.

Il n'est pas plus contestable que le contrat de travail est suspendu suite à la nomination d'un salarié en qualité de mandataire social.

Cette solution exclut cependant la signature d'un contrat en cours de mandat, voire à l'occasion de l'entrée en fonction.

Or, en l'espèce, M. [L] a signé un nouveau contrat de travail avec la société Sauget Électricité le 1er juillet 2009, date de prise d'effet de ses fonctions de président de la même société.

L'article 1273 devenu le 1er octobre 2016 l'article 1330 du code civil dispose que la novation ne se présume pas ; la volonté de l'opérer doit résulter clairement de l'acte. Ainsi la novation est un contrat qui a pour objet de substituer à une obligation, qu'elle éteint, une obligation nouvelle qu'elle crée.

Ce faisant, le contrat de travail conclu le 4 novembre 1991 a été remplacé par celui signé le 1er juillet 2009, ce dernier contrat attribuant de nouvelles fonctions et un salaire en adéquation avec ces dernières à l'appelant.

Il en résulte qu'aucune suspension du contrat de travail ne peut être retenue, justifiant le rejet de toutes les demandes présentées par M. [L], les présents motifs se substituant à ceux des premiers juges.

Les dépens d'appel seront laissés à la charge de M. [L].

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort

Confirme le jugement rendu le 11 janvier 2021 par le conseil de prud'hommes d'Avignon en toutes ses dispositions,

Condamne M. [H] [L] aux dépens d'appel;

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5ème chambre sociale ph
Numéro d'arrêt : 21/00524
Date de la décision : 10/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-10;21.00524 ?
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